Abstracts
Résumé
Dans une volonté de décolonisation de la recherche, la chaire UNESCO en transmission culturelle chez les Premiers Peuples comme dynamique de mieux-être et d’empowerment a conçu un modèle de gestion collaborative de la recherche universitaire par et pour les Autochtones, ce qui sous-tend la reconnaissance de leurs systèmes de connaissances, de leurs compétences, de leur crédibilité au regard de leurs savoirs, de même que de leur capacité de gérer la recherche. Nous proposons au lecteur de suivre les étapes adoptées par une équipe interdisciplinaire de chercheurs communautaires autochtones et de chercheurs universitaires, une démarche globale de collaboration touchant toutes les étapes du développement de la chaire de manière à favoriser l’innovation et l’empowerment, essentiels à la décolonisation. L’outil privilégié pour l’atteinte de ces objectifs fut la concertation qui aura permis de coconstruire un système de gouvernance basé d’abord sur la qualité de la relation en surmontant plusieurs obstacles, notamment la méfiance envers la recherche universitaire.
Mots-clés :
- décolonisation,
- recherche autochtone,
- gouvernance collaborative,
- concertation
Abstract
In a desire to decolonize research, the UNESCO Chair in cultural transmission among First Peoples, as a dynamic of well-being and empowerment, has designed a collaborative governance model for university research by and for Aboriginal people, which is based in the recognition of their knowledge systems, their skills, their credibility with regard to their knowledge, as well as their ability to manage research. We invite the reader to follow the steps adopted by an interdisciplinary team of Indigenous community and university researchers, a global collaborative approach affecting all stages of the development of the Chair in order to promote innovation and empowerment, essential to decolonization. The preferred tool for achieving these objectives was active and engaged consultation, which made it possible to co-construct a system of governance based first and foremost on the quality of the relationship by overcoming several obstacles, in particular, mistrust toward university research.
Keywords:
- decolonization,
- Indigenous research,
- collaborative governance,
- active consultation
Resumen
Con el objetivo de descolonizar la investigación, la Cátedra UNESCO de Transmisión de la Cultura de los Pueblos Originarios para el Bienestar y la Autonomía ha diseñado un modelo de gestión colaborativa de la investigación universitaria por y para los indígenas, sustentado en el reconocimiento de sus sistemas de conocimiento, sus competencias, su credibilidad respecto a sus conocimientos y su capacidad para gestionar la investigación. Invitamos al lector a seguir los pasos adoptados por un equipo interdisciplinar de investigadores comunitarios indígenas e investigadores universitarios, un enfoque de colaboración integral que abarca todas las etapas del desarrollo de la Cátedra, con el fin de fomentar la innovación y la capacitación, esenciales para la descolonización. La herramienta privilegiada para alcanzar estos objetivos fue la consulta, que permitió co-construir un sistema de gobernanza basado ante todo en la calidad de la relación, superando una serie de obstáculos, en particular la desconfianza hacia la investigación universitaria.
Palabras clave:
- descolonización,
- investigación indígena,
- gobernanza colaborativa,
- consulta
Article body
Cet article porte sur une démarche exploratoire qui émane d’une volonté collective de « faire autrement » au regard de la gouvernance de la recherche, et plus particulièrement au sein de La Chaire UNESCO en transmission culturelle chez les Premiers Peuples comme dynamique de mieux-être et d’empowerment. Dédiée à la transmission culturelle, au mieux-être et à l’empowerment des Premiers Peuples[2], cette chaire devait faire en sorte que le pouvoir décisionnel, les ressources et les informations soient le plus largement distribués (Paquet 2004). Comment coconstruire un modèle de gestion collaborative de la recherche universitaire par et avec les nations autochtones est la question à laquelle nous tentons de répondre. Cet article ne constitue pas une analyse critique, qui sera à venir ultérieurement. Nous proposons plutôt au lecteur de suivre les étapes adoptées par une équipe interdisciplinaire de chercheurs communautaires autochtones et de chercheurs universitaires en vue de la cocréation de modèles de gouvernance, présentés dans cet article. Des citations de nos partenaires autochtones tirées des différentes rencontres de travail ponctuent le texte, car ce sont leurs paroles qui constituent le terreau de l’ensemble de nos réflexions collectives.
Les auteures forment une équipe interculturelle (allochtone/autochtone) travaillant ensemble depuis de nombreuses années dans différents contextes reliés à la valorisation et à la transmission des cultures autochtones. Ayant toutes deux une formation en design, elles ont rapidement engagé leur parcours professionnel et leur recherche en design social. Cette discipline opère une extension du domaine du design des objets aux enjeux et problèmes de société, ainsi qu’aux modalités du « vivre ensemble » (Margolin et al. 2002). C’est plus précisément la création de processus et de méthodologies visant l’empowerment culturel des Premières Nations et des Inuit qui furent au coeur de leurs actions et réflexions et c’est à titre de cochercheures qu’elles signent cet article.
Le contexte
C’est à la demande de la Commission canadienne pour l’UNESCO qu’Élisabeth Kaine a été invitée à déposer un dossier de candidature pour l’obtention d’une chaire[3]. À la suite de nombreuses expériences de direction de projets de recherche impliquant chercheurs universitaires et partenaires autochtones, il était impératif pour elle que cette chaire puisse être un véhicule permettant d’atteindre un idéal de relations égalitaires entre chercheurs communautaires, experts de leur culture, et chercheurs universitaires − un idéal jamais complètement atteint auparavant[4]. Pour ce faire, il fallait mettre en place une démarche globale de collaboration touchant toutes les étapes du développement de la chaire de manière à favoriser l’innovation et l’empowerment, essentiels à la décolonisation de la recherche universitaire. L’outil privilégié pour atteindre ces objectifs fut la concertation, autrement dit la philosophie qui s’articule autour de trois piliers : environnement, société et économie (Brundtland et al. 1987), auxquels Gendron et Revéret (2000) ajoutent celui de la gouvernance qui permet la participation de tous les acteurs au processus décisionnel et à l’expression d’une éthique du futur (Jonas 1979). Le processus de concertation fut donc mis en place dès la conception, et à toutes les phases du projet, pour faire en sorte que nos partenaires autochtones aient accès à ce 4e pilier, la véritable gouvernance de la recherche. La concertation exige de partager le pouvoir décisionnel, contrairement à la consultation où les promoteurs d’un projet peuvent toujours décider de ne pas tenir compte des avis des personnes consultées.
Cette volonté de mieux travailler ensemble impliquait que la chaire mette rapidement en place un environnement favorable au développement du potentiel de leadership des experts autochtones dans un contexte de recherche universitaire. Cela sous-tend la reconnaissance de leurs systèmes de connaissances, de leurs compétences, de leur crédibilité au regard de leurs savoirs philosophiques, scientifiques et méthodologiques, de même que de leur capacité de gérer la recherche. S’inspirer des philosophies de gouvernance autochtones basées sur le consensus, la relation horizontale, la circulation de la parole et les alliances était un premier pas vers cette reconnaissance. Dans les sociétés dites « précolombiennes », n’ayant presque pas subi l’influence des Européens, Pierre Clastres (1974) constate que ces peuples mettent leurs énergies à écarter tout pouvoir politique de la communauté en exerçant une volonté délibérée de rester un « Nous » indivisé, exception faite des empires aztèques, mayas et incas. Il soutient que ces sociétés sont « sans organe séparé du pouvoir » et qu’elles réussissent à encadrer celui-ci afin d’éviter une structure de domination, ce qui nécessite une attention constante pour le retenir plutôt que de le détenir. Dans son ouvrage Eatenonha (2022), Georges Sioui parle des philosophies autochtones de la gouvernance comme étant basées sur la réciprocité, les échanges et la reconnaissance du cercle de la vie. Dans cet esprit, la co-conception du cadre de référence (philosophique, éthique, scientifique et méthodologique) de la Chaire UNESCO devait impliquer une dynamique de partage du pouvoir. C’est par un important processus de concertation que le programme, la structure de gouvernance, le système des valeurs et certains outils de management tels que les politiques et mécanismes de gestion ont été élaborés[5].
Un pas de plus pour décoloniser la recherche
Quand j’étais jeune, je pensais que c’était comme normal qu’on m’observe, mais aujourd’hui, je me dis qu’il doit y avoir beaucoup de photos et de choses de nous qui circulent sans qu’on ait donné notre approbation. Quand on répondait à des questionnaires, on avait le sentiment qu’il fallait qu’on passe dans le tordeur. Quand les chercheurs arrivaient, les Indiens se sauvaient dans le bois.
Caroline Vollant, innue, rencontre de réflexion des trois comités de la chaire, Wendake, février 2019
Naila Kabeer définit l’empowerment comme étant le développement de la capacité des individus à faire des choix de vie stratégiques dans un contexte où cette capacité leur était auparavant refusée (Kabeer 2001 : 19). Pour cette auteure, le processus d’empowerment est inévitablement lié à un contexte d’inégalité dans la distribution du pouvoir et à un état initial de manque de pouvoir, ce qu’est précisément la situation des Autochtones au regard du contexte universitaire. Pour les jeunes autochtones, l’accès aux études universitaires est un long parcours semé d’obstacles qui s’accumulent et font en sorte que seulement 10 % des diplômés du secondaire − déjà moins nombreux que l’ensemble des diplômés du secondaire au Québec − poursuivent à l’université. Le rapport au savoir est différent, les indicateurs pour le reconnaitre ne sont pas les mêmes et les détenteurs de ces savoirs ne sont pas les diplômés : ce sont les aînés, ceux qui connaissent le territoire, le mode de vie sur ce territoire, la langue et les récits. L’école représente une autorité qui ne reconnait pas ce système de connaissances. Même si on constate une certaine amélioration du taux d’inscription et de diplomation des Autochtones, ceux-ci sont toujours fortement sous-représentés au niveau universitaire. Il n’existe pas de statistiques sur le nombre d’enseignants autochtones dans les milieux universitaires, mais leur nombre est minime. Cette sous-représentation des Autochtones aux études postsecondaires, que ce soit comme étudiant ou comme professeur-chercheur, a de tristes conséquences puisque tout un univers de connaissances est ainsi absent du contexte universitaire. Celui-ci est souvent perçu comme fermé et inhospitalier par nos partenaires autochtones.
À l’étape de la conception des programmes de concertation, il était d’autant plus essentiel de créer un espace de rencontre qui soit non menaçant pour favoriser la confiance et l’engagement mutuels. Une des pierres d’achoppement importantes à la création de cet espace de rencontre est la posture diamétralement opposée des uns et des autres puisque les institutions universitaires, les organismes subventionnaires de la recherche, de même que les chercheurs se considèrent comme seuls responsables de l’ensemble des activités de la recherche. Les chercheurs communautaires autochtones, de leur côté, se considèrent redevables avant tout envers leur communauté, et plus largement envers les nations autochtones. Ils ne se sentent aucunement redevables envers l’organisme subventionnaire ou l’université.
Depuis une vingtaine d’années, dans une volonté de décolonisation, plusieurs groupes de recherche, qu’il s’agisse d’organismes autochtones ou d’organismes subventionnaires, ont, avec bonne foi, développé de nouveaux modèles pour une meilleure intégration de ces deux visions du monde de la recherche universitaire. Par exemple, le programme Réalités autochtones du Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) a mis en place au début des années 2000 un modèle d’évaluation des projets par un jury à majorité autochtone, accompagné d’un aîné ou d’une aînée. Après quelques années, croyant qu’il n’était plus nécessaire de mettre en place des programmes et des méthodologies d’évaluation spécifiques pour la recherche autochtone, ce programme fut abandonné avec des conséquences malheureuses. Cependant, cette décision a motivé le Conseil national de recherches du Canada, dans le cadre de l’appel à l’action de la Commission de vérité et réconciliation, à revoir ses protocoles en matière d’évaluation de projets en recherche autochtone, un processus présentement en cours. En 2019, le Grand dialogue national pour le renforcement des capacités en recherche autochtone réunissait 700 représentants des Premières Nations du Canada à Ottawa (Gouvernement du Canada 2019). Les trois organismes fédéraux de financement de la recherche ont, par la suite, créé le Cercle de leadership autochtone en recherche. Ce cercle conseille les présidents des quatre organismes susmentionnés en ce qui a trait à la mise en oeuvre du plan stratégique du comité de coordination de la recherche au Canada (CCRC) intitulé : Établir de nouvelles orientations à l’appui de la recherche et de la formation en recherche autochtone au Canada 2019-2022[6].
Dans cette même volonté de décoloniser la recherche, nombre de projets ont mis en place des processus de consultation, parfois de concertation ou de cotravail avec leurs partenaires autochtones, sans toutefois assurer une véritable gouvernance autochtone de la recherche. Dès le début de son élaboration en 2016, nous avons qualifié la chaire de « chaire autochtone »[7]. Dès lors s’est posée la question de la légitimité de cette appellation : qu’est-ce qu’un tel « sceau » implique ? Comment pouvons-nous parler de gouvernance autochtone de la chaire quand seule la cotitulaire, sur un total de 13 chercheurs universitaires, est d’origine autochtone ? Comment les chercheurs universitaires allochtones peuvent-ils véritablement prétendre décoloniser la recherche et travailler avec, par et pour les Autochtones dans ce contexte ? Certainement pas en organisant une rencontre par année d’un comité consultatif autochtone ou en intégrant les partenaires autochtones aux colloques. Il faut faire un pas de plus, mais quel serait « ce pas de plus » ?
Revenir sans cesse à la base[8]
Et pour revenir à la base, il faut d’abord partir de la base. Nous, on arrive avec rien dans les mains. La question est simplement : Qu’est-ce que vous en pensez ? C’est eux qui définissent les contenus. Une fois que l’on a pris les données, on s‘assoient avec les spécialistes qui entrent en deuxième ligne. Puis, à chaque étape, il faut retourner auprès des gens.
Gloria Vollant, innue, rencontre de réflexion des trois comités de la chaire, Chicoutimi, juin 2019
Pour la Chaire UNESCO en transmission culturelle chez les Premiers Peuples comme dynamique de mieux-être et d’empowerment, la volonté de décoloniser la recherche doit reposer avant tout sur la parole autochtone qui doit s’incarner à toutes les étapes de la recherche, incluant celle de la gouvernance. Dans les lignes qui suivent, nous présentons les étapes de concertation qui ont mené à la création du programme et du mode de fonctionnement de la chaire, présentée aux différentes parties prenantes comme étant une coquille vide à remplir à partir des réponses à une question simple : que devrait être cette chaire ? Soulignons que si la question est simple, créer un contexte de recherche qui permette de la poser se révèle plutôt difficile, les subventionnaires exigeant une description exhaustive du programme de recherche avant que le processus de concertation puisse débuter − un non-sens dans le cadre de véritables projets collaboratifs. Dans le cadre du dépôt du dossier à l’UNESCO, afin de contourner cet écueil, le programme de recherche se basait sur l’expérience acquise depuis plusieurs années au sein du projet Design et culture matérielle, plutôt que sur un programme précis, donnant ainsi une légitimité au processus proposé. Deux grands axes de recherche furent alors proposés, soit : « le développement durable et viable par la concertation » et « l’empowerment par la création, la médiation et la transmission culturelles ».
La recherche doit davantage s’intéresser à nos actions
Reconnaitre nos recherches en communauté et les répertorier pour, ensuite, les inscrire dans un projet d’avenir en élaborant des politiques à partir des initiatives du milieu. Tout est là. Il faut savoir regarder et écouter, et cesser de toujours recommencer.
Jean St-Onge, innu, rencontre de réflexion des trois comités de la chaire, Wendake, février 2019
Un premier grand rassemblement d’une trentaine d’experts culturels issus de sept nations autochtones du Québec (Anishinabek, Atikamekw Nehirowisiwok, Innus, Inuit, Mi’gmaqs, Hurons-Wendat, Waban-Akis) s’est tenu sur trois jours en mai 2018. Les objectifs de cette rencontre étaient de formuler ensemble les grandes orientations de la chaire, d’en concevoir le programme de recherche, de valider une proposition de modèle de gouvernance élaboré au préalable par un comité autochtone et de mobiliser les acteurs du milieu pour réfléchir, en lien avec leur réalité et leurs expertises, aux actions à entreprendre à court et moyen terme. Un programme d’activités favorisant la création, la réflexion et l’expression fut conçu (UNESCO 2018). De manière à laisser libre cours à la parole autochtone, les chercheurs universitaires ne participèrent pas à cette étape de la démarche, mais furent plutôt invités à se joindre au groupe lors des repas, des activités en soirée et de la dernière plénière. En dépit de la déception et de l’incompréhension d’une minorité de chercheurs universitaires, il était impératif de ne pas placer nos partenaires autochtones dans une position où ils auraient eu l’impression d’être observés plutôt qu’écoutés, comme ils l’ont souvent vécu. Ils devaient être en position majoritaire et se sentir entièrement libres de s’exprimer. À mesure que la confiance se développa, les groupes de réflexion interculturels furent mis en place pour les étapes subséquentes.
Les participants ont d’abord été invités à réfléchir à une première question : quelles seraient les qualités attendues d’une pratique exemplaire en recherche ? Les réponses à cette question nous ont permis de démarrer la coconception du cadre de référence (éthique, scientifique et opérationnel) reposant sur une quarantaine de caractéristiques reflétant leur vision des bonnes pratiques en recherche autochtone. Par la suite, différents dispositifs de dialogue ont permis de créer une dynamique de complémentarité et d’oscillation par des conversations sectorielles et intersectorielles, favorisant la prise de parole et la mise à profit de l’expertise de chaque participant. Des mises en commun en grand groupe et des moments de replis en petits groupes ont facilité la concertation et l’évolution de la réflexion collective. Lors de ces rencontres, l’ajout d’un axe transversal de la recherche autochtone s’est imposé. Il s’agissait d’explorer les paramètres favorisant la sécurité culturelle comme condition préalable à la transmission culturelle, car comme l’ont mentionné les participants : « la transmission culturelle est impossible si nous n’assurons pas d’abord la sécurité culturelle ». La sécurité culturelle implique un partenariat égalitaire entre deux personnes de cultures différentes fondé sur le respect mutuel, partenariat qui permet de reconnaître les forces et capacités de chacun. Il peut aussi s’établir entre une personne et une structure organisationnelle et implique nécessairement la création d’un espace de dialogue entre les deux parties. Le respect mutuel et le dialogue amènent ainsi un partage du pouvoir en vue d’une action commune (Blanchet Garneau et Pépin 2012). Se sont alors précisés les grandes orientations, les axes de recherche, les critères d’appréciation des projets de recherche et les secteurs d’intervention de la chaire. De plus, neuf besoins prioritaires ont été nommés et deux autres axes furent ajoutés aux deux premiers à la demande des experts culturels autochtones : la sécurisation culturelle comme préalable à la transmission culturelle, l’interconnectivité et la mise en réseau[9].
Décoloniser la recherche : un projet collectif
Je veux que l’on nous écoute, je ne veux pas que l’on m’étudie, je ne veux pas d’extrapolation de mes paroles.
Marie Raphaël, ilnue, rencontre de réflexion des trois comités de la chaire, Wendake, février 2019
Les objectifs de la deuxième rencontre (juin 2018) étaient de coconstruire un projet collectif et des outils de coopération, une dynamique de collaboration et de réseautage interculturelle et multidisciplinaire au sein de la chaire. L’équipe de cochercheurs universitaires et quatre représentants autochtones du grand rassemblement de mai 2018, désignés par l’assemblée, ont alors évalué le réalisme des possibles actions de recherche identifiées en mai, compte tenu des moyens financiers limités de la chaire et des expertises en place. Cette importante étape ayant trait à la faisabilité des projets aura permis d’éviter les déceptions de nos partenaires autochtones dont l’expérience avec la recherche universitaire a souvent été vécue de façon négative. Cette rencontre aura également permis de trouver un terrain d’entente en opérant un maillage autour de quatre chantiers : Éducation, Santé et Mieux-être, Transmission culturelle, Relation allochtone-autochtone. L’appellation de « chantier », qui désigne un lieu où s’effectuent des travaux, fut choisie pour symboliser notre volonté de répondre, par l’action, aux besoins exprimés par les experts culturels, tel qu’il nous avait été demandé.
Dans un même temps, un atelier de type workshop a permis l’élaboration d’un plan de rayonnement de la chaire dédié exclusivement aux Premières Nations. Cinq assistants de recherche autochtones ont rédigé les messages, identifié les canaux de communication intra et extra-communautaires et ont conçu différents outils de rayonnement et de communication.
Favoriser la vision autochtone de la recherche
Dans un contexte où notre peuple a été victime de génocide culturel, la recherche apporte des preuves de notre existence, aux autres, mais aussi à nous-mêmes. Il faut qu’elle fasse plus que documenter, elle doit soutenir notre objectif de valoriser cet ADN qu’est notre culture, notre identité. Comment la recherche peut-elle alimenter notre quête ? Il faut qu’elle enrichisse le terreau, qu’elle travaille sur les conditions propices à notre transmission.
Jacques Kurtness, ilnu, rencontre de réflexion des trois comités de la chaire, Wendake, février 2019
La troisième rencontre, tenue à Wendake en janvier 2019, avait comme objectif de coconcevoir le cadre de référence de la gouvernance de la Chaire UNESCO, d’y développer les rôles et les responsabilités, de même que la composition des trois comités stratégiques et décisionnels[10] : le comité des Sages, le comité scientifique et le comité de gestion. Cette étape devait également permettre de réfléchir sur les conditions optimales pour favoriser l’inclusion de la vision des experts autochtones à la recherche. Cette réflexion a donné naissance à la publication « La transmission culturelle chez les Premiers Peuples comme dynamique de mieux-être et d’empowerment : approches méthodologiques pour mieux travailler ensemble » (Kaine 2020) qui témoigne des grands changements souhaités en recherche de manière à refléter la culture, les savoirs et les modes de penser et d’agir autochtones. Il fut alors décidé que le comité des Sages regrouperait cinq membres issus des Premiers Peuples assurant une équité homme/femme et une dynamique intergénérationnelle. Les membres de ce comité devaient posséder une expertise culturelle, être capables d’impartialité, de recul et de prendre en compte le bien-être collectif. Le comité scientifique serait, quant à lui, constitué de sept membres à parts égales ou supérieures de membres des nations autochtones, experts de leur milieu, et de chercheurs universitaires responsables de la direction intellectuelle, des approches scientifiques, ainsi que de l’appréciation des projets de recherche présentés à la chaire. Le comité de gestion regrouperait, lui, cinq membres, constitué à parts égales ou supérieures de membres des nations autochtones.
Pour les participants, il était important que le programme de recherche démontre que les experts issus des Premiers Peuples et les experts universitaires sont égaux et que si leurs connaissances respectives sont essentielles à la compréhension de la complexité de l’univers culturel autochtone, seuls les membres des Premières Nations peuvent décider pour eux-mêmes et pour leur culture. C’est pourquoi les chercheurs universitaires doivent favoriser la participation des partenaires issus des Premiers Peuples à toutes les étapes de la recherche, et ce depuis la définition du projet jusqu’à sa finalité. Cette volonté d’inclusion implique souvent que des programmes de formation adaptés soient offerts par les chercheurs et que ces derniers incluent dans leur programme de recherche le développement de méthodologies. L’objectif est de véritablement « travailler ensemble », en équipe interculturelle, multisectorielle, multidisciplinaire, intercommunautés au sein d’une même nation et internations de manière à contrer l’isolement dans lequel les nations autochtones ont été confinées. Aux programmes de formation développés par les chercheurs universitaires s’ajoute un programme de médiation culturelle entre autochtones et non-autochtones. Il importe d’inverser le sens avec lequel les chercheurs comprennent souvent leur rôle : encadrer, enseigner, former ; et de les inviter à se mettre en position d’apprenants face à une culture qu’ils ne connaissent pas, ou peu, ou mal. Plutôt que le mentorat habituel d’un chercheur vers les étudiants et/ou la société civile, il faut aussi savoir inverser le sens de cette transmission : des étudiants et/ou partenaires autochtones et de leur communauté vers le chercheur et son institution.
Enfin, la réflexion a porté sur la manière d’évaluer, du point de vue autochtone, les résultats d’un projet de recherche, non seulement en termes quantitatifs, mais aussi en termes qualitatifs et holistiques : le projet a-t-il mobilisé toutes les parties prenantes autour d’une mission, de valeurs et d’une vision partagée ? A-t-il reconnu la part de chacun à sa juste valeur ? A-t-il permis d’assurer un véritable développement durable pour les partenaires autochtones ? A-t-il mis en place un processus de prise de décisions concertée ? Dans le contexte de l’appel à l’action de la Commission de vérité et réconciliation du Canada, il était important d’ajouter à ces critères : le projet a-t-il ouvert une voie pour la réconciliation en offrant une réelle participation à la gouvernance de la recherche à ses partenaires autochtones ?
Pour exprimer ces concepts, une modélisation qui avait été esquissée en mai 2018 fut développée par les participants. Elle présente, en quelque sorte, l’intentionnalité de la chaire, sa raison d’être.
Se mobiliser pour changer les façons de faire
Il faut que les chercheurs soient là, il nous faut saisir l’occasion pour récupérer avec eux ce que nous avons perdu. On n’est pas tous très scolarisés, on n’a pas de papiers, mais on a ce qu’il faut pour dire quoi mettre dans la recherche. La collaboration c’est de marcher côte à côte, de ne pas avoir à suivre derrière le chercheur.
Jean St-Onge, innu, rencontre de réflexion des trois comités de la chaire, Wendake, février 2019
La quatrième rencontre (juin 2019) voulait instaurer une dynamique de travail collaboratif entre les chercheurs communautaires et universitaires pour la constitution des plans d’action des trois comités. Il s’agissait de se mobiliser comme collectif : à partir des enjeux et des orientations déjà établis. Comment les chercheurs communautaires autochtones et les chercheurs universitaires pouvaient penser ensemble des actions structurantes qui permettraient l’atteinte des objectifs ? La participation de tous, dans un même lieu pendant plusieurs jours, aura permis de confirmer leur engagement, d’assurer le partage des responsabilités pour chaque comité, de proposer des actions réalistes compte tenu des moyens et ressources disponibles, et de proposer des indicateurs de résultats qui répondent au système de valeurs de la chaire. Il s’agissait aussi, et surtout, de devenir des amis qui ont à coeur de se soutenir mutuellement.
Un leadership par alternance
Savoir donner, chercher mais aussi donner. Rechercher, c’est se donner avec tous nos savoirs, nos philosophies, notre histoire. La recherche pour moi c’est le don. C’est bon pour nous et c’est bon pour les chercheurs.
Lucien St-Onge, innu, rencontre du comité des Sages, réflexion sur le cadre éthique et les valeurs, Uashat mak Mani Utenam, juin 2020
En ilnu, le mot UTEPI veut dire RACINE ce qui pourrait correspondre à notre conception de ce que devrait être la recherche autochtone aujourd’hui. Nos parents et grands-parents creusaient afin d’aller chercher les racines dans le sol. Ce matériau essentiel servait à la fabrication de divers contenants d’écorce, pour attacher ou lier diverses parties d’un objet. Je crois que la recherche devrait participer à lier ce qui fut déchiré, éclaté.
Marie Raphaël, ilnue, rencontre du comité des Sages, réflexion sur le cadre éthique et les valeurs, octobre 2019
Les membres des comités des Sages et scientifique ont poursuivi leur réflexion en parallèle à partir d’octobre 2019 sous le leadership du comité de gestion. Pour assurer la connectivité, un représentant de chaque comité assistait aux rencontres des autres comités et faisait un rapport aux membres de son propre comité. Des mises en commun des avancées des travaux avec les membres des trois comités ont eu lieu à plusieurs reprises. Pour le comité des Sages, il fallait entre autres réfléchir à la manière dont les valeurs pouvaient se concrétiser dans l’évaluation, la mise en oeuvre et le suivi des projets de recherche. Le comité scientifique devait se pencher sur les critères scientifiques et les actions scientifiques à mener à court, moyen et long terme. Ce dernier comité a développé une fiche d’appréciation des projets de recherche tenant compte des divers protocoles d’éthique des organismes autochtones et gouvernementaux, du système de valeurs du comité des Sages et des qualités attendues d’un projet exemplaire en recherche autochtone dans une structure de gouvernance horizontale (2018). Cette fiche, élaborée par les membres du comité scientifique, est basée sur la qualité de la relation comme mode de vie des projets et ne constitue en rien un système de surveillance. Elle se veut, selon la volonté des membres du comité des Sages, un outil d’accompagnement et de soutien, plutôt que d’évaluation des projets. Le don de soi est alors identifié par le comité des Sages comme étant le principe directeur qui sous-tend tout le système de valeurs. L’image de l’arbre est à nouveau choisie pour représenter ce dernier.
À partir de l’automne 2020, les modes de fonctionnement sont bien intégrés, les groupes sont autonomes dans la réalisation de leurs plans d’action respectifs tout en étant inter-reliés aux autres comités. Une sixième grande rencontre de travail aura permis aux membres des comités de partager et de consolider les avancées par l’expertise des uns et des autres, mais aussi de poursuivre la réflexion sur certains concepts et les façons de mobiliser les communautés autochtones autour de la chaire.
Le processus de concertation entamé en mai 2018 a mené, par étapes, à la co-création d’un modèle novateur de gouvernance collaborative d’une chaire institutionnelle autochtone. Outre les actions qui semblent évidentes, recrutement de chercheurs autochtones et sollicitation de collaborateurs et de partenaires issus des nations autochtones, il était essentiel de respecter la parole autochtone dans la conception et l’application de ce modèle de gouvernance de la chaire. Il s’agissait de « mettre en place des technologies de gouvernance qui sachent assurer cette participation active et créatrice de tous les intervenants, et de construire des contrats moraux suffisamment fermes pour que chacun sente le besoin d’honorer ses engagements » (Paquet 2016 : 7). Le contrat moral établi à la première rencontre de mai 2018 a reposé sur la volonté de déconstruire les modèles institutionnels connus et de décentraliser les pouvoirs décisionnels afin d’installer une organisation en réseau horizontal et transversal de trois comités qui se partagent les prises de décisions en lien avec la mission, les valeurs et les objectifs. Les membres de ces comités ont à coeur de créer les conditions favorables à la mobilisation et à l’engagement des membres des Premiers Peuples en les assurant d’une participation réelle aux décisions.
Sommes-nous arrivés à « désapprendre » ce que nous savions pour mieux écouter ?
Depuis mai 2018, les parties prenantes ont travaillé assidument à accueillir la capacité de prise de décisions des nations autochtones au regard de la recherche universitaire et au sein de la chaire. Un des défis importants auquel nous aurons à faire face concerne le partage d’information en continu au sein des comités et des membres : comment « interconnecter » de manière efficiente les comités, autant sur le plan intellectuel que relationnel, de manière que la gouvernance ne se recentralise pas. Il faudra mobiliser les chercheurs communautaires autochtones et universitaires pour atteindre cet objectif et éviter d’être influencé par ce « conditionnement qui empêche d’écouter » dont nous parle Lucien St-Onge − le modèle standard de la recherche scientifique étant très fortement ancré dans les pratiques du contexte universitaire.
Garder les membres autochtones des comités engagés à oeuvrer dans un contexte qui ne leur fut pas toujours favorable demeure un défi à moyen terme. Inviter à prendre part, accueillir chaleureusement et écouter attentivement a permis de coconstruire un système de gouvernance basé d’abord sur la qualité de la relation en surmontant plusieurs obstacles, notamment la méfiance envers la recherche universitaire, la distance culturelle, mais aussi la distance géographique. Pour les partenaires autochtones, le partage des pouvoirs, des ressources et des informations s’installe dans la relation. Il ne s’agit pas d’un concept théorique, mais d’un mode de vie, d’une façon d’être ensemble. Que tous soient encore avec nous depuis trois ans est déjà un indicateur de succès. Mais comment faire pour que le système de valeurs et son influence d’action demeurent des principes actifs à long terme ? Se transmettront-ils ? Même si les systèmes de gouvernance traditionnels refusent le pouvoir centralisé, un leadership fort est nécessaire pour rallier les unités horizontales, un leadership sensible qui consiste à « devenir les membres » (Clastres 1974). Qui assurera ce leadership à long terme ?
Reste la question de l’imputabilité, un élément fondamental lorsqu’il s’agit de gouvernance. À la demande du comité des Sages, pour le suivi des projets admis à la chaire, on ne doit pas parler d’imputabilité dans le sens de « chercher une personne à blâmer » lorsque des conflits émergent. L’imputabilité n’est pas hiérarchisée. Elle aussi doit être décentralisée et participer au développement du sens des responsabilités qui, lui, est nourri par une mission à porter et une motivation à bien faire les choses, basée sur un système de valeurs unique en recherche universitaire. Cette notion se rapproche de la notion d’imputabilité douce (Juillet, Paquet et Scala 2001) qui ne signifie pas l’absence de reddition de comptes, mais au contraire la conscience de répondre de ses actes et d’être responsable des gestes posés envers sa communauté, et plus largement, envers sa nation. De la même manière que le partage de pouvoirs est décentralisé par la présence de trois comités imputables les uns envers les autres de manière réflexive, les membres s’assurent que leurs actions, leurs prises de décision, de même que tous les travaux de la chaire, respectent les orientations exprimées par les nations autochtones. Cette conception de l’imputabilité ressemble davantage à une veille permanente qu’à une reddition de comptes en s’assurant que les ressources ont été utilisées de manière responsable.
Le modèle de gouvernance collaborative ayant émergé de cette démarche est unique puisqu’il est le reflet de la compréhension de la recherche qu’a développé un collectif. De plus, il réussit à « transcender les différences entre les cadres de référence » (Juillet, Paquet et Scala 2001 : 14) que tout opposait au départ ; l’un culturel, reposant sur des principes et des valeurs autochtones et l’autre institutionnel, reposant sur des principes et des valeurs de la science occidentale. De ce double cadre a émergé un modèle de gouvernance adapté, basé sur les relations, la collaboration et la prise en compte des savoirs des Premiers Peuples.
Appendices
Remerciements
Nous tenons à remercier chaleureusement tous les participants et participantes aux cinq rencontres de concertation.
Mai 2018, La Baie. Anne-Marie André, Dolorès André, Geneviève Ashini, Karine Awashish, Denis Bellemare, David Bernard, Shannon Blacksmith-Charlish, Constanza Camelo-Suarez, Cody S. Cimon, Quentin Condo, Christian Coocoo, Christine Couture, Nathalie Fiset, Mailys Flamand, Nancy Gros-Louis McHugh, Élisabeth Kaine, Jacques Kurtness, Denise Lavoie, Anne Marchand, Evie Mark, Jacques (Taby) McKenzie, Réal McKenzie, Rita Mestokosho, Claudia Néron, Sylvie Paré, Claudie Paul, Laurie Poirier, Colette Robertson, Nadine St-Louis, Jean St-Onge, Lucien St-Onge, Samuel St-Onge, Jean-François Vachon, Caroline Vollant, Gloria Vollant et Marie-Ève Vollant.
Juin 2018, Chicoutimi. Geneviève Ashini, Denis Bellemare, David Bernard, Shannon Blacksmith-Charlish, Constanza Camelo-Suarez, Cody S. Cimon, Christine Couture, Mathieu Cook, Jacinthe Dion, Marcelle Dubé, Mailys Flamand, Roberto Gauthier, Nancy Gros-Louis McHugh, Laurent Jérôme, Élisabeth Kaine, Denise Lavoie, Anne Marchand, Sylvie Morais, Laurie Poirier, Jean-François Vachon et Marie-Ève Vollant.
Janvier 2019. Wendake Denis Bellemare, David Bernard, Élisabeth Kaine, Jacques Kurtness, Manuel Kurtness, Denise Lavoie, Anne Marchand, Marie Raphaël, Lucien St-Onge, Évelyne St-Onge, Jean St-Onge, Jean-François Vachon, Caroline Vollant, Marie-Ève Vollant et Gloria Vollant.
Octobre 2019, Québec. Anne-Marie André, Denis Bellemare, Quentin Condo, Élisabeth Kaine, Jacques Kurtness, Denise Lavoie, Evelyne St-Onge, Lucien St-Onge, Marie Raphaël, Caroline Vollant et Marie-Ève Vollant.
Octobre 2020, Uashat. Denis Bellemare, David Bernard, Mathieu Cook, Roberto Gauthier, Laurent Jérôme, Élisabeth Kaine, Manuel Kurtness, Lisa Koperqualuk, Denise Lavoie, Anne Marchand, Julie Rock, Evelyne St-Onge, Lucien St-Onge, Jean-François Vachon, Gloria Vollant et Marie-Ève Vollant.
Ce travail a été soutenu par le Conseil de recherche en sciences humaines du Canada (CRSH) dans le cadre de trois programmes Connexion.
Notes biographiques
Élisabeth Kaine†, d’origine wendate, était spécialiste du développement de méthodologies collaboratives pour l’autoreprésentation des Autochtones. Elle a été professeure associée en design et transmission culturelle à l’Université du Québec à Chicoutimi. Elle a cofondé La Boîte Rouge VIF et Design et Culture matérielle, respectivement organisme à but non lucratif et projet de recherche qui, par la cocréation avec les Premières Nations et les Inuit, se consacrent à la production de nombreux outils de transmission culturelle et à l’étude de leurs impacts. Elle était également cotitulaire de la chaire Unesco « La transmission culturelle chez les Premiers peuples comme dynamique de mieux-être et d’empowerment ». Elle a dirigé plusieurs projets de recherche en partenariat avec des communautés autochtones du Québec et du Brésil, dont une importante concertation auprès de plus de 700 membres des Premières Nations et Inuit du Québec réalisée entre 2010 et 2013 qui a menée à la publication du livre Voix, Visages, Paysages : Les Premières Nations et le xxie siècle (PUL, 2016).
Denise Lavoie est titulaire d’une maîtrise en art, option design de l’Université du Québec à Chicoutimi de même qu’une formation en coaching de gestion, management, éthique et gouvernance stratégique. Elle a participé à plusieurs recherches en communautés inuit et des Premières Nations au sein du projet Design et culture matérielle. Elle fut cofondatrice de La Boîte Rouge VIF, un OBNL dédié à la valorisation et la transmission culturelle autochtone, et assuma la coordination de plusieurs recherches subventionnées de même que la direction d’organismes culturels. Directrice exécutive de la chaire UNESCO La transmission culturelle chez les Premiers Peuples comme dynamique de mieux-être et d’empowerment (2017-2020), elle a largement contribué à la structuration de celle-ci. Elle est coach professionnelle, formatrice en développement du leadership et en management et consultante en design organisationnel. deniselavoie100@gmail.com
Notes
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[1]
« Pour y arriver, tu dois d’abord désapprendre ce que tu sais et ensuite m’écouter. Présentement, ce n’est pas toi qui m’écoutes, c’est tout le conditionnement que tu as reçu » (Lucien St-Onge, innu. Rencontre de réflexion des trois comités de la chaire tenue à Wendake en février 2019).
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[2]
Rattachée à l’Université du Québec à Chicoutimi, la Chaire UNESCO – La transmission culturelle chez les Premiers Peuples comme dynamique de mieux-être et d’empowerment − a pour mission de promouvoir et de participer à un système intégré de recherche, de formation, de transfert de connaissances et de documentation dans les domaines de l’éducation, du mieux-être et de la culture chez les Premières Nations et les Inuits. Elle facilite la collaboration entre les experts culturels, les détenteurs de savoirs autochtones et chercheurs de haut niveau des universités et des établissements d’enseignement supérieur du Québec, du Canada, des Amériques et du monde.
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[3]
De mai 2018 à mai 2019, Constanza Camelo-Suarez a été cotitulaire et Marco Bacon, directeur. En 2019, Denise Lavoie a occupé la fonction de directrice exécutive. Depuis octobre 2020, Mathieu Cook a été nommé cotitulaire.
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[4]
Plusieurs expériences ont été menées en recherche collaborative par le projet Design et culture matérielle et La Boîte Rouge VIF pour le développement de méthodologies visant l’empowerment des Premiers Peuples depuis près de 30 ans. Le Petit guide de la grande concertation propose une démarche d’action concertée cohérente pour l’identification du patrimoine culturel et sa transmission en contextes autochtones et allochtones. Ce guide et l’approche générale qu’il propose sont devenus une importante source de références pour le développement d’un modèle organisationnel pour la Chaire UNESCO.
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[6]
Élisabeth Kaine a été nommée membre de ce comité de réflexion dont les travaux ont débuté en juin 2022. Voir ici : <https://www.canada.ca/fr/comite-coordination-recherche/priorites/recherche-autochtone/plan-strategique-2019-2022.html>.
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[7]
Il existe près de 800 chaires Unesco à travers le monde. De ce nombre, huit adressent des enjeux reliés aux Autochtones. La Chaire en transmission culturelle chez les Premiers Peuples comme dynamique de mieux-être et d’empowerment est la seule ayant mis en place un modèle de gouvernance autochtone.
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[8]
Notre volonté a été, dès le départ, d’écouter des membres de la société civile des Premières Nations pour cocréer un cadre de recherche autochtone qui répondrait à leur idéal. Notre démarche de concertation, plutôt que de consultation, se différencie de d’autres initiatives connues, élaborées par des experts ayant des formations universitaires.
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[9]
Définition des champs d’action et des axes de recherche. Voir : <http://www.uqac.ca/chaireunesco>.
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[10]
Les membres des comités sont pour le comité des Sages : Lucien St-Onge, Évelyne St-Onge, Jacques Kurtness (2019 à 2021), Marie Raphael (de 2019 à 2021), Marie-Ève Vollant (de 2019 à aujourd’hui), Quentin Condo (de 2019 à 2021), Élisabeth Kaine (2018 à 2022) ; pour le comité scientifique : Denis Bellemare, David Bernard, Lisa Kuaperkaluk, Anne Marchand, Jean-François Vachon, Gloria Vollant ; et pour le comité de gestion : Marco Bacon (de 2018 à 2019), Constanza Camelo Suarez (de 2018 à 2019), Mathieu Cook (de 2020 à aujourd’hui), Roberto Gauthier (de 2019 à 2021), Élisabeth Kaine (de 2019 à 2022), Manuel Kurtness (de 2019 à 2021), Denise Lavoie (de 2018 à 2020) et Francis Verreault Paul (de 2019 à 2022).
Médiagraphie
- Blanchet Garneau, Amélie et Jacinthe Pepin. 2012. « La sécurité culturelle : une analyse du concept ».Recherche en soins infirmiers 4(111) : 22-35.
- Canada, Gouvernement du. 2019. Dialogue national. Résumé des discussions.Renforcement des capacités en recherche autochtone. https://www.canada.ca/fr/comite-coordination-recherche/priorites/recherche-autochtone/plan-strategique-2019-2022/annexe-4.html
- Carr Paul, Carmen Dionne, Diane Dupont, Christopher Fullerton, Budd L. Hall, Elisabeth Kaine, Liette Vasseur et Vivek Venkatesh. 2020. Poursuivre l’excellence en recherche : réflexions des chaires de recherche de l’UNESCO au Canada. Commission canadienne pour l’UNESCO. https://fr.ccunesco.ca/ressources#first=10
- Clastres, Pierre. 1974. La Société contre l’État : Recherches d’anthropologie politique. Paris : Minuit.
- Jonas, Hans. 1979. Le principe responsabilité, une éthique pour la civilisation technologique. Paris : Le Cerf.
- Juillet, Luc, Gilles Paquet et Francesco Scala. 2001. Gouvernance collaborative, imputabilités douces et contrats moraux : un cadre d’analyse. http://www2.unb.ca/gge/Research/GEG/OceanGov/documents/gouvernance_collaborative%20.pdf
- Kabeer, Naila. 2001. « Reflexions on the measurement of women’s empowerment ». Dans Discussing Women’s Empowerment and Theory and Practice, 17-57. Sida Studies n˚ 3. Stockholm : Novum Grafiska.
- Kaine, Élisabeth. 2020. La transmission culturelle chez les Premiers Peuples comme dynamique de mieux-être et d’empowerment. Approches méthodologiques pour mieux travailler ensemble, exposé de position produit dans le cadre du Grand dialogue. Commission canadienne pour l’UNESCO. https://fr.ccunesco.ca/ressources#first=10
- Kaine, Élisabeth, Denis Bellemare, Olivier Bergeron-Martel et Pierre DeConnick. 2016. Le petit guide de la grande concertation. Création et transmission culturelle par et avec les communautés. Québec : Presses de l’Université Laval.
- Lavoie, Denise, dir. 2020. La Chaire UNESCO La transmission culturelle chez les Premiers Peuples comme dynamique de mieux-être et d’empowerment. Site Internet. Rédaction Daniel Jean, Élisabeth Kaine. Réalisation La Boîte Rouge VIF. http://www.uqac.ca/chaireunesco
- Margolin, Victor et Sylvia Margolin. 2002. « A “Social Model” of Design: Issues of Practice and Research ». Design Issues 18(4) : 24-30.
- Paquet, Gilles, 2004. Pathologies de gouvernance : essais de technologie sociale. Montréal : Liber.
- Paquet, Gilles. 2011. Gouvernance collaborative : un antimanuel. Montréal : Liber.
- Paquet, Gilles. 2016. Qui a peur de la gouvernance décentralisée ?Post-face à Solidarité rurale du Québec, pour une décentralisation démocratique. Ouvrage collectif et plaidoyer de Solidarité rurale du Québec. Québec : Presses de l’Université Laval.
- UNESCO. 2018. « Lancement de la Chaire UNESCO en transmission culturelle chez les Premiers peuples comme dynamique de mieux-être et d’empowerment ». Commission canadienne pour l’UNESCO. 23 mai. https://fr.ccunesco.ca/a-propos/medias/2018/5/chaire-unesco-en-transmission-culturelle-chez-les-premiers-peuples