Abstracts
Résumé
Le Ndakinna est le territoire ancestral de la nation w8banaki. Les W8banakiak, « gens du pays de l’aube » ou « ceux qui vivent au levant », forment la Première Nation algonquienne la plus au sud du Québec. Depuis 2013, le Bureau du Ndakinna est mandaté par le Conseil des Abénakis d’Odanak et le Conseil des Abénakis de Wôlinak pour répondre aux consultations territoriales. Afin d’y parvenir, le Bureau utilise notamment l’archéologie dans divers projets de gestion et d’affirmation sur le territoire ancestral w8banaki. Que ce soit au sujet de la protection et de la gestion d’écosystèmes indispensables pour la nation w8banaki, de la documentation des schémas et des sites historiques w8banakiak d’occupation du territoire ou du rayonnement scientifique, l’archéologie au sein du Bureau du Ndakinna représente un puissant véhicule d’autodétermination pour la Nation w8banaki.
Mots-clés :
- W8banaki,
- archéologie,
- territoire,
- Bureau du Ndakinna,
- valorisation,
- collaboration
Abstract
The Ndakinna is the traditional territory of the Abenaki. The Abenaki or « People of the dawn » are the southernmost Algonquiian First Nation of the province of Quebec. Since 2013, the Ndakinna Office has been mandated by the Councils of the Abenaki of Odanak and Wôlinak to conduct territorial consultations. In order to achieve this, the Office employs archaeology within many projects related to land management and for the affirmation of the traditional territory of the W8banaki Nation. For the Ndakinna Office, archaeology is a powerful tool for self-determination, as well as a means for protecting and managing the ecosystems that are essential to the Nation, documenting historic W8banakiak sites and patterns of land use, and to extert scientific influence through outreach .
Keywords:
- W8banaki,
- archaeology,
- territory,
- Ndakinna Office,
- enrichment,
- collaboration
Resumen
Ndakinna es el territorio ancestral de la nación w8banaki. Los W8banakiak, “gente del país del amanecer” o “los que viven en el levante”, forman la Primera Nación algonquina más meridional de Quebec. Desde el año 2013, el Consejo Abenaki de Odanak y el Consejo Abenaki de Wôlinak han encomendado a la Oficina de Ndakinna el mandato de responder a las consultas territoriales. Para ello, la Oficina utiliza la arqueología en diversos proyectos de gestión y afirmación en el territorio ancestral W8banaki. Ya se trate de la protección y gestión de ecosistemas esenciales para la nación w8banaki, la documentación de patrones y sitios históricos w8banakiak, de ocupación territorial o de divulgación científica, la arqueología dentro de la Oficina de Ndakinna representa un poderoso vehículo para la autodeterminación de la Nación w8banaki.
Palabras clave:
- W8banaki,
- arqueología,
- territorio,
- Oficina Ndakinna,
- valorización,
- colaboración
Article body
L’objectif principal de cet article est de présenter le rôle que joue l’expertise archéologique au sein des processus de gestion et d’affirmation territoriale du Bureau du Ndakinna depuis 2013. D’entrée de jeu, nous présenterons une brève histoire de la nation w8banaki[1] (Abénaquis) et le Bureau du Ndakinna. Nous détaillerons par la même occasion l’approche multidisciplinaire d’affirmation territoriale du Bureau du Ndakinna. Ensuite, par trois exemples concrets nous exposerons la façon dont les projets de recherches archéologiques sont menés au Bureau du Ndakinna. Nous verrons comment celles-ci peuvent : 1) contribuer à mieux comprendre le passé de la nation w8banaki et ainsi servir au Bureau du Ndakinna dans un contexte politique d’affirmation territoriale ; 2) appuyer le Bureau du Ndakinna dans ses projets de développement durable et de gestion du territoire ; 3) contribuer au rayonnement du Bureau du Ndakinna auprès des milieux universitaires. Finalement, nous exposerons certains défis ainsi que les avenues à explorer au sein du Bureau du Ndakinna dans les prochaines années.
La nation w8banaki
La nation w8banaki regroupe actuellement plus de 3000 membres répartis en deux communautés : Odanak, à l’embouchure de la rivière Alsig8ntekw (Saint-François), et Wôlinak, à l’embouchure de la rivière W8linaktekw (Bécancour). Il est généralement admis que les groupes w8banakiak, soit « les gens du pays de l’aube » ou « ceux qui vivent au levant », présents aujourd’hui au Québec se sont déplacés vers la vallée du Saint-Laurent à partir des États du Maine, du New Hampshire, du Vermont et d’une partie du Nouveau-Brunswick dans le cadre des guerres coloniales des xviie et xviiie siècles (Sévigny 1976 ; Charland 1964 ; Maurault 1866 ; Bourque 2004 ; Calloway 1994 ; Haviland et Power 1981 ; Morrison 1984 ; Snow 1978 ; Day 1978 ; Savoie 2003 ; Dickason 1990). Des recherches archéologiques récentes sur les rivières Alsig8ntekw (Saint-François) et W8linaktekw (Bécancour) ainsi que la révision des données archéologiques anciennes, dont celles du site Lachapelle à Saint-François-du-Lac et des collections archéologiques du Musée de la nature et des sciences de Sherbrooke, ont toutefois démontré que la présence des W8banakiak dans le bassin versant de la rivière Alsig8ntekw (Saint-François) et sur la rive sud du Saint-Laurent serait antérieure à la période de contact (Treyvaud et Plourde 2017). À Odanak, les fouilles archéologiques complètent les descriptions tirées des sources écrites et orales. Elles mettent au jour des emplacements d’habitations, ainsi que plusieurs fosses à déchets et foyers au contenu datable et culturellement révélateur. La datation au radiocarbone d’une dizaine d’échantillons de charbon et de restes culinaires carbonisés a révélé une occupation continue depuis le xvie siècle (ibid.). Les récentes découvertes effectuées sur la rivière W8linaktekw (Bécancour) semblent démontrer les mêmes schèmes d’établissement. L’analyse de ces récentes données et leurs comparaisons avec les sites d’Odanak, au Québec, ainsi que de Tracy Farm et Old Point Mission au Maine (Narantsouak), appuient la même hypothèse (ibid.). D’ailleurs, on retrouve sur le site de Tracy Farm les mêmes artéfacts diagnostiques que sur les sites d’Odanak et de Wôlinak. Ces objets ont une attribution temporelle datant du Sylvicole moyen jusqu’à la période de contact (Cowie, Bartone et Petersen 2000).
Le Bureau du Ndakinna
La structure administrative
Depuis 1979, le Grand Conseil de la Nation Waban-Aki (GCNWA), mandaté par le Conseil des Abénakis d’Odanak et le Conseil des Abénakis de Wôlinak, constitue une entité administrative qui offre certaines ressources et des services pour répondre aux besoins communs des deux communautés. Face à l’augmentation considérable des demandes de consultation territoriale provenant des gouvernements fédéral et provincial dans le contexte de leur obligation constitutionnelle de consulter et d’accommoder les peuples autochtones, et dans une volonté d’affirmer sa présence sur le Ndakinna, la nation w8banaki s’est dotée en 2013 d’une entité responsable de la gestion des questions territoriales : le Bureau du Ndakinna.
Le territoire et le mandat
Le Ndakinna est aujourd’hui un territoire où l’empreinte anthropique est élevée et où la tenure des terres est largement privée. Dans ce contexte où le Ndakinna est fortement urbanisé et en proie à de multiples conflits d’usages, la mission du Bureau du Ndakinna se décline en quatre principaux volets : 1) la promotion et la défense des droits et intérêts de la nation sur le Ndakinna ; 2) la représentation de la nation en matière de consultations et de revendications territoriales ; 3) la documentation, la conservation et la valorisation des savoirs w8banakiak en lien au territoire ; 4) l’accompagnement des communautés d’Odanak et de Wôlinak pour faire face aux enjeux environnementaux actuels, notamment en matière de lutte et d’adaptation aux changements climatiques (https://gcnwa.com/bureau-du-ndakinna/). Pour s’assurer que ces activités respectent la vision des membres des communautés de la nation w8banaki, le Bureau du Ndakinna s’est adjoint un comité consultatif à la recherche formé d’élus des deux communautés ainsi que d’hommes et de femmes w8banakiak de tous âges pratiquant des activités de chasse, de pêche, de piégeage, de cueillette ou de collecte. Ce comité, composé de onze W8banakiak, est notamment actif dans la préparation des méthodologies de recherche et dans l’analyse des résultats, ce qui permet au Bureau du Ndakinna d’arrimer la conception, l’analyse, les résultats et les conclusions de la recherche aux préoccupations et aux réalités des deux communautés concernées.
L’approche d’affirmation territoriale
Dans sa volonté de défendre les intérêts et les droits des W8banakiak au Québec et au Canada, le Bureau du Ndakinna en est venu rapidement à préconiser une approche d’affirmation territoriale plutôt que de revendication territoriale globale. Cela se traduit par des négociations faites dans un esprit de partenariat et de collaboration avec les gouvernements, les organismes de conservation, les initiateurs de projets et les autres intervenants présents sur le Ndakinna. Selon le Bureau, il en résulte une meilleure reconnaissance des droits et intérêts des W8banakiak sur le territoire ancestral, et ce, sans avoir besoin de procéder à des démarches judiciaires qui s’avèrent généralement confrontationnelles (Ray 2011), longues, coûteuses et fastidieuses pour les Premières Nations. En ce sens, si la nation w8banaki affirme détenir des droits ancestraux et des droits issus du traité d’Oswegatchie et du traité de Caughnawaga sur le Ndakinna, jusqu’à maintenant elle n’a pas jugé nécessaire de développer un argumentaire juridique détaillé. Grâce à cette approche, le Bureau du Ndakinna tisse des collaborations et des partenariats diversifiés, exerce un leadership environnemental positif sur l’ensemble du Ndakinna. À ce titre, le Bureau du Ndakinna siège en tant que membre actif à la Table de gestion intégrée des ressources et du territoire de l’Estrie et représente la nation w8banaki au sein de divers organismes de bassins versants et d’organismes de concertation (notamment les tables de concertation régionales du lac Saint-Pierre et de l’Estuaire fluvial), en plus d’être membre de deux équipes de rétablissement d’espèces en péril (celle des cyprins et petits percidés ainsi que celle du bar rayé).
L’affirmation territoriale de la nation w8banaki ne va pas sans reconnaître qu’il existe des chevauchements territoriaux entre Premières Nations. En ce sens, le Bureau du Ndakinna réalise régulièrement des travaux de recherche conjoints avec la nation malécite et la nation mohawk. À titre d’exemple, le projet Woli-psqahsuwe regroupe le Conseil de la Première Nation Malécite de Viger et Les Amis des Jardins de Métis avec comme objectif de mettre en valeur les patrimoines archéologique, culturel et naturel de l’embouchure de la rivière Mitis située dans la région du Bas-Saint-Laurent. Depuis 2014, plusieurs sites archéologiques ont révélé une présence autochtone à l’embouchure de cette rivière. Ces sites sont témoins de plusieurs interactions entre les Premières Nations et les Européens. Le projet inclut d’autres explorations archéologiques, l’analyse des données et l’élaboration d’un concept d’exposition sur l’utilisation et le prélèvement des ressources fauniques et floristiques telles le saumon, le phoque et des résidus de conifères. Des projets de prospections archéologiques, de formation, d’échanges, de partages de méthodologies de travail et de résultats de recherches sont en cours avec l’équipe de recherche en anthropologie et archéologie du Conseil mohawk de Kahnawà:ke.
L’équipe et les résultats de recherche
Dès ses premières années d’activité le Bureau du Ndakinna s’est doté d’une équipe multidisciplinaire composée de spécialistes en anthropologie, en archéologie, en histoire, en environnement (biologie et foresterie) et en géomatique afin d’approfondir sa compréhension du territoire w8banaki, des savoirs w8banakiak ainsi que des modes d’utilisation et d’occupation passés et actuels du Ndakinna. Les intervenants du GCNWA travaillent depuis mars 2013 sur l’identification, l’occupation et l’utilisation du Ndakinna.
Mentionnons notamment que, de 2013 à 2015, une recherche historique sur la territorialité w8banaki a été menée, ce qui a permis, grâce au travail de l’historien Mario Marchand, de mieux cerner les limites territoriales du Ndakinna (GCNWA 2015). Ce dernier avait le mandat de délimiter le territoire ancestral affirmé par la nation w8banaki à l’aide de sources historiques et cartographiques. Ces recherches ont permis au Bureau du Ndakinna de tracer la carte du territoire ancestral et de prioriser des secteurs clefs pour répondre aux consultations territoriales.
Suivant ces recherches historiques, une étude anthropologique sur l’utilisation et l’occupation contemporaine du territoire a été réalisée de 2014 à 2016 afin de comprendre l’importance de faire perdurer un mode de vie w8banaki et de transmettre les savoirs associés au territoire pour la nation. Cette étude a permis également de mieux concevoir comment les W8banakiak se représentent le Ndakinna et comment ils font face aux nombreuses transformations qui s’y opèrent actuellement. Les travaux entrepris ont généré des données intéressantes que les connaissances et les travaux des archéologues participant au projet viennent compléter afin d’obtenir un portrait complet de la présence w8banaki au Québec. Cette perspective de partenariat a alors mobilisé des connaissances de recherche multidisciplinaire (archéologie, environnement, anthropologie, etc.), et celles-ci sont non seulement destinées au milieu universitaire mais aussi à la nation w8banaki.
Finalement, au niveau environnemental, chaque bureau Environnement et Terre des Conseils des Abénakis d’Odanak et de Wôlinak ainsi que le Bureau du Ndakinna travaillent principalement à l’étude et à la protection des espèces en péril et des espèces d’importance culturelle telles que la perchaude et l’esturgeon, ainsi qu’à l’adaptation aux changements climatiques. La réalisation des projets d’inventaire (faune aviaire, herpétofaune, flore et autres) sur les différents secteurs du territoire des communautés, ainsi que sur le Ndakinna, génère des résultats significatifs sur les transformations observées sur le territoire et sur l’état des ressources.
Ces recherches, réalisées au sein même des structures du GCNWA et en collaboration avec de nombreux membres de la nation, ont permis au Bureau du Ndakinna de disposer d’une connaissance approfondie des schémas historiques et actuels d’occupation et d’utilisation du territoire à des fins alimentaires, rituelles ou sociales et d’identifier des sites sensibles pour la protection de leurs droits ancestraux. Ces données sensibles sont utilisées par le Bureau du Ndakinna afin d’évaluer les impacts environnementaux, patrimoniaux et sociaux des projets de développement proposés sur le territoire et ainsi communiquer aux différents promoteurs et instances gouvernementales les préoccupations des membres w8banakiak concernés. Il s’agit pour le Bureau du Ndakinna de consolider et pérenniser ses structures, méthodologies et relations permettant à la nation w8banaki d’affirmer sa présence sur le Ndakinna tout en y assumant de plus en plus des initiatives de direction environnementale et culturelle.
L’expertise archéologique dans les travaux du Bureau du Ndakinna
Tel que mentionné précédemment, sur un territoire où l’urbanisation et l’anthropisation sont élevées et en constante croissance, l’acquisition de connaissances et savoirs diversifiés est centrale à l’affirmation de la présence w8banaki et à la défense des droits et intérêts des membres de la nation. Depuis quelques années déjà, la présence d’une archéologue, Geneviève Treyvaud, s’intègre à cette démarche et contribue : 1) aux consultations territoriales du Bureau du Ndakinna ; 2) à la préservation et la gestion durable du territoire w8banaki ; 3) au développement d’initiatives de recherche du Bureau et de partenariats avec le milieu universitaire.
L’archéologie au sein des activités du Bureau du Ndakinna
Une des particularités de la recherche archéologique développée au sein du Bureau du Ndakinna est que celle-ci se fait par et avec les communautés w8banakiak et répond à l’agenda politique, culturel et scientifique de ces communautés, en respect des savoirs, des intérêts et des préoccupations de ses membres. Les aspects théoriques et méthodologiques préconisés par le Bureau du Ndakinna reposent sur les fondements de l’archéologie des Premières Nations, mieux connue en anglais sous le nom de Indigenous Archaeology (Bruchac, Hart et Wobst 2010 ; Watkins 2000). Cette approche repose sur le pouvoir décisionnel et organisationnel des peuples autochtones à mettre de l’avant des projets de recherches archéologiques qui concernent leur patrimoine culturel et ancestral (McGuire 1992). Elle s’est développée au sein des Premières Nations américaines vers la fin du xxe siècle puis appliquée en Australie, en Russie, en Afrique et en Asie afin de répondre à des problématiques historiques et actuelles issues des interprétations de chercheurs européens et américains qui étudient le patrimoine autochtone sans consulter les nations autochtones concernées (Carter 1997 ; Echo-Hawk 1997 ; Watkins 2000 ; Bruchac et al. 2010 ; Wobst 2010 ; Kim 2010 ; Atalay 2012).
L’archéologie des Premières Nations est une approche épistémologique, méthodologique et théorique qui remet en question l’ensemble des structures de savoirs concernant les populations autochtones en Amérique. L’approche positiviste de la recherche universitaire, la hiérarchie des savoirs ainsi que le partage asymétrique de l’autorité des savoirs produits entre les chercheurs externes et la nation sont chacun remis en cause par cette approche. Bref, si l’archéologie permet au Bureau du Ndakinna de développer ses capacités de gouvernance et de mieux tenir compte des intérêts et besoins des membres, il s’agit aussi d’intégrer les systèmes de savoirs et les épistémologies w8banakiak au sein des structures de recherches actuelles et d’exporter ce modèle via différents partenariats avec les milieux universitaires. Cette mouvance de décolonisation de la recherche a été théorisée et valorisée par de nombreux chercheurs de diverses disciplines depuis les années 1990 (Smith 2010 ; Harris 2010).
Pour le Bureau du Ndakinna, l’archéologie des Premières Nations n’est pas un modèle d’archéologie collaborative où archéologues universitaires ou consultants collaborent avec une nation autochtone. Il s’agit davantage de développer à l’interne des projets de recherche archéologiques et d’engager, à partir de ces projets, des partenariats avec les milieux universitaires. En effet, les recherches archéologiques réalisées au Bureau du Ndakinna, si elles s’effectuent en partenariat avec les milieux universitaires, sont conceptualisées et prises en charge par les employés du Bureau du Ndakinna et par les membres de la nation w8banaki. L’ensemble des travaux s’effectue donc directement par les organisations de la nation (le Musée des Abénakis, les Conseils des Abénakis d’Odanak et de Wôlinak ainsi que le Grand Conseil de la Nation Waban-Aki) afin d’assurer d’un contrôle des projets et de mettre en valeur les besoins, les intérêts et les savoirs de la nation. Cela se reflète d’ailleurs par une participation active des membres des deux communautés aux travaux d’évaluation du potentiel archéologique, de fouilles, d’analyse, de conservation et de mise en valeur, ce qui permet notamment un transfert de connaissances et d’aptitudes non négligeables.
Dans ce contexte, le Musée des Abénakis est un partenaire essentiel du Bureau du Ndakinna. Il joue un rôle majeur lors des projets en archéologie en assumant la responsabilité de la conservation et de la gestion des collections ainsi que de leur mise en valeur. Ce faisant, il place au coeur de ses responsabilités la transmission du savoir, du savoir-faire et des traditions aux générations futures de la nation w8banaki. Les résultats des différents projets de la nation sont diffusés ou intégrés via différents supports (exposition muséale, musée virtuel, blogue, capsules vidéo, sentiers pédestres et de découvertes, sites archéologiques, flore et faune) et mis à jour selon l’avancement des travaux.
Le Musée appuie l’affirmation du territoire w8banaki – en plus d’être un vecteur dynamique du rayonnement culturel pour la nation – notamment à travers ses initiatives en matière de recherche et de diffusion des connaissances en archéologie. Par exemple, les intervenants qui travaillent au musée sont formés en gestion du patrimoine autochtone et en diffusion de la culture autochtone. Le Musée offre aussi des services et entreprend des projets en partenariat avec d’autres nations autochtones qui veulent développer leur autonomie dans la gestion de leur patrimoine. En ce sens, le Musée des Abénakis, en collaboration avec le Bureau du Ndakinna, contribue activement à la prise en charge par les Premières Nations et à la décolonisation de la recherche en archéologie et en anthropologie sur son territoire ancestral.
La rivière W8linaktekw et l’affirmation d’une présence w8banaki
Mis sur pied par le Musée des Abénakis et le Grand Conseil de la Nation Waban-Aki à l’automne 2015 et subventionné en partie par le ministère du Patrimoine canadien, le projet de recherche archéologique visait à documenter l’occupation w8banaki du bassin de la rivière W8linaktekw. Les premiers sondages ont débuté à l’été 2016. Une quarantaine de sondages ont été réalisés sur l’ensemble du territoire de l’actuelle communauté de Wôlinak. Les relevés stratigraphiques pris lors des sondages ont démontré que les dépôts saisonniers de sédiments apportés par les crues de la rivière étaient importants. Les activités anthropiques, agricoles ou forestières, dont la construction d’un pont ferroviaire en 1972, ont considérablement modifié la nature du sol depuis le début du xviie siècle, ne laissant que quelques bribes d’informations sur l’occupation de la fin du xviiie siècle. Malgré toutes ces perturbations, deux sites archéologiques ont été mis au jour au sud du village et sur la première terrasse surplombant la rivière. L’un des sondages a révélé un vestige de bois, probablement un escalier, et plusieurs tessons de poterie, un morceau de pipe et des éclats de taille en chert, dont un éclat retouché. Les analyses sur la culture matérielle sont en cours, mais les premières observations indiquent vraisemblablement que le site daterait du milieu du xviiie siècle et aurait été occupé jusqu’au xxe siècle ou jusqu’à la construction du pont ferroviaire. Le tout correspondrait à l’occupation de la mission, qui s’étend du milieu du xviiie siècle à aujourd’hui. Les éclats de chert proviennent d’un niveau plus ancien et pourraient être associés à la fin du Sylvicole ou à la période du pré-contact. Nous attendons les résultats des datations au C14 afin d’émettre un diagnostic plus précis.
En 1996, un inventaire archéologique a été réalisé à la Maison McDonald sur l’île Montesson (Lavoie 1998). Cette île située à l’embouchure de la rivière W8linaktekw (Bécancour) est le lieu d’implantation de la première seigneurie datant de la fin du xviie siècle. Une prospection réalisée en 2016 a permis de mettre au jour plusieurs vestiges de maçonnerie et des artéfacts datant du Régime français. De plus, les fouilles archéologiques de l’été 2017 ont révélé des vestiges de la chapelle et du bâtiment seigneurial. À ce propos, les jésuites de Trois-Rivières auraient construit dès 1669 une petite mission sur l’île Montesson afin de christianiser les W8banakiak de passage dans la région, ce qui laisse supposer que ces derniers connaissaient la région avant la venue des Européens (Deshaies 1997 ; Leger 1929 ; Stanley 1950). Le site mis au jour serait donc associé à l’occupation de la fin du xviie siècle. Le projet s’est terminé à l’automne 2017 par une campagne de fouilles archéologiques sur le site de la première mission et seigneurie de Bécancour (1680-1735).
Outre son aspect scientifique et documentaire, ce projet visait à démontrer et affirmer la présence historique des W8banakiak dans la région du Centre-du-Québec, et plus particulièrement dans la région de Bécancour, où le développement d’infrastructures est très présent et les droits d’accès au territoire ancestral remis en question. La mise au jour de sites archéologiques et leur enregistrement officiel dans l’Inventaire des sites archéologiques du Québec permettent donc de défendre les droits ancestraux des W8banakiak lors de discussions et d’échanges avec les différentes instances municipales, provinciales et fédérales. Étant intimement lié à la protection des droits des membres lors de diverses consultations territoriales, ce projet réalisé sur la rivière W8linaktekw (Bécancour) s’avère très significatif pour plusieurs membres de la nation w8banaki et sert à attester sa présence historique sur des territoires d’intérêt patrimonial ou d’intérêt pour les pratiques de chasse, de piégeage, de pêche, de collecte ou de cueillette des W8banakiak.
La recherche archéologique permet de mieux comprendre l’occupation et l’utilisation anciennes du territoire, les relations entre colons et W8banakiak et, par les données environnementales, de reconstituer les diètes alimentaires et les cultigènes utilisés, une dimension jusqu’à présent peu documentée. Il est ensuite plus aisé pour le Bureau du Ndakinna de traduire les pratiques des membres de la nation au sein d’une trame historique plus vaste. Lors des processus de consultation, les connaissances archéologiques permettent au Bureau du Ndakinna d’affirmer la présence w8banaki sur le territoire et de recommander des mesures d’atténuation des impacts environnementaux, sociaux ou patrimoniaux d’un projet de développement en respect des pratiques alimentaires, rituelles ou sociales des W8banakiak. Par exemple, lorsque l’analyse de données biophysiques met en relief un enjeu environnemental qui s’avère central lors d’une consultation, le Bureau du Ndakinna peut utiliser les résultats des recherches archéologiques menées jusqu’à présent pour attester l’importance culturelle historique de la ressource ou de la composante environnementale visée par les projets de développement économique.
Ce projet réalisé à l’île Montesson et à Wôlinak a aussi visé le transfert, aux citoyens de la MRC de Bécancour, des connaissances acquises, par l’organisation de journées de fouilles archéologiques publiques et d’une série de conférences et par la confection de panneaux d’information sur les résultats de la recherche. Ainsi, le projet met de l’avant les résultats des recherches communes aux communautés autochtones et non autochtones présentes sur le territoire : la mission jésuite, les échanges vus à travers les matériaux et les technologies métissées, la diète alimentaire et les cultigènes. Le Bureau du Ndakinna a aussi fait appel à la participation active des jeunes du groupe de NIONA (https://gcnwa.com/connaissez-lequipe-jeunesse-niona/ et https://niona.org), une initiative communautaire des Services à l’enfance et à la famille des Premières Nations du Grand Conseil de la Nation Waban-Aki. Ceux-ci ont participé aux différentes étapes du projet et ont réalisé plusieurs entrevues portant sur différents sujets : l’artéfact du jour, la profession, les découvertes, les enregistrements, etc. Les entrevues ont été diffusées sur les sites Web de NIONA et du GCNWA (https://gcnwa.com/). Plusieurs des jeunes participants ont ainsi développé un intérêt pour leur patrimoine archéologique, et leur expérience acquise est maintenant un outil de valorisation culturelle.
La perchaude au lac Nebesek : l’archéologie au service de la gestion durable du Ndakinna
L’expérience et les connaissances acquises en archéologie contribuent aussi à renforcer les aptitudes de gestion durable du territoire du Bureau du Ndakinna. Depuis le milieu des années 1990, un effondrement de la population de la perchaude a été constaté au lac Nebesek (Saint-Pierre) [De La Chenelière 2014]. Pour remédier à cette situation en 2012, le gouvernement du Québec a décrété, pour une période de cinq ans, l’interdiction de la pêche sportive et commerciale à la perchaude au lac Nebesek. En raison du fait que la population de perchaudes de la région concernée est toujours dans un état précaire, ce moratoire a été renouvelé pour une période de cinq autres années en 2017 (MFFP 2017).
La pêche à la perchaude au lac Nebesek (Saint-Pierre) représente une activité au coeur de l’identité w8banaki. L’importance de cette espèce pour la nation a d’ailleurs été validée par la récurrence de sa mention lors d’entrevues relatives à la pêche réalisées par le Bureau du Ndakinna avec les membres de la nation (fig. 6). Face à cet enjeu biologique important, la nation w8banaki, via l’action des conseils, du GCNWA et des membres de la nation, avait consenti à participer aux efforts de conservation en diminuant significativement son prélèvement de perchaudes (par le resserrement des quotas accordés au sein du permis de pêche communautaire) dès l’instauration du premier moratoire sur sa pêche en 2012.
Suivant ce premier moratoire, plusieurs activités de recherche ont été organisées et financées par la nation w8banaki. Les données (environnementales, anthropologiques, archéologiques et géographiques) recueillies et compilées dans le cadre des travaux du Bureau du Ndakinna ont rendu possible une meilleure compréhension des répercussions des changements environnementaux relatifs à un développement agricole, industriel, commercial et urbain accru autour du lac sur les activités des W8banakiak. Ces travaux ont permis de réaliser, à l’échelle régionale, la portée des effets présents et futurs du développement sur les droits des W8banakiak en termes de pêche, de chasse, de piégeage et de cueillette. De plus, ils ont aidé à identifier certaines mesures pour remédier au déclin de l’écosystème du lac et à les diffuser auprès des instances gouvernementales et à la Table de concertation régionale du lac Saint-Pierre.
Les connaissances du Bureau du Ndakinna sur la biodiversité du secteur du lac Nebesek (Saint-Pierre) se sont vues bonifiées par l’intégration de résultats archéologiques. Des fouilles précédemment réalisées par le Musée des Abénakis sur la rive sud du lac Nebesek (Saint-Pierre) à l’embouchure de la rivière Alsig8ntekw, au Chenal-Tardif et sur la commune à Odanak, avaient permis de mettre au jour de nombreuses fosses contenant des ossements de différentes espèces animales (Treyvaud et Plourde 2017). Les analyses spécialisées en zooarchéologie ont alors révélé la présence de plusieurs espèces de poissons tels que des meuniers, des barbues, des poissons de la famille des percidés (perchaudes) et de l’esturgeon. Ces connaissances archéologiques ont révélé des continuités historiques dans les modes d’alimentation des W8banakiak. Conséquemment, les initiatives de la nation et du Bureau du Ndakinna, l’importance culturelle de l’espèce pour les W8banakiak ainsi que les connaissances historiques et archéologiques liées à l’espèce et à son habitat ont servi de base à un positionnement politique favorable au renouvellement du moratoire sur la pêche au lac Nebesek (Saint-Pierre) par le gouvernement du Québec en 2017. De plus, les bureaux Environnement et Terre des communautés d’Odanak et de Wôlinak ont depuis ciblé le rétablissement de cette population de perchaude comme un enjeu prioritaire et ont entrepris certains projets d’aménagements fauniques sur le territoire de la communauté d’Odanak pour remédier à la situation. Grâce à ces initiatives, la nation w8banaki et ses organisations font preuve d’une influence positive en matière d’intendance pour cette espèce.
L’archéologie et les initiatives scientifiques du Bureau du Ndakinna
Pour le Bureau du Ndakinna, les activités de recherche sous-tendent une diffusion des connaissances au sein des communautés de la nation et un rayonnement au sein des milieux de la recherche. Pour remplir ses objectifs, il peut créer des partenariats de recherche avec le milieu universitaire tout en renforçant les liens avec ses membres et en s’assurant qu’ils soient impliqués et respectés. De tels partenariats, par les dialogues, l’emploi et les résultats qu’ils génèrent, sont utiles aux processus de consultation et d’affirmation territoriale et à la formation continue des employés du Bureau du Ndakinna, ainsi qu’au transfert de compétences en matière de recherche aux membres de la nation w8banaki, au rapatriement du patrimoine matériel de la nation et à la décolonisation de la recherche au sein des universités en faveur d’une archéologie des Premières Nations. Ces partenariats peuvent notamment donner au Bureau du Ndakinna l’accès aux laboratoires d’archéologie de l’Université Laval et à un ensemble d’équipements spécialisés (géoradar, tomodensitomètre, Lidar, ITRAX) du Centre Eau Terre Environnement de l’Institut national de recherche scientifique (INRS-ETE), de même qu’un soutien technique de la part de ces institutions. Non seulement matérielles ou financières, ces collaborations reposent sur le partage des connaissances entre les équipes de recherche universitaires (Université Laval, INRS-ETE, Université de Sherbrooke, Université du Québec à Montréal, Université de Montréal), les membres de la nation w8banaki, le Grand Conseil de la Nation Waban-Aki, le Musée des Abénakis et d’autres organisations régionales.
À titre d’exemple, un partenariat de recherche récent a été contracté entre le Bureau du Ndakinna et l’Université Laval autour du projet historique et archéologique « Kik8ntekw (la rivière Chaudière) : le pays des W8banakiak ». Amorcée en janvier 2017, la première phase du projet consiste à regrouper l’ensemble des archives historiques concernant la présence des W8banakiak dans la région de la rivière Kik8ntekw (Chaudière) ainsi que les sources jésuites en lien avec la mission Saint-François-de-Sales située le long de ce cours d’eau. Cette première étape servira à enrichir nos connaissances sur l’histoire coloniale de cet espace géographique peu documenté en lien avec la présence des W8banakiak. Plusieurs objectifs sont visés : 1) répertorier les sites archéologiques w8banakiak ; 2) positionner les villages et les campements w8banakiak et les premières habitations coloniales ; 3) documenter la mission jésuite de Saint-François-de-Sales de la rivière Kik8ntekw (1683-1697) ; 4) intégrer les résultats obtenus par les études réalisées en Nouvelle-Angleterre, à Odanak et à Wôlinak afin mieux comprendre l’utilisation, l’évolution et l’usage des voies navigables entre la côte Est, l’Acadie et le fleuve Saint-Laurent ainsi que les échanges entre les différents groupes occupant le territoire.
Suivant cette phase préliminaire, une école de fouilles archéologiques sera mise en place conjointement avec l’Université Laval, permettant ainsi aux membres des communautés de la nation w8banaki intéressés, ainsi qu’aux étudiants du programme d’archéologie de l’Université Laval, de participer à toutes les phases du projet « Kik8ntekw (la rivière Chaudière) : le pays des W8banakiak » : 1) recherche des sources historiques et cartographiques ; 2) montage du projet ; 3) prospections et fouilles archéologiques ; 4) analyses spécialisées et traitement des données ; 5) interprétation et diffusion. Ce projet a aussi pour but de favoriser l’accès, pour les membres des Premières Nations, à des programmes de formation universitaire en archéologie.
L’école de fouilles permettra à de nombreux chercheurs émergents de se familiariser avec la discipline de l’archéologie des Premières Nations, spécialité peu adoptée dans les universités au Québec. De façon générale, nous pensons que les étudiants en archéologie et en anthropologie bénéficieront des connaissances sur le savoir autochtone et sur la façon dont leur territoire est utilisé et pensé. Il nous semble évident que ces connaissances générales sur les peuples autochtones changeront plusieurs interprétations ou stéréotypes véhiculés depuis la mise en place de l’archéologie au Québec, l’un des exemples les plus résistants étant la notion de la présence unique des peuples iroquoiens dans la vallée du Saint-Laurent au Sylvicole et à la période de contact (Snow 1976 ; Trigger et Pendergast 1978 ; Clermont 1980, 1992, 1996 ; Tremblay 2006 ; Saint-Pierre 2016 ; Loewen et Chapdelaine 2016). Nos recherches, notamment le projet Fort Odanak, nous amènent à considérer la vallée du Saint-Laurent comme le centre d’un vaste réseau d’échange d’idées et de biens entre plusieurs nations autochtones. Nous considérons qu’il nous reste beaucoup à apprendre sur l’occupation historique du territoire au Québec, et le savoir autochtone doit faire partie des connaissances générales à transmettre aux étudiants.
D’une part, cette approche permettra des échanges de connaissances entre les étudiants et les membres de la nation et, d’autre part, un accès pour les membres de la nation à la formation sur les méthodes et les outils utilisés en archéologie. Par l’entremise de ce projet, le Bureau du Ndakinna sera appelé à participer tant à des congrès scientifiques qu’à des présentations et à des formations publiques afin de discuter de l’avancée du projet et des résultats obtenus. Ces nouvelles données sur le Ndakinna permettront aussi aux membres de la nation w8banaki intéressés de renouer avec leur patrimoine et de connaître des savoir-faire, des outils et des matériaux aujourd’hui oubliés.
Les bénéfices et les défis de l’archéologie en contexte d’affirmation territoriale
Le Bureau du Ndakinna vise le développement des capacités de gouvernance et d’affirmation territoriale de la nation w8banaki en tant que structure où biologistes, gestionnaires en environnement, historiens, anthropologues, géomaticiens et archéologues s’occupent de documenter et colliger toutes formes de données sur le territoire en collaboration avec les membres de la nation. Dans un monde où les problématiques environnementales et sociales sont de plus en plus complexes, cette structure facilite l’arrimage entre les connaissances w8banakiak et celles émanant d’une approche scientifique. Pour sa part, les résultats archéologiques s’ajoutent à un ensemble de connaissances autochtones et scientifiques et permettent de faire sens du passé tout en collaborant à un projet collectif multidisciplinaire d’affirmation territoriale, comme le relevaient Patricia A. McAnany et Sarah M. Rowe (2015). Cet arrimage et cette complémentarité permettent d’étoffer et de communiquer la compréhension et la vision du Bureau du Ndakinna en ce qui concerne les relations entre les W8banakiak et le territoire. La contribution d’un ou une archéologue est donc indispensable au Bureau du Ndakinna pour développer ses programmes de gestion du territoire, pour entreprendre ses activités de recherche et pour mettre en valeur le patrimoine de la nation w8abanaki.
Appendices
Remerciements
Nous tenons à remercier les membres de la nation w8banaki pour leur participation aux différents projets mis en place depuis 2009. Il faut souligner le soutien permanent de l’équipe du Musée des Abénakis qui a permis la réalisation des recherches archéologiques et la diffusion des résultats à la nation w8banaki et au public. Nos remerciements vont aussi au GCNWA ainsi qu’au Conseil des Abénakis d’Odanak et au Conseil des Abénakis de Wôlinak pour leur appui. Finalement, cet article est dû au travail collaboratif des membres de l’équipe du Bureau du Ndakinna, soit Suzie O’Bomsawin (directrice du Bureau), Hugo Mailhot Couture (adjoint de direction), David Bernard (agent de recherche), Jean- François Provencher (agent de projets), Geneviève Treyvaud (archéologue), Jean-Nicolas Plourde (assistant de recherche) et Marie-Ève Samson (consultante).
Notes biographiques
Geneviève Treyvaud, Ph.D. en archéologie (Université Laval, 2013), est archéologue au Bureau du Ndakinna du Grand Conseil de la Nation Waban-Aki, chercheuse associée au CELAT de l’Université Laval et chercheuse postdoctorale au Centre Eau Terre Environnement de l’Institut national de recherche scientifique (INRS-ETE). Elle s’intéresse particulièrement à la période précoloniale et à la période de contact, ainsi qu’à l’impact de la colonisation européenne sur les savoirs traditionnels et sur les territoires ancestraux des Premières Nations du Sud-Est canadien. Titulaire de diplôme en orfèvrerie (HEAD-Genève), d’un baccalauréat en anthropologie, d’une maîtrise et d’un doctorat en archéologie, elle se spécialise dans les modes d’exploitation et de transformation de la matière première, particulièrement la caractérisation des chaînes opératoires métallurgiques. Elle contribue, entre autres, à la recherche et au développement de l’utilisation de la tomodensitométrie pour l’étude des matériaux anciens.
Suzie O’Bomsawin est une Abénaquise d’Odanak et elle occupe le poste de directrice du Bureau du Ndakinna au Grand Conseil de la Nation Waban-Aki. Elle détient une maîtrise en administration des affaires ainsi qu’un baccalauréat intégré en économie et politique, tous deux de l’Université Laval. Elle est également active au sein de plusieurs organisations et comités de travail, notamment en tant que présidente de la Société historique d’Odanak (Musée des Abénakis), de même que représentante abénaquise au comité jeunesse de Femmes autochtones du Québec, administratrice indépendante à la SEPAQ et secrétaire-trésorière au Lien Maison de la famille de Pierreville.
David Bernard est membre de la communauté w8banaki d’Odanak. Formé en histoire à l’Université de Montréal, il se spécialise dans l’histoire des organisations autochtones du Québec des années 1970. En tant qu’agent de recherche au Bureau du Ndakinna du Grand Conseil de la Nation Waban-Aki, il est chargé d’engager des partenariats de recherche avec les milieux universitaires, d’évaluer les impacts sociaux et patrimoniaux des projets économiques qui s’installent sur le Ndakinna et de développer les protocoles de recherche du Grand Conseil de la Nation Waban-Aki dans une optique de décolonisation de la recherche. Il enseigne aussi l’histoire des premiers peuples à l’Institut Kiuna.
Note
-
[1]
L’ethnonyme « W8banaki » est privilégié à « Abénakis » ou « Abénaquis » à des fins d’autodétermination par le Bureau du Ndakinna et le Grand Conseil de la Nation Waban-Aki afin d’identifier la nation w8banaki et ses membres, les W8banakiak. Pareillement, les principales rivières du territoire w8banaki, le Ndakinna, sont identifiées par leurs toponymes w8banakiak dans le but d’affirmer l’utilisation et l’occupation continue du territoire du Ndakinna par les W8banakiak. Nous retrouvons alors dans le texte les toponymes w8banakiak suivants : Alsig8ntekw (rivière Saint-François), W8linaktekw (rivière Bécancour), Kik8ntekw (rivière Chaudière) et Nebesek (lac Saint-Pierre). Il est à noter que le « 8 » dans la langue w8banaki se prononce comme un « O » nasal.
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