Abstracts
Résumé
Au début des années 2000, des études avaient été conduites en Guyane française par l’Institut de recherche pour le développement pour répertorier les pratiques thérapeutiques traditionnelles contre le paludisme et identifier les plantes utilisées. En janvier 2016, la Fondation France Libertés dénonçait le brevet posé sur une molécule active extraite du Quassia amara au motif que son « exploitation serait caractéristique d’actes de biopiraterie ». Cet article s’attache à la controverse qui s’est développée autour de cette imputation de biopiraterie, controverse qui permet de souligner les enjeux sociaux et politiques de cette mise en accusation portée sur la base des principes qui trouvent leur force dans les institutions internationales (Convention sur la diversité biologique et Protocole de Nagoya). En passant du global au local, on n’a pas seulement changé d’échelle, on a aussi transformé la nature même du débat : cette affaire a mobilisé l’État, les acteurs politiques locaux et les autochtones autour de stratégies qui visent avant tout à accorder ou à refuser une reconnaissance aux groupes amérindiens en tant que collectifs détenteurs d’un savoir.
Mots-clés :
- biopiraterie,
- autochtones,
- Guyane française,
- controverse,
- institutions internationales
Abstract
Since the early years of 2000, studies had been conducted among the population of French Guyana by the Institute of Research (IRD) to identify traditional therapeutic practices against malaria and the plants that are used. In January 2016, the Fondation France Libertés condemned the patent based on an active molecule extracted from Quassia amara on the grounds that its “exploitation would be characteristic of acts of biopiracy”. The article focuses on the controversy that has developed around this accusation of biopiracy. It highlights the social and political stakes of this indictment brought on the basis of principles that derive their strength in international institutions (Convention on Biological Diversity and Nagoya Protocol). By moving from the global to the local, not only is the scale changed, but also the very nature of the debate have been transformed: this affair has mobilized the State, local political actors and Indigenous People around strategies that aim above all to grant or deny recognition to Amerindian groups as collective holders of knowledge.
Keywords:
- biopiracy,
- Indigenous,
- French Guyana,
- controversy,
- international institutions
Resumen
A principios del año 2000, el Instituto de Investigación para el Desarrollo (IRD) había realizado estudios entre la población de Guayana Francesa para compilar las prácticas terapéuticas tradicionales contra la malaria e identificar las plantas utilizadas. En enero de 2016, la Fondation France Libertés denunció la patente de una molécula activa extraída de Quassia amara porque su “explotación sería característica de actos de biopiratería”. Este artículo se centra en la controversia que se ha desarrollado en torno a esta imputación de biopiratería, que pone de relieve los intereses sociales y políticos de esta acusación sobre la base de principios que encuentran su fuerza en las instituciones internacionales (Convenio sobre la Diversidad Biológica y Protocolo de Nagoya). Al pasar de lo global a lo local, no sólo hemos cambiado la escala, sino que también hemos transformado la naturaleza misma del debate: este asunto ha movilizado al Estado, a los actores políticos locales y a los indígenas en torno a estrategias que apuntan sobre todo a conceder o a negar el reconocimiento a los grupos amerindios como colectivos poseedores de conocimientos.
Palabras clave:
- biopiratería,
- indígenas,
- Guayana Francesa,
- controversia,
- instituciones internacionales
Appendices
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