Abstracts
Résumé
L’historiographie classique de l’architecture canadienne – formulée en termes patriotiques comme dans bien des pays – a pris le parti de traiter les styles néo-médiévaux, y compris le gothique victorien et le « style château », comme particulièrement canadiens. Comme cette approche, que l’on retrouve dans les textes de R.H. Hubbard et de Alan Gowans, devint partie intégrante du nationalisme canadien d’après-guerre et coïncida plus ou moins avec la célébration du centenaire de la Confédération en 1967, elle s’inscrivit dans le processus identifié par le critique littéraire Northrop Frye comme un essai de définition du « génie canadien ». Cet article trace l’histoire de ce trope, de cette convention de l’histoire de l’architecture en s’appuyant sur l’exemple des comptes-rendus (y compris le mien) de la construction du Parlement à Ottawa (1859–76). Ainsi encapsulée, l’histoire du projet peut être confrontée à l’historiographie classique en soulevant des questions au sujet de sa genèse et de son style mises en évidence par une réexamination des faits historiques. On mettra l’accent sur la prise de conscience de la Province du Canada dans les années 1850, soulignée par le nom de Nova Britannia proposé par Alexander Morris. On explorera la signification de l’emploi du style néo-gothique « High Victorian » du Parlement par l’architecte Thomas Fuller (1823–98), en tenant compte du fait qu’il connaissait le projet contemporain de constuction des « Public Offices » à Londres; et le Parlement d’Ottawa est comparé au nouveau palais de Westminster et au capitole des Étas-Unis à Washington (considérablement agrandi à cette époque). Après cette étude détaillée, on est amené à se demander si le style du Parlement doit être – ainsi que le suggère le titre de cet article – qualifié de « canadien, canadien-britanique ou anglo-américain » et, implicitement, quel regard poser sur la Province du Canada durant cette période.