Abstracts
Résumé
Cet article examine les liens entre un texte d’histoire de l’art écrit vers la fin du dix-huitième siècle et l’institution dans laquelle et pour laquelle il a été conçu, à savoir l’Université de Göttingen (la « Georgia Augusta ») en Allemagne du Nord. Bien que l’objectif principal de cet essai soit d’analyser un cas précoce (peut-être même le premier cas ?) par le biais duquel l’histoire de l’art devint une discipline académique, nous y abordons plus largement le rôle de la discipline dans la formation de l’érudition universitaire moderne. Nous voulons montrer que la constitution de l’histoire de l’art comme discipline dans cette institution allemande, considérée alors comme la plus moderne de son époque, était étroitement liée à un modèle « progressif » et « scientifique » d’érudition, né de préoccupations théoriques développées par ses historiens de profession, parmi lesquels on retrouve Johann Dominicus Fiorillo, un artiste et un membre du corps professoral. Celui-ci collabora à une série de volumes sur l’histoire des arts et sciences parrainée par l’Université elle-même par la publication entre 1798 et 1808 de cinq volumes de son histoire de l’art. Cette série avait été pensée comme un « monument » approprié pour la fin d’un siecle éclairé et le début d’un siècle nouveau et visait à circonscrire la culture de « notre coin de terre » d’une manière aussi « progressive » et « scientifique » que possible. Notre article s’intéresse surtout aux moyens pris par une histoire de l’art post-winckelmannienne, mais antérieure au milieu du dix-neuvième siècle, visant à intégrer ces analyses de la culture à une époque qui voyait l’épanouissement des sciences humaines, une connaissance croissante des « autres » cultures et une nouvelle conception théorique de l’histoire. Par conséquent, l’histoire de l’art de Fiorillo doit être considérée en termes de la particularité propre du lieu où il l’a écrite, et cela suppose que la constitution d’une histoire de l’art universitaire doit être nécessairement considérée dans la production du savoir culturel de l’Université de Göttingen (et du Siècle des Lumières) sur l’identité humaine et européenne. L’histoire de l’art comme nouvelle discipline dont les objectifs étaient justement d’archiver « notre culture », peut ainsi être reconnue comme une partie prenante du « master narrative » historiciste, dominant dans l’érudition universitaire occidentale et dans la formation de la modernité européenne.
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