Recensions

La mondialisation : une maladie imaginaire de Stéphane Paquin, Montréal, Les Presses de l’Université de Montréal, 2021, 64 p.[Record]

  • Alexandre Veilleux

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La mondialisation, soit l’ensemble des processus technologiques, politiques et économiques, a favorisé l’augmentation des échanges et l’accroissement de l’interdépendance entre les États. Avec le tournant néolibéral des années 1980 et les progrès des nouvelles technologies de l’information dans les années 1990, la mondialisation s’est accélérée à l’aube du XXIe siècle. Avec cette accélération, de plus en plus de critiques se sont fait entendre, poussant de plus en plus d’électeurs vers des partis populistes. Dans le livre La mondialisation : une maladie imaginaire, Stéphane Paquin s’adresse à ces critiques en analysant la façon dont la mondialisation, le libre-échange et l’autonomisation de l’État influent sur les programmes sociaux, l’emploi et la social-démocratie dans les pays développés. En utilisant les statistiques des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), l’auteur soutient qu’on a souvent tendance à amplifier non seulement la portée de la mondialisation, mais également ses effets. Cette déformation de la réalité serait influencée par des biais cognitifs qui influencent notre perception du monde : l’heuristique de disponibilité fait en sorte qu’un événement négatif (par exemple la délocalisation d’une entreprise) soit plus mémorable qu’un événement positif tel que l’augmentation progressive du taux d’emploi, et que plus un élément est mémorable, plus il semblerait probable. L’auteur débute son argument en soutenant que la mondialisation n’a pas une portée aussi importante dans les pays développés qu’il n’y paraît. En utilisant les statistiques disponibles, il démontre qu’une majorité importante des activités se font à l’intérieur des frontières, et non à l’échelle planétaire. Par exemple, 93 % des appels se font toujours à l’intérieur des frontières nationales, 71 % du commerce s’effectue au sein des États, et la production des multinationales à l’extérieur de leur pays d’origine ne dépasse pas 9 %. Paquin part ensuite de la supposition que, comme la portée de la mondialisation est exagérée, ses effets le sont probablement aussi. Il analyse donc ses effets sur 1) l’emploi et les inégalités, 2) l’État-providence et 3) la social-démocratie. L’analyse statistique débute en démontrant qu’il y a eu un taux de chômage beaucoup plus faible en 2019 dans les pays de l’OCDE que dans les dernières décennies, et que le taux d’emploi et la part d’emplois très qualifiés ont augmenté avec l’accélération de la mondialisation. Les pertes d’emplois ont plutôt eu lieu dans les secteurs moins concurrentiels nécessitant des emplois moyennement qualifiés et requérant des tâches répétitives, où les travailleurs peuvent être remplacés plus facilement par des technologies d’autonomisation. Par ailleurs, les technologies n’ont pas nécessairement abouti à une diminution du nombre d’emplois, mais plutôt à une réorganisation des emplois vers les secteurs des services. Paquin conclut ce chapitre en s’attaquant au mythe de l’inégalité, en soutenant que, comme les inégalités ne croissent pas de la même façon dans l’ensemble des pays, la mondialisation n’en serait pas la cause. La cause des inégalités trouverait plutôt sa source dans les réformes fiscales entreprises par Ronald Reagan et Margaret Thatcher, où le pouvoir du capital a commencé à primer davantage sur celui des travailleurs. L’auteur poursuit son analyse en s’attaquant aux critiques de la mondialisation portant sur l’État-providence. Il constate que la mondialisation n’a pas freiné les dépenses publiques. Au contraire, les pays de l’OCDE ont plutôt connu une très forte croissance des dépenses publiques entre 1960 et 2015. Celles-ci sont effectivement passées d’une moyenne de 10 % du produit intérieur brut (PIB) en 1960 pour les États de l’OCDE à 21 % de leur PIB en 2016. De plus, dans les États où le secteur privé contribue financièrement aux dépenses sociales, ces dépenses ont globalement augmenté, infirmant ainsi l’idée que les …