Introduction

Réformes démocratiques et finances publiques : enjeux et défis actuels[Record]

  • Geneviève Tellier

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Il est indéniable que l’analyse des finances publiques a sa raison d’être en science politique. Quand il s’agit de comprendre et d’expliquer comment les ressources de la société sont allouées (qui a quoi) et redistribuées (qui reçoit quoi), on ne peut ignorer la forte présence de l’État : lorsqu’ils prélèvent des impôts et des taxes, lorsqu’ils financent des services publics, lorsqu’ils prêtent ou empruntent des fonds, les gouvernements exercent une influence déterminante sur les choix de société. Toutefois, ces choix ne sont pas nécessairement le reflet de préférences collectives. Il est tout à fait raisonnable de penser que les gouvernements agissent selon leurs propres préférences, leur perception de la réalité, les contraintes auxquelles eux-mêmes font face, les ressources qu’ils possèdent (qui ne se limitent pas qu’aux ressources financières – pensons à leur expertise, leurs réseaux, leurs propres ressources matérielles), etc. Bref, le rôle des gouvernements est complexe, et cette complexité se reflète dans leurs choix budgétaires. En raison du rôle central que joue l’État dans l’allocation et la redistribution des ressources de la société et de la notion de pouvoir qui lui est sous-jacent, l’étude des finances publiques devrait occuper une place importante en science politique. Et pourtant la réalité est tout autre. Seul un petit nombre de politologues canadiens et québécois s’intéressent aux questions budgétaires. Il en résulte donc que ces questions sont peu enseignées dans les programmes de science politique et font l’objet de peu de publications savantes (que ce soit des articles scientifiques ou des monographies) dans les parutions généralistes de la science politique (comme Politique et sociétés ou la Revue canadienne de science politique). Un exemple ? Au cours des vingt dernières années, la revue Politique et sociétés n’a publié que deux articles sur ce sujet. Pourtant les débuts de la revue semblaient prometteurs : dès son troisième numéro, la revue consacrait un numéro spécial à la crise des finances publiques. Par la suite, la publication d’analyses traitant des finances de l’État ne se fera que sporadiquement : il n’y aura plus d’autre numéro spécial dédié à ce thème. Cependant, des articles abordant des questions financières et budgétaires seront publiés de temps à autre. Il faut donc se tourner vers des programmes et des revues ou collections spécialisés pour trouver la majorité des études traitant de questions budgétaires. On retrouve une partie de ces programmes et publications dans les filières de l’administration publique et de l’analyse des politiques publiques. Au Canada, par exemple, l’École de politiques publiques et d’administration (School of Public Policy and Administration) de l’Université Carleton publie chaque année l’ouvrage intitulé How Ottawa Spends, qui examine les récents changements budgétaires du gouvernement fédéral. L’Institut des relations intergouvernementales de l’Université Queens, quant à lui, offre régulièrement des analyses sur le thème du fédéralisme fiscal par le biais de sa publication annuelle Canada : The State of the Federation. Par ailleurs, soulignons aussi l’intérêt des fiscalistes pour l’étude des finances publiques. À ce titre, il convient de mentionner la Fondation canadienne de fiscalités (Canadian Tax Foundation) qui publie des monographies et des articles scientifiques qui débordent le simple cadre de la fiscalité et de la comptabilité et la Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques de l’Université de Sherbrooke qui offre de nombreux rapports sur des thèmes variés (les garderies subventionnées, les budgets de genre, etc.). L’administration publique et l’analyse des politiques publiques sont très certainement des disciplines très proches de la science politique. En fait, plusieurs les considèrent comme étant des champs à part entière de la science politique, au même titre que les relations internationales, la politique canadienne (ou …

Appendices