FR:
Le débat contemporain entourant l’utilisation du sort en politique tend parfois à oublier que celui-ci s’inscrit dans un contexte institutionnel précis. En effet, la discussion tente généralement de révéler une nature immanente au tirage au sort. Parmi les auteurs ayant abordé cette question, deux pôles peuvent être dégagés : ceux qui mettent l’accent sur le caractère neutralisateur du hasard en politique et ceux qui insistent sur sa dimension égalitaire. Or, de telles positions obscurcissent le fait que c’est en fonction de certains arrangements institutionnels spécifiques que les potentiels neutralisateurs ou égalitaires du tirage au sort sont mis de l’avant. Adoptant à la fois une perspective philosophique, historique et sociologique, cet article analyse le tirage au sort en politique selon l’angle de son essence et de ses effets. Un survol de différentes expériences historiques aide à illustrer le fait que le potentiel du tirage au sort en politique dépend principalement de la pratique politique dans laquelle il s’inscrit. Par la suite, une comparaison de l’élection et du tirage permet de démontrer le caractère problématique de l’idée d’une essence de ces processus et de démontrer l’importance d’une réflexion en termes de potentialité et non de nature.
EN:
The contemporary debate surrounding the use of sortition (political lotteries) sometimes tends to forget that it takes place in a specific institutional context. Indeed, the discussion usually tries to reveal an immanent nature in the draw. Among the authors who have addressed this issue, two poles can be identified: those who focus on the neutralizing nature of luck in politics and those who insist on its equalizing dimension. Both positions obscure the fact that the neutralizing or egalitarian outcomes of sortition depend on specific institutional arrangements. Adopting a philosophical, historical and sociological perspective, this article analyzes lotteries in politics focusing on both its essence and effects. An overview of different historical experiences helps to illustrate that the potential of sortition depends mainly on the political practice in which it operates. Subsequently, a comparison of the election and the draw is used to demonstrate the problematic nature of the idea of the essence of these processes and to demonstrate the importance of thinking in terms of potentiality and not of nature.