Recensions

Les Autochtones et le Québec. Des premiers contacts au Plan Nord, sous la dir. d’Alain Beaulieu, Stéphan Gervais et Martin Papillon, Québec, Presses de l’Université de Montréal, coll. « PUM », 2013, 407 p.[Record]

  • Joëlle Alice Michaud-Ouellet

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  • Joëlle Alice Michaud-Ouellet
    Candidate au doctorat, Département de science politique, Université de Victoria
    jamo@uvic.ca

Alors que les relations entre Autochtones, Québécois et territoire font depuis longtemps l’objet de recherches dans le restreint des cercles universitaires et, même sans en être une préoccupation de premier ordre, se trouvent portées à l’attention des gouvernements dès lors que ceux-ci se soucient de la légitimité (légale plutôt que politique) de différents projets de développement économique et social, force est de constater que le public québécois en est peu informé. C’est dire que Les Autochtones et le Québec. Des premiers contacts au Plan Nord, sous la direction d’Alain Beaulieu, Stéphan Gervais et Martin Papillon, est un ouvrage important, en ce sens qu’il prend la forme d’un tour d’horizon des multiples enjeux, historiques et contemporains, qui touchent les relations entre ces peuples. Le large spectre interdisciplinaire représenté dans ce collectif, de même qu’une volonté d’accessibilité explicite chez tous les auteurs, en font un bon ouvrage de référence pour l’enseignement aux étudiants de niveau collégial ou du premier cycle universitaire dans les domaines des sciences sociales et humaines et pour quiconque s’intéresse aux relations entre Autochtones et allochtones au Québec. Ghislain Picard, chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, signe la préface du collectif qui s’articule autour du thème de la rencontre et qui se divise en trois sections : les rencontres historiques ; les rencontres culturelles, sociales et économiques ; et les rencontres politiques et juridiques. Il rappelle au lecteur l’importance de renouveler une relation de nation-à-nation, une position qui procède de la souveraineté autochtone préexistante au contact avec les Européens et jamais abdiquée. Le rappel n’est pas sans importance. À l’encontre des récits historiques dominants et à sens unique célébrant les origines de la nation québécoise, la première partie de l’ouvrage rend compte d’une réalité géopolitique et interculturelle complexe et changeante qui, dans un premier temps, obligea à la création d’alliances et à la médiation. Ainsi, différentes méthodologies sont mises à contribution afin d’enrichir et de nuancer notre conception des relations historiques entre ces peuples. Roland Tremblay fait d’entrée de jeu l’analyse de preuves archéologiques d’un vaste réseau d’échange « d’objets et d’idées » (p. 43), d’abord entre les diverses nations autochtones, puis entre elles et les explorateurs européens, alors que Peter Cook fait la lecture « à contre-courant » (p. 56) des sources documentaires européennes datant du début du seizième siècle jusqu’aux années 1630. Les contributions de Sylvie Vincent et Jonathan Lainey nous initient à la richesse des traditions autochtones de transmission des savoirs (un récit de type historique issu de la tradition orale pour Vincent et le Two-Dog Wampum pour Lainey) et font l’étude de leurs correspondances et différences avec les versions écrites d’origine européenne. Dans les deux cas, la comparaison a le mérite de donner voix à la version autochtone de l’histoire, de révéler des rapports de pouvoirs changeants et le subséquent affaiblissement des alliances au profit des Européens. Cette première partie raconte aussi les effets de la perte d’influence politique, des épidémies et de la perte de contrôle sur le territoire des Autochtones, autrement dit de la détérioration généralisée de leurs conditions de vie due à la présence des Européens, jusqu’à faire d’eux des pupilles de l’État. En ce sens, Toby Morantz se penche sur le cas précis de la région du Nord québécois. Maxime Gohier fait le récit des différents développements juridico-politiques marquant le passage de politiques élaborées à partir de Paris et de Londres, au colonialisme interne et à la Loi sur les Indiens de 1876. Alors que, selon Alain Beaulieu, c’est cette perte de contrôle et d’influence qui explique la création des réserves – politique de « …