L’introduction, intitulée « Cultures nationales, démocratie et légitimité », fait un tour d’horizon du nationalisme en s’intéressant particulièrement aux cas québécois et catalan. Le nationalisme est confronté aux traditions jacobine et d’inspiration girondine, sans oublier un résumé des travaux d’Anthony Smith. L’auteur y énonce son argument central et met en garde les nations majoritaires qui seraient tentées d’ignorer ou d’endiguer leurs nations minoritaires : Le chapitre un, intitulé « La diversité linguistique en contexte pluraliste », présente les politiques linguistiques canadiennes telle une dynamique tension/attraction entre le gouvernement fédéral et le gouvernement québécois. Les principales statistiques sur la connaissance des langues officielles des Canadiens y sont présentées de manière synthétique, de même que la distinction entre régime territorial et régime individualiste. Puis, la protection linguistique offerte par le fédéralisme ainsi que l’habilitation de la langue sont discutées pour les cas du Nouveau-Brunswick, du Nunavut et de la Catalogne. Le chapitre deux, portant sur les « Nouveaux enjeux pour les États plurinationaux : la mondialisation et les régimes de citoyenneté », s’inspire de la Convention de Cotonou (2000), de la construction européenne et du Québec pour identifier les dangers de la mondialisation, tant pour les langues nationales (dont le français) que pour l’égalité en société. Le chapitre trois, titré « Les éléments d’un régime de citoyenneté au Québec : constitution informelle et citoyenneté active », promeut la consolidation de l’interculturalisme québécois (centré autour du fait français) au sein d’un « véritable fédéralisme multinational » (p. 73). Une présentation instructive du concept britannique d’abeyance (p. 79) étaie la discussion qui suit sur l’interculturalisme québécois en parallèle au multiculturalisme canadien. Dans la conclusion, Gagnon hésite entre « la prédominance, au Québec, de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne sur la Charte canadienne des droits et libertés » et une constitution informelle pour le Québec prônant « le potentiel du principe fédéral d’autonomie et de non-subordination des pouvoirs » du fédéral sur les provinces (p. 88). Le chapitre quatre, pour sa part, intitulé « Le moment autonomiste : de l’endiguement à l’habilitation », s’avère un texte magistral et concis sur le fédéralisme canadien. Il s’intéresse à la prépondérance du gouvernement fédéral au Canada, puis aux stratégies de contentement et d’endiguement que pourrait adopter celui-ci. Un examen des rapports Québec-Canada depuis les années 1970 illustre la stratégie d’endiguement choisie par le gouvernement fédéral à l’égard du Québec. Le chapitre entier se trouve sous le chapeau des concepts de liberté négative (freedom from) et de liberté positive (freedom to) décrites par Isaiah Berlin (p. 92) : les affronts à ces libertés enfreignent la reconnaissance et l’habilitation des nations minoritaires. Le chapitre cinq, « Conjuguer communauté, autonomie et habilitation », se penche quant à lui sur trois dimensions du fédéralisme multinational. Il argue que « [le] fédéralisme permet de concevoir une souveraineté partagée entre deux ordres de gouvernement et sans qu’une hiérarchie ne soit imposée d’autorité » (p. 131). Ce n’est pas le cas au Canada, mais, oui, le fédéralisme peut offrir une politique d’habilitation à l’égard des nations minoritaires, c’est-à-dire qu’il peut permettre à celles-ci « de se doter des outils nécessaires pour leur plein épanouissement communautaire » (p. 139). Enfin, l’auteur se désole que les organisations internationales paraissent moins ouvertes aux revendications d’autonomie, voire d’indépendance, gouvernementale depuis la dernière décennie (le cas du Kosovo faisant exception). Le chapitre six, « Repenser les voies de la réconciliation intercommunautaire », revisite le concept du « pactisme » et le lie à « une culture fédérale authentique » (p. 159). Ces deux éléments se rejoignent sous le « fédéralisme …
L’âge des incertitudes. Essais sur le fédéralisme et la diversité nationale, d’Alain-G. Gagnon, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2011, 210 p.[Record]
…more information
Alexandre Couture Gagnon
École nationale d’administration publique
alexandre.couture-gagnon@enap.ca