FR:
Le plus souvent étudiée dans le contexte des évolutions du politique et du passage présumé d’une démocratie représentative vers une démocratie davantage participative ou délibérative, la question de la participation est abordée ici sous l’angle d’une transformation de nos coordonnées anthropologiques. Les exigences et les attentes de participation se retrouvent en effet dans de multiples domaines qui excèdent de loin la seule sphère du politique, allant du monde de l’entreprise et de ses cercles de qualité jusqu’à la production de biens en kit sollicitant les capacités de montage des acheteurs. Cette extension du domaine de la participation s’appuie en réalité sur un certain nombre de présupposés anthropologiques. Ceux-ci prêtent aux acteurs des capacités et des compétences qu’ils sont censés détenir, à moins qu’ils ne soient appelés à les enrichir par des stratégies d’empowerment si elles leur font défaut ou sont insuffisantes. Ils leur attribuent aussi un potentiel de motivation indispensable à l’actualisation de ces compétences et capacités. Le texte soutient que l’évaluation des personnes ainsi que la configuration de nombreux dispositifs sociaux récents tendent de plus en plus à s’ajuster à ce nouveau référentiel anthropologique. Il en va ainsi de la participation politique bien sûr, mais aussi des nouvelles politiques sociales, des formations au « pouvoir d’agir », des objectifs éducatifs, des politiques de développement ou de santé. Revenant plus spécifiquement sur la question de la participation politique, le texte montre comment ces nouvelles coordonnées anthropologiques reconfigurent la question de l’expertise en réorganisant les partages entre expertises ordinaire et spécialisée et, du coup, le partage entre les espaces où peut prendre place une démocratie participative et ceux qui demeurent confiés à l’expertise technocratique.
EN:
Often studied in the context of political developments and the shift from an alleged representative democracy to a participatory democracy, the issue of participation is discussed here in terms of anthropological change. Requirements and expectations of participation are found in many areas that exceed the political sphere, from the business world and its quality circles to the production of self-assembly goods involving the buyer’s experience. This extension of the field of participation is based on a number of anthropological presuppositions, which are supposed to give empowerment to actors and update their skills and abilities. This paper argues that the configuration of many recent social arrangements tends increasingly to adjust to this new anthropological paradigm. This is the case for political participation, but also for new social policies, empowerment training, educational objectives, development and health policies. Returning more specifically on the issue of political participation, the paper shows how this new anthropological paradigm reconfigures the issue of expertise and, hence the balance between spaces where participatory democracy can take place and those that remain under technocratic expertise.