Abstracts
Résumé
L’information dans le domaine phytosanitaire a préoccupé plusieurs précurseurs, et ce, bien avant la fondation de la Société de protection des plantes du Québec (SPPQ) en 1908. Cependant, dès le début du XXe siècle, le ministère de l’Agriculture du Québec s’est engagé dans cette voie avec la mise en place du Bureau de l’entomologie et du Bureau de la protection des plantes qui publient des guides de protection des différentes cultures. Dès 1934, des cartes-avis postées aux producteurs agricoles donnaient déjà des informations sur les ennemis des cultures et les interventions recommandées en cours de saison. Ce service fit place, en 1975, au Réseau d’avertissements phytosanitaires du Québec (RAP) dont les objectifs visaient à informer les producteurs et les vulgarisateurs agricoles sur l’évolution des ennemis des cultures, à indiquer le moment propice des interventions phytosanitaires et à orienter la recherche afin de répondre aux problèmes les plus urgents. Toujours sous la responsabilité du MAPAQ, le RAP couvre maintenant 13 groupes de cultures et rejoint les producteurs et les conseillers agricoles, les clubs d’encadrement technique et plusieurs autres intervenants. Il est un partenaire majeur de la Stratégie phytosanitaire du MAPAQ. Beaucoup d’outils technologiques ont permis d’informatiser ce réseau afin de répondre aux besoins de ce secteur.
Abstract
Well before the Québec Society for the Protection of Plants (QSPP) was founded in 1908, the dissemination of phytosanitary information was already a concern for many of our forerunners. However, at the beginning of the 20th century, the Quebec Department of Agriculture got involved with the creation of the Entomological Office (Bureau de l’entomologie) and the Plant Protection Office (Bureau de la protection des plantes), which published guides for the protection of different crops. In 1934, notification postcards were sent to agricultural producers to provide information on crop pests and recommend treatments during the season. These offices were replaced, in 1975, by the Quebec Plant Protection Warning Network, whose objectives were to provide information to agricultural producers and extension officers on the evolution of crop pests, indicate what period was the most appropriate to conduct phytosanitary treatments, and steer research in order to address the most pressing issues. The Quebec Plant Protection Warning Network, which is still under the responsibility of the MAPAQ, now covers 13 crop groups and communicates with agricultural producers and advisors, technical support groups, and several other stakeholders. It is a major partner in the MAPAQ’s phytosanitary strategy. Several technological tools have made it possible to computerize the network in order to meet the needs of this sector.
Article body
LES PRÉCURSEURS (AVANT 1884)
L’Église catholique romaine (relations, prédications)
En juillet 1743, alors que les chenilles ravagent les champs, « monseigneur Pontbriand fait réciter tous les soirs dans la cathédrale les litanies des Saints et on procède à la bénédiction du Saint-Sacrement pour éloigner le fléau ».
Fondation de la Société d’agriculture du Québec (1789)
Le mandat de la Société d’agriculture du Québec, première du genre au Canada, consistait à l’origine à identifier « les moyens de prévenir ce qui occasionne le blé noir ainsi que l’avoine noire » et à recommander « les meilleures méthodes de préparer la semence afin d’en faire l’expérience dans le cours de la saison suivante dans toute la province ».
Abbé Léon Provancher (1820-1892)
Essais sur les insectes et les maladies qui affectent le blé (1857) : « Premier écrit original publié au Canada français sur l’entomologie appliquée » (Georges Maheux).
Le verger canadien et le potager canadien (1862).
Fondation de la revue Le Naturaliste canadien (1868), comprenant de nombreuses notes sur les ravageurs et les méthodes de lutte disponibles.
En plus de ses écrits, l’abbé Provancher presse le gouvernement d’organiser la défense des cultures et prêche aux cultivateurs la nécessité de lutter contre les ravageurs.
Autres publications significatives de cette période
Notes on Insects Injuring Crops in the Vicinity of Montreal (W.S.M. D’Urban, 1857)
La mouche ou la chrysomèle des patates (Chrysomela decemlineata) et le moyen d’en combattre les ravages (J.-C. Taché, 1877)
ORGANISATION DE LA RECHERCHE ET DE L’INFORMATION (1884-1975)
Quelques événements marquants
Fondation de la filiale de Montréal de la Société entomologique de l’Ontario (ESO) (1873), transformée en Société d’entomologie du Québec (SEQ) en 1951
James Fletcher, premier entomologiste du Dominion (1884)
Création de la Société de pomologie et de la culture des fruits de la province de Québec (1894)
Mise en place des services centraux et des premières stations de recherche fédérales (vers 1900)
Fondation du Collège Macdonald (1907)
Fondation de la SPPQ (1908)
Embauche de cinq agronomes de comtés par le ministère de l’Agriculture du Québec (1913) : ces agronomes sont à l’origine des Bureaux de renseignements agricoles
Création du Comité de protection des légumes (1945)
Évolution du service de protection des plantes au ministère de l’Agriculture du Québec de 1914 à 1975
1914 : Chanoine V.A. Huard, premier entomologiste provincial
1916 : Bureau de l’entomologie, service de l’horticulture
1929 : Bureau de la protection des plantes, service de l’horticulture
1937 : Service de la protection des plantes
1940 : Division de la protection des plantes, service de l’horticulture
1943 : Service de l’information et de la recherche
1964 : Service de la recherche et division de la défense des cultures
1974 : Service de recherche en défense des cultures
Les publications et services du ministère de l’Agriculture du Québec
Guides de protection des cultures (pommier, légumes, céréales…) (1929-1969). Publiés en collaboration avec les comités provinciaux de protection des cultures, ces guides vont par la suite être pris en charge par le Conseil des productions végétales du Québec (CPVQ) à partir de 1970, puis par le Centre de référence en agriculture et agroalimentaire du Québec (CRAAQ) à partir de 2000.
Calendriers d’arrosage des vergers (1925-1928-1938…) et calendrier de protection des cultures maraîchères (1929) (Fig. 1). Ces calendriers sont publiés en collaboration avec la Société de pomologie. Dès 1948, on indique aux producteurs la façon d’utiliser la table de Mills pour évaluer les risques d’infection par la tavelure et ainsi mieux ajuster leurs applications de fongicide.
Cartes-avis (1934-1974). Précurseurs des avertissements phytosanitaires, ces cartes postées aux producteurs donnaient des informations sur les ennemis à surveiller et les interventions recommandées en cours de saison (Fig. 2). Elles couvraient plusieurs cultures (pomme, petits fruits, légumes, pomme de terre…) et l’information était régionalisée (ouest, centre et est du Québec). En 1938, le ministère a expédié 44 cartes pour un total de 46 000 copies.
Autres activités d’information (nombre) réalisées de 1916 à 1936. Lettres et bulletins circulaires (427); articles dans les périodiques et journaux (870); conférences aux producteurs (1376); émissions radiophoniques (48); démonstrations en champ (1819); inspections (63 683).
LE RÉSEAU D’AVERTISSEMENTS PHYTOSANITAIRES DU QUÉBEC (DEPUIS 1975)
Ses objectifs
À l’origine, les objectifs poursuivis par le Réseau d’avertissements phytosanitaires (RAP) étaient : i) d’informer les producteurs agricoles de l’évolution des ennemis des cultures; ii) d’indiquer aux producteurs le moment opportun de réaliser une intervention phytosanitaire; iii) d’orienter la recherche afin de répondre aux problèmes les plus urgents en matière de protection des cultures; et iv) de parvenir à pratiquer une véritable « lutte intégrée » contre les ennemis des plantes cultivées (Fig. 3).
Aujourd’hui, le RAP a pour mission d’informer les producteurs et autres intervenants de l’agroalimentaire québécois sur i) la présence et l’évolution des ennemis des cultures dans leur région; et ii) les stratégies d’intervention les plus appropriées dans un contexte de gestion intégrée des cultures et de développement durable.
Un organisme bien ancré dans le milieu
Le RAP est sous la responsabilité de la Direction de l’innovation scientifique et technique du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) qui en assume également les tâches de secrétariat.
Chacun des 13 groupes de cultures couverts par le RAP est sous la responsabilité d’un avertisseur auquel est rattaché un groupe de travail en protection des cultures.
Le RAP maintient des liens privilégiés avec un grand nombre de partenaires hautement qualifiés, dont le Laboratoire de diagnostic en phytoprotection du Québec (MAPAQ); les conseillers et conseillères agricoles du MAPAQ, des clubs d’encadrement technique et des clubs-conseils en agroenvironnement; les chercheurs d’Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC), des universités, du Centre de recherche sur les grains inc. (CÉROM) et de l’Institut de recherche et de développement en agroenvironnement (IRDA); le CRAAQ et l’industrie privée, pour un total de plus de 150 collaborateurs répartis sur tout le territoire québécois.
Le RAP est un partenaire majeur de la Stratégie phytosanitaire du MAPAQ.
Des communiqués à la fine pointe de l’information
Nombre de communiqués (avertissements, bulletins) publiés en 2008 : 227 avertissements phytosanitaires et 89 bulletins d’information, pour un total de 316 communiqués (Fig. 4).
Cultures couvertes (13) actuellement : arbres de Noël, cultures en serres, grandes cultures, légumes (carotte-céleri-laitue-oignon, crucifères, cucurbitacées, maïs sucré, solanacées), pépinières ornementales, petits fruits, pomme de terre, pommier, vigne.
L’information est actualisée et régionalisée grâce à l’utilisation d’outils de surveillance pour optimiser le suivi au champ, à l’appui de programmes de prévision des ennemis des cultures (gérés en collaboration avec le Centre de recherche et de développement en horticulture d’AAC, Saint-Jean-sur-Richelieu) et à l’intégration des derniers développements scientifiques et technologiques.
Évolution des moyens de diffusion
À l’origine, l’information était diffusée par la poste, par le journal La Terre de chez nous (grandes cultures) et par les répondeurs téléphoniques (pommier).
En cours de route, d’autres moyens ont été utilisés pour accélérer le transfert de l’information, soit le télex (conseillers agricoles), la radio (D’un soleil à l’autre, magazine radiophonique à Radio-Canada), Radiométéo Canada, etc.
Aujourd’hui, 99 % des abonnés reçoivent l’information par courriel, 0,5 % par télécopieur et 0,5 % par la poste. L’information est également accessible sans abonnement par les sites Internet spécialisés d’Agri-Réseau.
Autres implications du RAP
Développement d’outils de surveillance phytosanitaire et de prévision
Atlas des ennemis des cultures (années 1970 et 1980)
Manuels de l’observateur
Journées d’information sur les nouveaux produits antiparasitaires (en collaboration avec le CRAAQ)
Journées d’information à l’intention des groupes de travail en protection des cultures
AUTRES SOURCES D’INFORMATION EN PHYTOPROTECTION
MAPAQ
Laboratoire de diagnostic en phytoprotection du Québec (mis en place en 1986) : feuillets d’information et banques d’images sur les insectes, les maladies et les mauvaises herbes; IRIIS Phytoprotection, une banque d’imagerie scientifique et technique en phytoprotection.
Outils d’aide à la décision en malherbologie : ARICO (Centre d’expertise sur les mauvaises herbes et dans le développement de logiciels en protection des cultures) et L’Herbier virtuel.
IRPeQ : indicateur de risque des pesticides, comprenant un volet santé (IRPeQ-santé) et un volet environnement (IRPeQ-environnement).
SAgE Pesticides : outil d’information sur les risques pour la santé et l’environnement ainsi que sur les usages agricoles pour une gestion rationnelle et sécuritaire des pesticides au Québec.
Stratégie phytosanitaire (mise en place en 1992) : publications, cours, parcelles de démonstration, etc.
Centres de services agricoles.
Centre de référence en agriculture et agroalimentaire du Québec (CRAAQ)
Agri-Réseau : la porte d’accès au savoir et à l’expertise du réseau agricole et agroalimentaire québécois.
Guides de protection, répertoires de pesticides, affiches de traitements antiparasitaires.
Colloques, symposiums, visites de parcelles expérimentales.
Répertoire d’experts et répertoire de services-conseils.
Calendrier des événements.
Clubs d’encadrement technique (CET) et clubs-conseils en agroenvironnement (CCAE)
Les premiers CET ont été mis en place en 1981 (PRISME) et les premiers CCAE en 1997.
Ces organismes visent entre autres à accompagner individuellement les producteurs agricoles dans l’amélioration de leurs pratiques phytosanitaires.
Au 31 mars 2006, 8 368 exploitations agricoles étaient membres actifs de 83 CCAE et près de 300 conseillers les accompagnaient dans leur démarche agroenvironnementale.
Autres sources
Centres régionaux de services-conseils.
Gouvernement fédéral : Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA), Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA), centres de recherche, etc.
Organisations professionnelles : l’Union des producteurs agricoles (UPA) et ses fédérations spécialisées, Conseil québécois de l’horticulture, Association des jardiniers maraîchers du Québec, Cranberry Institute, Association des producteurs d’arbres de Noël du Québec, etc.
Industrie privée : CropLife Canada, coopératives agricoles, etc.
Appendices
Notes biographiques
Michel Letendre
Coordonnateur du Réseau d’avertissements phytosanitaires de 1987 à 1998 et président de la SPPQ en 1988-1989.
Gilles Émond
Fondateur et responsable du Réseau d’avertissements phytosanitaires de 1975 à 1986, membre de la SPPQ depuis 1958 et président de la SPPQ en 1973-1974, rédacteur en chef de Phytoprotection de 1995 à 2005, président du Comité permanent de nomenclature française des maladies des plantes au Canada de 1990 à 2005.