Je remercie les organisateurs de m’avoir donné l’occasion de prendre connaissance de ce dossier : sa lecture m’a permis de remettre sur le métier des questions qui travaillent ma propre activité de recherche dans le cadre des travaux conduits par l’équipe ERGAPE (Ergonomie de l’Activité des Professionnels de l’Education). Le choix de me confier cette tâche est-il judicieux alors que dans mes travaux je n’ai pas été amené à distinguer situation professionnelle et situation de travail, occupé par l’analyse de situations concrètes d’un travail réalisé par des professionnels. Mais je n’ai jamais douté que des non professionnels, des « femmes au foyer » ou des bénévoles par exemple, travaillaient. Donc, c’est l’analyse des situations concrètes de travail des professionnels de l’éducation qui orientera les propos que j’organiserai en trois points, en prenant l’option de ne pas rendre compte de chacun des textes dans le détail. C’est par des considérations générales et la présentation de quelques repères dans le domaine del’ergonomie de l’activité des professionnels de l’éducation que j’essaierai de poser le cadre de la discussion. L’intérêt des travaux en sciences de l’éducation pour les situations professionnelles va grandissant et n’est pas forcément nouveau. En cela il n’y a rien d’étonnant à ce que le premier numéro de Phronesis ouvre sur un dossier qui réactive un débat sur les cadres et les objets de recherche constitutifs des sciences de l’éducation. Dans cette perspective, la lecture de ce dossier m’en a rappelé d’autres, à propos des rapports entre la demande sociale et les recherches en sciences de l’éducation, dans lesquelles nos prédécesseurs nous alertaient déjà sur la question des rapports entre les changements de prescriptions et la définition de nouveaux objets d’étude. Certains d’entre eux se présentaient sous forme de théorie alors qu’ils étaient à la remorque des prescriptions. En clair, est-ce l’évolution des politiques scolaires et de formation en matière de professionnalisation, de formation tout au long de le vie, d’obligation de résultats, etc. qui orientent « naturellement » des travaux actuels vers les situations professionnelles, ou est-ce des questions scientifiques? Quels sont les enjeux sur le plan scientifique : élargir aux dimensions professionnelles des situations « classiques » (situations d’enseignement-apprentissage, de conseil, de formation, etc.) ? élargir des problématiques en sciences de l’éducation ? mettre à l’épreuve de ces situations « devenues » professionnelles des connaissances produites jusqu’ici sur les processus d’éducation et de formation? La lecture de ce dossier montre que chaque texte porte ces éléments de débat et l’enjeu social et scientifique qui le sous tend. Ensuite, l’autre intérêt est de savoir comment les sciences de l’éducation vont dialoguer avec les disciplines qui ont déjà produit des connaissances sur les situations professionnelles (notamment les sciences du travail). En quoi ce dialogue re questionnerait-il les objets « traditionnels » des sciences de l’éducation ou leurs problématiques ? A n’en pas douter la situation professionnelle peut constituer l’objet central de ce dialogue. A cet égard, la didactique professionnelle nous fournit un bon exemple de dialogue fructueux entre la didactique et l’ergonomie cognitive. L’ergonomie de l’activité des professionnels de l’éducation, moins connue, représente, pour notre équipe du moins, un autre angle d’attaque possible. C’est avec cette paire de lunettes que j’ai effectué la lecture des textes, renforcé en cela par le fait que la plupart d’entre eux renvoient à des travaux d’ergonomie ou de psychologie du travail. Pour participer au débat ouvert par ce dossier Je souhaiterais brièvement rappeler quelques présupposés épistémologiques et théoriques qui fondent l’approche ergonomique. Celle-ci fait la part belle, dans l’analyse des situations de travail des professionnels de l’éducation, à des objets encore trop négligés, à mes …
Appendices
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