Comptes rendus

Récanati, François, Philosophie du langage (et de l’esprit), Gallimard, Folio essais, 2008, 268 p.[Record]

  • Richard Vallée

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  • Richard Vallée
    Université de Moncton, Campus de Shippagan

Dans une longue préface, l’auteur explicite le contexte qui a présidé à la rédaction du livre. Récanati est un des philosophes français les plus respectés actuellement. On lui reproche, en France, d’être peu présent sur la scène nationale. Il est en effet difficile d’être à la fois très actif sur la scène internationale et très présent sur la scène nationale. On a cependant tort de lui proposer un faux dilemme entre ces deux scènes. Ce livre est une version remaniée d’un cours donné à Harvard. Ses onze chapitres en font un texte de base idéal pour un cours intermédiaire de philosophie du langage. Le livre comprend quatre sections. Une première, intitulée Sémantique et référence, est divisée en trois chapitres. Une seconde, Sémantique et emploi, et une troisième, Sémantique et représentation mentale, contiennent chacune deux chapitres. Une dernière section, Le langage, la pensée et le monde, est divisée en quatre chapitres. Chaque chapitre est court et concis, et ne s’éloigne jamais du sujet. Il n’y a ni digression ni rhétorique. Le livre contient aussi un très riche et très utile glossaire en appendice. L’auteur défend une sémantique référentielle. Une telle sémantique donne la signification des termes en se basant sur la relation que ceux-ci entretiennent avec le monde. Récanati montre clairement que la signification d’un terme ne peut être donnée en disant que c’est une idée dans l’esprit. On ne fait alors qu’associer une représentation linguistique à une représentation mentale, et l’on devrait expliciter ce qui relie la représentation mentale et le monde. La sémantique ne peut non plus être faite en disant que la signification est l’usage ou l’emploi de certains termes, comme le préconisent certains. On néglige alors les contenus des phrases et, ajouterais-je, la richesse de la syntaxe. La sémantique référentielle fournit cependant un tremplin pour examiner tant l’esprit que l’usage. Dans le premier chapitre, R. présente et explique les notions importantes que l’on retrouve chez Frege — sens et référence —, et Carnap — intension et extension — de même que la distinction entre terme sujet et terme prédicat, et la différence entre le « est » de l’identité et celui de la prédication. Dans le second chapitre, il présente le modèle sémantique de Kaplan, où sont distingués le caractère, le contenu et l’extension, qui permet de traiter les indexicaux, les noms propres, les descriptions définies et les prédicats, de même que la différence entre détermination du contenu et évaluation de la valeur de vérité du contenu. Certaines expressions, les indexicaux, ont un caractère (ou signification linguistique) qui introduit un objet (ou extension) dans le contenu en exploitant l’énonciation ou l’occurrence, objet qui est alors fixé dans un contexte, mais qui demeure le même dans différentes situations. D’autres expressions, les descriptions définies ou les prédicats, ne mettent pas à profit l’énonciation ou l’occurrence, et introduisent des propriétés dans le contenu. Ces propriétés sont possédées par différents objets selon les situations et font donc que l’extension va varier selon les situations. Le contenu d’une phrase indexicale contient un objet ; le contenu d’une phrase non indexicale contient des propriétés. Ce qui satisfait ces propriétés varie selon les situations mais pas selon les contextes, et donc l’objet désigné par une description définie varie selon les situations. C’est ce qui explique que ce que désigne une énonciation de « Je » dans un contexte varie selon le locuteur mais pas selon les situations, alors que ce que désigne « Le Premier ministre du Canada » ne varie pas selon le locuteur, mais peut varier selon les situations. Les noms propres sont aussi discutés dans ce chapitre. On …