Comptes rendus

Peirce, Charles Sanders, Ecrits logiques, Tiercelin Claudine et Thibaud Pierre (dir.), Oeuvres III, Paris, Cerf, 2006, 395 pages[Record]

  • Olivier Perru

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  • Olivier Perru
    Université de Lyon

Ce volume est le troisième de l’édition française des oeuvres de Charles Sanders Peirce (1839-1914). Initiée en 2002, cette édition comprendra dix volumes, chaque volume regroupant des traductions d’articles de l’auteur autour des axes principaux de son oeuvre. C’est ainsi que ce projet met en valeur les travaux de Peirce autour du pragmatisme (I et II), de la logique et de ses rapports avec les mathématiques et la philosophie (III, IV et V), de la sémiotique (VI), de la philosophie de l’esprit (VII), de l’épistémologie (VIII et IX) et de la métaphysique (X). L’oeuvre de Peirce est particulièrement difficile; les écrits logiques dont il est question ici, pour méconnus qu’ils soient en France, n’en constituent pas moins un point de passage obligé dans l’entreprise d’édification de la logique formelle aux xixe et xxe siècles. Le propos de Peirce était triple : revisiter la syllogistique aristotélicienne à la lumière d’une formalisation plus mathématique, expliciter et interpréter l’oeuvre de Boole et son utilité dans la formalisation du discours, proposer un formalisme logique des prédicats et des relatifs, pouvant donner lieu à l’invention de formes graphiques; l’invention des graphes existentiels est une innovation de Peirce qui exprime des modes de combinaison des idées autour des propriétés d’objets individuels. Indépendante de la logique péano-russellienne, l’oeuvre logique de Peirce a pourtant apporté de nombreux éléments pour constituer la logique standard contemporaine, et elle est à bien des égards plus complexe; elle passe en revue les grands problèmes de formalisation, classes, relations, prédicats, elle assume d’ailleurs les prédicats dans des formes relationnelles assez complexes et introduit la trivalence des propositions. Toutefois, cette logique de Peirce suppose un développement mathématique ardu, en particulier autour de l’algèbre booléenne, et son usage, dans la notation et l’interprétation du discours, s’avère difficile. Dans le développement qui suit, nous signalons et discutons brièvement quelques points essentiels de cette traduction française des articles logiques de Peirce, points qui montrent le caractère innovant et spécifique de cette oeuvre : transformation et renouvellement de la syllogistique, relecture et interprétation de l’oeuvre de Boole, établissement d’une algèbre de la logique, réflexion sur le signe (relation ternaire signe - objet - esprit), et enfin, essai de logique symbolique par l’invention de formes graphiques de la logique. Peirce examine les syllogismes en s’attachant d’abord aux réductions à la première figure. La présentation adoptée souligne que les divers syllogismes de chaque figure sont des variations de la même inférence, en qualité (affirmation - négation) et en quantité (singulier, particulier - universel), tout en étant réductible à la première figure. Une originalité de Peirce consiste à y introduire un raisonnement probabiliste. Pour le syllogisme de la première figure, on obtient : Cette inférence introduit un caractère probabiliste dans le syllogisme classique en Barbara, Tout M est Π, Tout S est M, donc Tout S est Π. En fait, Peirce introduit une hypothèse probabiliste sur la majeure, puisqu’il ne s’agit pas de « tout M » mais d’une certaine proportion de M, laquelle proportion est supposée se retrouver dans le tirage aléatoire des M, ce qui justifie le caractère aléatoire de la conclusion. Ce raisonnement est nouveau, dans la mesure où il introduit le caractère probabiliste au coeur du syllogisme à la fois dans la majeure et dans la mineure, ce qui permet de poser « probablement et approximativement » la conclusion (p. 32). On retrouve d’autres exemples dans les pages suivantes. Le même problème, transposé dans la 3e figure, donne : De façon intéressante, Peirce reconnaît la formule de l’induction dans cette formulation. Mais il ne précise pas qu’il s’agit là de l’induction quantitative, laquelle pourrait …

Appendices