Comptes rendus

Denis Fisette (dir.), Husserl’s Logical Investigations reconsidered, Dordrecht, Boston, Londres, Kluwer, coll. «Contributions to Phenomenology», 2003, 252 pages.[Record]

  • Pierre-Jean Renaudie

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  • Pierre-Jean Renaudie
    Université Paris IV– Sorbonne

À l’occasion du centenaire de la publication des Recherches logiques, oeuvre monumentale dans laquelle la phénoménologie a accompli sa première «percée» si l’on en croit Husserl lui-même, a eu lieu à Montréal un colloque international destiné à revenir sur les origines de la phénoménologie et à en saisir les enjeux dans le cadre de la philosophie contemporaine (notamment en ce qui concerne la logique, l’ontologie, ou encore la philosophie de l’esprit). Les actes de cette rencontre ont servi de point de départ à Denis Fisette pour éditer un recueil d’articles dont l’objectif est de dresser une sorte d’état des lieux des différentes directions offertes un siècle après sa publication par l’oeuvre séminale de la phénoménologie husserlienne. Il s’agit à la fois de dégager la signification historique des voies inaugurées par les Recherches et de donner un aperçu des perspectives qu’elles ont inaugurées en laissant ouvertes un certain nombre de directions. Les Recherches logiques donnent une clé intéressante pour aborder la philosophie du XXe siècle en se situant tout à la fois dans les débats d’époque auxquels elles espéraient apporter une réponse (psychologisme, fondation des sciences, théorie des multiplicités, méréologie), et à l’origine d’une histoire qui allait durablement séparer philosophie continentale et philosophie analytique, sans pour autant que Husserl s’y engage encore pleinement dans la perspective transcendantale idéaliste qui allait jouer en faveur de leur éloignement réciproque. Ces différents aspects du projet de relecture des Recherches logiques ont permis à D. Fisette de définir quatre sections thématiques regroupant l’ensemble des contributions de ce recueil. Nous ne présenterons ici que quelques articles significatifs pour en saisir la perspective d’ensemble. La première section embrasse un dessein général dans l’approche de l’oeuvre qu’elle propose, en interrogeant la cohérence et l’unité d’un texte qui apparaît d’abord au lecteur de façon morcelée, découpé en recherches à caractère programmatique et éloignées les unes des autres par la diversité de leurs thèmes. La question de cette unité des Recherches doit ainsi permettre de préciser la portée et le sens du projet philosophique de Husserl. David Woodruff Smith va insister sur la structure systématique de l’oeuvre et tenter de reconstruire logiquement l’unité très forte de celle-ci en isolant d’une part les thèses amenées dans chacune des six recherches et dans les Prolégomènes, puis en montrant le lien logique qui les rattache les unes aux autres de façon à constituer une théorie cohérente à partir de laquelle l’ensemble des Recherches logiques trouve un soubassement. L’unité de la théorie est elle-même garantie par la métathéorie mise en place dans les Prolégomènes, laquelle définit les conditions générales de validité des Recherches. Le projet initial de la phénoménologie se noue ainsi autour d’une reconstruction intégrale des différents champs de la philosophie (de la logique à l’épistémologie, en passant par une théorie de la signification, des universaux, une ontologie, une grammaire... ) articulés non plus au sein d’un système philosophique mais dans une théorie dont on s’est assuré de la validité formelle, et Smith établit les relations d’interdépendance entre chacune des doctrines. Denis Fisette prolonge cette perspective en montrant comment le programme d’une théorie de la science présenté par Husserl dans les Prolégomènes lui permet de donner une unité très forte aux deux directions principales dans lesquelles s’engagent les Recherches logiques: la logique pure d’un côté et la phénoménologie de la connaissance de l’autre. L’auteur reconstruit ainsi l’itinéraire intellectuel de Husserl et montre que si la logique pure pose le cadre théorique dans lequel pourront être traitées les tâches fondamentales d’une théorie de la science, cette dernière ne peut s’accomplir que dans une élucidation phénoménologique des principaux concepts …