Abstracts
Résumé
La notion d’« Esprit » que chérit le système hégélien a été tellement galvaudée qu’on n’associe souvent de nos jours ce dernier qu’à l’opposé de la nature sans trop comprendre ce que cela signifie vraiment en termes hégéliens. Dans un même élan, on prend un malicieux plaisir à soulever le haut niveau d’abstraction de cette philosophie qui, aux dires de ses détracteurs, délaisse complètement ce qui est naturel au profit de ce qui est spirituel. La nature et le monde matériel se trouvent-ils si mal servis par l’hégélianisme ? Nous allons montrer que non, en expliquant que cette apparence dérive directement d’un refus de prendre en compte la métaphysique qui oeuvre à l’arrière-plan du désir hégélien d’articuler la totalité de ce qui est dans le discours philosophique.
Abstract
The notion of “Spirit” so championed in the Hegelian system has been so trivialised, that nowadays one tends to link it to the very opposite of nature without really understanding what it truly means in Hegelian terms. Furthermore, critics take a malicious pleasure in emphasizing the high level of abstraction of this philosophy which, still according to them, results in completely neglecting the natural in favor of the spiritual. Are nature and the material world so poorly served by Hegelianism ? We will prove that statement wrong by explaining that this criticism of Hegel’s philosophy directly derives from a refusal to consider the metaphysics at work behind the Hegelian desire to thoroughly explain the totality of what is in the philosophical discourse.
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Appendices
Notes
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[1]
L’esquisse de ce texte a fait l’objet d’une communication présentée dans le cadre du colloque de la Société de philosophie du Québec sur La Phénoménologie et la philosophie de l’esprit contemporaine qui a eu lieu à l’Université du Québec à Montréal les 24 et 25 mars 2000.
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[2]
G. W. F. Hegel, Theologische Jugendschriften, Francfort, Minerva GmbH, 1966,p. 377 ; L’Esprit du christianisme et son destin, trad. de J. Martin, Paris, Vrin, 1988, p. 140.
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[3]
Nous parerons l’« [A]bsolu » d’une majuscule lorsqu’il exprime vraiment la plénitude et d’une minuscule, « [a]bsolu », dans le cas contraire. Nous ferons de même avec le terme « Esprit ».
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[4]
Parmi les interprètes de Hegel qui soutiennent de telles choses, il y a eu Karl Marx et, plus près de nous, Jürgen Habermas, qui se fonde sur le point de vue de Marx pour aborder l’hégélianisme. Voir J. Habermas, La Pensée postmétaphysique. Essais philosophiques, trad. de R. Rochlitz, Paris, Armand Colin, 1993, p. 47.
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[5]
Hegel, Enzyklopädie der philosophischen Wissenschaften im Grundrisse : 1827 (ci-après Enz.), Gesammelte Werke vol. 19, Hambourg, Felix Meiner, 1989, § 384, p. 290 ; Encyclopédie des sciences philosophiques III Philosophie de l’esprit (ci-après Enc. III), trad. de B. Bourgeois, Paris, Vrin, 1988, § 384, p. 179.
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[6]
Hegel, Schriften und Entwürfe (1799-1808) (ci-après Schriften), Gesammelte Werke, vol. 5, Hambourg, Felix Meiner, 1998, p. 371 ; Le Premier Système. La Philosophie de l’esprit de 1803-1804 (ci-après P.S.), trad. de M. Bienenstock, Paris, PUF, 1999, p. 34.
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[7]
Hegel, Frühe Schriften I, Gesammelte Werke, vol. 1, Hambourg, Felix Meiner, 1989, p. 83 ; « Fragment de Tübingen », trad. de R. Legros, dans R. Legros, Le Jeune Hegel et la naissance de la pensée romantique, Bruxelles, Ousia, 1980, p. 260.
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[8]
Hegel, Phänomenologie des Geistes (ci-après Ph.G.), Philosophische Bibliothek, vol. 414, Hambourg, Felix Meiner, 1988, p. 14-15 ; Phénoménologie de l’Esprit (ci-après Ph.E.), trad. de J. Labarrière et G. Jarczyk, Paris, Gallimard, 1993, p. 82.
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[9]
Ph.G., p. 18-19 ; Ph.E., p. 87.
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[10]
Enz., § 1, p. 27 ; Hegel, Encyclopédie des sciences philosophiques I. La Science de la logique, trad. de B. Bourgeois, Paris, Vrin, 1986, § 1, p. 163.
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[11]
Hegel associe, depuis la publication de sa Phénoménologie de l’Esprit, la philosophie à la science dans sa diction de l’Absolu : « Contribuer à ce que la philosophie approche la forme de la science — […] — c’est là ce que je me suis proposé. » Voir Ph.G., p. 6 ; Ph.E., p. 71.
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[12]
Ph.G., p. 526 ; Ph.E., p. 687 (nous avons modifié la traduction).
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[13]
Ph.G., p. 14-15 ; Ph.E., p. 82.
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[14]
Hegel, Wissenschaft der Logik. Erster Band : Die objective Logik (ci-après W.L. I.), Gesammelte Werke, vol. 11, Hambourg, Felix Meiner, 1978, p. 21 ; Hegel, Science de la logique. Premier Tome, premier livre : L’Être (ci-après S.L. I.), trad. de J. Labarrière et G. Jarczyk, Paris, Aubier Montaigne, 1972, p. 19.
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[15]
Ph.G., p. 503 ; Ph.E., p. 657.
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[16]
Ibid.
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[17]
W.L. I., p. 262 ; Hegel, Science de la logique. Premier tome, deuxième livre : La Doctrine de l’essence (ci-après S.L. II.), trad. de J. Labarrière et G. Jarczyk, Paris, Aubier Montaigne, 1976, p. 41.
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[18]
W.L. I., p. 264 ; S.L. II., p. 43-44.
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[19]
Ph.G., p. 6 ; Ph.E., p. 71.
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[20]
Ph.G., p. 60 ; Ph.E., p. 135.
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[21]
W.L. I, p. 5 ; S.L. I, p. 1.
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[22]
W.L. I, p. 7 ; S.L. I, p. 5.
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[23]
Ibid.
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[24]
A. Stanguennec, Hegel. Une philosophie de la raison vivante, Paris, Vrin, 1997, p. 53.
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[25]
Hegel, Jenaer System... [illisible], Gesammelte Werke, vol. 11, Hambourg, Felix Meiner, p. 122 ; Logique et métaphysique (Iéna 1804-1805), trad. de D. Souche-Dagues et A. Kaan, Paris, Gallimard, 1980, p. 144-145.
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[26]
Comme l’exemple de la plante présenté au début de notre texte. Une plante universalisée ne se présente pas seulement comme « une plante », mais bien comme « un végétal vivant fixé en terre ».
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[27]
Schriften, p. 370 ; P.S., p. 33. Les parenthèses sont de nous. Comme vous pouvez le constater, nous traduirons le verbe ausfleben et ses dérivés à la manière de Derrida, soit par le terme « relever », au sens où l’on peut être à la fois élevé et relevé de ses fonctions, remplacé dans une sorte de promotion par ce qui suit et prend la relève. Voir J. Derrida, « Le puits et la pyramide », dans J. Hyppolite, Hegel et la pensée moderne, Paris, Presses Universitaires de France, 1970, p. 53.
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[28]
Ph.G., p. 29 ; Ph.E., p. 98.
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[29]
Ibid.
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[30]
Ph.G., p. 61 ; Ph.E., p. 136.
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[31]
Ibid.
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[32]
Ph.G., p. 385 ; Ph.E., p. 515.
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[33]
Ph.G., p. 387-388 ; Ph.E., p. 518.
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[34]
Jean-Jacques Rousseau, Du contrat social, Paris, Garnier-Flammarion, 1966, p. 51.
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[35]
Ph.G., p. 389 ; Ph.E., p. 520. Les interpolations sont de nous.
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[36]
Ph.G., p. 526 ; Ph.E., p. 687.
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[37]
Ph.G., p. 512 ; Ph.E., p. 669.
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[38]
Ph.G., p. 513 ; ibid.
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[39]
Ph.G., p. 531 ; Ph.E., p. 694.
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[40]
Ph.G., p. 424 ; Ph.E., p. 560. Les interpolations sont de nous.
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[41]
W.L. I., p. 21 ; S.L. I., p. 19.
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[42]
Ph.G., p. 15 ; Ph.E., p. 83.
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[43]
Ph.G., p. 14 ; Ph.E., p. 82.
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[44]
Ph.G., p. 10 ; Ph.E., p. 76.
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[45]
Hegel, System der Philosophie. Dritter Teil. Die Philosophie des Geistes, Sämtliche Werke, vol. 10, Stuttgart, Frommann Verlag, 1965, § 575, p. 447 ; Enc., III., § 575, p. 373.
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[46]
Ph.G., p. 530 ; Ph.E., p. 693.
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[47]
Ph.G., p. 462 ; Ph.E., p. 607.
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[48]
Hegel, Jenaer [illisible], Philosophische Bibliotek, vol. 333, Hambourg, Felix Meiner ; La Philosophie de l’esprit (1805), trad. de G. Planty-Bonjour, Paris, Presses Universitaires de France, 1982, p. 120.
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[49]
« […] le mystère du pain et [du] vin n’est pas encore mystère de la chair et [du] sang. » Ph.G., p. 472 ; Ph.E., p. 619