Abstracts
Résumé
L’Acayenne de Germaine Guèvremont est peut-être le personnage acadien le plus connu de la littérature québécoise. Son acadianité, pourtant, n’a jamais été étudiée. La biographie de l’auteure montre que, contrairement au Chenal du Moine et à la région de Sorel, longuement fréquentés par Guèvremont, l’Acadie a été un pays avant tout imaginé. Cet article vise à jeter les bases d’une réflexion sur la présence de l’Acayenne dans son imaginaire. Paradoxalement, l’éloignement de l’Acadie permet à Guèvremont d’exprimer le familial, car l’altérité déguise suffisamment l’intime pour le faire affleurer sans heurter sa pudeur. Alphonsine, le personnage principal du roman, appelle ainsi l’Acayenne l’« Autre » pour mieux refouler cette familiarité. Leur relation est placée sous le signe de l’Unheimlich dont a parlé Freud. Le familier se cache sous l’étranger, car l’Acayenne met en scène la relation passionnée de Guèvremont avec sa mère, Valentine Labelle, et l’ombre que jeta sur celle-ci le décès de sa soeur aînée, qui lui laissa le prénom de Germaine. Nous verrons également que, si l’Acayenne permet à Guèvremont d’exprimer le deuil qui frappa sa mère, c’est notamment en raison de l’intertextualité discrète, mais néanmoins importante de l’Évangéline de Longfellow.
Mots-clés :
- Germaine Guèvremont,
- L’Acayenne,
- relations mère-fille,
- Acadie,
- enfant de remplacement
Abstract
Germaine Guèvremont’s Acayenne is perhaps the most famous Acadian character in Québec literature. Her Acadianness, however, has never been studied. The author’s biography shows that, unlike the Chenal du Moine and the Sorel region, which Guèvremont visited over a lengthy period, Acadia was a land that was first and foremost imagined. This article aims to lay the groundwork for a reflection on the presence of the Acayenne in her imagination. Paradoxically, Guèvremont’s remoteness from Acadia allows her to express the familial, because otherness disguises the intimate sufficiently to make it emerge without offending her modesty. Alphonsine, the novel’s main character, calls the Acayenne the “Other” to better repress this familiarity. Their relationship is placed under the sign of the Unheimlich as conceptualized by Freud. The familiar hides beneath the foreign, through which the Acayenne reflects Guèvremont’s intense relationship with her mother, Valentine Labelle, and the shadow cast on her by the death of her older sister, who left her the name Germaine. We will also see that, if the Acayenne allows Guèvremont to express the grief that struck her mother, it is notably because of the discreet, yet important intertextuality of Longfellow’s Evangeline.
Keywords:
- Germaine Guèvremont,
- the Acayenne,
- mother-daughter relationships,
- Acadia,
- replacement child
Appendices
Bibliographie
- Germaine Guèvremont. « Les survenants ». Dans Paysana, vol. 1, no 1, 1938, p. 11-12 ; repris dans En pleine terre sous le titre « Chauffe, le poêle ».
- Germaine Guèvremont (sous le pseudonyme de Jan Rhêve). « Des riens en prose. Madame Rivard ». Article de journal non-identifié (peut-être le Courrier de Sorel ?), non paginé que l’on trouve dans le Fonds Germaine Guèvremont, BANC LMS 0260, Série 4, s.d. Ce texte a été repris et modifié afin d’être intégré au roman feuilleton Tu seras journaliste que Guèvremont a écrit pour la revue Paysana (vol. 2, no 8, octobre 1939, p. 67).
- Germaine Guèvremont. En pleine terre. Paysanneries. Trois contes. Montréal, Éditions Paysana, 1942, 159 p.
- Germaine Guèvremont. Le Survenant. Édition critique par Yvan G. Lepage. Montréal, Presses de l’Université de Montréal, coll. « Bibliothèque du Nouveau Monde », (1945) 1989, 367 p.
- Germaine Guèvremont. Marie-Didace, édition critique par Yvan G. Lepage, Montréal, Les Presses de l’Université de Montréal, coll. « Bibliothèque du Nouveau Monde », (1947) 1996, 446 p.
- Germaine Guèvremont. « Tu seras journaliste ». Dans Paysana, vol. 2, no 8, octobre 1939, p. 67.
- Germaine Guèvremont. Le Survenant. Téléroman (CBFT, 1956-1957), Bibliothèque et archives Canada, Fonds Germaine Guèvremont, LMS 0260, 2004-03, série 2, no 3, 30 octobre 1956.
- Germaine Guèvremont. Marie-Didace. Téléroman (CBFT, 25 septembre 1958 - 26 juin 1959), Bibliothèque et archives Canada, Fonds Germaine Guèvremont, LMS 0260, 2004-03, série 2.
- Germaine Guèvremont. « Un coup de fil ». Dans Le Nouveau journal, 1962, p. 21 (chronique « 3 minutes avec Germaine Guèvremont »).
- Germaine Guèvremont. Tu seras journaliste et autres oeuvres sur le journalisme. Édition critique et présentation de David Décarie et Lori Saint-Martin. Montréal, Presses de l’Université de Montréal, coll. « Les écrits de Germaine Guèvremont », 2013, 244 p.
- Germaine Guèvremont. Le Cycle du Survenant I : Supplément. Le Survenant, Marie-Didace et autres textes. Édition critique et présentation de David Décarie et Lori Saint-Martin. Montréal, Presses de l’Université de Montréal, 2017, 439.
- Freud, Sigmund. « L’inquiétant ». Dans Oeuvres complètes XV. Paris, Presses universitaires de France, (1919) 1996, p. 147-188.
- Lepage, Yvan. Germaine Guèvremont. La tentation autobiographique. Ottawa, Les Presses de l’Université d’Ottawa, 1998, p. 25.
- Paterson, Janet. Figures de l’autre dans le roman québécois. Québec, Nota bene, 2004, 228 p.
- Porot, Maurice. L’enfant de remplacement. Montréal, Éditions Sciences et Culture, 1994, 246 p.
- Saint-Martin, Lori. Le nom de la mère. Québec, Nota bene, 1999, 331 p.