Abstracts
Résumé
Les discussions sur la complexité dans les sciences sociales ont été affectées par des malentendus concernant la notion de système. L’une des caractéristiques des systèmes sociaux est qu’il s’agit de systèmes d’acteurs, dans lesquels la composition des intentionnalités peut utilement servir de fil conducteur pour la construction des logiques de ces systèmes. Les choses sont bien évidemment différentes dans les sciences de la nature. Dans ce contexte, la complexité peut se définir en mathématiques ou en physique par l’augmentation du niveau d’imprévisibilité d’un système, ce qui n’est pas le cas dans les mondes sociaux. L’hypercomplexité des systèmes sociaux repose sur une très forte interactivité entre acteurs, objets et environnements et cette interactivité est d’autant plus intelligible que l’on connaît les attentes, les désirs, les craintes, les projets des acteurs. En conséquence, le futur devient un objet d’études à la fois plus accessible et plus nécessaire aux les sciences sociales, comme les exemples de la « transition démographique » et des choix résidentiels individuels en témoignent.
Mots-clefs:
- Complexité,
- hypercomplexité,
- systèmes,
- acteurs,
- intentionnalités,
- imprévisibilité
Abstract
A misunderstanding about the notion of system has undermined discussions on complexity in social sciences. Social systems are fundamentally actors systems, whereby the arrangement of intentionalities can be used as a leading thread for the understanding of these systems’ rationales. The situation is obviously different in natural sciences. In this context, complexity can be defined in physics and mathematics by higher level of unpredictability level, which is not the case in social worlds. Hypercom-plexity is based on massive interactions between actors, objects, and environments and this interactivity is all the more intelligible when actors’ expectations, desires, fears, and projects are known. As a result, future can be addressed as a more accessible as well as a more essential object for social sciences. The examples of “demographic transition” and of individual residential choices clearly illustrate this proposition.
Keywords:
- Complexity,
- hypercomplexity,
- systems,
- actors,
- intentionality,
- unpredictability
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Appendices
Notes
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[1]
Certains passages de ce texte reprennent, en la remaniant, une partie du chapitre 3 du livre Le tournant géographique (Paris, Belin, 1999).
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[2]
Blaise Pascal, Pensées, Paris, Garnier Flammarion, [1670] 1976, p. 69.
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[6]
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[7]
On peut citer l’ouvrage classique de Pierre Grémion (Le pouvoir périphérique en France. Bureaucrates et notables dans le système politique français, Paris, Seuil, 1976) comme caractéristique d’une démarche, ici très géographique, qui montre comment un système, celui de la distribution des pouvoirs sur le territoire, est modelé par le poids qu’y occupent des acteurs apparemment secondaires.
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[8]
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[20]
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[21]
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[22]
Voir à ce sujet les travaux d’Alain Desrosières (La politique des grands nombres : histoire de la raison statistique, Paris, La Découverte, 1993) et d’Hervé Le Bras (Marianne et les lapins. L’obsession démographique, Paris, Hachette, 1993).
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[23]
Projet de recherche « Our Inhabited Space » (2005-2009) réalisé par le laboratoire Chôros de l’École polytechnique fédérale de Lausanne et financé par le Fonds national suisse pour la recherche dans le cadre du PNR 54.
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[24]
Zygmunt Bauman a utilisé le couple mixophobie/mixophilie pour désigner cette opposition (Le présent liquide. Peurs sociales et obsession sécuritaire, Paris, Seuil, 2007).
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[25]
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