Volume 142, Number 1, Winter 2018
Table of contents (12 articles)
Le mot du président
Hommage
Botanique
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L’aubépine du Canada (Crataegus canadensis Sargent), une espèce à part entière, endémique au Québec et différente de l’aubépine subsoyeuse (Crataegus submollis Sargent)
André Sabourin
pp. 6–15
AbstractFR:
L’aubépine du Canada, Crataegus canadensis Sargent (Rosaceae), a été considérée comme une espèce distincte par la majorité des auteurs jusqu’à récemment. Elle est désormais incluse en synonymie avec l’aubépine subsoyeuse (Crataegus submollis Sargent) dont elle ne serait qu’une forme locale de la région de Montréal. Les 2 espèces sont semblables par certaines caractéristiques morphologiques. Toutefois, des observations effectuées sur une quinzaine d’années et des mesures prises sur le terrain et en herbier en 2015, 2016 et 2017 jettent un nouvel éclairage. Les différences entre les 2 espèces pour plusieurs caractères morphologiques pourraient justifier que C. canadensis soit considéré comme un taxon à part entière. Une description de ces différences est présentée concernant le nombre d’étamines, la position et la longueur des sépales, les dimensions du limbe et l’incision des sinus inférieurs des feuilles, la dimension et la forme des fruits. La répartition géographique de l’aubépine du Canada, limitée et endémique à la grande région de Montréal, est aussi détaillée.
EN:
Historically, most authors recognized the Canada hawthorn (Crataegus canadensis Sargent [Rosaceae]), which occurs in the Montréal area (Québec, Canada), as a distinct species. Recently, however, it has been considered simply a distinct local form and taxonomic synonym of the Quebec hawthorn (Crataegus submollis Sargent). The two species are similar and share some morphological characteristics, but observations made over the last 15 years, together with field and herbarium measurements taken in 2015, 2016 and 2017, highlight clear distinctions between them. The differences in leaf blade size and lower sinus incisions, stamen number, sepal length and position, and fruit shape and size, are described. The restricted geographical distribution of the Canada hawthorn, which is endemic to the greater Montréal region, is also presented.
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Changements climatiques : défis et perspectives pour les plantes vasculaires en situation précaire au Québec
Yanick Gendreau, Audrey Lachance, Marylène Ricard, Hélène Gilbert, Nicolas Casajus and Dominique Berteaux
pp. 16–35
AbstractFR:
Les espèces en situation précaire comptent parmi les plus sensibles aux changements climatiques. Nous avons documenté les effets potentiels de ceux-ci sur les 409 plantes vasculaires en situation précaire au Québec. Nous avons quantifié les modifications potentielles des aires de répartition de 131 d’entre elles avec des modèles de niche bioclimatique et évalué la vulnérabilité des 409 plantes avec un indice de vulnérabilité aux changements climatiques. Nos résultats suggèrent que les conditions climatiques pourraient devenir favorables à plusieurs plantes en situation précaire au Québec. La province pourrait devenir un refuge climatique pour celles pour lesquelles les conditions climatiques deviendraient défavorables aux États-Unis. Toutefois, notre étude révèle que la vitesse de déplacement des niches bioclimatiques des plantes risque de dépasser largement leur capacité de déplacement. Ainsi, il pourrait être impossible pour celles-ci d’étendre naturellement leur répartition dans la province. De plus, 57,7 % des espèces étudiées sont considérées comme vulnérables aux changements climatiques. Les plus vulnérables sont celles ayant une répartition périphérique sud et celles associées aux habitats arctiques-alpins, à l’estuaire et au golfe du Saint-Laurent. Des recommandations sont formulées afin d’intégrer des stratégies d’adaptation aux changements climatiques à la gestion des plantes vasculaires en situation précaire et de leurs habitats au Québec.
EN:
Species at risk are among the most sensitive to climate change. The present study investigated the potential impacts of climate change on the 409 vascular plant species at risk found in Québec (Canada). A vulnerability index was used to evaluate their susceptibility to climate change, and ecological niche models were used to quantify potential changes in the distribution of 131 of them. Results suggest that climatic conditions in Québec could become suitable for many of the plant species at risk, and that the province could serve as a climate refuge for those for which conditions become unsuitable in the United States of America. However, the study revealed that the ecological niche of plant species may move faster than their capacity for dispersal. Thus it may be impossible for many plants to naturally expand their distribution range within the province. In total, 57.7% of the studied species were found to be susceptible to climate change, with the most vulnerable being those with a southern peripheral distribution, and those associated with arctic-alpine habitats or with the St. Lawrence gulf and estuary. Recommendations are made to incorporate climate change mitigation strategies into the management of plant species at risk and their habitats.
Conservation
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Les valeurs socioculturelles et monétaires des services écologiques rendus par les parcs nationaux du Québec
Benoit Limoges
pp. 36–49
AbstractFR:
Les retombées économiques des parcs nationaux du Québec pour les collectivités périphériques sont de plus en plus connues, mais l’ensemble des bénéfices rendus par ces aires protégées reste encore à définir, surtout les avantages non financiers. Cette étude révèle les valeurs socioculturelles et monétaires d’environ 70 services écologiques et autres bénéfices retirés des écosystèmes des 23 parcs nationaux du sud du Québec, dont leurs valeurs indirectes et de non-usage. Nous avons tenté de décrire chaque service écologique qualitativement et quantitativement. Dans certains cas, leur valeur monétaire a été estimée. La valeur économique totale des parcs nationaux, sur la base de la valeur des écosystèmes, est estimée à 1 milliard de dollars par année, ce qui représente un capital naturel de 31 milliards de dollars. La valeur économique totale est environ le triple de celle des retombées strictement financières enrichissant les communautés périphériques. Ces valeurs sont légèrement inférieures à celles rapportées pour les parcs nationaux ontariens ou américains.
EN:
There is a growing understanding of the positive economic impacts of national parks in Québec (Canada) on surrounding communities; however, the entire suite of benefits provided by these protected areas, especially those of non-financial value, has yet to be defined. This study reveals the sociocultural and monetary values of approximately 70 ecosystem services and benefits provided by the 23 national parks of southern Québec, including the values linked to indirect use and non-use. Each service or benefit is described qualitatively and quantitatively. In some cases, monetary values were estimated. Based on the value of their ecosystems, the total economic value of the 23 national parks is estimated at CAD 1 billion per year, which represents a natural capital of CAD 31 billion. This total economic value is about three times that of the financial advantages to the surrounding communities. The values obtained in this study are slightly lower than those produced for national parks in Ontario and the United States of America.
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La conservation des parcs nationaux au-delà de leurs frontières
Marie-Ève Deshaies and René Charest
pp. 50–63
AbstractFR:
Le réseau des parcs nationaux du Québec vise à assurer la conservation et la protection permanente de territoires représentatifs des régions naturelles du Québec ou de sites naturels exceptionnels. Cependant, dans certains parcs, principalement ceux au sud du 50e parallèle, il peut s’avérer ardu de répondre aux besoins des espèces à grand domaine vital en raison des superficies variables des parcs. De plus, l’utilisation ou la dégradation du territoire en périphérie de ces parcs peut contribuer à une perte de leur valeur écologique. Afin de favoriser la mise en oeuvre de la mission de conservation des parcs nationaux, la Société des établissements de plein air du Québec (Sépaq) a entrepris de mobiliser les acteurs dans les territoires périphériques des parcs. Elle s’est fixé pour objectifs de caractériser les zones périphériques, de tenir des journées de réflexion rassemblant les acteurs locaux et régionaux et de mobiliser ces derniers afin qu’ils réalisent des actions concrètes pour mieux conserver ces territoires. Le maintien des richesses écologiques des parcs repose, en partie, sur l’engagement des acteurs à participer aux efforts de conservation en périphérie des parcs afin de réduire les effets des activités humaines sur les territoires protégés et assurer le maintien des services écologiques essentiels.
EN:
The aim of the national park network in Québec (Canada) is to permanently conserve and protect zones that are representative of the natural regions found within the province, or outstanding natural areas. However, due to the limited size of certain parks, some, mostly located south of the 50th parallel, face challenges in responding to the habitat needs of species with large home ranges. Moreover, certain land-use activities within the peripheral zones of the parks may contribute to a degradation of their ecological value. To help accomplish the mission of the parks, the Société des établissements de plein air du Québec has undertaken to mobilize neighbouring stakeholders. To achieve this, it set itself the objectives of characterizing the peripheral zones; organizing discussion forums with local and regional stakeholders active within them; and rallying the latter to realize concrete conservation actions. Maintaining the ecological value of the parks relies partially on the engagement and participation of peripheral zone stakeholders in conservation efforts to reduce the impact of human activities on these protected lands. Their actions will help ensure that these areas can continue to fulfill essential ecological services.
Entomologie
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Extension du territoire connu de la fourmi Myrmica lampra au Québec (Formicides, Hyménoptères)
André Francoeur and Mathieu Bouchard
pp. 64–65
AbstractFR:
Lors d’un projet de recherche en foresterie, une gyne (reine) de la fourmi parasite Myrmica lampra a été capturée dans la région du Lac-Saint-Jean, au Québec. Cette découverte agrandit le territoire connu de cette espèce, rarement observée jusqu’à présent.
EN:
A gyne (queen) of the parasitic ant Myrmica lampra was captured in the Lac-Saint-Jean region (Quebec, Canada) during a research project on forest insects. This discovery extends the known range of this rarely reported species.
Milieux aquatiques
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Les variations de niveau du lac Saint-Jean : effets sur la reproduction des poissons dans les habitats en milieux humides riverains
Patrick Plourde-Lavoie, Marc Archer, Karine Gagnon and Pascal Sirois
pp. 66–77
AbstractFR:
Le lac Saint-Jean a vu son régime hydrologique considérablement modifié depuis sa transformation en réservoir en 1926. Cet article examine les effets de la gestion du niveau du lac pour la fraie de la perchaude (Perca flavescens) et du grand brochet (Esox lucius). Une analyse des niveaux des eaux des 100 dernières années a permis de mettre en évidence une réduction des écarts entre les niveaux printaniers et estivaux, qui contribue vraisemblablement à diminuer la taille et la qualité des sites de reproduction, et un retardement de l’atteinte du niveau maximal au printemps par rapport au régime naturel. L’utilisation de données historiques de températures du lac et des milieux humides riverains a permis d’estimer les périodes de fraie de 1991 à 2015 et de mettre en évidence les conséquences des bas niveaux au printemps sur l’accessibilité des milieux humides. À présent, ces habitats ne sont généralement que partiellement inondés lors de la fraie des 2 espèces. Nous recommandons d’adopter une gestion du lac Saint-Jean qui vise à devancer l’atteinte des hauts niveaux printaniers et à maximiser les écarts entre les niveaux printaniers et estivaux, tout en maintenant un niveau stable au printemps pour permettre l’éclosion des oeufs de poissons et assurer la survie des jeunes stades de vie.
EN:
The hydrological regime of Lac Saint-Jean (Québec, Canada) was drastically altered following the installation of dams along its drainage channels in 1926. This article examines the impact of water level management on the spawning success of yellow perch (Perca flavescens) and northern pike (Esox lucius). An analysis of water levels over the past 100 years shows a decrease in the amplitude of spring flooding since 1926, which has likely contributed to a reduction in the effective size and quality of spawning sites. It also highlights a delay in the time taken to reach the maximum spring high water level. Historical temperatures of the lake and associated wetlands allowed the spawning period between 1991 and 2015 to be estimated, and underlined the impact of low spring water levels on wetland accessibility. Presently, spawning sites for the study species are only partially flooded during the breeding season. It is recommended that a water level management plan be adopted that allows higher water levels to be reached earlier in the spring; that keeps the spring level stable to promote hatching and to ensure the survival of fry during early life stages; and that increases the difference between spring and summer water levels.
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Effets du réseau routier sur la connectivité des frayères du grand brochet (Esox lucius) au lac Saint-Pierre (fleuve Saint-Laurent, Canada)
Céline Le Pichon, Marc Mingelbier, Maëlle Legros, Aline Foubert and Philippe Brodeur
pp. 78–91
AbstractFR:
Afin de compléter le portrait des pressions agissant sur les habitats aquatiques de la plaine d’inondation du lac Saint-Pierre, une analyse géomatique avancée évalue les effets du réseau routier sur la connectivité des frayères et des nourriceries du grand brochet (Esox lucius). Les résultats révèlent des effets négatifs sur les habitats à fort potentiel lorsque le débit à Sorel dépasse 12 000 m3.s−1 (récurrence : de 1 à 2 ans), créant des pertes directes au niveau des emprises (maximum : 142 ha) et de la fragmentation entre les habitats situés de part et d’autre des routes (maximum : 39 ha). Ces effets, principalement circonscrits dans la région nord-ouest du lac, dépendent largement des conditions hydrologiques entre la période de fraie et la première semaine de vie des larves. Les mesures de connectivité soulignent l’importance des ponceaux fonctionnels et du réseau hydrographique de la zone littorale, éléments essentiels à l’interconnexion des habitats. Il apparaît que les répercussions du réseau routier, bien qu’elles soient moindres que celles provoquées par les pratiques agricoles intensives ou encore par la régularisation du débit, demeurent non négligeables. La présente étude identifie les habitats à fort potentiel et des corridors de connectivité constituant des milieux prioritaires à protéger ou à restaurer.
EN:
To help complete the picture of the pressures affecting the diverse aquatic habitats of the Lake St-Pierre floodplain (Québec, Canada), an advanced geomatics analysis was used to assess the effects of the adjacent road network on the connectivity of spawning and nursery grounds of the northern pike (Esox lucius). The results revealed adverse effects on high potential habitat when the water flow at Sorel exceeded 12,000 m3.s−1 (recurrence interval of 1 to 2 years). Once this flow rate was reached, there was a direct habitat loss along roads (maximum: 142 ha) and fragmentation of habitat transected by roads (maximum: 39 ha). These effects, which were most marked around the northwestern part of the lake, depended largely on the hydrological conditions between spawning and the first week of larval life. Connectivity measurements highlighted the importance of functional culverts and of the hydrologic network of the littoral zone as being essential for habitat connectivity. The effects of the road network, although smaller than those caused by intensive agricultural practices or by the regulation of water flow, remained non-negligible. This study identified high-potential habitats and connectivity corridors as priority areas for protection or restoration.