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Des bactéries pour prévenir et traiter le cancer du col de l’utérus induit par le papillomavirus humain de type 16Bacteria to prevent and treat cervical cancer induced by human papillomavirus type 16[Record]

  • Luis Bermúdez-Humarán and
  • Philippe Langella

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  • Luis Bermúdez-Humarán
    Équipe « Interactions des probiotiques avec l’hôte »,
    Unité d’Écologie et de Physiologie du Système Digestif,
    INRA,
    Domaine de Vilvert,
    78352 Jouy-en-Josas Cedex,
    France.

  • Philippe Langella
    Équipe « Interactions des probiotiques avec l’hôte »,
    Unité d’Écologie et de Physiologie du Système Digestif,
    INRA,
    Domaine de Vilvert,
    78352 Jouy-en-Josas Cedex,
    France.
    philippe.langella@jouy.inra.fr

Le papillomavirus humain de type 16 (HPV-16) est un des virus à potentiel oncogène que l’on retrouve (avec le type 18) dans plus de 90 % des cancers du col de l’utérus (300 000 décès par an dans le monde) [1]. Les stratégies actuelles pour prévenir ou traiter l’infection par ce virus sont prometteuses mais coûteuses. Des vaccins prophylactiques fondés sur des VLP (virus-like particles) ont récemment induit des baisses significatives des infections à l’HPV-16 et 18 et des cancers associés à ces infections en essais cliniques humains [2, 3]. Cependant, ces vaccins agissent seulement au niveau de l’infection et n’ont aucun effet thérapeutique. Par ailleurs, ils demeurent d’un coût très élevé qui limite leur utilisation dans les pays en voie de développement où l’on dénombre environ 80 % de ce type de décès. Dans ce travail, nous avons utilisé une bactérie non pathogène, Lactococcus lactis, pour délivrer deux protéines d’intérêt médical : (1) l’antigène E7 du HPV-16 (E7), protéine retrouvée systématiquement dans des carcinomes provoqués par des infections par des HPV et un des antigènes candidats pour le développement d’une thérapie anti-HPV ; et (2) l’interleukine-12 (IL-12), une molécule stimulatrice de la réponse immunitaire cellulaire lors d’infections. L. lactis est une bactérie à Gram positif de statut alimentaire largement utilisée dans la production d’aliments fermentés et considérée comme une alternative attractive aux pathogènes atténués. Depuis une dizaine d’années, de nombreux travaux décrivent l’utilisation de L. lactis pour délivrer des antigènes au niveau des muqueuses [4]. Notre but était d’induire ainsi l’immunité au niveau des muqueuses qui sont les sites d’entrée dans l’organisme de la plupart des agents pathogènes (comme l’HPV-16). De plus, de tels vaccins mucosaux, plus faciles à administrer et moins coûteux à produire que les vaccins injectables, seraient tout à fait adaptés à des campagnes massives de vaccination dans les pays en voie de développement. Nous avons construit deux souches de L. lactis : la première produisant E7 (LL-E7) et la seconde produisant l’IL-12 (LL-IL12). L’IL-12 est une cytokine qui induit les cellules Th1 (T-helper 1), augmente le taux de maturation des lymphocytes T-cytotoxiques et induit la production d’IFN-γ. Elle est également capable de bloquer in vivo l’angiogenèse, notamment observée dans les développements de tumeurs. Cette cytokine a déjà été utilisée avec succès en immunothérapie pour traiter certains cancers et en tant qu’adjuvant de vaccins à ADN. Elle n’avait jusqu’alors jamais été produite chez une bactérie à Gram positif. Nous avons pu mettre en évidence une réponse immune spécifique d’E7 chez des souris à la suite de l’administration de LL-E7 [5, 6]. Par ailleurs, nous avons constaté que la co-administration de LL-E7 et de LL-IL-12 améliorait significativement la réponse immune spécifique d’antigène [7]. Nous avons testé in vivo les effets de la co-administration de ces bactéries chez des souris développant des tumeurs cancéreuses induites par une lignée tumorale exprimant E7 de l’HPV-16 (TC-1) [8]. Pour cela, nous avons inoculé la lignée TC-1 à des souris immunisées avec LL-E7 seule ou avec LL-IL12. Nous avons observé que 50 % des souris vaccinées avec les deux souches n’ont développé aucune tumeur, contre 35 % chez les souris immunisées avec seulement LL-E7 [9]. Par ailleurs, chez les 50 % restants, le volume des tumeurs était largement réduit (1/6 de celui des tumeurs des souris témoins vaccinées avec LL, la souche témoin ne produisant ni E7, ni l’IL-12), ce qui suggère une synergie de l’action prophylactique des deux protéines exprimées (Figure 1). De plus, les souris immunisées avec LL-E7 et LL-IL12 sont capables de résister à un second défi (2 mois après la première immunisation) …

Appendices