La datation des fossiles au 14C est une technique bien connue des archéologues pour les temps préhistoriques. Elle est fondée sur la stabilité de cet isotope dans l’atmosphère, au cours des temps géologiques. Elle est cependant peu fiable pour les temps modernes étant donnée sa période (5 730 ans). Mais, le génie humain étant sans limites, une équipe suédoise de l’Institut Nobel (l’inventeur de la dynamite) a mis au point l’année dernière [1] une méthode fondée sur l’augmentation du taux de 14C dans l’atmosphère suite aux essais nucléaires en plein air avant la signature du traité de non-prolifération nucléaire en 1962. En effet, le taux de 14C dans l’atmosphère a pratiquement doublé entre 1955 et 1963 avant de diminuer de manière exponentielle grâce à l’arrêt des tests et à son rééquilibrage dans le biotope : le 14C réagit avec l’oxygène de l’air pour former du CO2 qui est alors incorporé dans les plantes lors de la photosynthèse. Notre consommation de plantes (et des animaux qui s’en nourrissent) amène à des concentrations internes de 14C du même niveau que les concentrations dans l’atmosphère à un temps donné. Comme l’ADN d’une cellule est stable après que celle-ci ait subi sa dernière division, il devient donc possible d’obtenir rétrospectivement la date de naissance d’une cellule. Cette datation est particulièrement intéressante dans le cas des neurones puisque le dogme de leur non-prolifération chez le mammifère adulte a été largement battu en brèche ces dix dernières années. Un consensus existe sur la production continue de précurseurs neuronaux dans deux régions du cerveau : la zone sous-granulaire du gyrus denté de l’hippocampe et la zone située sous les ventricules latéraux d’où les cellules migrent vers les bulbes olfactifs. Cependant, l’importance de cette néoneurogenèse chez l’adulte décroît au cours de la phylogénie, des poissons et oiseaux aux rongeurs puis aux primates non humains. Une des controverses les plus aiguës en neurosciences est son existence dans le néocortex de l’homme adulte [2]. Le cortex humain contient environ 10 milliards de neurones et c’est le principal organe dont dépendent nos capacités cognitives de raisonnement et de théorisation. La question de savoir quand ces cellules sont engendrées et quelle est leur durée de vie est cruciale pour notre compréhension du fonctionnement cérébral et, au-delà, de l’hominisation. Dans leur première étude, les auteurs avaient montré le renouvellement de cellules non neuronales comme celles du tractus gastro-intestinal et du muscle ainsi que celui des cellules gliales du cortex occipital mais l’âge des neurones dans cette région remontait à la date de naissance des individus testés [1]. Dans leur nouvel article [3], ils appliquent la méthode aux autres lobes du cortex humain et obtiennent une date de naissance de 0,0±0,4 an après la date de naissance des sujets. Pour vérifier ces résultats, les auteurs ont alors eu l’idée d’utiliser une autre méthode fondée sur l’analyse des cerveaux de patients cancéreux ayant reçu, pour des raisons diagnostiques, une injection de BrdU, un marqueur de prolifération. La durée de survie après les injections était de 4,2 mois à 4,3 années. Sur les 515 cellules BrdU positives analysées, aucune ne correspondait à un neurone visualisé par des marqueurs sélectifs (NeuN ou neurofilaments). Étant donné les limites de détection des deux méthodes, il est clair que si l’on ne peut exclure formellement une neurogenèse chez l’adulte, elle ne représenterait qu’une infime proportion de la quantité totale de neurones et que la durée de vie de ces neurones, s’ils existent, serait inférieure à 4,2 mois. Si on utilise le rasoir d’Occam, on peut donc conclure que la non-prolifération des armes nucléaires à …
Appendices
Références
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