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Cellules sombres : l'histoire continueDark cells: the endless story[Record]

  • Gérard Friedlander

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  • Gérard Friedlander
    Rédacteur en chef,
    Faculté de Médecine Necker,
    156, rue de Vaugirard,
    75730 Paris Cedex 15,
    France.
    friedlander@necker.fr

Trente-cinq ans après les observations fondatrices de Jacqueline Hagège et de Gabriel Richet, le feuilleton des cellules sombres rénales, ou cellules intercalaires, n'a pas trouvé son épilogue ((→) m/s 2005, n° 6-7, p. 652). Des données morphologiques et fonctionnelles nombreuses ont été fournies au dossier, des pistes susceptibles de donner la clé de l'apparition ou de la disparition de ces cellules et de leurs différents types ont été tracées. Ce sont ces éléments qui seront résumés ici. C'est dans la partie terminale du tubule rénal, le canal collecteur, que les cellules intercalaires sont observées. Ces cellules représentent jusqu'à 30 % du nombre total de cellules épithéliales tubulaires. Deux types de cellules intercalaires ont été décrits à ce jour. Toutefois, des formes intermédiaires entre ces deux types peuvent être occasionnellement observées dans des situations métaboliques instables ou lors de changements rapides de l'équilibre acidobasique. Les cellules de type A (ou α) sont pourvues de structures tubulovésiculaires qui bombent dans la lumière tubulaire (Figure 1). Leur membrane apicale est différenciée en microvillosités ou en en microplicatures. Elles assurent une sécrétion de protons (ions H+) dans la lumière tubulaire et entraînent ainsi l'acidification de l'urine. Leur nombre et la surface de leur membrane apicale augmentent dans des situations d'acidose respiratoire ou métabolique. Les cellules de type B (ou β) apparaissent plus sombres en microscopie optique ou électronique en raison d'une plus grande densité en mitochondries (Figure 1). C'est leur nombre que J. Hagège et G. Richet a vu augmenter lors de l'alcalose métabolique. Elles assurent une sécrétion d'ions bicarbonates (HCO3-) dans la lumière tubulaire et alcalinisent l'urine. Ces différences de fonction sont sous-tendues par des équipements spécifiques en transporteurs membranaires (Figure 2). Les cellules de type A expriment dans leur membrane apicale une H+-ATPase de type vacuolaire, responsable de la sécrétion de protons, tandis qu'un échangeur chlore - bicarbonate du type de la bande 3 (AE-1) est inséré dans leur membrane basolatérale et assure la sortie de bicarbonate de la cellule. Dans la médullaire rénale, la sécrétion de protons fait également intervenir une H+,K+-ATPase qui échange un proton contre un ion potassium et dont la régulation pourrait être différente de celle de la H+-ATPase vacuolaire. La situation est (presque) symétrique en ce qui concerne l'organisation des transporteurs dans les cellules de type B : une H+-ATPase est insérée dans la membrane basolatérale et un transporteur de bicarbonate fonctionne dans la membrane apicale. Toutefois, ce dernier n'est pas apparenté à la bande 3 et pourrait correspondre à un nouvel échangeur d'anions, la pendrine, spécifiquement exprimé dans cette sous-population de cellules rénales. L'expression de la pendrine est augmentée au cours de l'alcalose métabolique et diminuée au cours de l'acidose métabolique. Des mutations de la pendrine sont responsables, chez l'homme, du syndrome de Pendred qui associe un goitre et une surdité (la pendrine est exprimée également par les cellules thyroïdiennes et celles de l'oreille interne) [1-3]. Les animaux dont la pendrine est invalidée par recombinaison homologue ont un défaut de sécrétion de bicarbonate dans l'urine en situation de charge alcaline [4]. L'existence d'un autre échangeur d'anions, AE-4, dans les cellules intercalaires de type B de certaines espèces a été rapporté. La question centrale, dont les conséquences en termes de plasticité cellulaire sont importantes, est de savoir si, en fonction des besoins de l'homéostasie acido-basique, une cellule de type A peut se transformer en une cellule de type B et réciproquement. Des arguments expérimentaux convaincants ont été apportés en faveur de cette hypothèse bien que le signal …

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