Les antigènes de groupes sanguins Rh (Rhésus) sont portés par un complexe protéique composé de deux sous-unités principales spécifiquement exprimées dans le lignage érythrocytaire, Rh et RhAG (Rh-associated glycoprotein), codées respectivement par des gènes homologues présents sur le bras court des chromosomes 1 (p34-p36) et 6 (p12-p21). Des protéines accessoires (LW/ICAM-4, CD47 et glycophorine B) sont également associées à ce complexe. Dans le phénotype Rhnull - caractérisé par une anémie hémolytique de sévérité variable associée à une stomato-sphérocytose - le complexe Rh est absent ou sévèrement diminué. Le rôle structural majeur du complexe Rh dans la membrane du globule rouge résulte d’une interaction spécifique avec l’ankyrine R, permettant l’ancrage des protéines du squelette membranaire dépendant de la spectrine. Des mutations du gène RH ou du gène RHAG sont à l’origine des phénotypes Rhnull. Parmi ces mutations, l’une d’entre elles, affectant le gène RHAG, abolit l’interaction avec l’ankyrine [1]. Des progrès importants ont été réalisés dans la connaissance de la structure et du polymorphisme des protéines Rh. Cependant, bien que les prévisions de structure secondaire aient été en faveur d’une organisation topologique avec 12 domaines transmembranaires, évocatrice de celle des protéines de transport, la fonction des protéines Rh est longtemps restée mystérieuse. La première indication a trouvé son origine dans des études phylogénétiques qui ont révélé que les protéines de la famille Rh, incluant les protéines érythroïdes (Rh, RhAG) et des homologues non érythroïdes (RhBG et RhCG) présents dans divers tissus, présentent une relation ancestrale avec des transporteurs spécifiques d’ammonium de la famille Mep/Amt (methylammonium permease/ammonium transporters) conservés chez les archaebactéries, les eubactéries, les champignons, les végétaux, ainsi que chez des animaux invertébrés, définissant ainsi la superfamille des protéines Mep/Amt/Rh. La preuve expérimentale a été apportée par des expériences de complémentation fonctionnelle montrant que RhAG et RhCG peuvent restaurer l’influx et l’efflux d’ammonium dans des levures déficientes pour les trois transporteurs endogènes Mep1, Mep2 et Mep3 [2]. RhAG et RhCG seraient donc les premiers transporteurs spécifiques d’ammonium décrits chez les vertébrés. Des travaux ultérieurs fondés sur l’expression dans des oeufs de xénope ont confirmé que les glycoprotéines Rh (RhAG, RhBG et RhCG) sont toutes capables de transporter l’ammonium. Dans les micro-organismes et chez les végétaux, l’ammonium représente une excellente source d’azote. Cependant, chez les vertébrés, l’ammonium est un dérivé du catabolisme des protéines produit par l’intestin, le rein et les muscles, et éliminé par le foie. Il est toxique pour le système nerveux. Son élimination contrôlée dans l’urine joue un rôle majeur dans la régulation de l’équilibre acide-base. Les glycoprotéines humai-nes RhBG et RhCG sont majoritairement exprimées dans le rein, mais elles sont également présentes dans le foie (et aussi dans la peau et les gonades), organes impliqués dans la production et l’élimination de l’ammonium. L’ammonium existe en solution sous deux formes en équilibre, NH4+ et NH3, dont la concentration est dépendante du pH (pKa = 9,25 à 22° C). Classiquement, il est admis que la forme neutre NH3 est capable de diffuser de façon passive à travers les lipides membranaires alors que le transport de la forme chargée NH4+ est assuré de manière non spécifique par différents transporteurs de K+ et de Na+. Des études indirectes fondées sur l’incorporation de l’analogue méthylammonium et d’autres plus directes d’électrophysiologie (voltage-clamp) ont abouti à des conclusions contradictoires concernant le mécanisme de transport relayé par les glycoprotéines Rh exprimées dans des oeufs de xénope. Pour certains, il s’agirait d’un transport électrogénique et, pour d’autres, d’un transport électroneutre relayé par un échangeur NH4 …
Appendices
Références
- 1. Nicolas V, Le Van Kim C, Gane P, et al. Rh-RhAG/ ankyrin-R, a new interaction site between the membrane bilayer and the red cell skeleton, is impaired by Rh(null)-associated mutation. J Biol Chem 2003 ; 278 : 25526-33.
- 2. Marini AM, Matassi G, Raynal V, et al. The human Rhesus-associated RhAG protein and a kidney homologue promote ammonium transport in yeast. Nat Genet 2000 ; 26 : 341-4.
- 3. Ripoche P, Bertrand O, Gane P, et al. Human Rhesus-associated glycoprotein mediates facilitated transport of NH3 into red blood cells. Proc Natl Acad Sci USA 2004 ; 101 : 17222-7.
- 4. Khademi S, O’Connell J, Remis J, et al. Mechanism of ammonia transport by Amt/Mep/Rh : structure of AmtB at 1.35 A. Science 2004 ; 305 : 1587-94.
- 5. Zheng L, Kostrewa D, Berneche S, et al. The mechanism of ammonia transport based on the crystal structure of AmtB of Escherichia coli. Proc Natl Acad Sci USA 2004 ; 101 : 17090-5.
- 6. Bakouh N, Benjelloun F, Hulin P, et al. NH3 is involved in the NH4+ transport induced by the functional expression of the human RhCG glycoprotein. J Biol Chem 2004 ; 279 : 15975-83.
- 7. Soupene E, Inwood W, Kustu S. Lack of the Rhesus protein Rh1 impairs growth of the green alga Chlamydomonas reinhardtii at high CO2. Proc Natl Acad Sci USA 2004 ; 101 : 7787-92.