La dyskératose congénitale (DKC), maladie multisystémique caractérisée par des anomalies cutanées, des troubles hématopoïétiques et une prédisposition aux cancers comporte deux formes, différentes par leur mode de transmission : (1) la dyskératose liée à l’X, due à des mutations du gène DKC1, situé en Xq28, codant pour la dyskérine, associée aux petits ARN nucléolaires ((→) m/s 2000, n° 4, p. 562) ; (2) la DKC autosomique dominante, beaucoup plus rare, due à des mutations dans le gène TERC, localisé en 3q21-23, codant pour l’ARN matriciel de la sous-unité catalytique de la télomérase (TERT) ((→) m/s 2002, n° 1, p. 39). Dans les deux formes de DKC, il existe donc une inhibition partielle de la télomérase, cette transcriptase inverse qui synthétise les répétitions télomériques à chaque extrémité des chromosomes. L’importance du rôle de la télomérase dans la maintenance de la longueur des télomères, capital en biologie cellulaire, en particulier dans le vieillissement et les cancers, a fait l’objet de nombreux travaux dont médecine/sciences s’est fait l’écho à plusieurs reprises [1, 2]. Le mécanisme pathogénique des deux formes de DKC ayant été compris - atteinte des deux composants de la télomérase, avec pour conséquence un raccourcissement très net des télomères dans les cellules des malades -, tout semblait dit sur cette redoutable maladie. Pourtant, une équipe anglaise qui s’est investie dans l’étude des DKC [3] vient de découvrir un phénomène extrêmement intéressant : dans la forme à transmission dominante de la DKC, on observe indiscutablement un phénomène d’anticipation [4]. Une étude de plusieurs familles sur trois générations montre que certains sujets de la génération I peuvent rester asymptomatiques leur vie durant, et que les troubles apparaissent plus précocement à la génération III qu’à la génération II. Ainsi, ce mécanisme qu’on croyait réservé aux maladies par expansion de triplets peut aussi être observé dans d’autres affections humaines. Le modèle murin aurait pu mettre la puce à l’oreille puisque, chez les souris TR-/-, ce n’est qu’à partir de la 6e génération que se manifestent les anomalies (en l’occurrence, un vieillissement prématuré). L’anticipation se produit donc aussi, mais encore plus lentement car les cellules des lignées de souris utilisées sont pourvues de télomères beaucoup plus longs que ceux des cellules humaines. La malaria, fléau mondial avec ses deux millions de morts annuelles, est globalement le fruit d’un échec de la réponse immunitaire de l’hôte. L’ampleur de la variabilité antigénique de la protéine parasitaire EMP1 (erythrocyte membrane protein 1), exprimée à la surface des érythrocytes infectés, est responsable de l’échappement immunitaire et donc de la persistance de l’infection qui, in fine, se traduit par des difficultés à éradiquer le pathogène. Si la fréquence de recombinaison exceptionnellement élevée du gène var, codant pour la protéine EMP1, rend compte de l’importante variabilité antigénique de P. falciparum [5], M. Recker et al. [6] avancent l’existence d’un mécanisme, complémentaire, impliquant la pression immunitaire exercée par l’hôte. Avec un constat pour le moins paradoxal : les individus les plus capables de mettre en oeuvre une réaction immunitaire efficace contre les variants du parasite sont aussi les plus susceptibles de présenter une infection persistante. Les auteurs proposent un schéma, testé par modélisation mathématique, au sein duquel coexistent deux types de réactions immunes. L’un est une réponse lente dirigée contre l’épitope majeur de la protéine parasitaire : isolée, cette réaction devrait à elle seule suffire à terminer l’infection. Le second type de réaction immune - il s’agit de l’hypothèse des auteurs - comprendrait une série de réponses croisées, transitoires, dirigées contre des motifs antigéniques mineurs partagés par différents variants. …
Appendices
Références
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