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Le drame de la mortalité infantile : comment pourrait-on y remédier ?Child survival : a global health challenge[Record]

  • Domininique Labie

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  • Domininique Labie
    Département de génétique, développement et pathologie moléculaires,
    Institut Cochin, Inserm U.567,
    24, rue du Faubourg Saint-Jacques,
    75014 Paris, France.
    labie@cochin.inserm.fr

Une série de cinq articles majeurs parus à l’été 2003 dans le Lancet souligne le scandale et le défi que représente, au début du xxie siècle, la mort, chaque année, de plus de dix millions d’enfants de moins de cinq ans. Les progrès observés ces dernières décennies l’ont été surtout dans les pays riches, et la baisse de cette mortalité, souhaitée par l’OMS en 1990, est loin d’avoir été atteinte selon le dernier rapport paru en 2002 [1]. Ces cinq articles ont été rédigés chacun par un groupe d’auteurs différents, les experts étant d’origines variées (OMS, UNICEF, banque mondiale, diverses ONG, spécialistes de grands instituts et responsables locaux de politique de santé). Trois points émergent avec insistance [2] : (1) l’importance du problème, qui justifie une approche intégrée tenant compte de causes sous-jacentes telles que les carences nutritionnelles ; (2) l’importance et la difficulté d’offrir une couverture sanitaire aux populations les plus défavorisées ; (3) la nécessité absolue de données épidémiologiques précises, permettant de définir partout une politique de santé spécifique impliquant des autorités locales. On peut, dans ces conditions se référer à la démarche suivie par les auteurs. Un premier article propose une analyse épidémiologique des décès chiffrés par l’OMS. Quelles causes ? Quelles populations [3] ? L’analyse des données révèle que, sur 10,8 millions de décès, 41 % surviennent en Afrique subsaharienne et 34 % en Asie du Sud. Dit autrement, 42 pays concentrent à eux seuls 90 % des décès d’enfants. Un tableau détaillé révèle cependant des différences. Si l’on considère le nombre absolu de décès, les pays asiatiques, Inde, Chine, Pakistan… sont dans le peloton de tête. Mais si l’on considère le taux de mortalité pour 1 000 naissances, ce sont les pays de l’Afrique subsaharienne, Sierra Leone en tête (316 ‰), qui ont la palme, talonnés par l’Afghanistan (257 ‰), alors que, dans le sous-continent indien, les taux varient entre 18,8 ‰ au Kerala et 137,6 ‰ au Madhya Pradesh. L’étude épidémiologique montre enfin que la majorité des décès survient dans des zones rurales et dans les bidonvilles (slums) des grandes villes. Eau polluée, absence de conditions sanitaires minimales, naissances trop rapprochées et alimentation inadéquate ou défaut d’allaitement maternel sont autant de facteurs aggravants qui interfèrent évidemment avec la cause directe du décès, qu’elle soit infectieuse ou accidentelle. Ces intrications font apparaître les classifications, dont celle de l’OMS, trop simplificatrices, les maladies pouvant être concomitantes ou survenir séquentiellement : on sait que la rougeole se complique de pneumonie et de diarrhée, que le sida accroît la susceptibilité à d’autres infections, que l’hypotrophie facilite les maladies infectieuses, de même qu’un déficit en vitamine A ou en zinc. Sauf dans quelques-uns des pays étudiés, les bilans épidémiologiques sont souvent incomplets en ce qui concerne les catégories les plus démunies. Parmi les 10,8 millions de décès recensés, 3,9 (33 %) surviennent dans le premier mois de vie. Cette proportion varie selon les pays entre 20 et 60 %, de façon inversement proportionnelle au taux de mortalité global. Une évaluation approximative, et incomplète, attribue 24 % des décès à une étiologie infectieuse, 29 % à une asphyxie, 24 % à la prématurité, 7 % au tétanos. Les autres causes immédiates sont la diarrhée, une pneumonie, le paludisme, la rougeole même non compliquée, 10 % enfin de causes variées ou non déterminées. Quelle que soit la cause du décès, l’hypotrophie en majore l’incidence de façon considérable (Figure 1). Tenant compte de la variabilité observée, les auteurs ont tenté une typologie basée sur les cinq causes majeures de décès, observant ainsi des regroupements géographiques, et ont défini …

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