En 2000, E Lagasse et al. publiaient dans Nature Medicine que la transplantation de cellules médullaires ayant un phénotype identique à celui de cellules souches hématopoïétiques (CSH) corrigeait la fonction hépatique de souris tyrosinémiques Fah-/- ((→) m/s 2001, n° 4, p. 491) [1]. Les hépatocytes FAH+ de ces receveurs exprimaient des marqueurs spécifiques du donneur, ce qui avait fait émettre l’hypothèse d’une « transdifférenciation/plasticité » des CSH. Mais la preuve irréfutable de cette potentialité hépatique de CSH que constituait l’analyse clonale se faisait attendre. Elle ne viendra pas puisque cette même équipe de M. Grompe, et celle de D. Russell concluent, après une analyse rigoureuse des proportions des génomes du donneur et du receveur dans les animaux fah-/- transplantés avec des cellules de moelle de souris sauvages, qu’une fusion cellulaire est à l’origine de la restauration d’hépatocytes FAH+ [2, 3]. Si les cellules de moelle osseuse s’étaient différenciées en hépatocytes, le génotype du donneur aurait dû prédominer largement sur celui du receveur, surtout compte tenu de l’important avantage sélectif des cellules FAH+ chez le receveur fah-/- après retrait de la drogue correctrice (NTBC). Or l’analyse par Southern Blot était incompatible avec cette hypothèse, puisque l’ADN du donneur était toujours très inférieur à ce qui était théoriquement escompté. La stratégie est particulièrement rigoureuse: utilisation de donneurs et de receveurs identifiables par des marqueurs génétiques facilement quantifiables en Southern blot, analyse des génotypes du foie de receveurs secondaires et tertiaires (après transplantation d’hépatocytes des receveurs fah-/- corrigés par le greffon médullaire initial). La fusion est directement visualisée par l’analyse du caryotype des hépatocytes individuels qui confirme la présence de cellules ayant 80 ou 120 chromosomes, résultant de la fusion entre une cellule du donneur et un hépatocyte fah-/- diploïde ou tétraploïde (les hépatocytes peuvent être tétraploïdes). Une aneuploïdie est présente, et souvent le caryotype des cellules originales du donneur est très modifié. Ce dernier point est important dans une perspective thérapeutique: en effet, la vertu thérapeutique de ces hétérocaryons est fascinante car non seulement le noyau de la cellule hématopoïétique mature du donneur est « reprogrammé » et transcrit le gène fah, aboutissant à la production d’une protéine FAH fonctionnelle par l’hybride, mais ces hétérocaryons prolifèrent et peuvent restaurer la fonction hépatique de receveurs fah-/- secondaires, voire tertiaires. Futés, ils peuvent aussi faire une mitose réductionnelle et devenir diploïdes, alléchant ainsi les pauvres chercheurs en leur faisant miroiter une transdifférenciation insoupçonnée. Ce n’est pourtant pas le moment de les décourager! Dans les noyaux cellulaires des mammifères, chaque chromosome occupe un volume distinct appelé territoire chromosomique [4]. Ces territoires rendent compte d’une architecture du noyau potentiellement liée à l’activité transcriptionnelle. En conséquence, il est important de comprendre comment s’établissent et se maintiennent les territoires chromosomiques les uns par rapport aux autres si l’on veut élucider les liens entre l’organisation spatiale du noyau et l’expression génique. Deux équipes, dont la nôtre, ont récemment caractérisé la dynamique de cet arrangement au cours du cycle cellulaire en créant des motifs fluorescents stables sur la chromatine, motifs qui peuvent être suivis au cours du temps dans les cellules vivantes [5, 6]. Ces études ont, d’une part, confirmé que l’arrangement des territoires chromosomiques est maintenu en interphase [7] et, d’autre part, montré que cet arrangement est globalement transmis lors de la mitose, même si les conclusions des deux articles divergent sur ce point. J. Walter et al. ont observé que dans les cellules Hela, des domaines de chromatine proches dans la cellule-mère se retrouvent proches dans les cellules-filles dans la majorité des cas, mais que cette …
Appendices
Références
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