Abstracts
Résumé
Le contentieux des risques technologiques, des risques fantômes ou des toxic torts provoque des décisions de justice qui doivent se prononcer sur des incertitudes. Incertitude de la relation de cause à effet : il arrive qu’on ne puisse pas démontrer que telle activité cause invariablement le dommage; on ne peut que montrer un certain rapport entre l’un et l’autre. Incertitude du risque lui-même : il arrive qu’on ne puisse pas établir que telle activité crée effectivement un risque pour les individus. Aujourd’hui plus encore qu’hier, le droit de la responsabilité se construit en devant tenir compte du possible, du probable et du « peut-être ».
Cette nouvelle construction perturbe fortement les discours théoriques du droit de la responsabilité qui ne sont pas conçus pour supporter de telles incertitudes. Ces discours menacent de perdre leur capacité à décrire le droit positif, leur aptitude à produire de la connaissance juridique et leur vocation à théoriser le droit.
Je soutiens dans ce texte que le contentieux des risques technologiques, des risques fantômes ou des toxic torts provoque une rupture de l’unité conceptuelle du droit de la responsabilité garantie depuis longtemps par les discours juridiques théoriques. Cette rupture atteint d’abord l’exigence de causalité parce que c’est en son sein que s’est logée la forme moderne de rationalité déstabilisée par l’évolution scientifique et technologique contemporaine. Cet article suggère alors un mode de construction des discours théoriques de façon à ce que ceux-ci puissent soutenir l’incertitude du droit de la responsabilité, et ce au moyen d’une forme de dialectique.
Abstract
Litigation involving technological risks, so-called “phantom risks” and toxic torts gives rise to decisions in which courts must rule based on inherent uncertainties. The uncertainty may permeate the relation between cause and effect: it will often be impossible to demonstrate that a given activity invariably caused the injury; one is only able to demonstrate some link between the one and the other. The uncertainty may also relate to the risk itself. It may be impossible to demonstrate that a given activity indeed creates risks for individuals. Today, and more so than in the past, the development of the law of civil liability affords particular consideration to the possible and the probable.
These new developments significantly perturb the theoretical discourse on the law of civil liability, which is ill-suited to support such uncertainties. Such discourses threaten to lose their capacity to describe the positive law, their aptitude to produce legal knowledge, and their vocation to theorize the law.
In this text, I argue that litigation involving technological risks, so-called “phantom risks”, and toxic torts provokes ruptures in the law of civil liability’s conceptual unity, long guaranteed by theoretical legal discourse. These ruptures affect the exigency of causation because, as I also advance, it is under its guise that the modern form of rationality, destabilized by contemporary scientific and technological evolution, has lodged itself. Therefore, this article proposes a dialectical method of constructing legal discourse so as to make it responsive to legal uncertainty in the law of civil liability.