McGill Law Journal
Revue de droit de McGill
Volume 56, Number 2, February 2011
Table of contents (7 articles)
Articles
-
A Theory of Fiduciary Liability
Paul B. Miller
pp. 235–288
AbstractEN:
The law of fiduciaries has been developed in an unprincipled manner. Consequently, the common law lacks a clear idea of the nature of the fiduciary relationship, the justification for fiduciary duties, and the purpose of fiduciary remedies. However, according to the author a principled theory of fiduciary liability may be derived from the common law. The focal point is the recent decision of the Supreme Court of Canada in Galambos v. Perez. The theory of liability suggested by Galambos and developed by the author is based on the conventional notion that fiduciary liability is premised upon the existence of a fiduciary relationship. The author argues that a clearer account of the nature and normative significance of the fiduciary relationship is critical to developing a sound understanding of the nature and scope of fiduciary duties. Under the theory developed by the author, the fiduciary relationship is treated as a distinctive kind of legal relationship. It is one in which one person (the fiduciary) wields discretionary power over the practical interests of another (the beneficiary). According to the author, fiduciary duties are explicable solely in terms of normatively salient qualities of the fiduciary relationship. The author explains these qualities and shows how they support and limit the incidence of fiduciary duties.
FR:
Le droit fiduciaire fut développé sans principe directeur. Par conséquent, la common law n’a pas d’idée claire de ce qu’est la nature de la relation fiduciaire, de la justification des obligations fiduciaires et de l’objectif des remèdes fiduciaires. Toutefois, selon l’auteur, le principe théorique de la responsabilité fiduciaire provient peut-être de la common law. L’élément principal est le jugement récemment rendu par la Cour suprême du Canada dans Galambos c. Perez. La théorie de la responsabilité suggérée par Galambos et développée par l’auteur est basée sur la notion conventionnelle selon laquelle la relation fiduciaire est la prémisse sur laquelle l’existence d’une responsabilité fiduciaire est établie. L’auteur tente de démontrer qu’une explication plus claire de la nature et de la signification normative de la relation fiduciaire est un élément essentiel au développement d’une compréhension informée de la nature et de la portée des obligations fiduciaires. Selon la théorie développée par l’auteur, la relation fiduciaire est traitée comme étant une relation légale distincte. II s’agit d’une relation dans laquelle une personne (le fiduciaire) exerce un pouvoir discrétionnaire sur les intérêts d’une autre personne (le bénéficiaire). Selon l’auteur, les obligations fiduciaires dépendent principalement des qualités normatives saillantes de la relation fiduciaires. L’auteur explique ces qualités et démontre comment ces dernières supportent et limitent l’incidence des obligations fiduciaires.
-
The Judicial System in the Digital Age: Revisiting the Relationship between Privacy and Accessibility in the Cyber Context
Karen Eltis
pp. 289–316
AbstractEN:
Despite technology’s reach into all parts of social life, its effects on the judiciary have been under-theorized. The “Digital Age”, and unfettered usage and access to digital information, will have untold effects on core values of judicial independence, impartiality and the delicate balance between privacy and the “open court” principle. Technology—as well as the dramatically increased availability of information of all kinds and quality—is distorting the judicial process and its outcomes. It is of primary importance, therefore, to identify the broad issues that emerge from the growing use of technology, and to provide a theoretical basis for adjudicating the ongoing tension between privacy and transparency in the judicial setting. Too often the judiciary pits privacy against the “open court” principle and accepts a culturally narrow view of what constitutes privacy and how it affects the judicial process. In particular, this article investigates the effects of online court documents to establish why, despite the current preference for openness and transparency, a contextualized understanding of privacy is desirable. Indeed, if we rethink privacy within the cyber context, it can be considered an ally of openness in the court system.
FR:
Malgré la présence de la technologie dans tous les aspects de la vie sociale, ses effets sur le système judiciaire sont sous-théorisés. L’ « ère digitale », l’accès à l’information numérique et son utilisation sans entraves auront des effets inédits sur les valeurs fondamentales de l’indépendance judiciaire et de l’impartialité, ainsi que sur l’équilibre délicat entre le respect de la vie privée et le principe de la publicité des débats. La technologie, et l’énorme augmentation de la disponibilité d’information de nature et de qualité variées, déforme tant le processus judiciaire que ses résultats. Il est donc d’une importance primordiale d’identifier les grands enjeux qui ressortent de l’utilisation croissante de la technologie et d’élaborer un fondement théorique pour examiner la tension continue entre le droit à la vie privée et la transparence en milieu judiciaire. Il arrive trop souvent que l’appareil judiciaire oppose le droit à la vie privée au principe de la publicité des débats et accepte une vision culturelle restreinte de ce que constitue le droit à la vie privée et son impact sur le processus judiciaire. Plus particulièrement, cet article étudie les effets de l’informatisation des documents des tribunaux pour déterminer pourquoi une compréhension contextuelle du droit à la vie privée est désirable, et ce, malgré la préférence actuelle pour l’ouverture et la transparence. En effet, si nous reconcevons le droit à la vie privée dans le contexte électronique, il peut être considéré comme un allié de la transparence dans le système judiciaire.
-
Le contrat d’assurance contemporain et la réification des parties
André Bélanger
pp. 317–348
AbstractFR:
La relation d’assurance entre le preneur et l’assureur est source d’un double rôle social, soit celui du regroupement des assurés et celui de la définition même des risques à contrer. Or, tant la théorie des contrats que la pratique juridico-assurantielle tendent vers une individualisation des parties et une désocialisation du contrat d’assurance. L’auteur s’interroge à savoir si au sein de la relation contractuelle qui le lie à l’assureur, le preneur peut être perçu autrement qu’à titre de bien économique risqué à gérer par l’entreprise assurance. Inversement, l’assureur est-il, au plan contractuel, davantage qu’un commerçant duquel le preneur doit soutirer le maximum de bénéfices ? Alors que la relation contractuelle est d’abord et avant tout interprétée à titre de valeur économique par les juristes, il semble nécessaire de réfléchir à la possibilité de réhumaniser le contrat par le biais de règles juridiques qui ne font pas uniquement appel à des préceptes moraux flous en mal de légitimation tels ceux de la plus haute bonne foi et l’équité contractuelle. Il est donc intéressant de s’attarder à certains des travaux de Csaba Varga portant sur la question de la réification en droit, de même qu’à ceux plus récents du philosophe Axel Honneth, afin de vérifier si la question de la réification peut être pertinente à l’étude du contrat d’assurance.
EN:
The insurance relationship between the policyholder and the insurer creates a double social role, that is, the grouping of insured parties and the very definition of the risks to be addressed. And yet, both contract theory and legal/insurance practice lean towards the individualization of parties and a desocialization of the insurance contract. The author seeks to determine whether, as far as the contractual relationship with the insurer goes, the policyholder can be perceived as something other than a risky economic good that must be managed by the insurance company. Conversely, is the insurer more than merely a seller from whom the policyholder must derive the most benefit? While jurists interpret the contractual relationship first and foremost in terms of economic value, it seems necessary to reflect on the possibility of rehumanizing the contract through legal rules that call upon more than vague moral precepts which lack in legitimacy, such as utmost good faith and contractual equity. As such, it is interesting to examine the work of Csaba Varga, which addresses reification in law, as well as the more recent works of philosopher Axel Honneth, to verify whether reification can be relevant to the study of the insurance contract.
-
The Impossibility of a Critically Objective Criminal Law
Dennis J. Baker
pp. 349–394
AbstractEN:
In this paper, I argue that principled criminalization does not have to rely on critical objectivity. It is not necessary to demonstrate that conduct is criminalizable only if it is wrong in a transcultural and truly correct sense. I argue that such standards are impossible to identify and that a sounder basis for criminalization decisions can be found by drawing on our deep conventional understandings of wrong. I argue that Feinberg’s harm principle can be supported with conventional accounts of harm, and that such harms can be identified as objectively harmful when measured against our deep conventional understandings of harm. The distinction that critical moralists make between truly harmful conduct and conventionally objective harmful conduct is unsustainable because many conventional harms impact real victims in social contexts. The best that we can do is to scrutinize our conventional conceptualizations of harm and badness, but that scrutiny is constrained by the limits of epistemological inquiry and our capacity for rationality at any given point in time. Many acts are criminalizable because they violate social conventions that are shareable by communally situated agents.
FR:
Dans cet essai, je soutiens que les principes de la criminalisation ne reposent pas forcément sur l’objectivité critique. Il n’est pas nécessaire de démontrer qu’un comportement est « criminalisable » seulement s’il est réellement répréhensible au sens transculturel. Je soutiens que de tels critères sont impossibles à identifier et que nos notions conventionnelles et approfondies du mal constituent une base plus saine pour les décisions relatives à la criminalisation. Je soutiens que les explications conventionnelles du mal appuient le principe élaboré par Feinberg et que ces maux peuvent être identifiés comme étant objectivement nuisibles lorsque comparés à notre compréhension conventionnelle et approfondie du mal. La distinction qu’établissent les moralistes critiques entre le comportement réellement nocif et le comportement généralement considéré comme étant objectivement nocif est intenable parce que de nombreux maux conventionnels affectent des victimes réelles dans des contextes sociaux. Le mieux que nous pouvons faire est d’examiner de façon minutieuse nos conceptions du mal et de la méchanceté. Cet examen est toutefois limité par les limites de l’enquête épistémologique et par notre capacité de rationalité à un moment donné. De nombreux actes sont « criminalisables » parce qu’ils violent des conventions sociales qui peuvent se partager par l’entremise d’agents collectifs.
-
Qu’est ce que l’interculturalisme ? / What is Interculturalism?
Gérard Bouchard
pp. 395–468
AbstractFR:
L’auteur présente l’interculturalisme comme modèle d’intégration et de gestion de la diversité ethnoculturelle. Il s’inspire du parcours québécois amorcé depuis les années 1960-1970, mais aussi de la réflexion et des expériences conduites en Europe où la philosophie interculturaliste a d’importantes racines. Au Québec, l’interculturalisme bénéficie présentement de larges appuis dans la population (comme l’ont montré les audiences publiques de la Commission Bouchard-Taylor), mais fait aussi l’objet d’importantes critiques.
Un second objectif consiste à répudier certains malentendus qui ont introduit de la confusion dans le débat public, plus spécialement au Québec. L’auteur démontre que : l’intégration collective est un processus global concernant l’ensemble des citoyens et des composantes d’une société et non seulement l’insertion des immigrants ; l’interculturalisme n’est pas une forme déguisée de multiculturalisme ; l’intégration est fondée sur un principe de réciprocité ; le pluralisme et le principe de la reconnaissance ne conduisent nullement à la fragmentation ; le pluralisme est une option générale pouvant recevoir diverses applications correspondant à autant de modèles, dont le multiculturalisme ; le type de pluralisme préconisé par l’interculturalisme peut être qualifié d’intégrateur ; les accommodements ne sont pas des privilèges, ils n’ont pas été conçus uniquement pour les immigrants et ne donnent pas libre cours aux valeurs, croyances ou pratiques contraires aux normes fondamentales de la société ; l’interculturalisme se soucie autant des intérêts de la majorité culturelle que des intérêts des minorités et des immigrants ; et sauf circonstances extrêmes, les solutions radicales conviennent rarement à la nature des problèmes que pose la diversité ethnoculturelle.
EN:
The author presents interculturalism as a model for the integration and administration of ethnocultural diversity. He not only draws inspiration from the path taken by Quebec since the 1960s and 1970s, but also from personal reflection and from experiments conducted in Europe, where the philosophy of interculturalism has significant roots. In Quebec, interculturalism currently benefits from widespread popular support (as the public hearings of the Bouchard-Taylor Commission demonstrated), but it is also the object of significant criticism.
A second goal is to repudiate certain misunderstandings that have caused confusion in the public debate, especially in Quebec. The author demonstrates that: integration is a global process affecting all the citizens and constituents in a society, and not simply the assimilation of immigrants; interculturalism is not a disguised form of multiculturalism; integration is based on a principle of reciprocity; pluralism and the principle of recognition do not in any way lead to fragmentation; pluralism is a general option with many possible applications corresponding to as many different models, including multiculturalism; the kind of pluralism advocated by interculturalism can be described as integrationary; accommodations are not privileges, they are not designed solely for immigrants, and they do not give free rein to values, beliefs, and practices that are contrary to the basic norms of society; interculturalism concerns itself as much with the interests of the cultural majority as with the interests of minorities and immigrants; except in extreme cases, radical solutions rarely meet the needs of the problems posed by ethnocultural diversity.