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Dans ce numéro de rentrée, nous avons sept articles avec des thèmes et des méthodologies pouvant souligner la richesse de la ligne éditoriale de la revue Management international.
Le premier article s’intitule « l’impact des différences culturelles et de l’intensité morale sur la prise de décision éthique : données de France et de Chine ». Jocelyn Husser, Anne Goujon-Belghit, Lingfang Song et Anaïs Rouanet mobilisent six scénarios reproduisant des situations d’achat typiques sur ces deux pays à partir d’un échantillon de 366 acheteurs professionnels (203 français et 163 chinois) autour des six caractéristiques du processus décisionnel développé par Jones (1991). Il en ressort que les acheteurs chinois reconnaissent davantage les enjeux éthiques que les acheteurs français et entendent agir de manière plus éthique sur une dimension : la proximité. En revanche, les acheteurs français entendent agir de manière plus éthique que les acheteurs chinois sur trois autres dimensions : l’immédiateté temporelle, la probabilité d’effet et la concentration de l’effet.
Le deuxième article proposé par cinq co-auteurs, Jie Xiong, Lu Xu, Qian Li, Zhe Yuan, Shubho Chakraborty revêt aussi un titre évocateur : « Faire le bien et/ou éviter le mal : Une vue ambidextre de la gestion des activités sociales des entreprises ». L’objectif est d’examiner comment les organisations gèrent les activités de responsabilité sociale des entreprises à travers des orientations variées, soit des activités pro-RSE (responsabilité sociale des entreprises) et/ou anti-iRSE (irresponsabilité sociale des entreprises) en utilisant un panel de 5 292 entreprises issues de KLD et COMPUSTAT sur sept années.
Le troisième article co-écrit par Julien Lachuer et Sébastien Jost est intitulé : « Les déterminants financiers et extra-financiers du discours responsable des PDG. Une analyse longitudinale sur le marché Américain ». Sous le prisme de la théorie de l’alignement et de la théorie instrumentale de la RSE, les auteurs étudient, le rôle modérateur des PDG en analysant les liens de causalité entre leurs discours introductifs dans les rapports de responsabilité et la performance financière et extra-financière. Au moyen d’un modèle Logit et d’une analyse textuelle, ils mènent une approche longitudinale des entreprises cotées au S&P500 entre 2014 et 2019, sur trois secteurs. Il en ressort que les discours des PDG sont reliés à la performance financière et extra-financière. Ces discours sont donc déterminants pour comprendre si les stratégies RSE des PDG répondent aux enjeux stratégiques sectoriels.
Le quatrième article est quant à lui le fruit du travail Hèla Yousfi. Son titre pose une vraie question : « Culture et management dans les pays du Sud : peut-on dépasser la théorie de la modernisation ? ». L’absence de consensus autour de la définition de concepts comme « culture » et « développement » ainsi que la domination de la théorie de la modernisation expliquent en grande partie les difficultés à identifier un cadre théorique clair pour penser l’influence de la culture aussi bien sur les trajectoires de développement économique que sur les pratiques organisationnelles. L’auteure revient ainsi sur les controverses principales qui ont marqué la littérature traitant du lien entre culture, développement économique et management. Elle insiste sur l’importance de dépasser la dichotomie tradition/modernité associée à la théorie de la modernisation pour mieux renouveler la réflexion autour de l’influence de la culture dans l’édification et la mise en place de pratiques organisationnelles efficaces dans les pays du Sud.
Le cinquième article est co-écrit par Sofiane Baba et Jacqueline Dahan avec pour titre : « L’acceptabilité sociale des projets : Un cadre intégrateur ». Les deux auteurs soulignent que la littérature aborde de manière générique les controverses liées à la non-acceptabilité sociale des projets. Ils soutiennent plutôt que chaque trajectoire d’acceptabilité sociale (ou de non-acceptabilité) est unique et le démontre grâce à l’analyse qualitative de trois projets controversés : l’exploitation uranifère Matoush (2006-2020), la cryptomonnaie de Facebook (2017-2021) et la vaccination contre la Covid-19 (2020-2021). Un cadre d’analyse qui conceptualise l’acceptabilité sociale en tant que trajectoire dynamique de légitimation et de justification est proposé autour de trois piliers : éco-traditionnel, symbolique et technique. Ce travail vient donc enrichir la compréhension des enjeux d’acceptabilité sociale et offre des perspectives de recherche à l’interface de l’acceptabilité sociale, de la légitimation et des logiques institutionnelles.
Min Feng et Driss Bourazzouq sont les deux auteurs du sixième article avec pour titre : « Les solutions de coping interactionnelles : le cas d’un cabinet d’avocats français ». Cette étude analyse qualitativement neuf solutions d’adaptation interactionnelles (ICS) dans la phase post-adoption de la mise en oeuvre des technologies de l’information dans un cabinet juridique français pour comprendre l’impact de ces solutions sur la gestion du technostress. Ils capturent l’impact des solutions d’adaptation interactionnelles (ICS) et remarquent certaines limites au sein de l’entreprise qui peuvent avoir un impact sur la performance des solutions d’adaptation interactionnelles (ICS) dans la gestion du technostress. Ces limites comprennent un manque d’interaction créative entre collègues au niveau du groupe et d’engagement organisationnel envers le processus de numérisation.
Le dernier article de ce numéro a pour auteurs Ching T. Liao et Ana Colovic. Ils abordent « L’impact de la recherche ouverte, la propriété étrangère et de l’information provenant du marché sur la productivité des PME exportatrices ». De façon plus précise, cet article étudie l’influence du statut d’exportateur — ancien ou nouvel exportateur — sur la capacité des PME à bénéficier de gains de productivité. Une analyse de régression en utilisant des données de panel de PME manufacturières espagnoles de la base de données PITEC est réalisée. Les résultats confirment que la combinaison du statut d’ancien exportateur et d’une stratégie de recherche ouverte permet aux PME d’accroître leur productivité. Cet effet est particulièrement important lorsque les entreprises sont exclusivement détenues par du capital domestique et qu’elles acquièrent des informations axées sur le marché.
Ce numéro offre aussi aux lecteurs de Management international la possibilité de découvrir un hommage à Delmas Lévesque (1933-2023), professeur de sociologie passionné, enraciné et intellectuel engagé dans le développement socioéconomique de son pays : le Québec. À l’origine de ce texte, Jean-François Chanlat qui prend la plume ici à plusieurs titres : en tant qu’ancien élève, ancien stagiaire de sociologie, ancien collègue de Delmas Lévesque à HEC Montréal, et comme professeur attaché à comprendre la dynamique anthropologique des organisations (Chanlat, 2023). Nous ne pouvons qu’espérer que cet hommage à Delmas Lévesque « encouragera le lectorat de Mi à relire certains de ses écrits qui constituent, encore aujourd’hui, une source de réflexions sur la société québécoise et le développement socioéconomique du monde ».
Enfin, Éric Davoine nous propose pour clôturer ce numéro un compte rendu de lecture donnant incontestablement le goût de lire ce bel ouvrage de Jean-Pierre Dupuis et Jean-Pierre Segal : « Des cousins très éloignés : Français et Québécois ensemble au travail ». L’ouvrage traite certes en premier lieu des interactions entre Français et Québécois mais change régulièrement d’axe d’analyse, et présente au final un bouquet de contributions originales sur les cultures de gestion de la France et du Québec.
Bonne lecture et encore bonne rentrée !