Abstracts
Résumé
Cet article analyse les relations entre la qualité du management, les exportations, et la rentabilité, à partir d’un échantillon de 187 entreprises camerounaises en 2013. Ces relations sont estimées par des équations simultanées pour corriger les biais d’endogénéité dans les liens entre ces variables. Les résultats montrent un lien direct et positif entre la qualité du management et la rentabilité, et un lien indirect via les exportations. Mais ces liens ne sont pas univoques. Lorsque le poids des exportations est supérieur à 75 % ou le ROA est inférieur à 5 %, il n’existe qu’un lien direct. Lorsque le ROA est supérieur à 5 %, il y a plutôt qu’un lien indirect.
Mots-clés :
- Qualité du management,
- Exportations,
- Rentabilité
Abstract
This paper analyzes the relationship between quality of management, exports and firm profitability based on a sample of 187 Cameroonian companies in 2013. We estimate a simultaneous equations model, to control for the endogeneity related to this kind of analysis. Findings show that a direct and positive link between the quality of management and profitability, and an indirect link between these variables through exports. But these direct and indirect links are not unequivocal. When the weight of exports is greater than 75% or when the ROA is less than 5%, there is only a direct link. When the ROA is above 5%, there is rather an indirect link.
Keywords:
- Quality of management,
- Export,
- Profitability
Resumen
Este artículo analiza el vínculo entre la calidad de la gestión, las exportaciones y la rentabilidad, con base en una muestra de 187 empresas camerunesas en 2013. Este vínculo se estima mediante ecuaciones simultáneas para corregir los sesgos de endogeneidad en los vínculos entre estas variables. Los resultados muestran un vínculo directo y positivo entre la calidad de la gestión y la rentabilidad, y un vínculo indirecto a través de las exportaciones. Pero estos vínculos no son unívocos. Cuando el peso de las exportaciones es mayor al 75% o el ROA es menor al 5%, solo existe un vínculo directo. Cuando el ROA es superior al 5%, hay un vínculo más bien indirecto.
Palabras clave:
- Calidad de gestión,
- Exportación,
- Rentabilidad
Article body
Les exportations sont essentielles dans les pays qui connaissent d’importants déficits commerciaux (Axinn, 1988). Elles donnent aux firmes des opportunités de croissance en évoluant dans les marchés internationaux (Edwards et al. 2017). Avec la globalisation d’un grand nombre de marchés et une concurrence plus rude pour des firmes étrangères, les exportations sont difficiles et constituent un objet de recherche central en management international (Aaby et Slater, 1989). Elles désignent des biens et services vendus par des firmes à l’étranger. Il s’agit d’un mode d’entrée dans les marchés étrangers (Acar, 2016).
Un pan des travaux sur le sujet, dans une perspective managériale, a porté sur l’analyse des barrières, des comportements et des facteurs d’exportation des entreprises. Le manque d’assistance gouvernementale, la rude concurrence sur les marchés étrangers, la fiscalité étrangère excessive sont les principaux freins à l’exportation (Ahmed et al. 2004). Par ailleurs, les entreprises exportatrices exportent des produits innovants à forte valeur ajoutée (Boscor, 2015). Toutefois, plusieurs facteurs internes et externes de l’entreprise agissent sur ses exportations (Kahiya et al. 2010). Les facteurs internes se rattachent principalement au management, tandis que, les facteurs externes portent sur les caractéristiques des marchés étrangers et domestiques (Beleska-Spasova, 2014).
Les liens entre les exportations et la performance sont prégnants dans la littérature sur les entreprises actives sur les marchés internationaux (Wagner, 2012). La performance traduit les résultats réalisés par l’entreprise (Richard et al. 2009). Les travaux qui vont dans ce sens examinent majoritairement les effets des exportations sur la productivité (Berthou et al, 2015). Cependant, peu de travaux étudient les relations entre les exportations et la rentabilité (Wagner, 2012). La rentabilité est définie comme le rendement du capital, et l’avantage en termes de productivité ne conduit pas forcément à un avantage en termes de rentabilité (Wagner, op cit). L’objectif de l’entreprise étant centré sur la rentabilité, il devient crucial d’approfondir l’analyse des liens entre les exportations et la rentabilité (Vu et al. 2014).
Toutefois, plusieurs travaux analysent les exportations comme une variable expliquée par les variables de management (Aaby et Slater, 1989, Souza et al, 2010). D’autres travaux appréhendent les exportations comme un facteur de la performance (Wagner, 2012). Il ressort de ces deux groupes de travaux que les exportations peuvent jouer un rôle médiateur dans la relation entre le management et la performance. Dans la littérature, des travaux analysent le rôle médiateur de l’innovation (Zhang et al, 2016), de l’accès aux ressources financières (Agyemang et Ansong, 2017) dans la relation entre les variables du management et la performance. Paradoxalement, aucune étude à notre connaissance ne traite du rôle médiateur des exportations dans la relation entre ces deux variables. Bien que, le management peut agir sur la performance par l’entremise des exportations. Par ailleurs, la plupart des travaux sur les exportations des entreprises portent sur des pays développés, et les résultats obtenus sont controversés et ne peuvent pas être généralisés (Bleaney et Wakelin, 2002).
Dans le contexte africain, un nombre réduit de travaux à l’instar de Bigsten et Gebreeyesus (2009), traitent des liens entre les exportations et la performance des entreprises. Pourtant, avec la signature des accords de partenariat économique entre des pays africains et ceux d’autres régions, ces liens deviennent centraux pour les entreprises de cette région. Surtout que dans ces pays, les exportations nettes sont négatives depuis cinq ans (BAD, 2019, p11). Dans le cas particulier du Cameroun qui a ratifié les accords ACP-Union européenne, la balance commerciale est déficitaire depuis près de 20 ans, les exportations connaissent une baisse depuis 2015[1], les entreprises ne figurent pas parmi les plus rentables[2] en Afrique. Aussi, dans les entreprises du pays et beaucoup plus les entreprises publiques, les dirigeants adoptent des comportements déviants tels que l’investissement dans les actifs spécifiques, le développement des stratégies collusives… (Begne, 2012). La quête de la qualité ne semble pas être leur priorité (Boubakary, 2020) et elles n’ont pas toujours une structure organisationnelle appropriée (Dama Dié, 2016). Dans ce contexte, les pratiques de management sont jugées approximatives, les exportations diminuent et les entreprises ne sont pas comptées parmi les plus performantes de la région. Peu d’études analysent les exportations dans une perspective managériale. Pourtant, une analyse du rôle médiateur des exportations dans la relation entre la qualité du management et la rentabilité peut être une voie de solution à l’atteinte des objectifs de rentabilité de ces entreprises. Face à cette situation, on peut se poser la question de savoir : Comment la qualité du management agit sur la rentabilité des entreprises via les exportations au Cameroun ?
L’objectif principal de ce travail est d’analyser empiriquement le lien indirect entre la qualité du management et la rentabilité des entreprises via des exportations. Il revient de manière spécifique d’analyser l’influence de la qualité du management sur l’intensité d’exportation, et celle de l’intensité d’exportation sur la rentabilité. Nous utilisons un échantillon de 187 entreprises camerounaises en 2013 et nous estimons un modèle d’équations simultanées pour déterminer les liens entre ces trois variables.
Ce travail met la lumière sur ces relations en Afrique. Ainsi, après une discussion théorique des liens entre le management, les exportations et la performance, nous exposons la méthodologie adoptée. Puis, nous présentons et discutons les résultats de la recherche.
Management, exportations et performance des entreprises : une revue de la littérature
Management et performance de l’entreprise : un lien direct
En management, la manière selon laquelle une entreprise est dirigée détermine ses résultats (Drucker, 1964). Les approches de management stratégique et opérationnel visent l’efficacité et le succès de l’entreprise (Marchesnay, 2004). En s’appuyant sur la théorie des ressources, la dextérité du dirigeant à manager est une ressource non imitable qui permet de construire un avantage compétitif et de réaliser de bonnes performances (Barney, 1991).
Dans ce sens, Bloom et al (2012) montrent que les scores de management élevés sont reliés à de fortes performances. Un management qui porte sur un contrôle effectif, sur les objectifs,… améliore la performance. Bloom et al (2018) aboutissent aux résultats similaires. La qualité du management est positivement reliée à la productivité, à la rentabilité et à la valeur de marché des entreprises. Bien qu’en situation de crise, cette relation n’est pas toujours vérifiée (Paraskevas, 2006). Sur la base de ces analyses, il est formulé l’hypothèse H1 : La qualité du management influence positivement la rentabilité de l’entreprise au Cameroun.
Cependant, le lien entre le management et la performance peut être indirect via les exportations. Les exportations sont capturées par la décision d’exporter ou par l’intensité d’exportation (Shevtsova, 2015). Dans ce sens, la littérature aborde le management comme un déterminant des exportations, et les exportations comme un déterminant de la performance.
Le lien entre le management et les exportations de l’entreprise
L’explication des exportations par le management peut être donnée par la théorie des ressources. Selon cette théorie, la performance de l’entreprise repose sur un avantage concurrentiel qu’elle détient du fait de posséder des ressources non imitables (Barney, 1997). Ainsi les compétences managériales sont des ressources (Barney, 1991) sur lesquelles peut s’appuyer une entreprise pour exporter plus. Dans plusieurs travaux, les variables de management sont des facteurs explicatifs des exportations (Aaby et Slater, 1989). Pour Bloom et al (2012), les entreprises mieux gérées dégagent d’importants revenus de l’exportation. Aussi, celles qui mobilisent aisément les ressources, réduisent les coûts de collecte, de diffusion, de traitement de l’information en provenance de l’étranger, et sont plus enclines à exporter (Cavusgil et Naor, 1987). L’expérience managériale sur les marchés étrangers favorise une maitrise des processus et le succès des activités d’exportation (Love et al. 2016).
Dans une perspective empirique, Bloom et Van Reenen (2010) étudient les entreprises de plusieurs pays et trouvent que les scores de management sont faibles dans les entreprises non exportatrices. Bloom et al (2018) obtiennent un résultat similaire sur des entreprises américaines et chinoises. Masso et al (2015) analysent des entreprises estoniennes, et trouvent par un modèle Probit que celles mobilisant une forte expérience managériale à l’exportation, s’engagent le plus dans ces activités. Quansah et Bunyaminu (2017) analysent des entreprises ghanéennes, et montrent par une régression linéaire que les compétences managériales agissent positivement sur la performance des activités d’exportation. L’essentiel des travaux évoqués établissent un lien positif entre le management et les exportations. En s’appuyant sur la théorie des ressources et sur ce dernier résultat relatif au contexte africain, nous formulons l’hypothèse H2 : la qualité du management agit positivement sur le poids des exportations dans les entreprises au Cameroun.
Relations entre les exportations et la performance : les hypothèses d’auto-sélection et d’apprentissage par l’exportation
Les relations entre les exportations et la performance de l’entreprise sont expliquées principalement par les théories de l’auto-sélection et de l’apprentissage par l’exportation (Wagner, 2012). Sous l’hypothèse d’auto-sélection, la performance permet de discriminer entre les entreprises exportatrices et celles non exportatrices. En effet, les entreprises accroissent leur productivité dans le but de devenir exportatrices (Alvarez et Lopez, 2005). Pour Bernard et Jensen (1999), la productivité d’une entreprise augmente plus avant le démarrage du processus d’exportation qu’après. Néanmoins, l’exportation entraine d’importants coûts, que les entreprises performantes sont plus à même de couvrir (Bai et al. 2016). Les marchés étrangers étant très concurrentiels, ces dernières sont plus aptes à maitriser cette concurrence et à exporter (Bernard et Jensen, 2004).
Sous l’hypothèse de l’apprentissage par l’exportation, les exportations permettent à l’entreprise de développer un canal d’acquisition de l’information favorisant une bonne incorporation des techniques de production et une meilleure qualité des produits, avec pour corollaire un accroissement de la rentabilité (Aw et al. 2008). Elles favorisent l’amélioration de l’échelle de production et la réalisation des économies d’échelle (Alvarez et Lopez, 2005). Toutefois, l’apprentissage par l’exportation est plus remarquable dans les pays en développement où les firmes ont plus à apprendre des producteurs efficients (Wilhelmsson et Kozlov, 2007). L’amélioration de la productivité du fait de cet apprentissage est importante lorsque le pays de destination des produits est plus développé que le pays d’origine (Wagner, 2012). L’essentiel des travaux présentent l’auto-sélection comme la principale explication du lien entre les exportations et la performance, bien que les deux explications ne s’excluent pas mutuellement (Bigsten et Gebreeyesus, 2009).
Plusieurs travaux ont testé empiriquement le lien entre ces deux variables. Alvarez et Lopez (2005) étudient des entreprises chiliennes et trouvent par une régression Probit que le statut d’exportation agit positivement sur la productivité totale des facteurs. Farinas et Martin-Marcos (2007) analysent des entreprises espagnoles et trouvent par une régression log-linéaire que le statut d’exportation est relié positivement à la productivité totale des facteurs et à la productivité du travail. Dans une étude des entreprises chiliennes, colombiennes et mexicaines, Garcia-Marin et Voigtländer (2019) montrent qu’elles enregistrent des gains d’efficience après le démarrage des exportations. Berthou et al (2015) examinent des entreprises de 15 pays européens et établissent que le taux de croissance des exportations est relié positivement à la productivité. Des travaux menés dans des contextes différents, la productivité agit positivement sur les exportations. Pour certains auteurs, ce lien est déterminé par des variables managériales et organisationnelles. Dans cette veine, Wagner (2014) montre à partir d’une étude sur les entreprises allemandes, que la qualité des produits détermine le lien positif entre les exportations et la rentabilité. Ce lien change selon le secteur d’activité (Reggiani et Shevtsova, 2018; Jiao et al. 2018) ou selon la nature des produits exportés (Benkovskis et al, 2019), et est déterminé par l’âge et par la taille de l’entreprise. Pour Wagner (2019), l’effet positif des exportations sur la performance est davantage observé dans les jeunes entreprises. Wilhelmsson et Kozlov (2007) étudient des entreprises russes, et établissent que celles exportatrices sont de grande taille et plus productives.
Cependant, pour Fryges et Wagner (2010), il y a une faible différence de rentabilité, entre les entreprises exportatrices et celles non exportatrices. Dans le même sens, Gupta et al (2018) trouvent qu’il y a une moindre amélioration de la productivité de l’entreprise après le démarrage des exportations. Greenaway et al (2005) utilisent la méthode « Matched Difference in Differences » et ne trouvent aucune différence de productivité entre les entreprises exportatrices et celles non exportatrices en Suède. Bleaney et Wakelin (2002) trouvent un résultat similaire en Angleterre. Pour Grazzi (2012), il n’y a pas de lien significatif entre les exportations et la rentabilité dans les entreprises Italiennes. A contrario, Lu et Beamish (2006) trouvent un lien négatif entre les exportations et la rentabilité. Dans cette lancée, Xu et al (2019) à partir des entreprises chinoises, trouvent que la productivité totale des facteurs est plus forte dans les entreprises non exportatrices.
Le sens du lien entre les exportations et la performance dépend de la mesure de performance retenue (Tavares-Lehmann et Costa (2015), de la technique statistique employée et du niveau de performance de l’entreprise (Vu et al. 2014). Alors qu’aucun lien n’est établi par une régression linéaire, il ressort des liens par une régression quantile. Ce lien est négatif dans des entreprises ayant de faibles taux de croissance du profit et est positif pour celles présentant de forts taux de croissance. Dhiman et Sharma (2019) trouvent des résultats différents selon le test de co-intégration de Johansen et Juselius et le test de causalité de Granger. Temouri et al (2013) établissent que le lien entre les exportations et la rentabilité change selon le pays. Alors qu’en Allemagne, la rentabilité des entreprises exportatrices est significativement faible, elle est plutôt forte en France, et en Angleterre, il n’y a point de différence de rentabilité entre les entreprises exportatrices et les entreprises non exportatrices.
En Afrique, Van Biesebroeck (2005) étudie les entreprises de 9 pays et trouve à partir d’une régression linéaire en données de panel avec des effets aléatoires, que celles exportatrices sont plus productives. Bigsten et al (2004) examinent les entreprises de 04 pays par la méthode des moments généralisés et soulignent qu’elles enregistrent des gains d’efficience de l’exportation. En étudiant les entreprises éthiopiennes, Bigsten et Gebreeyesus (2009) combinent les méthodes des variables instrumentales et des moments généralisés et trouvent une relation positive et de causalité inversée entre les exportations et la productivité. Fatou et Choi (2013) aboutissent à des résultats similaires sur des entreprises sénégalaises. Foster-McGregor et al (2013) étudient des entreprises de 19 pays d’Afrique subsaharienne par une régression quantile et montrent que les entreprises exportatrices sont plus performantes. Wassie (2019) montre à partir des données des entreprises éthiopiennes, que les entreprises exportatrices sont plus productives. Les résultats des études sur la relation entre les exportations et les mesures de performance sont controversés. Toutefois, en se basant sur des études en Afrique, qui établissent une relation positive entre les exportations et la rentabilité, nous formulons ici l’hypothèse H3 : les exportations agissent positivement sur la rentabilité des entreprises au Cameroun.
Cependant, depuis les travaux de Bernard et Jensen (1999), les hypothèses d’auto-sélection et d’apprentissage par l’exportation, définissent une relation d’endogéneité entre les exportations et la performance (Bigsten et Gebreeyesus, 2009). Pour corriger ce biais d’endogéneité, plusieurs auteurs utilisent le modèle des moments généralisés avec variables instrumentales (Van Biesebroeck, 2005, Fatou et Choi, 2013) et quelques-uns, le modèle de régression quantile avec effets fixes (Foster-McGregor et al. 2013, Vu et al. 2014).
Au Cameroun, aucune étude rigoureuse n’a été menée pour estimer les liens entre la qualité du management, les exportations et la rentabilité des entreprises. Pourtant, le pays est l’un des premiers à avoir signé les accords de partenariat économique ACP-Union européenne. D’après ces accords, les pays des ACP peuvent vendre leurs produits immédiatement dans l’Union européenne sans droits de douane ou quotas, avec pour finalités la consolidation du commerce et la stimulation de la croissance[3]. Toutefois, ces derniers ne seraient intéressants pour ces pays que lorsqu’ils favoriseraient une croissance des exportations des entreprises tributaire d’une bonne qualité de management et avec pour corollaire de fortes performances. Dans le pays en 2015, les produits agricoles, le pétrole, les produits miniers, les produits manufacturés représentaient respectivement 46,23 %, 41,07 %, 4,93 % et 7,77 % des exportations (Perspectives monde, 2019[4]). Au premier trimestre 2018, le pays a enregistré une augmentation du déficit de la balance commerciale de 169,7 % comparativement à 2017, du fait entre autres éléments d’une diminution de 10,33 % des exportations. Cette diminution est consécutive à la baisse des ventes du cacao brut en fève, des huiles brutes de pétrole, des bois sciés, de l’aluminium, de bananes et plantains et du caoutchouc (INS, 2018). L’Europe est la principale destination des exportations du pays (ONU, 2017)[5] qui sont peu diversifiées et portent fortement sur les produits primaires (INS, 2018).
Données et spécification du modèle
Les données
Les données utilisées dans ce travail proviennent de l’Institut National de Statistiques du Cameroun (INS). Elles portent sur les états financiers de synthèse de 223 entreprises camerounaises, observées sur l’année 2013. Ces états sont constitués du bilan comptable de fin d’exercice et du compte de résultat, présentés dans le détail. Le groupe d’entreprises considéré est hétérogène sous deux aspects. D’abord la taille, car il est constitué de grandes et de petites et moyennes entreprises. Ensuite le secteur d’activité, le groupe étant constitué de sociétés évoluant dans les secteurs primaire, secondaire et tertiaire.
Les informations contenues dans cette base de données nous ont permis d’apprécier la situation financière des entreprises concernées, par le calcul des ratios généralement utilisés dans la littérature dans le cadre de l’analyse des états financiers. Nous avons retenu au final un échantillon de 187 entreprises qui a servi aux analyses effectuées dans ce travail[6]. Les variables utilisées dans cette étude ont été identifiées dans l’objectif d’analyser la relation entre qualité du management, exportation, et rentabilité des entreprises.
Dans les principaux travaux, les exportations sont mesurées par une variable binaire pour distinguer les entreprises exportatrices et celles non exportatrices (Temouri et al. 2013, Foster-McGregor et al. 2013). Le but est de définir des caractéristiques propres à chaque type d’entreprise (Aaby et Slater, 1989). Cette variable établit une homogénéité entre les entreprises exportatrices, qui pourtant n’ont pas la même intensité d’exportation. Dans d’autres travaux, la variable capturant les exportations est le taux de croissance des ventes à l’exportation (Akyol et Akehurst, 2003) ou la part des exportations dans le chiffre d’affaires (Fryges et Wagner, 2010). C’est cette dernière mesure qui est retenue. Elle corrige la limite de l’homogénéité du groupe d’entreprises exportatrices, et permet de mesurer le poids des exportations dans les activités d’une entreprise.
La performance est un concept polysémique dont les tentatives de définition sont nombreuses. Dans le champ de l’entreprise, elle porte sur plusieurs dimensions : financière, marketing, organisationnelle etc. La dimension financière est la plus étudiée (Chenhall et Langfield-Smith, 2007), et c’est elle qui est abordée dans ce travail. Cette dernière renvoie à l’efficience managériale des ressources financières. Dans l’essentiel des travaux, la performance est capturée par la productivité (Berthou et al. 2015). Pourtant, l’objectif de l’entreprise se rattache plus à la rentabilité. C’est pourquoi certains auteurs la capturent par la rentabilité commerciale (Grazzi, 2012, Wagner, 2014), par le ROA (Gibson et Pavlou, 2017). C’est cette dernière mesure que nous retenons pour mesurer la performance.
Dans les travaux sur la relation entre le management et les exportations, les auteurs cernent le management par un ou plusieurs de ces aspects (Masso et al, 2015). Bloom et al (2012) définissent un score qui mesure de manière globale les pratiques de management. Ce score capture la qualité du management sur la base de 18 questions relatives au management des actifs physiques et des ressources humaines. Il s’agit d’une variable catégorielle qui regroupe dans une classe homogène des entreprises avec des niveaux de qualité de management différents. Par ailleurs, on peut apprécier la qualité du management d’une entreprise au moyen de la maitrise des coûts associés aux processus organisationnels (Love et al. 2016). Certains auteurs mesurent la dextérité du mangement par le ratio des charges d’exploitation (Charges d’exploitation/encours de crédit) (Serrano-Cinca et Gutiérrez-Nieto, 2014). Ce ratio présenterait des limites à discriminer en termes de qualité de management, les entreprises évoluant dans des secteurs différents. Dans certains secteurs d’activités comparativement à d’autres, les charges d’exploitation représentent un poids important du total actif. Ainsi dans un groupe comportant les entreprises des différents secteurs, à partir de ce ratio, on serait conduit à conclure que les entreprises de ce secteur sont moins bien managées. Au Cameroun, plus de 84 % des entreprises évoluent dans le secteur tertiaire[7]. Dans l’échantillon d’analyse, près de 75 % des entreprises relèvent de ce secteur. Ce qui a pour conséquence de réduire le biais associé à l’utilisation de cette variable. Pour capturer la qualité du management, en s’appuyant sur ces travaux, nous retenons le ratio charges d’exploitation sur total des actifs.
Les variables exogènes sont essentiellement des ratios financiers, calculés à partir des états de synthèse, qui permettent d’apprécier la structure financière, le niveau d’endettement, la liquidité, la solvabilité, le fonds de roulement, etc. Les différentes variables utilisées sont résumées dans le tableau ci-dessous :
L’échantillon est constitué à hauteur de 88,77 % de PME dont le nombre d’employés est au plus égal à 100. Il comprend respectivement 71,65 % et 24,6 % d’entreprises des secteurs tertiaire et secondaire. Pour l’ensemble des entreprises, le poids moyen des exportations dans le chiffre d’affaires est de 68,76 %. Il est de 71,59 % dans les PME et de 46,31 % dans les grandes entreprises. Il est respectivement de 70,81 %, 63,69 % et 62,86 % dans les entreprises des secteurs tertiaire, secondaire et primaire. Aussi, le ROA moyen est de 8,03 %. Il est de 8,49 % dans les PME et de 4,36 % dans les grandes entreprises. Les charges d’exploitation par unité d’actif sont en moyenne de 1,577 8. Elles sont en moyenne de 1,1 dans les grandes entreprises et de 1,63 dans les PME. En revanche, les grandes entreprises semblent mieux gérées. Dans ces entreprises, le montant moyen des immobilisations en pourcentage de l’actif total est de 31,9 % et les capitaux propres représentent en moyenne 45,77 % du total du passif. Par ailleurs, le ratio de liquidité générale est en moyenne de 1,29 et celui de liquidité immédiate est de 0,280 8. Les charges de personnel représentent en moyenne 27,92 % de la valeur ajoutée et les services extérieurs représentent en moyenne 18,14 % des charges d’exploitation.
Pour l’essentiel de ces variables, la dispersion est plus forte dans les PME et dans les entreprises du secteur tertiaire.
Spécification du modèle empirique
Dans ce travail, nous utilisons un modèle à équations simultanées pour analyser le lien entre la qualité du management et la rentabilité via les exportations d’une part, et pour identifier les ratios financiers exogènes expliquant ces variables conjointement endogènes d’autre part. Ce modèle est, de manière générale, spécifié comme suit :
γt1 = γ21γt2 + γ31γt3 + … + γM1γtM + β11xt1 + … + βK1xtK + εt1
γt2 = γ12γt1 + γ32γt3 + … + γM2γtM + β12xt1 + … + βK2xtK + εt2
γtM = γ1Mγt1 + … + γM — 1,Mγt,M — 1 + β1Mxt1 + … + βKMxtK + εtM
où γti (i = 1, …, M) sont les variables endogènes, xtj (j = 1, …, K) sont les variables exogènes, M est le nombre d’équations dans le modèle.
Spécifiquement, notre modèle se présente comme suit :
ca_exportcat1
= γ21retat2 + γ31chextat3 + β11Ratiot1 + … + βK1RatiotK
+ εt1 équation de l’exportation,
retat2 = γ12ca_exportcat1 + γ32chextat3 + β12Ratiot1 + … + βK2RatiotK
+ εt2 équation de la rentabilité,
chextat3 = γ13ca_exportcat1 + γ23retat2 + β13Ratiot1 + … + βK3RatiotK
+ εt3 équation de la qualité du management,
où ca_exportcat, retat, et chextat, représentent respectivement le volume des exportations en pourcentage du chiffre d’affaires, le ratio de rentabilité des actifs utilisé comme mesure de performance, et la qualité du management pour l’entreprise t.
La structure du modèle utilisé se justifie par le fait que l’entreprise développe sa stratégie d’exportation dans le temps, avec pour objectif la pérennisation des activités et la rentabilité. Il devient approximatif de considérer que, les exportations et la qualité du management qui déterminent la rentabilité ne sont pas à leur tour influencées par cette dernière. Les hypothèses d’auto-sélection et d’apprentissage par les exportations, et des travaux en management révèlent l’endogénéité qui existe entre les exportations, la rentabilité et la qualité de management de l’entreprise (Bernard et Jensen, 1999; Foster-McGregor et al. 2013). Dans les autres travaux utilisant le modèle des moments généralisés, la variable d’exportation est binaire. Dans notre travail, il s’agit d’une variable continue (non catégorielle), ce qui permet l’utilisation des équations simultanées.
Pour Hausman (1983), lorsque certaines variables endogènes sont par ailleurs exogènes dans le modèle à équations simultanées, l’estimation des paramètres par la méthode des moindres carrés ordinaires présente des limites. Elle conduit à la détermination des estimateurs biaisés et faiblement stables. Les méthodes basées sur les variables instrumentales, et les moindres carrés en deux étapes (2SLS), génèrent des estimateurs au contenu informationnel limité. Pour pallier les limites évoquées, nous estimons le modèle spécifié plus haut par la méthode des moindres carrés en trois étapes. Cette méthode combine la méthode des variables instrumentales et celle des moindres carrés généralisés.
Des analyses préliminaires, il ressort que les entreprises dans lesquelles le volume des exportations en pourcentage du chiffre d’affaires est supérieur à 75 %, présentent un ROA moyen de 8,37 %. Il est relativement faible (soit 7,6 %) dans celles où le volume des exportations en pourcentage du chiffre d’affaires est au plus égal à 75 %. Le graphique 1 montre néanmoins que, c’est dans le groupe des entreprises ayant un volume des exportations en pourcentage du chiffre d’affaires au plus égal à 75 % qu’on observe les plus fortes valeurs du ROA. Dans ce groupe, la dispersion du ROA autour de 0 % est plus faible.
Toutefois, en s’appuyant sur le test de compraraison des moyennes, il n’y a pas de différence significative en termes de ROA entre les entreprises ayant un volume des exportations en pourcentage du chiffre d’affaires supérieur à 75 % et les autres entreprises.
Dans les entreprises présentant un ROA au plus égal à 5 %, le volume moyen des exportations en pourcentage du chiffre d’affaires est de 68,768 %, alors qu’il est de 68,75 % dans celles ayant un ROA supérieur à 5 %. Dans cette lancée, il n’y a pas de différence significative en termes de volume des exportations en pourcentage du chiffre d’affaires entre les entreprises ayant un ROA au plus égal à 5 % et celles ayant un ROA supérieur à 5 %.
Cependant, dans les entreprises étudiées, il y a une différence très significative du volume des exportations en pourcentage du chiffre d’affaires entre les PME et les grandes entreprises. Au Cameroun, dans les PME, le volume des exportations en pourcentage du chiffre d’affaires est supérieur à celui observé dans les grandes entreprises.
Résultats
L’analyse empirique révèle que, plus la qualité du management augmente, plus le rendement des actifs est élevé et inversement. En effet, une diminution des charges d’exploitation par unité d’actif de 1 % entraine un accroissement du ROA de 0,49 %. Une augmentation du ROA de 1 % entraine une diminution des charges d’exploitation par unité d’actif de -2,11 %. Ainsi, la qualité du management agit directement sur la rentabilité dans les entreprises étudiées. Ce résultat corrobore les préconisations de la théorie des ressources (Barney, 1991), et les conclusions des travaux de Bloom et al (2012) et de Bloom et al (2018). Dans ces entreprises, un type de management qui assure un contrôle effectif dans la gestion des ressources, est orienté vers les objectifs, est associé à de fortes rentabilités. Ces liens sont observés pareillement dans les entreprises ayant un volume des exportations en pourcentage du chiffre d’affaires inférieur à 75 %. Lorsque le volume des exportations en pourcentage du chiffre d’affaires est supérieur à 75 % ou lorsque le ROA est inférieur à 5 %, la qualité du management agit sur la rentabilité, et cette dernière n’agit pas sur la qualité du management.
Dans la grande majorité des modèles, la qualité du management agit sur les exportations. Plus les charges d’exploitation par unité d’actif diminuent, plus le volume des exportations en pourcentage du chiffre d’affaires diminue. Les exportations jouent un rôle dans le management des entreprises au Cameroun. Les exportations en pourcentage du chiffre d’affaires sont positivement reliées aux charges d’exploitation par unité d’actif, et négativement reliées au ratio de rotation de l’actif. Ainsi, une augmentation des charges d’exploitation par unité d’actif de 1 %, entraine un accroissement de la part des exportations dans le chiffre d’affaires de 0,78 %. Par ailleurs, une diminution du chiffre d’affaires par unité d’actif de 1 % entraine une augmentation de la part des exportations dans le chiffre d’affaires de 0,36 %. Pour un volume d’actifs, une diminution du chiffre d’affaires qui porte davantage sur la baisse des ventes sur le marché local a pour corollaire une augmentation du poids des exportations dans les ventes. Au Cameroun, les entreprises qui enregistrent une baisse des ventes sur le marché local ou supportent des charges d’exploitation par unité d’actif importantes, sont orientées à exporter davantage. Les exportations sont alors expliquées par une baisse des ventes sur le marché local, une moins bonne maitrise des charges d’exploitation et donc par une faible qualité du management. Dans les entreprises faiblement rentables (ROA inférieur à 5 %), la qualité du management n’agit pas sur les exportations.
Ces résultats sont contraires aux préconisations de la théorie des ressources qui présentent la qualité du management comme une ressource vectrice de performance dans l’activité d’exportation. Ils ne corroborent pas ceux de Cavugil et Naor (1987), Love et al (2016) et Bloom et Van Reenen (2010). Pour ces auteurs, les entreprises mieux managées sont celles qui exportent le plus. Leurs dirigeants parviennent à réduire les différents coûts associés au processus d’internationalisation. Ce résultat révèle qu’au Cameroun, les entreprises qui supportent des charges d’exploitation par unité d’actif importantes, donc avec une faible qualité de management, exportent plus. Dans cette lancée, les exportations sont une stratégie pour bénéficier des économies d’échelle et maitriser les charges d’exploitation. L’hypothèse H2 n’est pas validée. Donc, le gouvernement du pays peut définir des conditions et une fiscalité d’exportation souples et ou renforcer les capacités des agences de conseil sur les opportunités d’exporter, pour des entreprises qui perdent des parts de marché localement ou n’arrivent pas à maitriser leurs charges d’exploitation.
Le ROA agit positivement sur les exportations, mais ce lien n’est pas significatif. Dans les entreprises étudiées, la rentabilité n’explique pas les exportations. L’hypothèse d’auto-sélection n’est pas validée. De manière globale, les entreprises les plus rentables ne sont pas plus aptes à exporter. Ce résultat est contraire aux conclusions de Bernard et Jensen (1999), ou Wagner (2012), selon lesquelles, les entreprises performantes sont plus aptes à exporter parce qu’elles peuvent mieux couvrir les coûts induits par l’exportation. Il confirme les conclusions de Grazzi (2012) qui ne trouve aucun lien entre la rentabilité et les exportations.
En revanche, les exportations en pourcentage du chiffre d’affaires sont reliées positivement au ROA. Un accroissement du poids des exportations dans le chiffre d’affaires de 1 % entraine une hausse du ROA de 0,574 %. Donc, les exportations ont un impact positif sur la rentabilité de l’entreprise. Ce résultat confirme les préconisations du modèle de l’apprentissage par les exportations. Ainsi, dans les entreprises étudiées, comme le suggèrent Aw et al (2008) ou Alvarez et Lopez (2005), les exportations semblent favoriser l’acquisition de nouvelles connaissances, l’incorporation de nouvelles techniques de production, une meilleure qualité des produits avec pour conséquence une amélioration de la rentabilité. Par ailleurs, elles permettent la réalisation des économies d’échelle. Il corrobore ceux de Wagner (2014) ou Fryges et Wagner (2012) dans les entreprises allemandes, de Van Biesebroeck (2005), Bigsten et al (2004), Fatou et Choi (2013), Bigsten et Gebreeyesus (2009) ou Foster-McGregor et al (2013) dans les entreprises africaines. L’hypothèse H3 est ainsi confirmée. Le ratio de rotation de l’actif, la structure du capital et la marge brute d’exploitation sont positivement reliés au ROA. Une augmentation du poids des capitaux propres dans la structure du capital de 1 % induit une hausse du ROA de 0,096 %. Par ailleurs, une augmentation du chiffre d’affaires par unité d’actif ou de la marge brute d’exploitation de 1 % entraine une hausse respective du ROA de 0,25 % et de 0,075 %. Une entreprise qui accroit ses ventes pour un même niveau d’actif, améliore son profit et par voie de conséquence son ROA. Une entreprise qui améliore aussi sa marge brute d’exploitation, maitrise mieux ses charges d’exploitation hors amortissement et augmente son ROA.
Toutefois, le ROA est relié au poids des immobilisations dans l’actif. Une baisse du poids des immobilisations dans l’actif de 1 % entraine un accroissement du ROA de 0,19 %. Au Cameroun, le ROA est expliqué par les exportations, la qualité du management, la politique d’investissement, la structure du capital et la gestion de l’activité.
A leur tour, les charges d’exploitation par unité d’actif sont reliées positivement au poids des exportations dans le chiffre d’affaires et au ratio de rotation de l’actif. Une augmentation du chiffre d’affaires par unité d’actif de 1 % induit une hausse des charges d’exploitation par unité d’actif de 0,52 %. De ce fait, les entreprises exportatrices peuvent développer des programmes de formation pour leurs personnels. Il s’agirait de former les dirigeants sur les techniques et les enjeux du management à l’international pour une maitrise des charges. La qualité du management est expliquée par les exportations et la gestion de l’activité.
De manière générale, il ressort un lien indirect entre la qualité du management et la rentabilité via les exportations. La qualité du management agit négativement sur les exportations, qui agissent à leur tour positivement sur le rendement des actifs. Les entreprises moins bien gérées, qui ne maitrisent pas leurs charges d’exploitation, peuvent par les exploitations bénéficier des économies d’échelle et améliorer leur rentabilité.
Toutefois, les liens étudiés changent selon le poids des exportations et le niveau de rentabilité. Dans les entreprises avec un volume des exportations en pourcentage du chiffre d’affaires au plus égal à 75 %, les exportations sont positivement reliées aux charges d’exploitation par unité d’actif et au poids des immobilisations dans l’actif, et négativement reliées au ratio de rotation de l’actif. En revanche, le ROA est positivement relié aux exportations et au ratio de rotation de l’actif, et négativement relié aux charges d’exploitation par unité d’actif. Les charges d’exploitation par unité d’actif sont positivement reliées aux exportations et au ratio de rotation de l’actif, et négativement reliées au ROA. Dans ce groupe d’entreprises, il existe un lien direct et positif entre la qualité du management et le rendement des actifs. Il existe par ailleurs un lien indirect entre ces deux variables via les exportations.
Dans les entreprises avec un volume des exportations en pourcentage du chiffre d’affaires supérieur à 75 %, les exportations sont positivement reliées aux charges d’exploitation par unité d’actif et au poids des immobilisations dans l’actif, et négativement reliées au ratio de rotation de l’actif. Dans ces entreprises, le ROA est positivement relié à la structure du capital, au ratio de rotation de l’actif et à la marge brute d’exploitation. Par ailleurs, les charges d’exploitation par unité d’actif sont positivement reliées aux exportations et au ratio de rotation de l’actif. Donc, dans les entreprises où le poids des exportations dans le chiffre d’affaires est au plus égal à 75 %, un accroissement du poids des exportations entraine une augmentation de la rentabilité. En revanche, dans les entreprises où le poids des exportations dans le chiffre d’affaires est supérieur à 75 %, un accroissement du poids des exportations n’a pas d’effet sur la performance. Dans ce dernier groupe d’entreprise, il y a un lien direct et positif entre la qualité du management et la rentabilité. En revanche, il n’existe pas de lien indirect entre ces deux variables via les exportations. Ainsi, le gouvernement peut assouplir des conditions douanières et fiscales seulement pour des entreprises exportatrices respectant un poids des exportations au plus égal à 75 %. Ceci aurait pour conséquence d’encourager un accroissement des exportations de ces entreprises et de stimuler leur rentabilité.
Dans les entreprises ayant un ROA au plus égal à 5 %, les exportations ne sont pas expliquées par la qualité du management. Le ROA est positivement relié au ratio de rotation de l’actif et négativement relié aux charges d’exploitation par unité d’actif. Les charges d’exploitation par unité d’actif sont reliées positivement au ratio de rotation de l’actif. Ainsi, la rentabilité est expliquée par la qualité du manangement, alors que cette dernière n’est pas expliquée par la rentabilité. Par ailleurs, les exportations n’ont aucun effet sur la rentabilité. Pour ces entreprises, il n’est pas pertinent d’augmenter les exportations pour améliorer la rentabilité. Dans ce groupe d’entreprises, il y a un lien direct et positif entre la qualité du management et la rentabilité. Il n’existe pas de lien indirect entre ces variables via des exportations.
Dans les entreprises ayant un ROA supérieur à 5 %, les exportations sont positivement reliées au ROA, aux charges d’exploitation par unité d’actif, et négativement reliées au ratio de rotation de l’actif. Le ROA est relié positivement aux exportations. Les charges d’exploitation par unité d’actif sont positivement reliées aux exportations, à la taille de l’entreprise et au ratio de rotation de l’actif et sont reliées négativement au délai d’écoulement des stocks. Dans ce dernier groupe d’entreprises, il ny a pas de relation directe entre la qualité du management et la rentabilité. Il existe plutôt une relation indirecte entre la qualité du management et la rentabilité via des exportations. Au Cameroun, pour les entreprises fortement rentables, les hypothèses d’auto-sélection et d’apprentissage par l’exportation expliquent les liens entre les exportations et la rentabilité. Un accroissement de la rentabilité entraine une augmentation des exportations, et une augmentation de ces dernières conduit à plus de rentabilité. Les résultats montrent que, les liens directs et indirects entre la qualité du management et la rentabilité sont tributaires du niveau de rentabilité et du poids des exportations.
Conclusion
Les exportations sont présentées dans des contextes différents comme un vecteur de performance et de croissance pour les entreprises. Cependant au Cameroun, elles connaissent une baisse depuis plusieurs années. Les entreprises ne sont pas parmi les plus performantes d’Afrique et leurs approches de management sont questionnables. Ce travail visait donc à établir par l’empirie les liens indirects entre la qualité du management et la rentabilité via les exportations dans les entreprises dans ce pays. Ces liens ont été estimés sur un échantillon de 187 entreprises en 2013, à l’aide d’un modèle d’équations simultanées permettant de corriger les biais d’endogénéité qui caractérisent les relations entre ces variables.
Des analyses il ressort que, plus la qualité du management est bonne, plus élevée est la rentabilité. Il y a alors un lien direct et positif entre la qualité du management et la rentabilité. Par ailleurs, les exportations en pourcentage du chiffre d’affaires agissent positivement sur les charges d’exploitation par unité d’actif. De ce fait, une faible qualité du management est associée à plus d’exportations. Ceci est contraire aux préconisations de la théorie des ressources. Dans un environnement camerounais très concurrentiel, les entreprises moins bien managées avec des charges d’exploitation par unité d’actif importantes, exportent davantage afin de bénéficier des économies d’échelle et de dégager des revenus additionnels conséquents et de couvrir ces charges. L’exportation semble être une stratégie de diversification de marché adoptée dans les entreprises à faible qualité de management pour assurer leur viabilité. Cependant, les exportations agissent positivement sur la rentabilité de l’entreprise. Ceci montre qu’au Cameroun, c’est davantage l’hypothèse d’apprentissage par les exportations et non celle d’auto-sélection, qui explique le mieux le lien entre les exportations et la rentabilité. Les entreprises à forte rentabilité ne sont pas plus enclines à exporter. Par contre, les entreprises avec un poids important des exportations sont plus rentables. Toutefois, la qualité du management agit négativement sur les exportations, et celles-ci agissent à leur tour positivement sur la rentabilité. Il y a alors un lien indirect entre la qualité du management et la rentabilité via les exportations.
Les liens directs entre la qualité du management et la rentabilité ou les liens indirects entre ces deux variables via les exportations ne sont pas univoques. Ils changent selon le poids des exportations dans le chiffre d’affaires et selon la rentabilité de l’entreprise. Dans les entreprises où le poids des exportations est inférieur ou égal 75 %, il y a un lien direct et positif entre la qualité du management et le rendement des actifs. Il existe par ailleurs un lien indirect entre la qualité du management et le rendement des actifs via les exportations. Lorsque ce poids est supérieur à 75 % ou lorsque le ROA est inférieur à 5 %, il y a un lien direct et positif entre la qualité du management et la rentabilité. En revanche, il n’existe pas de lien indirect entre ces deux variables via des exportations. Les exportations n’agissent pas sur la rentabilité. Ce résultat préconise un poids des exportations non supérieur à 75 %, pour qu’elles favorisent la rentabilité. Il conduit à définir un intervalle dans lequel un accroissement des exportations assure une amélioration de la rentabilité. Au-delà de cet intervalle, toute augmentation des exportations n’a pas de conséquence sur la rentabilité. Pareillement, pour les entreprises faiblement rentables, un accroissement des exportations pour améliorer la rentabilité n’est pas pertinent. L’amélioration de la qualité du management devient le principal gage de la réalisation de fortes rentabilités.
Lorsque le ROA est supérieur à 5 %, il n y a pas de relation directe entre la qualité du management et la rentabilité. Il existe plutôt une relation indirecte entre la qualité du management et la rentabilité via les exportations. Les exportations et la rentabilité entretiennent une relation de causalité inversée positive. Pour les entreprises fortement rentables, les hypothèses d’auto-sélection et d’apprentissage par l’exportation expliquent conjointement les liens entre ces variables. Pour ces entreprises, un accroissement de la rentabilité entraine une augmentation des exportations, et une augmentation de celles-ci conduit à plus de rentabilité.
Eu égard à ces résultats, le gouvernement du pays peut définir des conditions et une fiscalité d’exportation souples et ou mettre sur pied une agence de conseil sur les opportunités d’exporter, pour des entreprises qui perdent des parts de marché localement ou n’arrivent pas à maitriser leurs charges d’exploitation. Ainsi, ces conditions peuvent aussi être orientées en faveur des entreprises exportatrices ayant un poids des exportations au plus égal à 75 %. Les entreprises exportatrices peuvent développer des programmes de formation de leurs personnels. Il s’agirait de former les dirigeants de ces entreprises sur les techniques et les enjeux du management à l’international pour une maitrise des charges d’exploitation.
Ces résultats soulèvent néanmoins des questions relatives au niveau optimal des exportations de l’entreprise. Pour des entreprises qui exportent vers plusieurs pays ou vers plusieurs régions du monde, il revient de discuter la destination qui favorise le plus la rentabilité. Surtout qu’en Afrique subsaharienne, l’Europe est restée la première destination des exportations. Mais depuis quelques années, les échanges avec la Chine et entre pays africains, peuvent relancer le débat sur la destination des exportations qui est la plus profitable, et guider ainsi les politiques dans la conclusion des accords de partenariat économique.
Appendices
Notes biographiques
Marius Ayou Bene, est titulaire d’un doctorat en Finance Mathématiques. Il enseigne la Finance à l’ESSEC de l’Université de Douala et ses principaux domaines de recherches sont les modèles de prédiction de la faillite des entreprises, les déterminants de la performance des entreprises et la gouvernance d’entreprise.
Michel Bertrand Cyrille Onomo, est titulaire d’un doctorat en Finance. Il enseigne la Finance d’entreprise à l’ESSEC de l’Université de Douala et ses principaux domaines de recherche sont le management stratégique, la gouvernance d’entreprise, les déterminants de la performance des entreprises et la microfinance.
Notes
-
[1]
Ces informations sont tirées des données de la banque mondiale, à partir du site http://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMTendanceStatPays ?langue=fr&codePays=CMR&codeStat
-
[2]
Dans le classement des 500 meilleures entreprises en Afrique en 2020, les entreprises camerounaises qui y figurent, sont mal classées. https://www.cameroon-tribune.cm/article.html/33448/fr.html/meilleures-entreprises.
-
[3]
Confère le guide des APE. https://eeas.europa.eu/sites/eeas/files/04102016_ape_guide_fr.pdf
-
[4]
http://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMImportExportPays ?codePays=CMR
-
[5]
https://www.uneca.org/sites/default/files/uploaded-documents/ERA/ERA2017_Fr/chap1_03.pdf
-
[6]
A partir des résultats obtenus de ces calculs, il a été possible de nettoyer la base de données en supprimant les entreprises qui présentaient plusieurs données manquantes ou des valeurs extrêmes sur plusieurs ratios. Ont été considérées comme valeurs extrêmes, toutes les valeurs non comprises dans l’intervalle de valeurs limité par la moyenne d’un ratio donné, plus ou moins trois fois son écart type.
- [7]
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Appendices
Biographical notes
Marius Ayou Bene holds a doctorate (PhD) in Finance Mathematics. He teaches Finance at ESSEC of University of Douala and his main areas of research are business failure prediction models, determinants of business performance and corporate governance.
Michel Bertrand Cyrille Onomo holds a doctorate (PhD) in Finance. He teaches Corporate Finance at ESSEC of University of Douala and his main areas are strategic management, corporate governance, determinants of business performance and microfinance.
Appendices
Notas biograficas
Marius Ayou Bene, tiene un doctorado en Matemáticas de Finanzas. Es profesor de Finanzas en ESSEC de la Universidad de Douala y sus principales áreas de investigación son los modelos de predicción de fallos empresariales, los determinantes del rendimiento empresarial y el gobierno corporativo.
Michel Bertrand Cyrille Onomo, tiene un doctorado en Finanzas. Es profesor de Finanzas Corporativas en ESSEC de la Universidad de Douala y sus principales áreas de investigación son la gestión estratégica, el gobierno corporativo, los determinantes del desempeño empresarial y las microfinanzas.