Abstracts
Résumé
Les entrepreneurs qui créent suite à une période de chômage sont reconnus pour mettre en place des entreprises de moindre croissance. Néanmoins, ces derniers n’ont pas tous la même expérience initiale et la même motivation pour le développement de leur entreprise. Ceci peut expliquer des variations du niveau de croissance de la nouvelle entreprise créée. L’analyse de plusieurs modérations, au travers d’une base de données de 304 entrepreneurs, apporte de nouvelles connaissances sur la relation complexe entre les caractéristiques de l’individu, la situation de chômage de l’entrepreneur avant la création et la croissance de l’entreprise créée.
Mots-clés :
- création d’entreprise,
- motivation à croître,
- chômage,
- capital humain,
- croissance des entreprises,
- modération
Abstract
Companies created by the unemployed are expected to have less growth. However, even though they were unemployed, entrepreneurs have different experience and motivations to grow their companies. These aspects can explain growth variations in new companies. The analysis of several moderations on a database of 304 entrepreneurs allows to understand the complex relationship between the personal characteristics, unemployment, and growth of the company.
Keywords:
- Business creation,
- motivation to growth,
- unemployment,
- human capital,
- company growth,
- moderation
Resumen
Se espera que las empresas creadas por emprendedores que han estado desempleados previamente tengan una baja tasa de crecimiento. Sin embargo, no todos los emprendedores tienen la misma experiencia, ni la misma motivación para el crecimiento. Estas características pueden explicar las variaciones en el nivel de crecimiento de las nuevas empresas. El análisis de varias moderaciones en una base de datos de 304 emprendedores nos permite entender la compleja relación entre las características del individuo, la situación de desempleo antes de la creación y el crecimiento de las empresas creadas.
Palabras clave:
- creación de empresas,
- motivación al crecimiento,
- desempleo,
- capital humano,
- crecimiento de las empresas,
- moderación
Article body
La croissance des entreprises a été bien étudiée dans la littérature en entrepreneuriat (Storey et Greene, 2010). Plusieurs facteurs, internes ou externes à l’entreprise, peuvent l’influencer (i.e. l’expérience, la personnalité de l’entrepreneur, l’existence d’une équipe autour du créateur, le secteur d’activité, la concurrence, l’agencement organisationnel, etc.). Dans le cas d’une jeune entreprise, le rôle du créateur est prédominant durant les premières années de vie de l’entreprise (Wiklund et Shepherd, 2003; Vivarelli, 2004). Il devient important d’étudier les caractéristiques de l’entrepreneur, expériences et motivations, qui influencent le développement de cette dernière.
Parmi les expériences antérieures qui peuvent avoir une influence sur le développement de l’entreprise, les individus qui ont subi une période de chômage sont reconnus pour créer des entreprises qui ont une moindre croissance (Andersson et Wadensjö, 2007; Pffeifer et Reize, 2000; Reid et Smith, 2000). Les théories de la motivation entrepreneuriale permettent d’expliquer ce résultat. En effet, plusieurs scénarios peuvent motiver la création d’une entreprise (Shapero et Sokol, 1982). Selon le GEM (2001), les entrepreneurs décident de créer une entreprise soit parce qu’ils ont détecté une opportunité d’affaires, soit parce qu’ils n’ont pas de meilleure option pour subvenir à leurs besoins (Gilad et Levine, 1986; Schjoedt et Shaver, 2007; Hireche et Douidi, 2016; Rajabi, Brashear-Alejandro et Cheleriu, 2018). Le second scénario est lié à une période de chômage précédant la création de l’entreprise (McMullen et al., 2008; Hireche et Douidi, 2016). Dans ce cas, l’individu est poussé vers la création d’entreprise par nécessité.
Le résultat réalisé par ces entrepreneurs, mesuré en termes de chiffre d’affaires, est généralement plus faible que celui réalisé par les entrepreneurs par opportunité (Amit et Muller, 1995). Ces entreprises ont une durée de vie plus courte (Block et Sandner, 2009) et les entrepreneurs sont plus sensibles à la prise de risque (Block, Sandner et Spiegel, 2015). Ils auront également plus de difficulté à payer leurs crédits (Bourlès et Cozarenco, 2018). Ces entreprises auront moins d’impact économique (Reynolds et al., 2002; Acs, 2006; Block et Wagner, 2010; Edelman et al., 2010; Hessels et al., 2008; Kautonen et Palmroos, 2010; Zanakis et al., 2012). Storey et Greene (2010) indiquent que les mauvaises performances des entrepreneurs par nécessité peuvent être une conséquence d’un niveau de compétences et d’aptitudes inférieures (Block et Sandner, 2009; Block et Wagner, 2007; Deli, 2011). Par opposition, les entrepreneurs par opportunité sont plus susceptibles d’être associés à un haut niveau de capital humain (Bhola, Verheul, Thurik et Grilo, 2006). Cela concerne le capital humain générique (comme l’éducation) ainsi que le capital humain spécifique (comme l’expérience entrepreneuriale ou managériale). Les entrepreneurs par opportunité font également preuve de plus de résistance face aux risques (Bhola, Verheul, Thurik et Grilo, 2006; Block, Sandner et Spiegel, 2015) et n’étant pas soumis à une situation d’inconfort (insatisfaction au travail ou chômage), ils peuvent investir plus facilement du temps dans la découverte de l’opportunité et sa préparation pour l’exploiter (Pffeifer et Reize, 2000; Storey et Greene, 2010).
Néanmoins, il est simplificateur de considérer les entrepreneurs comme appartenant seulement à deux groupes. L’hétérogénéité des profils nous amène à étudier les différences intra-groupes (Block, Sandner et Spiegel, 2015; Block et Wagner, 2010). Par exemple, les entrepreneurs au chômage peuvent avoir accès à des multiples incitations et aides pour créer une entreprise. En France, cela se caractérise par le dispositif NACRE qui débloque l’accès à la subvention si l’individu décide de créer une entreprise. Ils peuvent également avoir des appuis supplémentaires au travers d’organismes publics qui permettent de bénéficier de prêts à taux zéro et d’un accompagnement bénévole. Cet environnement favorable peut permettre à l’entrepreneur par nécessité de contrebalancer l’influence négative du chômage et de puiser dans ses compétences et ses envies pour créer une entreprise. Pour ceux qui peuvent surpasser et mettre à profit cette période, le chômage peut fournir le temps nécessaire pour développer une opportunité nouvelle et originale (Pffeifer et Reize, 2000; Storey et Greene, 2010). Cela dépendra de l’aide que l’entrepreneur trouvera (par exemple, les lois ou structures consacrées à l’assistance, à l’enseignement et à la promotion de l’entrepreneuriat), des compétences acquises avant la période de chômage, mais également de la motivation que l’entrepreneur générera après la création de l’entreprise (Wiklund et Shepherd, 2003). Les motivations des individus ne sont pas fixées dans le temps et peuvent évoluer en fonction des événements extérieurs ou changements auxquels fait face l’entrepreneur (Williams et Williams, 2012; Jayawarna, Rouse et Kitching, 2013). Les motivations à la création peuvent se transformer une fois la création de l’entreprise établie en de nouvelles motivations en lien avec la croissance de son entreprise (Williams et Williams, 2012), sa situation familiale, ou ses intérêts personnels (Jayawarna, Rouse et Kitching, 2013).
En considérant la complexité et la multiplicité des situations, il devient réducteur d’évaluer la croissance des entreprises en se focalisant seulement sur la motivation ou la situation de l’individu au moment de la création. Les entrepreneurs subissant une période de chômage ne sont pas tous pareils. A notre connaissance, on sait peu sur les effets combinés d’une période de chômage avec les différentes variables individuelles (telles que le capital humain et la motivation à croître) sur la croissance de l’entreprise. Il est alors intéressant d’étudier des combinaisons de facteurs afin de mieux identifier les différents cas de figure concernant la création d’entreprises. Ainsi, nous formulons la question suivante : Le capital humain et la motivation à croître de l’entrepreneur modèrent-ils l’influence négative d’une période de chômage sur la croissance de l’entreprise ?
Afin d’améliorer la compréhension de ce phénomène, nous avons développé une analyse multivariée d’une base de données d’une plate-forme de financement française[1] pour étudier les différentes interactions entre la situation du chômage avant la création, la motivation à croître, les variables du capital humain (génériques et spécifiques) et la croissance des entreprises créées. Dans notre article, nous nous orientons vers la recherche des variables qui peuvent conditionner une influence négative d’une période de chômage. Nous supposerons que cet effet négatif est modéré par certaines variables du capital humain générique et spécifique (comme par exemple l’âge ou le capital managérial de l’entrepreneur). Ceci nous permettra de souligner les catégories les plus sensibles au chômage et celles qui y résistent le mieux. Enfin, l’influence combinée du capital humain et de la motivation sera explorée au travers d’une double modération. Nos principaux résultats montreront l’effet négatif du chômage sur la croissance de l’entreprise créée. Cette relation sera d’autant plus négative lorsque l’entrepreneur sera âgé mais pourra être contrebalancée par une connaissance du secteur industriel dans lequel il créera son entreprise. Concernant la motivation à croître, ce sont les entrepreneurs les plus jeunes qui en bénéficieront après une période de chômage. Passé un certain âge, cet effet bénéfique disparaîtra.
Ce travail de recherche est structuré en quatre parties. La première partie présente la littérature sur le chômage et l’interaction de ce dernier avec le capital humain et la motivation à croître, ainsi que nos hypothèses. La deuxième partie décrit la méthodologie utilisée. La troisième partie présente les résultats, une quatrième partie les discute. Nous finissons cette recherche avec une conclusion.
Revue de la littérature
La relation entre chômage et création d’entreprise a reçu beaucoup d’attention de la part des chercheurs (Storey, 1991; Thurik, 2003). En effet, la création d’entreprise représente une alternative crédible à la situation de la personne n’ayant pas d’emploi (Carree et Thurik, 1998; Audretsch et Thurik, 2000; Thurik, 2003). Elle a donné naissance à la littérature sur les entrepreneurs par nécessité, et indique une moins bonne réussite de ces derniers lorsqu’ils sont comparés aux entrepreneurs par opportunité (Reynolds et al., 2002; Block et Wagner, 2010).
La littérature s’intéressant à l’influence du chômage sur la croissance des entreprises créées souligne généralement son effet négatif (Reynolds et al., 2002; Acs, 2006; Block et Wagner, 2010; Edelman et al., 2010; Hessels et al., 2008; Kautonen et Palmroos, 2010; Reid et Smith, 2000; Zanakis et al., 2012). Storey et Greene (2010) indiquent que plusieurs raisons peuvent être à l’origine de cette situation. La première concerne la prise de risque. L’entrepreneur ayant été au chômage aura plus tendance à vouloir éviter les entreprises risquées pour ne pas retomber au chômage. Ceci peut le mener à la création d’entreprise moins rentable ou à éviter les opportunités potentielles.
La deuxième raison concerne le moins bon niveau de compétences des entrepreneurs par nécessité. N’ayant pas les compétences pour être employés dans une entreprise, ils ne l’ont pas non plus pour en créer une. Les individus ayant les compétences et les diplômes les plus faibles sont les plus susceptibles de se retrouver dans une position de chômage (Nilsson, 2015). Par ailleurs, Nilsson (2015), reprenant la grille de lecture de Lindqvist et Vestman (2011), montre que le chômage est lié à certaines caractéristiques de personnalité, telles qu’un manque de volonté pour prendre des responsabilités, peu de motivation, de désir d’indépendance, d’initiative, ou de compétences sociales, ainsi qu’une faible stabilité émotionnelle. Comme l’indiquent Kautonen et Palmroos (2010), les individus au chômage développent probablement des compétences moins en phase avec les caractéristiques d’un entrepreneur telles qu’une forte capacité à contrôler sa vie, de l’auto-détermination, une faible aversion au risque, etc. Ils développeront également une satisfaction moindre par rapport à leur situation d’entrepreneur (Kautonen et Palmroos, 2010). Le chômage générera également des périodes de dépression (Pelzera, Schaffratha et Vernaleken, 2014). Les individus poussés dans l’entrepreneuriat sans autre choix devront donc résoudre ces problèmes pour pouvoir avancer avec leur entreprise ou projet. Basé sur l’idée que les entrepreneurs au chômage ont moins de succès (Andersson et Wadensjö, 2007; Pffeifer et Reize, 2000; Reid et Smith, 2000; Storey, 1994), nous présentons notre première hypothèse :
H1 : Le chômage avant la création a un effet négatif sur la croissance de l’entreprise créée.
D’autre part, nous pouvons également supposer que les entrepreneurs qui ont choisi de créer une entreprise après une situation de chômage ont résolu une partie des problèmes cités précédemment. Pelzera, Schaffratha et Vernaleken (2014) en analysant deux groupes d’individus, un en situation d’emploi et un autre au chômage, ne trouvent aucune différence en termes de compétences sociales, de communication, et de caractéristiques de personnalité. Leur conclusion implique que le chômage initie des périodes de dépression sans corrélation avec un déficit de compétences initiales de l’individu. Ces résultats rejoignent la littérature sur l’apprentissage suite à un échec (McGrath, 1999; Brown, Park et Folger 2012). Plus que la période de chômage, c’est la décision de continuer et d’avancer qui importe. Dans cette hypothèse, la motivation à croître des individus (Wiklund et Shepherd, 2003) et le capital humain (Mincer, 1974) pourront réduire l’influence négative du chômage et seront utilisés comme variables modératrices.
Ainsi, le capital humain d’un individu aura un impact positif sur le développement du projet (Mincer, 1974; Cooper, Gimeno-Gascon et Woo, 1994; van Praag et Cramer, 2001; Bosma et al. 2004; Coleman, 2007; Bonaccorsi et Giannangeli, 2010). Le capital humain peut être divisé en capital spécifique et capital générique (Colombo et Grilli, 2001; Capelleras et al., 2019). Les compétences génériques font référence au niveau académique des entrepreneurs et à leur expérience de travail. Les compétences spécifiques s’appliquent aux connaissances ciblées que les individus peuvent utiliser lors de la création d’une entreprise, ces dernières peuvent être industrielles, managériales, ou entrepreneuriales. Le capital humain industriel est lié à la connaissance du secteur d’activité dans lequel l’entrepreneur envisage la création de son entreprise. Cette connaissance préalable, tacite, aide les entrepreneurs à mieux appréhender la demande et le fonctionnement du marché dans lequel l’entreprise s’implante (Bonaccorsi et Giannangeli, 2010). De leur côté, le capital humain managérial fait référence à l’expérience précédente de l’individu dans un poste de direction, et le capital humain entrepreneurial à son expérience dans la création (Colombo et Grilli, 2005). Les deux derniers donnent accès à des compétences organisationnelles essentielles (négociation, planification, prise de décision, etc.) pour gérer les défis de l’entreprise nouvellement créée (Baum, Locke et Smith, 2001; Bonaccorsi et Giannangeli, 2010).
Selon Block et Wagner (2010), les différences de capital humain influencent la capacité d’exploiter les opportunités. Les entrepreneurs par nécessité ont tendance à avoir moins de capital humain que les entrepreneurs par opportunité. Les entrepreneurs par opportunité ont passé plus de temps à développer les compétences nécessaires pour la création d’une entreprise commerciale réussie (Block et Wagner, 2010). Cependant, comme nous l’avons décrit précédemment, le chômage peut également être une période de temps utilisée pour développer des compétences ou obtenir les ressources nécessaires pour mettre en place un projet de création d’entreprise (Storey et Greene, 2010). Même si le chômage est une surprise pour l’individu, plusieurs aides sont à sa disposition et il peut utiliser cette période de temps pour créer son entreprise. La création de l’entreprise est alors un choix, que l’individu estime plus profitable que de chercher un emploi salarié. Certaines des caractéristiques développées par le futur entrepreneur doivent pouvoir l’aider à contrebalancer les effets négatifs du chômage qui le poussent et l’orientent vers l’entrepreneuriat.
Block et Wagner (2010) indiquent que la connaissance du secteur d’activité (capital humain spécifique) sera plus avantageuse pour l’entrepreneur par nécessité, tandis que l’éducation (capital humain générique) sera d’une grande utilité pour l’entrepreneur ayant perçu une opportunité. Block et Wagner (2010) suggèrent ainsi l’existence d’une interaction entre les motivations (opportunité, nécessité) et le capital humain de l’individu. D’autres auteurs comme Wiklund et Shepherd (2003) montrent également que le capital humain (expérience et éducation) joue un rôle modérateur en améliorant le lien positif entre la motivation à croître des dirigeants et la performance réelle de l’entreprise.
Dans cet article, nous considérons qu’il existe une relation entre la situation antérieure (avec ou sans emploi) et le capital humain de l’entrepreneur sur la croissance de son entreprise (Block et Wagner, 2010). La deuxième hypothèse se formule de la manière suivante :
H2 : Le capital humain modère l’effet négatif d’une période de chômage sur la croissance de l’entreprise créée.
Nous supposons ainsi la présence d’un rôle modérateur du capital humain (générique ou spécifique) entre une période de chômage avant création (entrepreneur par nécessité) et la croissance. Nous scindons la deuxième hypothèse en deux sous-hypothèses :
H2a : Le capital humain générique modère l’effet négatif d’une période de chômage sur la croissance de l’entreprise créée.
H2b : Le capital humain spécifique modère l’effet négatif d’une période de chômage sur la croissance de l’entreprise créée.
En plus de l’expérience de l’entrepreneur, d’autres facteurs individuels peuvent avoir une influence positive sur la croissance de l’entreprise (Baum, Locke et Smith, 2001). Il est reconnu que la motivation à croître est un déterminant important de cette croissance (Delmar et Wiklund, 2008). Baum et Locke (2004) associent cette motivation à la vision de l’entrepreneur et la définissent comme une action orientée vers un objectif désiré. S’inspirant de la théorie du comportement planifié (Ajzen, 1991), Wiklund et Shepherd (2003) indiquent que la motivation à croître reflète l’aspiration de l’individu vis-à-vis d’un comportement particulier, ici la croissance de l’entreprise. Elle est considérée comme étant une motivation stable dans le temps et agit conjointement avec les ressources, compétences, et opportunités à disposition de l’entrepreneur pour permettre la croissance de l’entreprise.
Delmar et Wiklund (2008) démontrent également une influence de l’atteinte des objectifs précédents sur cette motivation. La réalisation des objectifs permet de conforter la motivation à croître, tandis que sa non-réalisation contribue à la diminuer.
Il est intéressant de noter que la motivation à croître a d’abord été fortement considérée comme une caractéristique des entrepreneurs innovants ou par opportunité (Huggins, Prokop et Thompson, 2017). Toutefois, des écrits comme ceux de Williams et Williams (2012) montrent que les motivations initiales des entrepreneurs peuvent changer au cours du temps. Ainsi, des entrepreneurs par nécessité peuvent développer des motivations de croissance (motivation associée aux entrepreneurs par opportunité). Pour Jayawarna, Rouse et Kitching (2013), la motivation entrepreneuriale est sensible aux expériences et changement de contexte d’un individu (dans sa vie professionnelle ou personnelle). Ainsi, si la motivation économique d’un entrepreneur s’estompe (si l’entrepreneur rencontre des difficultés lors des premiers développements de l’entreprise), elle pourra être remplacée par une autre, telle que la nécessité de couvrir les besoins de sa famille, ou la réputation que lui donne son statut de dirigeant (Jayawarna, Rouse et Kitching, 2013). L’opposition entre les motivations des entrepreneurs par opportunité et nécessité n’est finalement pas assez précise (Verheul et al., 2010; Kirkwood, 2009; Hughes, 2003; Stevenson, 1990). Traditionnellement, l’entrepreneur par nécessité est associé à des caractéristiques situationnelles de non-satisfaction avec sa situation antérieure de travail, comme l’expérimentation d’une période de chômage (McMullen et al., 2008; Hughes, 2003). L’entrepreneur par opportunité, quant à lui, est associé à des objectifs de réalisation économique (Shane et al., 2003). En décomposant cette association initiale, il devient alors intéressant d’étudier l’interaction entre cette situation (le chômage avant création) et le désir de croissance économique des entrepreneurs sur la croissance de l’entreprise. Il est généralement admis que la motivation à croître a un lien direct avec la croissance de l’entreprise (Delmar et Wiklund, 2008). Néanmoins, à notre connaissance, aucune étude ne s’est attardée à tester son influence sur la croissance dans le cas particulier d’une situation de chômage. Nous proposons l’hypothèse suivante :
H 3 : La motivation à croître modère l’effet négatif du chômage sur la croissance de l’entreprise créée.
Notre quatrième hypothèse est également inédite. Elle s’intéresse à l’interaction entre une période de chômage, le capital humain de l’individu et la motivation à croître sur la croissance de l’entreprise. Cette triple interaction fait référence aux travaux de recherche qui lient la croissance d’une entreprise à la qualité des opportunités disponibles, à la motivation de l’entrepreneur pour les poursuivre et aux compétences disponibles pour mener à bien son projet (Autio et Acs, 2010; Wiklund et Davidsson, 2003; Davidsson, 1991). Dans leur étude, Wiklund et Shepherd (2003) trouvent que l’éducation et l’expérience des individus améliorent le lien entre la motivation à croître et la croissance de l’entreprise. Ainsi, plus les entrepreneurs ont un capital humain important (expérience industrielle, managériale ou entrepreneuriale), plus leur motivation à croître aura un impact positif sur la croissance réelle de l’entreprise.
En effet, vouloir croître ne veut pas dire croître forcement. Un individu peut vouloir croître mais peut obtenir ce résultat de plusieurs manières différentes (Delmar et Wiklund, 2008) : par l’acquisition d’une autre entreprise; par croissance interne; en sous-traitant; en recrutant de nouveaux employés. C’est un chemin incertain qui peut également dépendre de la capacité de l’individu d’exploiter les opportunités qui apparaitront durant le développement de son entreprise (Davidsson, 1991; Bonaccorsi et Giannageli, 2010).
Adapté à notre étude, nous supposerons que ce double effet bénéfique de la motivation à croître et de l’expérience de l’entrepreneur diminuera d’autant plus l’effet négatif d’une période de chômage.
H4 : L’effet combiné de la motivation à croître et du capital humain (générique et spécifique) modère l’influence négative d’une période de chômage.
Nous nous attendons ainsi à ce que l’influence négative du chômage soit plus élevée pour les individus avec un capital humain et une motivation à croître faible et à ce que l’influence négative du chômage soit plus faible pour les individus avec un capital humain et une motivation à croître forte.
Le modèle et les hypothèses H1 à H4 sont présentés dans la Figure 1.
Méthodologie
La base de données utilisée provient d’une enquête nationale auprès de 3000 entrepreneurs, menée par une plate-forme de financement française. Un échantillon de 969 observations a été fourni qui correspond à 33 % de la population initiale. Pour construire un échantillon homogène, nous avons d’abord rejeté les individus ayant acquis des entreprises en activité (reprise), ce qui représente 260 observations, en conservant 709 entreprises créées ex-nihilo. Dans une deuxième étape, nous avons exclu les individus avec des observations manquantes, réduisant la taille de l’échantillon à 307 observations. L’existence de valeurs aberrantes a également été analysée par les tests de Mahalanobis, de Cooks et des valeurs influentes (Hair et al., 2010). Ces analyses sont directement disponibles sur le logiciel SPSS. Nous avons utilisé la règle empirique qui recommande d’éliminer une observation si elle montre des valeurs aberrantes sur deux des trois tests. Trois observations supplémentaires sont exclues. L’échantillon final est de 304 observations.
Nous avons effectué plusieurs analyses descriptives de notre échantillon. Le premier concerne le profil des répondants et la nature des entreprises créées. En ce qui concerne l’analyse des profils des répondants, il est important de noter que 57,89 % étaient au chômage avant la création de leurs entreprises (176 répondants), tandis que 42,11 % ont indiqué qu’ils avaient été employés avant la création (128 répondants). Les répondants avaient entre 21 et 57 ans avec un âge moyen de 37,29 ans. La majorité des créateurs étaient des hommes (77,63 %) et avaient décidé de vendre à l’échelle locale ou régionale (80,2 % d’entre eux), tandis que 14,3 % ont ciblé les ventes nationales et 5,5 % des ventes internationales.
La variable dépendante que nous avons utilisée est le logarithme népérien des ventes. La transformation en logarithme nous a permis de normaliser les modèles testés (Hair et al., 2010). La variable indépendante décrit la situation de l’entrepreneur avant la création de l’entreprise, indiquant si l’individu a subi une période de chômage avant la création. La variable est dichotomique. La valeur 0 est attribuée si l’individu indique avoir été en situation d’emploi avant la création de son entreprise et la valeur 1 est utilisée s’il indique être sans emploi avant cette création. Le dernier groupe de variables correspondait à nos modérateurs et décrit le capital humain (générique et spécifique) et la motivation à croître de l’entrepreneur. Finalement, six modérateurs ont été utilisés. Dans le cadre du capital humain, deux variables sont utilisées pour décrire le capital humain générique (âge au moment de la création et niveau d’étude de l’entrepreneur) et trois variables pour représenter le capital humain spécifique (expérience sectorielle, expérience managériale et expérience entrepreneuriale).
Pour la motivation à croître, la question suivante a été posée : « Durant ces deux dernières années quelle a été votre démarche vis-à-vis de votre entreprise ? ». La motivation à croître a été associée dans la littérature à la vision de l’entrepreneur (Baum et Locke, 2004) et est considérée comme un concept stable dans le temps (Delmar et Wiklund, 2008). Plusieurs réponses étaient disponibles pour le chef d’entreprise : « Accroître nettement son activité », « Tenter de sauvegarder l’entreprise » ou « Maintenir l’entreprise à son niveau » (Jayawarna, Rouse et Kitching, 2013). La différence entre les trois options correspond à la dichotomie indiquée par Cassar (2007) entre le lien risque-rentabilité lorsque l’entrepreneur décrit ses préférences en termes de croissance : améliorer ses résultats ou réduire son risque d’échec. Nous avons attribué la note de 1, lorsque l’entrepreneur indiquait avoir voulu accroître nettement son activité et 0 dans les deux autres cas.
Il est important de noter que la motivation à croître est généralement étudiée de manière longitudinale (Delmar et Wiklund, 2008). Au contraire, dans notre étude, l’entrepreneur a été questionné sur son comportement passé en une seule fois. Un biais de rappel peut être présent (Podsakoff, MacKenzie, Lee, Podsakoff, 2003; Cassar, 2007; Antonakis, Bendahan, Jacquart, Lalive, 2010). Pour limiter ce biais, les entrepreneurs ont, dans un premier temps, été interrogés par rapport aux caractéristiques de leurs entreprises (les variables de contrôle), puis leurs variables personnelles (le capital humain) et enfin sur leur motivation à croître (leur démarche concernant leur deux dernières années). Dans un deuxième temps, ils ont dû apporter des éléments objectifs concernant leur chiffre d’affaires. La question du chiffre d’affaires est ainsi posée en dernier, limitant une éventuelle contamination liée à l’ordre des questions avec la motivation à croître (l’entrepreneur indique vouloir croître/maintenir son activité après avoir indiqué précédemment une croissance/stagnation de son chiffre d’affaires).
Les variables sont présentées en annexe (tableau 1).
Résultats
Plusieurs modèles ont été testés. L’analyse du tableau de corrélations et des facteurs d’inflation de la variance (ou VIF pour « variance inflation factor » en anglais) indiquent qu’il n’y a pas de problème de multicolinéarité dans les différents modèles présentés en annexe (tableau 2). L’utilisation de multiplication de variables (au sein des interactions) et de variables catégorielles augmentent naturellement la corrélation entre les variables concernées mais n’a pas d’influence sur le risque de multicolinéarité (Hayes, 2018).
Nous avons également comparé les différentes corrélations obtenues avec les recherches précédentes (Delmar et Wiklund, 2008). Ainsi, dans une revue de littérature sur le sujet, Delmar et Wiklund (2008) soulignent que le lien entre la motivation des entrepreneurs et la croissance varie entre 0,12 et 0,48[2]. De leur côté, ils obtiennent des corrélations entre la motivation pour croître en nombre d’employés et la croissance réelle du nombre d’employés de 0,27. Lorsqu’ils s’attachent à la motivation pour croître en termes de chiffres d’affaires, la corrélation obtenue avec la croissance réelle du chiffre d’affaires est de 0,15. Nous obtenons de notre côté, une corrélation de 0,264 entre notre question liée à la motivation à croître et le chiffre d’affaires. Cette corrélation reste dans le cadre des estimations obtenues dans les études précédentes.
Trois tableaux vont être utilisés pour représenter les différents modèles testés (tableaux 3, 4 et 5). Ils nous permettront de confronter chacune des hypothèses indiquées dans la revue de littérature. Le choix de présenter plusieurs modèles nous permettra également de tester la solidité des différents liens soulignés dans les hypothèses. Le tableau 3 regroupe les modèle I à IX et permettra d’analyser l’hypothèse 1. Le tableau 4 se focalisera sur l’analyse de l’hypothèse 2 et 3 au travers des modèles X à XVII. Le tableau de résultat 5 s’intéressera plus particulièrement à l’hypothèse 4 (modèles XVIII à XXIV).
Effet du chômage (H1) sur la croissance de l’entreprise créée
Dans le premier modèle (modèle I), seules les variables de contrôle sont testées (voir tableau 3 en annexe). Il apparaît que l’âge de l’entreprise et le genre masculin ont une influence positive et significative sur la croissance. Les variables de contrôle expliquent 5,2 % de la variance (R² ajusté). Ces résultats ne changent pas dans les modèles suivants. Dans notre analyse, le secteur d’activité n’a pas d’influence sur le chiffre d’affaires de l’entreprise. Ces différents résultats sont conformes aux recherches antérieures sur le sujet (Block et Sandner, 2009).
Les variables dépendantes liées au chômage et les variables qui seront utilisées ultérieurement comme variables modératrices (capital humain et motivation à croître) ont été introduites dans les modèles II à IX. Dans le modèle II, nous avons testé les variables de chômage et de contrôle sur la croissance. Les résultats indiquent que le chômage influence négativement la variable dépendante (croissance). L’introduction de la variable de chômage augmente légèrement le pouvoir explicatif du modèle de 1,8 % et est significatif à 5 % (p ≤ 0.05).
Dans le modèle III et IV, nous avons introduit les variables génériques du capital humain (âge et éducation). Les résultats montrent que l’âge a une influence négative non significative (p = 0,13), tandis que l’éducation a un effet positif significatif (p ≤ 0,01). Dans la littérature, l’influence de l’âge de l’entrepreneur a souvent été décrite comme étant non linéaire (Storey et Greene, 2010) et pouvant donner lieu à des influences non significatives (Pfeiffer et Reize, 2000; Lasch, Le Roy et Yami. 2005). En effet, les entrepreneurs les plus jeunes et les plus âgés seraient ceux qui auraient les moindres croissances. Ces deux catégories seraient donc plus fragiles que la catégorie d’entrepreneur d’âge moyen (Storey et Greene, 2010). L’éducation favorise les compétences et l’accès à certains réseaux et offre plus d’opportunités (Storey et Greene, 2010; van der Sluis, van Praag, Vijverberg, 2005). Dans les modèles V à VII, nous avons testé l’influence des variables spécifiques du capital humain (expériences managériale, industrielle et entrepreneuriale). Les résultats montrent que seule l’expérience managériale a une influence positive sur la croissance. Ainsi, contrairement à la littérature sur le sujet, ni l’expérience industrielle, ni entrepreneuriale est nécessaire pour la croissance de l’entreprise (Shrader et Siegel, 2007).
Dans le modèle VIII, nous introduisons la variable de motivation à croître. Son influence est positive et significative (p≤ 0.001). Ce résultat est cohérent avec les écrits sur le sujet (Wiklund et Shepherd, 2003). Plus l’individu est motivé pour croître, plus la croissance est présente.
Dans le modèle IX, nous testons toutes les variables indépendantes (chômage, capital humain, motivation à croître) en même temps. Finalement, l’ensemble des variables testées permettent d’expliquer la variance du chiffre d’affaires à raison de 25,5 % (R²). Par rapport au modèle II, ceci représente une amélioration de 17,8 % du pouvoir explicatif du modèle. Les résultats montrent que le chômage et l’éducation ont perdu leur significativité dans le modèle, alors que l’expérience managériale et la motivation à croître restent significatives à 1 %. Ceci peut provenir d’un différentiel du pouvoir explicatif des différentes variables dans nos modèles. Ainsi, le chômage et l’éducation expliquent respectivement 1,8 % et 2,2 % de la variance globale (variation du R²) tandis que la motivation à croître et l’expérience managériale comptent pour 6,5 % et 10,7 % de cette même variance.
Effets des interactions entre le chômage et le capital humain (H2) et entre le chômage et la motivation à croître (H3) sur la croissance de l’entreprise créée
Dans les modèles X à XVII présentés en annexe (tableau 4), nous avons testé les interactions entre les variables modératrices (capital humain et la motivation à croître) et le chômage. Ces modèles permettent de tester l’hypothèse 2 (H2a, H2b) ainsi que l’hypothèse 3. Pour une meilleure précision de nos analyses, nous avons testé chacune des interactions, une à la fois, dans les modèles X à XV, puis ensemble dans les modèles XVI et XVII.
En termes de résultats, deux interactions semblent fonctionner avec la variable chômage : l’âge de l’entrepreneur et l’expérience industrielle. Nous rappelons que pour qu’une interaction soit considérée comme valide, il faut qu’à la fois le coefficient de l’interaction (b) soit significatif mais également que le modèle dans lequel cette interaction est introduite montre une amélioration significative du pouvoir explicatif (R²) (Cohen et Cohen, 1983). Les modèles X et XIV remplissent ces deux conditions. Le modèle X montre que l’interaction entre l’âge de l’entrepreneur et la période de chômage est significative à 10 % (p=0,088). Le modèle XIV indique que l’interaction entre l’expérience sectorielle et la période de chômage est significative à 5 % (p=0,036).
Pour améliorer notre compréhension de ces résultats, nous avons schématisé les deux interactions qui fonctionnent. Pour cela, nous avons utilisé le logiciel Process 3.1 (Hayes, 2018). Le logiciel Process permet de visualiser les interactions significatives et ainsi de porter un jugement sur la nature de l’interaction. Il fournit également plusieurs tests d’effet conditionnel qui permettent de juger de la significativité des variables en différents points du schéma. Ainsi, le test de Johnson-Neyman permet d’identifier, lorsque le modérateur est numérique, les points significatifs de la modération. Les figures 2 et 3 sont basées sur le modèle X et analysent la relation entre l’âge de l’entrepreneur, le chômage et l’impact sur la croissance de l’entreprise.
Les analyses Johnson-Neyman (Hayes, 2018) montrent que la zone de significativité de l’interaction correspond aux individus de plus de 40,87 ans (zone grisée). Cette zone correspond à 31,91 % de notre échantillon, soit 97 cas. En dessous de cet âge, l’interaction est non significative. L’effet du chômage sur la croissance de l’entreprise dépend donc de l’âge de l’entrepreneur. La figure 2 montre que les entrepreneurs seniors subissent un désavantage important lorsqu’ils sont passés par une période de chômage comparativement aux seniors qui ont quitté leur emploi pour créer leur entreprise (-0,3167†, p=0,06) et aux jeunes qui ont subi une période de chômage (-0,016†, p=0,0546). La croissance de leur entreprise est significativement moins élevée.
La figure 4 est basée sur le modèle XIV et examine l’interaction entre l’expérience industrielle et le chômage sur la croissance. L’expérience industrielle est une variable catégorielle ordinale. Contrairement à l’âge, il n’est pas possible de distinguer des zones de significativité à l’aide du test de Johnson-Neyman (Hayes, 2018). Pour permettre une bonne compréhension de l’interaction à l’oeuvre, une analyse visuelle de la modération doit nous permettre d’indiquer les différences entre les points de la figure.
Les résultats montrent que la connaissance du secteur d’activité dans lequel on s’engage (secteur d’activité précédent identique) à un avantage pour les entrepreneurs sortant d’une période de chômage (différence significative entre les lignes 1 et 3).
Pour compléter nos analyses, nous présentons dans le modèle XVI, un modèle de modération additif. L’objectif de ce modèle est de voir si l’effet négatif du chômage est conditionnel de manière simultanée des deux variables qui ont démontrées une modération simple significative (l’âge et l’expérience industrielle). Nos résultats montrent que la modération de l’âge sur le chômage disparaît lorsqu’elle est introduite avec celle de l’expérience industrielle. Ceci peut signifier que l’interaction simple de l’âge et du chômage peut être conditionnel d’autres variables ou que le pouvoir explicatif de la modération entre chômage et l’expérience industrielle comptent de manière plus importante dans la variance globale (variation du R² de 1,7 %) que celle de l’interaction âge et chômage (variation du R² de 0,7 %). Des analyses supplémentaires (Modèle XVII) montrent qu’il existe une interaction triple entre l’âge, l’expérience industrielle et le chômage. Ainsi, la connaissance d’un secteur d’activité annule l’effet négatif observé pour les entrepreneurs seniors. La figure 5 représente visuellement ce résultat. L’influence négative du chômage existe seulement pour les individus qui vont dans un secteur différent de ce qu’ils connaissaient précédemment. Cette différence est gommée lorsque l’entrepreneur à une connaissance du secteur d’activité dans lequel il crée.
Effets des interactions triples entre le chômage, le capital humain et la motivation à croître (H4) sur la croissance de l’entreprise créée
Dans les modèles XVIII à XXIV présentés en annexe (tableau 5), nous avons testé plusieurs modérations de modération (interaction triple). L’objectif est de tester le double effet bénéfique de l’influence de la motivation et de l’expérience sur la croissance de l’entreprise après une période de chômage (hypothèse 4). Nous avons testé les interactions d’abord une à une (modèles XVIII à XXII) puis toutes ensembles (modèles additifs XXIII et XXIV). Trois triples interactions semblent fonctionner. Elles remplissent la double condition d’obtenir un coefficient (b) significatif mais aussi une augmentation significative du pouvoir explicatif (R²) (Cohen et Cohen, 1983). Les triples interactions qui fonctionnent sont liées aux modèles XVIII, XIX et XXI.
Le modèle XVIII teste la triple interaction entre la période de chômage, l’âge de l’entrepreneur et la motivation à croître. Le modèle XIX teste la triple interaction entre la période de chômage, l’éducation et la motivation à croître. Le modèle XXI teste la triple interaction entre la période de chômage, l’expérience managériale et la motivation à croître.
Chômage, motivation, âge de l’entrepreneur
Nos résultats précédents (interaction entre période de chômage et âge de l’entrepreneur) ont déjà indiqué un effet négatif de l’âge pour les individus ayant connu une période de chômage (cf. figures 2 et 3).
Pour améliorer notre modélisation, nous avons supposé que la motivation à croître des entrepreneurs modère la modération de l’âge sur la situation de l’entrepreneur avant la création de l’entreprise (Hypothèse 4). Autrement dit, nous nous attendons à ce que l’effet de l’âge sur l’influence négative du chômage sera moins forte si l’entrepreneur indique être motivé pour croître. Dans le cas contraire (entrepreneur sans motivation à croître), la modération de l’âge pourrait soit n’avoir aucune influence (diminution de sa significativité), soit augmenter la relation négative entre le chômage et la croissance de l’entreprise. L’analyse des résultats (modèle XVIII) montre que cette modération double est significative à 5 % (p=0,0423). Elle améliore la modélisation de 1,05 % (variation du R²). Nous avons conduit une analyse de Johnson-Neyman qui permet de faire apparaître les zones significatives de la triple interaction. Deux zones significatives apparaissent (figure 6).
La première zone correspond aux individus de moins de 29,19 ans; la seconde correspond à celle des individus de plus de 51,53 ans. La zone de moins de 29 ans correspond à 15,79 % de notre échantillon, soit 48 individus. La zone de plus de 51,53 ans correspond à 7,56 % de notre échantillon, soit 23 individus. Comparé à la zone des moins de 29 ans, le nombre d’individus correspond à la moitié. Les résultats liés à cette zone devront sans doute être pris avec précaution (Hayes et al. 2018). Ces zones d’âge nous indiquent que la situation de l’entrepreneur (chômage ou non) aura une influence différente sur ces créateurs selon qu’ils indiquent avoir une motivation à croître ou non.
La figure 7 montre différents effets sur les trois zones identifiées (moins de 29 ans; entre 29 et 51 ans; plus de 51 ans). Les moins de 29 ans (cadrant haut, figure 7) sont avantagés par la motivation lorsqu’ils ont connu une période de chômage avant la création de leur entreprise. La motivation a donc un effet positif significatif pour eux. Cet avantage n’existe pas lorsqu’ils sont passés par un emploi avant de créer.
Les plus de 51 ans (cadrant bas, figure 7), au contraire, en cas de motivation, sont avantagés lorsqu’ils n’ont pas connu de période de chômage. On remarque qu’en cas de chômage, et même en présence de motivation, les plus de 51 ans perdent l’avantage qu’ils avaient sans période de chômage (influence négative significative). Pour la zone entre 29 et 51 ans, la motivation ne modère pas la relation entre l’âge et une période de chômage sur la croissance de la future entreprise (figure 7). Les deux populations (sans emploi et avec un emploi) obtiennent le même avantage de la motivation à croître.
La comparaison des trois cadrant de la figure 7 montre que pour les individus n’ayant pas connu de chômage, l’influence positive de la motivation pour croître augmente avec l’âge. Pour les individus ayant connu une période de chômage c’est le contraire, l’influence positive de la motivation à croître décroit en significativité au fur et à mesure que l’âge avance. La motivation à croître modère donc l’influence de l’âge sur le chômage car cette influence positive de la motivation est plus forte pour les jeunes entrepreneurs et non significative pour les entrepreneurs seniors.
Chômage, motivation, éducation
Le modèle XXI teste la triple interaction entre une période de chômage, l’obtention d’un diplôme universitaire et la motivation à croître. La triple interaction est significative à 10 % et correspond à une augmentation du pouvoir explicatif (R²) de 0,8 %. La figure 8 permet de représenter ce résultat.
Nos tests montrent que le diplôme universitaire est un avantage pour les individus sans motivation à croître qui sortent d’une situation d’emploi (point 1, figure 8). En cas de chômage, un diplômé universitaire doit avoir de la motivation à croître pour obtenir des niveaux de croissance similaires à ceux d’un entrepreneur sortant d’une situation d’emploi (point 2, figure 8). Ces résultats complètent ceux de Block et Wagner (2010) qui indiquaient que l’éducation avantageait seulement les individus qui n’ont pas connu de situation de chômage. Dans nos analyses, l’éducation avantage les entrepreneurs qui sortent d’une situation d’emploi s’ils n’ont pas de motivation à croître. En cas de motivation à croître, le diplôme ne semble pas discriminant. Cette double modération significative ne va pas dans le sens de notre hypothèse 4.
Chômage, motivation, expérience managériale
Enfin, les résultats concernant la modération entre l’expérience managériale, la motivation, et la situation avant la création de l’entreprise (modèle XXI) montrent un triple avantage des individus avec une expérience managériale, n’ayant pas connu de période de chômage et avec une motivation à croître (Figure 9, cadrant haut). Cette triple interaction est significative à 10 %. La figure 9 permet la compréhension et l’interprétation de ce résultat. Ainsi, les individus qui ne sont pas au chômage, ayant une motivation à croître et avec une expérience managériale, créent des entreprises qui ont les plus importantes croissances. Néanmoins, il est important de noter que ce bénéfice correspond seulement aux individus ayant déjà un emploi. L’influence négative du chômage sur la croissance des entreprises n’est pas doublement modérée par l’expérience managériale et la motivation à croître (figure 9, cadrant bas).
Discussion
L’objectif de ce papier était d’analyser les variables qui peuvent conditionner l’influence négative d’une période de chômage avant la création d’une entreprise. Nous nous sommes concentrés sur des variables modératrices attachées aux caractéristiques de l’entrepreneur. Deux grandes catégories de variables modératrices ont donc été testées : des variables de capital humain (générique et spécifique) et de motivation à croître. Plusieurs modèles ont été testés (cf. tableaux 3, 4 et 5). De ces différentes analyses, il ressort que l’influence du chômage est globalement significative et négative (modèle II à VIII). Ceci est cohérent avec la littérature sur les variables de pré-création influençant la croissance des entreprises (Andersson et Wadensjö, 2007). Dans le cadre de notre analyse, nous décidons de valider notre hypothèse 1. Par la suite, les analyses de modération nous ont aidés à affiner les modalités de cette influence négative.
Le test de l’hypothèse 2 a été effectué au travers des modèles X à XVII. Deux interactions ressortent comme significative : l’âge de l’entrepreneur et l’expérience industrielle. Contrairement à ce qui avait été pensé lors de l’hypothèse H2a, l’âge représentant l’expérience de l’individu, et l’éducation ne modèrent pas une période de chômage. A notre connaissance, cette relation entre le chômage et le capital humain sur le chiffre d’affaires de l’entreprise n’avait pas été testée.
Nos résultats montrent une scission entre les entrepreneurs de moins de quarante ans et ceux de plus de quarante ans. Ainsi, les entrepreneurs de moins de quarante ans ne sont pas affectés par une période de chômage, contrairement aux entrepreneurs de plus de quarante ans. Ces résultats invalident l’hypothèse H2a, car nous avions supposé l’existence d’une modération inverse. Ces résultats sont cependant cohérents avec les études théoriques qui indiquent que les entrepreneurs plus âgés sont reconnus pour avoir, à la fois, plus d’expérience permettant d’améliorer la croissance de l’entreprise, mais pouvant faire également face à un manque d’enthousiasme ou d’énergie (Storey et Greene, 2010). Dans ce cadre-là, le chômage affecterait l’entrepreneur senior et non l’entrepreneur junior. L’entrepreneur junior serait donc moins sensible à une période de chômage que l’entrepreneur senior.
Concernant notre hypothèse H2b, nous remarquons que ni l’expérience entrepreneuriale (modèle XIII), ni l’expérience managériale (modèle XIV) présentent d’effet modérateur significatif. Seule l’expérience industrielle (expérience spécifique) montre un effet après une période de chômage (modèle XV). Ainsi, connaitre le secteur dans lequel on va créer permet d’avoir de bien meilleurs résultats que de s’aventurer dans un secteur peu ou pas connu (Bonaccorsi et Giannangeli, 2010; Colombo et Grilli, 2005). Nos résultats montrent que les entrepreneurs provenant d’une période de chômage ont plus intérêt à créer une entreprise dans le même secteur d’activité que leur entreprise précédente. En conséquence, ceux s’orientant plus favorablement vers des projets en lien avec le secteur d’activité de leur précédent emploi auront de meilleurs résultats que ceux décidant de s’orienter vers un secteur d’activité différent. Nos résultats montrent également que l’effet négatif de l’âge peut être gommé par la connaissance du secteur d’activité (modèle XVI et XVII). Nous validons donc partiellement l’hypothèse H2b.
L’hypothèse H3 est invalidée, la motivation à croître ne modère pas la relation négative entre le chômage et la croissance de l’entreprise (modèle XV). Ainsi, contrairement à ce qui avait été supposé, être motivé pour croître n’est pas suffisant seul pour réduire l’effet négatif du chômage. Ceci va dans la direction des recherches qui indiquent que le choix de croître est ancré dans les compétences des porteurs de projet (Capelleras et al., 2019; Autio et Acs, 2010; Bonaccorsi et Giannageli, 2010). Ce sont elles qui permettent d’exploiter les opportunités auxquelles l’entrepreneur fait face (Davidsson, 1991).
L’analyse de l’hypothèse 4 montre que trois doubles modérations fonctionnent. Ainsi, la motivation à croître et la période de chômage interagissent avec les variables d’expérience générique (âge et éducation) et une de nos trois variables d’expérience spécifique (expérience managériale). Seule la triple interaction avec l’âge va dans le sens de l’hypothèse posée. Nous validons partiellement l’hypothèse 4.
Concernant l’interaction avec l’âge (figure 7), les résultats valident un effet modérateur et une diminution de l’influence négative du chômage pour les entrepreneurs les plus jeunes lorsqu’ils sont motivés. La période de chômage devient un moment de réflexion pour le futur projet (Pffeifer et Reize, 2000). Cet effet positif n’existe plus pour les entrepreneurs seniors. La période de chômage dans ce cas-là détériore de manière significative l’effet bénéfique que pourrait avoir une motivation à croître. Ceci complète nos premiers résultats qui montraient une sensibilité plus forte des entrepreneurs de plus de 40 ans après une période de chômage.
À propos de l’interaction avec la variable d’éducation (figure 8), nos résultats montrent que les connaissances académiques constituent un avantage pour les individus n’ayant pas connu de période de chômage (Block et Wagner, 2010) et compensent l’absence d’une motivation à croître de la part de l’entrepreneur. Au chômage, au contraire, le diplôme universitaire, seul, n’est plus suffisant et nécessite une motivation pour croître pour obtenir de bon résultat. Nos résultats montrent ainsi que les entrepreneurs avec un niveau académique universitaire obtiennent des croissances plus basses lorsque la motivation est absente. Il devient alors important de comprendre les raisons de ce choix (Williams et Williams, 2012; Jayawarna, Rouse et Kitching, 2013).
Enfin, pour les expériences spécifiques, nos résultats suggèrent que la motivation à croître est utile pour les individus avec une expérience managériale et un emploi avant de créer une entreprise (figure 9). Il apparaît qu’ils peuvent au mieux utiliser les compétences qu’ils ont acquis durant leur vie professionnelle en accord avec leur choix de croissance (Baum, Locke et Smith, 2001; Baum et Locke, 2004). Ce lien positif est détruit en cas de chômage. Ceci est conforme avec les études qui indiquent qu’il n’y a pas d’influence du chômage sur les compétences de l’individu (Pelzera, Schaffratha et Vernaleken, 2014). Néanmoins, nos résultats indiquent que le chômage détériore la capacité de l’individu à mettre en place correctement sa vision du futur et ceci même en présence d’expérience utile.
Le tableau 6 ci-dessous résume les hypothèses ainsi que leur validation :
Conclusion
En suivant les écrits de Baum, Locke et Smith (2001), la compréhension de la croissance d’une entreprise n’est pas un construit simple. Plusieurs facteurs peuvent entrer en jeu et il devient important de comprendre comment ils interagissent entre eux. Dans notre article, nous avons cherché à répondre à la question de recherche suivante : le capital humain et la motivation à croître de l’entrepreneur modèrent-ils l’influence négative d’une période de chômage sur la croissance de l’entreprise ?
Le chômage est une variable qui permet de modéliser le concept d’entrepreneur par nécessité. C’est-à-dire un entrepreneur qui se retrouve sans aucune autre alternative pour vivre que celle de créer son entreprise. Il est reconnu que cette situation initiale aura pour conséquence une entreprise avec une croissance plus faible. Les raisons invoquées sont relatives au manque de préparation, de compétences et de ressources de l’entrepreneur. Nous pensons néanmoins que malgré la surprise que peut être de se retrouver au chômage, l’entrepreneur par nécessité pourra toutefois piocher dans certaines de ses compétences (capital humain) et sur sa motivation à surmonter les difficultés de la création de l’entreprise.
D’un point de vue théorique, cette étude s’inscrit dans une recherche de compréhension plus fine des facteurs influençant la croissance des jeunes entreprises (Baum, Locke et Smith, 2001; Block et Wagner, 2010; Block, Sandner, et Spiegel, 2015). Elle souligne la complexité de cette compréhension et la nécessité d’étudier plus en détail les caractéristiques des différentes catégories d’entrepreneurs.
D’un point de vue managérial, notre recherche permet d’analyser plus en profondeur les leviers à disposition des formateurs lorsqu’ils doivent aider des entrepreneurs par nécessité. Ainsi, nos résultats montrent que tandis que l’âge est un facteur aggravant en cas de chômage pour la croissance de l’entreprise, l’expérience industrielle permet d’en diminuer la portée. La connaissance sectorielle semble être un point clé de la réussite des entreprises qu’il faut exploiter. Nos résultats sont consistants avec les écrits de Block et Wagner (2010). Les auteurs supposaient que l’expérience industrielle bénéficiait plus aux personnes ayant connu le chômage et que l’éducation était plus profitable pour les entrepreneurs qui n’ont pas connu de chômage. Nos résultats vont dans ces directions. Un autre résultat important montre que les entrepreneurs les plus âgés sont, à la fois, plus sensibles à l’effet négatif du chômage mais aussi imperméables à un possible effet bénéfique d’une motivation à croître. Tandis que les plus jeunes résistent mieux à une période de chômage. Cette résistance est d’autant plus forte qu’ils se sentent motivés pour la croissance. Cette disparité générationnelle pose la question de la sensibilité des entrepreneurs « seniors » par nécessité sur leur capacité à croître et devrait orienter les institutions ou organismes d’accompagnement à mieux les aider dans leur parcours entrepreneurial. Il souligne également que certaines populations sont plus résistantes aux effets du chômage sur le développement de leur projet.
Plusieurs limites doivent être soulignées. Ainsi la précision des éléments de mesure a été au coeur des analyses présentées. La base de données n’ayant pas été construite par les auteurs, beaucoup des variables utilisées sont de nature dichotomique ou catégorielle. Un élément d’amélioration pourrait être l’utilisation de variables métriques (comme par exemple les années d’expérience ou le temps de chômage) pour voir si les résultats sont stables. Une autre limite concerne le caractère potentiellement endogène de la variable « motivation à croître ». Bien que les entrepreneurs ne soient pas en quête perpétuelle de croissance et que celle-ci reste un choix délibéré (Morris et al., 2006; Bonaccorsi et Giannageli, 2010; Jayawarna, Rouse et Kitching, 2013), il est possible que le résultat de l’entreprise soit influencé par la déclaration ex-post de l’entrepreneur quant à sa motivation à croître. Autrement dit, un entrepreneur dont l’entreprise a crû sur la période peut avoir tendance à déclarer ex-post que ceci était sa volonté. Ce problème de simultanéité peut affecter les résultats présentés et ne doit pas être mésestimé lors de l’analyse du lien de causalité entre nos variables (Antonakis, Bendahan, Jacquart et Lalive, 2010). De la même manière, la base de données que nous avons utilisée dans cette étude, bien qu’elle nous ait permis d’avoir accès à un grand nombre d’entrepreneurs a été construite sur la base déclarative des entrepreneurs sur une seule période et peut affecter les résultats obtenus (Podsakoff, MacKenzie, Lee, Podsakoff, 2003; Antonakis, Bendahan, Jacquart, Lalive, 2010).
Enfin, d’autres variables, non présentes dans le modèle testé (e.g. organisationnelles, institutionnelles etc.), pourraient expliquer nos résultats. Par exemple, les entrepreneurs issus de la base de données ont obtenu de l’assistance de la part d’une plateforme de financement française. Les aides et les services découlant de cette assistance pourraient également être responsables du développement ou de la survie des entreprises de notre échantillon. L’ouverture des analyses vers d’autres groupes d’entrepreneurs pourrait améliorer les résultats présentés.
Appendices
Annexe
Notes biographiques
Benjamin Vedel est maître de conférences à l’IUT de Vélizy (université de Versailles/Paris Saclay). Il détient un doctorat en Sciences de gestion de l’Université de Montpellier. Ses recherches sont en entrepreneuriat et portent sur l’incubation et les mécanismes d’émergence entrepreneuriale. Il est membre du Larequoi, laboratoire de recherche en management de l’université de Versailles.
Inés Gabarret est Docteur en Sciences de Gestion, avec une spécialisation en Entrepreneuriat. Elle détient depuis 2016 une Habilitation à Diriger les Recherches (H.D.R). Elle est professeure à l’ESSCA School of Management. Inés Gabarret est également chercheuse affiliée au Larequoi, laboratoire de recherche en management de l’Université de Versailles. Ses recherches portent sur les caractéristiques de l’entrepreneur (sa motivation, résilience, confiance) et les profils atypiques d’entrepreneurs (femmes, chômeurs, entrepreneurs sociaux).
Mohamed Sellami est docteur en sciences de gestion du Cnam de Paris. Il occupe un poste de professeur associé au sein de l’EDC Paris Business School. Ses domaines de recherche portent sur la finance entrepreneuriale, l’intrapreneuriat et la finance de marché.
Sana Saidi est docteur en sciences de gestion de l’Université de Toulouse 1 depuis 2011. Elle occupe un poste de professeur permanent dans le département Finance de Yschools (Groupe ESC Troyes) en Champagne. Ses domaines de recherche actuels se situent à la frontière entre la comptabilité et l’entrepreneuriat. Ils portent sur les pratiques socioculturelles et politico-institutionnelles des cabinets d’audit et d’expertise comptable, la motivation entrepreneuriale des entrepreneurs et la performance en innovation des entreprises dans les technopôles.
Notes
-
[1]
Le rapport publié par le GEM, en 2012, indique que 18 % des entreprises en France sont créées par des entrepreneurs par nécessité. Le taux de création par nécessité varie d’un pays à l’autre (entre 31 % et 7 % selon l’étude GEM). Le taux français est considéré comme moyen. Il est inférieur à celui des pays scandinaves (Norvège, Finlande), mais meilleur que celui de certaines économies en crise au moment de l’étude (comme l’Espagne et la Grèce). Il est, en outre, similaire au taux des États-Unis.
-
[2]
Ils citent les études de Bellu et Sherman (1995) et de Miner, Smith et Bracker (1994).
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Appendices
Biographical notes
Benjamin Vedel is a lecturer at the Institute of Technology of Vélizy, University of Versailles Paris Saclay. He holds a doctorate in Management Sciences from the University of Montpellier. He develops research in entrepreneurship, specially in incubation process and the mechanisms of entrepreneurial emergence. Benjamin is a member of the Larequoi, a management research laboratory of the University of Versailles.
Inés Gabarret holds a PhD in Management Science, with a specialization in Entrepreneurship. Since 2016, she has held an accreditation to supervise research (H.D.R.). She is a professor at Essca School of Management. Inés Gabarret is also a researcher at Larequoi, a management research laboratory of the University of Versailles. Her research focuses on the characteristics of the entrepreneur (motivation, resilience, confidence) and the atypical profiles of entrepreneurs (women, unemployed, social entrepreneurs).
Mohamed Sellami is a doctor on Management Sciences from the Cnam, Paris. He is associate professor at EDC Paris Business School. He develops research on entrepreneurial finance, intrapreneurship and market finance.
Sana Saidi has a PhD in Management Sciences from the University of Toulouse 1 since 2011. She is actually an assistant professor in Finance at Yschools (Business School of Troyes). Her main fields of research lie at the frontier between accounting and entrepreneurship. They focus on the sociocultural and politico-institutional practices of audit firms and accountants, the entrepreneurial motivation and the innovation performance of firms in the technopoles.
Appendices
Notas biograficas
Benjamin Vedel es profesor en el Instituto de tecnología de la Universidad de Versailles, Paris Saclay. Él ha obtenido su doctorado en administración en la Universidad de Montpellier. Su investigación es en emprendedorismo, principalmente en los sistemas de incubación y en los mecanismos de emergencia de las nuevas empresas. Él es miembro del Larequoi, laboratorio de investigación en administración de la Universidad de Versailles.
Inés Gabarret es Doctor en administración con una espacialización en emprendedorismo. Desde el 2016 ella tiene una habilitación a dirigir investigación (H.D.R.). Ella es profesora en el ESSCA School of Management. Inés Gabarret es igualmente investigadora afiliada al Larequoi, laboratorio de investigación en administración de la Universidad de Versailles. Sus temas de investigación son las características de los emprendedores (motivación, resiliencia, confianza) y los perfiles atípicos de emprendedores (mujeres, desempleados, emprendedores sociales).
Mohamed Sellami es doctor en administración del Cnam de Paris. Él ocupa un puesto de profesor asociado en el EDC Paris Business School. Sus temas de investigación son la finanza del emprendedorismo, el intraemprendimiento y la finanza de mercados.
Sana Saidi es doctora en administración por la Universidad de Toulouse 1 desde 2011. Actualmente, es profesora asistente adscrita al Departamento de Finanzas del Yschools (Grupo ESC Troyes). Sus temas de investigación se encuentran en la frontera entre contabilidad y emprendimiento, enfocándose en las prácticas socioculturales y político-institucionales de los despachos de auditoría contable, la motivación empresarial y la innovación en las empresas participantes en Tecnópolis.