DocumentationComptes rendus

Eiber, Bettina (2020) : Wikipedia und der Wandel der Enzyklopädiesprache. Ein französisch-italienischer Vergleich [Wikipédia et la transformation du langage encyclopédique. Comparaison franco-italienne]. Tubingue : Narr Verlag, 473 p.[Record]

  • John Humbley

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  • John Humbley
    Université de Paris, Paris, France

Les encyclopédies et autres dictionnaires collaboratifs, Wikipédia en tête, ont bouleversé le paysage lexicographique mondial. Quel traducteur professionnel ou occasionnel ne s’en sert pas ? On peut alors s’étonner que les répercussions linguistiques de ce changement de paradigme n’aient pas fait l’objet de davantage de recherches. C’est donc avec plaisir que l’on salue la publication du présent ouvrage, qui manifestement cherche à combler une lacune importante et par là même à rétablir une réputation. On sait que la méfiance a été pendant longtemps le maître mot parmi les linguistes. Le grand lexicographe et spécialiste des encyclopédies, Alain Rey, disait en 2011 tout le mal qu’il pensait de Wikipédia et de « ces encyclopédies participatives dans lesquelles on a tout et n’importe quoi ». La présente étude aurait-elle été susceptible de le faire changer d’avis ? Une des premières surprises que l’on a en ouvrant ce volume est l’existence de nombreuses études réalisées dans des cadres très variés par différentes communautés de recherche mais peu prises en compte par la métalexicographie francophone. On se félicite alors de ce précieux bilan de l’existant : il s’avère que l’anglais est relativement bien couvert par rapport au français et à l’italien, qui ont toutefois fait l’objet d’analyses ponctuelles mais pertinentes grâce à un petit nombre de chercheurs isolés. Partant de cette synthèse de nombreux travaux antérieurs, l’auteure met à profit ses propres recherches réalisées dans le cadre d’une thèse de doctorat pour rendre compte des aspects linguistiques de cette révolution lexicographique. Le livre comporte neuf chapitres. Le premier présente succinctement les objectifs de l’étude, le deuxième une historique du concept encyclopédie, mettant l’accent sur la forme – canonique – qu’il a pris à la période des Lumières. Ensuite, l’auteure esquisse l’évolution ultérieure, en passant par l’époque « bourgeoise » au dix-neuvième siècle pour arriver aujourd’hui à l’éruption du numérique. La nouvelle possibilité de dialoguer avec l’encyclopédie, surtout par le truchement de la fonction Discussion et l’effacement de la distinction entre auteur et utilisateur, sont deux aspects de la révolution numérique qui sont problématisés ici et leurs effets linguistiques sont analysés tout au long de l’ouvrage. Le troisième chapitre situe les orientations proprement linguistiques dans l’approche de la « tradition discursive », outil d’analyse du discours bien connu dans les pays de langue allemande, prisme par lequel sera analysé d’abord l’article d’encyclopédie papier puis celui de Wikipédia. Cette école d’analyse textuelle est présentée en détail et sa pertinence pour une comparaison à la fois historique et interlinguistique est finement argumentée. Le quatrième chapitre expose et justifie le choix du corpus et de la méthode de dépouillement et d’analyse. Le corpus se compose d’articles correspondant à cinq vedettes prises dans quatre domaines différents (géographie, chimie, médecine, économie), dans deux encyclopédies papier françaises (Larousse et Universalis) et deux italiennes (Garzanti et Nova) ainsi que dans les pages Wikipédia françaises et italiennes. Les cinq concepts ainsi analysés sont dans trois cas sur quatre des cohyponymes : pour la médecine, il s’agit de cinq maladies, pour la géographie de cinq noms de pays, etc. L’économie constitue l’exception, car les concepts sont plus hétérogènes. On dispose ainsi d’un corpus « encyclopédies », papier et numériques, de 549 685 mots (tokens). Les différentes techniques d’interrogation sont alors présentées en détail. Pour le contenu des articles, chaque concept vedette est sous-divisé en aspects, qui peuvent être schématisés par type et par langue. Par exemple, pour les substances chimiques, 21 aspects sont identifiés au moyen de mots clés : propriétés, production, utilisation, forme naturelle, structure, etc., dont les pourcentages sont traduits en …

Appendices