L’ouvrage s’ouvre sur une préface éclairante. Devant l’absence d’un manuel académique en matière d’interprétation, les auteurs se proposent, comme l’indique le sous-titre, d’introduire les étudiants universitaires aux théories propres à l’interprétation. Car, s’il existe plusieurs manuels de type professionnel destinés aux futurs interprètes et aux professionnels, un ouvrage relatif aux approches théoriques en vigueur dans les recherches en la matière faisait cruellement défaut. Disons cependant que des ouvrages comme ceux de Gile (1995), Pöchhacker (2016) et Setton (1999), entre autres, recèlent des éléments théoriques, pas toujours systématiques, dont peuvent bénéficier les chercheurs. L’objectif déclaré (et atteint) du manuel est donc de présenter les fondements théoriques de l’interprétation et les recherches effectuées dans le domaine. L’ouvrage est destiné aux étudiants de premier et de deuxième cycles, inscrits dans des programmes d’interprétation de conférence, auprès des tribunaux ou en milieu social. Notons d’emblée qu’un accent très prononcé est mis sur l’interprétation en langue des signes (pour malentendants) et sur les États-Unis. La préface se termine par un bref curriculum vitae des trois auteurs : on y présente leur expérience tant professionnelle qu’académique de l’interprétation et, le cas échéant, leurs responsabilités administratives et leurs publications. Dans un premier chapitre, The Discipline of Interpreting Studies, qui pourrait en fait s’appeler Introduction, les auteurs se penchent sur la définition et la constitution d’une discipline et sur les méthodes scientifiques quantitatives et qualitatives, avant de présenter, très généralement, l’interprétation en tant que discipline. Vient ensuite la description de la structure du livre. Après cette « introduction », suivent six chapitres, chacun consacré à une approche théorique spécifique que les auteurs considèrent comme les fondations de la jeune « interprétologie » : l’histoire, la traductologie, la linguistique, la sociologie/anthropologie, la psychologie sociale et la psychologie cognitive. Le lecteur appréciera l’équilibre de l’ouvrage, où les chapitres font tous une trentaine de pages. Chaque chapitre affiche une même composition : une citation en exergue, un encadré introductif, le texte proprement dit (souvent agrémenté de photographies d’auteurs connus), un résumé, des questions et quelques suggestions de lectures complémentaires destinées à alimenter la réflexion des étudiants. Finalement, quelques remarques relatives au style d’écriture et au métalangage. Notons que l’ouvrage traite les interprètes exclusivement au féminin en utilisant les pronoms she et her. Le deuxième chapitre porte sur les rapports entre l’interprétation et l’histoire. D’emblée, les objectifs du chapitre sont clairement exposés : le lecteur (l’étudiant), à la fin du chapitre, devra être en mesure de : comprendre l’utilité de l’approche historique ; repérer les principaux thèmes récurrents dans l’histoire de l’interprétation ; évaluer de manière critique des événements historiques en lien avec l’interprétation ; et rendre compte de la notion de pouvoir inhérente au choix des interprètes. Notons qu’à l’instar de Foucault (1972, 1979 et 1991) les auteurs insistent sur le fait que l’histoire ne devrait pas se limiter à tenter de comprendre « la » vérité des choses, mais plutôt d’historiciser « les » vérités présentes dans les cultures. L’exemple est celui du discours de Martin Luther King Jr. « I Have a Dream ». Suivent plusieurs références à des interprètes et leur contexte dans différentes parties du monde et à des époques distinctes. On commence par l’ancienne Égypte au cours du troisième millénaire avant Jésus-Christ pour finir de nos jours. Mentionnons toutefois que la grande majorité de ces références le sont à l’interprétation en langue des signes (LS). Le chapitre se termine sur la professionnalisation des interprètes en LS. La traduction est la discipline suivante, mise en parallèle avec l’interprétation. Avec pour but de montrer la filiation des deux disciplines, le chapitre 3 passe en revue quelques-uns …
Appendices
Bibliographie
- Foucault, Michel (1972) : The Archeology of Knowledge. (Traduit du français par R. Sheridan). Londres : Routledge.
- Foucault, Michel (1979) : The History of Sexuality Volume 1 : An Introduction. (Traduit du français par R. Hurley). Londres : Allen Lane.
- Foucault, Michel (1991) : Politics and the Study of Discourse. In : G. Burchell, C. Gordon et P. Miller, dir. The Foucault Effect : Studies in governmentality. Chicago : University of Chicago Press, 53-72.
- Gerver, David (1975) : A Psychological Approach to Simultaneous Interpretation : A Review and Model. Meta. 20(2):119-128.
- Gile, Daniel (1995) : Basic Concepts and Models for Interpreter and Translator Training. Amsterdam : John Benjamins.
- Pöchhacker, Franz (2016) : Introducing Interpreting Studies. 2e éd. Abingdon : Routledge.
- Setton, Robin (1999) : Simultaneous Interpretation : A Cognitive-Pragmatic Analysis. Amsterdam : John Benjamins.