Mémoires du livre
Studies in Book Culture
Volume 6, Number 2, Spring 2015 Livre et religion Religion and the Book Guest-edited by Scott McLaren
Table of contents (11 articles)
Articles
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The Atheist Bunyan: The Pilgrim’s Progress and Organized Freethought in Victorian Britain
David Reagles
AbstractEN:
This article explores how freethinkers received John Bunyan and read his works in Victorian Britain. An analysis of freethinking periodicals, letters to editors, lectures, essays, and autobiography reveals a vexed relationship that was anything but monolithic. There emerged two distinct reading communities within organized freethought. Some freethinkers, especially in the early nineteenth century, rejected Bunyan as another representation of irrational religious faith that was a hindrance to societal reform. However, other freethinkers appropriated his works and used him as a valuable resource for understanding their own experiences with religion as well as for communicating their message. I demonstrate that these contrasting positions resulted from interpretive strategies that stem from fundamental assumptions regarding how the project of secularism ought to interact with Britain’s predominantly Christian culture. It corresponds to an ongoing negotiation of meaning within organized freethought that reflects internal fissures, as well as a rapidly changing British society.
FR:
Dans cet article, j’explore la réception, dans la Grande-Bretagne de l’époque victorienne, de l’oeuvre de John Bunyan par les libres penseurs. Une analyse de périodiques, de lettres aux journaux, de conférences, de dissertations et d’autobiographies associés au courant de la libre pensée révèle un rapport problématique qui était tout sauf monolithique. Deux communautés de lecture distinctes émergèrent au sein du mouvement. Certains libres penseurs, surtout au commencement du xixe siècle, rejetèrent Bunyan, qui incarnait pour eux une foi religieuse irrationnelle constituant une entrave aux réformes sociétales; d’autres, au contraire, s’approprièrent ses oeuvres, qui faisaient écho à leur propre expérience du religieux et se révélaient utiles pour communiquer leur message. Je soutiendrai que ces positions opposées résultaient de stratégies d’interprétation émanant d’hypothèses fondamentales quant à la manière de concilier une laïcité éventuelle avec la culture principalement chrétienne de la Grande-Bretagne. Cette opposition est en phase avec la négociation continuelle dont faisait l’objet la notion de signification au sein du courant organisé de la libre pensée, en plus d’être le reflet de fissures internes dans le mouvement ainsi que d’une société britannique en pleine mutation.
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The Life of The Life of David Brainerd: Agency, Evangelicalism, and Book History
Jennifer Snead
AbstractEN:
This article describes the editorial practices that Jonathan Edwards and John Wesley brought to their respective editions of The Life of David Brainerd, explains how those practices were informed by their opposing theological stances towards salvation, and traces the circulation and reception of each edition back to those theological stances. Finally, the article invokes classic models of the methodology of book history and recent work on the circulation of nineteenth-century evangelical publications, arguing that an understanding of the kind of theological editing eighteenth-century figures like Edwards and Wesley took can better help us to articulate nineteenth- and twentieth- (and twenty-first) century attitudes and assumptions about agency and material texts.
FR:
Cet article décrit les pratiques éditoriales adoptées par Jonathan Edwards et John Wesley dans leurs éditions respectives de The Life of David Brainerd, explique de quelle manière ces pratiques furent alimentées par l’opposition théologique entre les deux hommes concernant le salut, et retrace la diffusion et la réception de chaque édition en fonction de ces positions théologiques distinctes. Sont également évoqués les modèles traditionnels de la méthodologie de l’histoire du livre ainsi que des travaux récents sur la diffusion des publications évangéliques du xixe siècle, de manière à faire valoir que la compréhension du genre d'édition théologique pratiqué par des figures du xviiie siècle comme Edwards et Wesley peut nous aider à mieux cerner les attitudes et les hypothèses ayant cours aux xixe et xxe siècles (et au xxie) en ce qui a trait à l’agentivité et à la matérialité des textes.
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Making a Bible Enterprise: James Thomson and the British and Foreign Bible Society in British North America, 1838–1842
Stuart Barnard
AbstractEN:
The reading and study of bibles in Canada has shaped the ways in which the Christian faith is practiced, but it was not until the middle of the nineteenth century that bibles became widely available. This article examines the historical developments of bible distribution in British North America, focusing on the British and Foreign Bible Society (BFBS), which became the largest distributor of bibles in the world. Strengthening the BFBS's Canadian influence was its agent James Thomson, whose work in British North America between 1838 and 1842 expanded the organization’s reach and ensured an ample supply of bibles in the colonies. Through the expansion of local Bible Society auxiliaries and the establishment of distribution networks, Thomson laid the foundations for the BFBS’s success in establishing a successful bible enterprise that would dominate the trade in British North America for the rest of the century.
FR:
La lecture et l'étude de la Bible au Canada a façonné la manière dont la foi chrétienne y est pratiquée, même s’il fallut attendre le milieu du xixe siècle pour que les bibles y soient largement accessibles. Dans cet article, j’évoque les jalons historiques qui ont marqué la distribution de bibles en Amérique du Nord britannique et m’intéresse particulièrement aux activités de la Société biblique britannique et étrangère (BFBS), qui allait devenir le plus grand distributeur de bibles du monde. Je m’intéresserai à la figure de James Thomson, agent de la BFBS en Amérique du Nord britannique de 1838 à 1842, qui, par son travail, contribua grandement à renforcer l'influence canadienne au sein de la Société, en plus d’étendre la portée de cette dernière et de veiller à ce que les colonies soient bien pourvues en matière de bibles. Sous sa gouverne, des sociétés bibliques auxiliaires virent le jour un peu partout et des réseaux de distribution furent établis. Thomson jeta les bases devant assurer le succès de la BFBS, qui allait dominer le commerce des bibles en Amérique du Nord britannique durant la seconde moitié du xixe siècle.
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A Slow, Not Swift, Battle of the Books: Christian Literature in Nineteenth-Century India
Graham W. Shaw
AbstractEN:
This essay examines the preparation, distribution, and reception of Christian literature in nineteenth-century India. To the missionaries, the contemporary publishing landscape lacked any moral content. The output of Indian-owned presses, dominated by religious works, was contemptible; the popular literature imported from Europe deplored; and “infidel” works feared for their potential to turn Indians against all religion. To battle all this, the urgency to prepare a “moral” literature was at the heart of the evangelical project. Indian Christian works ranged from Bible translation into regional languages to all kinds of “support” literature. Various channels were used to distribute this literature, both individual and institutional. Counter-attacks were mounted by India’s own religious communities, turning the missionaries’ own methods against them.
FR:
Dans le présent article, nous étudions la conception, la diffusion et la réception de la littérature chrétienne en Inde au xixe siècle. Aux yeux des missionnaires, le paysage éditorial de l’époque était dépourvu de toute composante morale. Ceux-ci dédaignaient à la fois la production des presses détenues par des Indiens, composée surtout d’ouvrages religieux, et la littérature populaire importée d’Europe. Quant aux oeuvres « infidèles », elles étaient redoutées, car elles auraient pu détourner les Indiens de toute religion. Pour contrer ces menaces, il apparaissait impératif de proposer une littérature « morale », projet au coeur de l’entreprise évangélique et soutenu par une croyance pratiquement magique quant au pouvoir de conversion du Verbe imprimé. Les oeuvres chrétiennes produites en Inde allaient des traductions de la Bible dans des langues régionales à la documentation d’« accompagnement » en tout genre. Divers réseaux, tant individuels qu’institutionnels, étaient utilisés pour la diffusion de cette littérature. Cependant, la contre-attaque s’organisa chez les communautés religieuses indigènes, de sorte que les méthodes préconisées par les missionnaires en vinrent à se retourner contre eux.
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Religious Books, the French Revolution and the Printer Jean-Baptiste Collignon in Metz
Jane McLeod and Renée Girard
AbstractEN:
When the Revolutionary government in France declared Freedom of the Press in 1789 it did not anticipate the flow of counter-revolutionary pamphlets attacking its decision to nationalize the French Church and require all clergy to swear an oath to the Civil Constitution of the Clergy. This article examines the conditions surrounding the printing of these religious pamphlets by investigating the career of one provincial printer in the border town of Metz—Jean-Baptiste Collignon—who worked with émigré bishops to produce them and who was guillotined in 1794 for counterrevolutionary activities. The authors explore the production and distribution of religious pamphlets, the ideological commitment of revolutionary printers, and the regional nature of censorship in the early French Revolution.
FR:
Alors qu’en 1789, le gouvernement révolutionnaire décrétait la liberté de la presse, il était difficile pour lui de prévoir l'ampleur de la diffusion de pamphlets contrerévolutionnaires produits peu après en réaction à la décision de l’Assemblée de nationaliser l’Église de France et d’imposer à son clergé un serment de soutien à la Constitution civile du clergé. Dans cet article, les auteures examinent le contexte de publication des pamphlets religieux par l’entremise de la carrière d'un imprimeur messin, Jean-Baptiste Collignon, qui s’associa aux évêques émigrés afin de produire ce type d’écrits et qui fut guillotiné en 1794 pour activités contrerévolutionnaires. Elles analysent la production et la distribution des pamphlets religieux, la motivation idéologique des imprimeurs et le système de censure régional aux débuts de la Révolution française.
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“The Substance of Things Hoped for”: Peter Gordon White and the New Curriculum of The United Church of Canada
Ruth Bradley-St-Cyr
AbstractEN:
For the United Church of Canada, the “New Curriculum” achieved its main objective of renewing bible study for all age groups, with the added bonus of gaining publicity for the church itself. However, the massive project took a huge investment that was neither properly funded nor ultimately realized. The editor-in-chief, Peter Gordon White, unjustly blamed himself for the problems that resulted; however, the project was extremely well managed and produced on schedule. Nor did the calls to burn the New Curriculum due to its overtly modernist biblical interpretations directly cause financial problems. Instead, it was almost universally adopted by United Churches across the country. The problems arose mainly from a disconnect between the world the New Curriculum was conceived in (1950s) and the world it was launched into (1960s). This paper explores the New Curriculum’s successes and failures, and its contribution to the downfall of Canada’s largest publishing house, The Ryerson Press.
FR:
Pour l’Église Unie du Canada, le « Nouveau Curriculum » a atteint son objectif central, soit de renouveler l’étude de la Bible chez tous les groupes d’âge. Il a en outre conféré une visibilité médiatique accrue à l’Église elle-même. Toutefois, l’imposant projet a nécessité un immense investissement qui n’a pas été adéquatement financé, et il ne s’est pas complètement concrétisé. L’éditeur en chef, Peter Gordon White, s’est imputé la responsabilité des problèmes qu’a connus le projet, alors même que celui-ci avait été géré de main de maître et que sa mise en oeuvre s’était déroulée comme prévu. De plus, les appels au rejet du Nouveau Curriculum en raison des interprétations bibliques ouvertement modernistes qu’il propose ne sont pas en cause dans les déboires financiers qui ont suivi. Au contraire, le programme a été adopté par pratiquement toutes les Églises Unies du pays. Les problèmes sont surtout attribuables à la rupture s’étant opérée entre le monde dans lequel le Nouveau Curriculum a été élaboré (les années 1950) et celui dans lequel il a été lancé (les années 1960). Dans cet article, nous nous penchons sur les succès et les échecs connus par le Nouveau Curriculum, ainsi que sur le rôle qu’il a joué dans le déclin de la maison d’édition la plus importante du Canada, The Ryerson Press.
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Iconic Scriptures from Decalogue to Bible
James W. Watts
AbstractEN:
An “iconic book” is a text revered primarily as an object of power rather than just as words of instruction, information, or insight. The emerging study of iconic books and texts draws especially on comparative scriptures studies (e.g. Graham, Watts) and icon theory (e.g. Brown, Parmenter) to develop frameworks for understanding the ritual production, display, and manipulation of material texts. People usually assume that books and other kinds of texts gain iconic status secondarily, after their semantic contents gain influence and prestige. That assumption is called into question by the study of the form and functions of ancient Near Eastern texts, many of which were created for iconic use. Iconic ritualization was also a key factor in creating the first Western scripture, the Jewish Torah. It narrates the gift of divinely written tablets to Moses, tablets that are never read but rather enshrined in a book reliquary (the Ark of the Covenant) that represents God’s presence with Israel. Simultaneously, Moses writes scrolls of Torah (law or instruction) that accompany the Ark of the Covenant, report on the tablets’ origins and contents, among other things, and must be read aloud regularly to the entire people of Israel. Jewish tradition soon came to regard the Torah, too, as written in heaven. In this way, iconic display joined ritualized performance and semantic interpretation as engines for scripturalizing Torah in antiquity as well as the Bibles that incorporated it in later periods.
FR:
Un « livre iconique » est un ouvrage qui est d’abord célébré en tant qu’objet de pouvoir plutôt que comme un simple texte véhiculant une marche à suivre, de l’information ou quelque réflexion. Le champ en émergence de l’étude des livres et des textes iconiques puise principalement aux études religieuses comparées (p. ex. Graham, Watts) et à la théorie des icônes (p. ex. Brown, Parmenter) dans l’élaboration de cadres qui permettent de comprendre la dimension rituelle de la production, de la présentation et de l’usage de textes matériels. On tient généralement pour acquis que les livres et autres textes se voient conférer un statut iconique dans un deuxième temps, après que leur contenu sémantique eut gagné en influence et en prestige. Cette perception mérite d’être réexaminée à la lumière de l’étude de la forme et des fonctions de textes anciens en provenance du Proche-Orient, plusieurs desquels furent créés précisément pour servir d’icônes. La ritualisation iconique fut aussi un élément central dans la création des premières Écritures occidentales, soit la Torah juive. Cette dernière relate le don divin, à Moïse, de tables qui ne sont jamais lues mais sont plutôt consignées à un reliquaire (l’Arche d’Alliance) représentant la présence de Dieu au milieu d’Israël. Moïse, cependant, écrit les rouleaux de la Torah (la loi), qui coexistent avec l’Arche d’Alliance, expliquent entre autres choses l’origine des tables et leur contenu, et doivent être lus à voix haute fréquemment à tout le peuple d’Israël. Bientôt, la tradition juive en vint à considérer que la Torah avait elle aussi une origine divine. C’est donc dire que la présentation iconique est associée à une performance ritualisée et à une interprétation sémantique qui participèrent à la scripturalisation de la Torah dans l’Antiquité, mais aussi à celle des Bibles qui l’incorporèrent ultérieurement.
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Textual Erasures of Religion: The Power of Books to Redefine Yoga and Mindfulness Meditation as Secular Wellness Practices in North American Public Schools
Candy Gunther Brown
AbstractEN:
This essay argues that books, broadly defined to include print and internet publications, played a crucial role in the cultural mainstreaming, including adoption by public schools, of non-Christian religious practices such as yoga and meditation. Promotional books, tactically and ironically, played on the textual bias of Christianity, and especially Protestantism, to re-brand practices borrowed from religious traditions such as Hinduism and Buddhism, as scientific techniques for exercise and stress-reduction, thereby reintegrating religion into public education. The essay begins with a brief history of religion in U.S. and Canadian public education, explains the textual bias of North American assumptions about religion, and analyzes how twentieth-century promoters of practice-centered religions tactically wielded books to increase public acceptance of non-Christian religious practices. The essay focuses on two twenty-first-century examples of religion-based, textually mediated public-school curricula: the Sonima Foundation’s Health and Wellness program of Ashtanga yoga and The Hawn Foundation’s MindUP program of mindfulness meditation.
FR:
Dans le présent article, nous soutenons que les livres (que nous définirons comme incluant à la fois les publications imprimées et numériques), notamment par leur incorporation au programme d’écoles publiques, ont joué un rôle fondamental dans la normalisation culturelle de pratiques religieuses d’origine non chrétienne comme le yoga et la méditation. De manière stratégique mais non moins ironique, des ouvrages promotionnels ont su profiter du préjugé favorable envers l’écrit observé au sein du christianisme (et plus particulièrement dans le protestantisme) pour conférer une nouvelle image à des pratiques empruntées à d’autres traditions religieuses telles l’hindouisme et le bouddhisme, et désormais présentées comme des techniques scientifiques d’exercice et de réduction du stress. La religion se trouve alors réintégrée au système public d’éducation. Nous brossons d’abord un bref historique de la place de la religion à l'école publique aux États-Unis et au Canada; expliquons en quoi consiste le parti pris textuel qui teinte la réflexion en matière de religion en Amérique du Nord; puis analysons la manière dont les promoteurs de religions axées sur la pratique se sont servis des livres, au xxe siècle, pour favoriser l’acceptation de pratiques religieuses non chrétiennes par le grand public. Nous nous attardons à deux cas, pour le xxie siècle, de programmes scolaires publics où la religion se fait présente par l’entremise des textes : le programme de santé et bien-être par l’entremise du yoga ashtanga de la Sonima Foundation, et le programme MindUP de la Hawn Foundation, qui préconise la méditation de pleine conscience.
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The Secret Textual History of Pamela, Methodist
Andrew O. Winckles
AbstractEN:
This essay will trace how the closely linked discursive practices of oral testimony in Methodist classes and bands, manuscript circulation via letter of spiritual experience accounts, and publication of letters and narratives in the Arminian Magazine can be mapped onto the discourse culture that brought about the publication of Samuel Richardson’s Pamela and the resultant media storm that was only rivalled by the vehemence of the attacks on Methodism in the contemporary press. This history makes clear some of the links between the discourse of evangelicalism and the discourse of the early novel, most notably in the shared textual histories and similar protocols of mediation that define early works in each field.
FR:
Nous nous intéresserons ici à des pratiques discursives apparentées : le témoignage oral dans la tradition méthodiste lors des rencontres de « classes » et de « bandes »; la diffusion épistolaire, donc manuscrite, de témoignages relatant des expériences spirituelles; et la publication de lettres et de récits dans le Arminian Magazine. Nous tenterons de voir de quelle manière toutes ces pratiques participèrent au discours ambiant qui mena à la publication du roman Pamela de Samuel Richardson et au tollé médiatique qu’il souleva, tollé qui ne fut surpassé que par la véhémence des attaques qu’on fit alors subir au méthodisme dans la presse. Ce cas de figure met en lumière certains des liens existant entre le discours évangéliste et le discours adopté par le roman de l’époque, surtout en ce qui a trait aux histoires textuelles partagées et aux protocoles de médiation similaires qui caractérisent les oeuvres fondatrices de chacune des deux sphères.
Varia
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Le reporter devient un auteur. L’édition du reportage en France (1870-1930)
Mélodie Simard-Houde
AbstractFR:
Cet article propose quelques balises pour une histoire de l’édition du reportage en France (1870-1939). Si l’effervescence des années de l’entre-deux-guerres est déjà connue, nous verrons que l’édition des années 1870-1914 est plus abondante qu’on a pu l’affirmer jusqu’à présent. L’étude du format et du paratexte des volumes permet de dégager, dans un premier temps, des stratégies de légitimation du geste éditorial et la construction de postures de reporters, à la croisée de plusieurs genres (chronique, reportage, mémoires) ou disciplines (histoire, ethnologie, littérature, journalisme). Nous distinguerons le tournant des années 1900 comme un moment phare pour l’édition du reportage, concurremment à d’autres phénomènes bouleversant les représentations du reporter. Nous reviendrons enfin sur les années de l’entre-deux-guerres afin d’illustrer la proximité entre reportage et fiction, à travers la mise en place d’un reportage feuilletonesque, soutenue par un dispositif d’édition populaire.
EN:
This article proposes markers for the history of reportage publishing in France (1870-1939). While the effervescence of reportage publishing during the interwar period is well-known, we demonstrate that from 1870-1914 it was actually more abundant than was at first thought. Our study of the paratexts and formats of certain volumes highlights legitimization strategies of publishers and the construction of reporters’ postures, hybrids of either literary and journalistic genres (columns, reportages, memoirs) or of disciplines (history, ethnology, literature, journalism). We single out the early 1900s as a key moment for reportage publishing, when distinct phenomena work concurrently to create a turning point in the representations of the reporter. Finally, we return to the years between the two wars in order to illustrate how close to one another reportage and fiction became at that time through the introduction of a particular form of reportage that we refer to as “feuilletonesque,” or “serialized,” a form that was sustained by a popular publishing device.