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Louis Valcke, licencié en droit et docteur en philosophie de l’Université de Louvain, s’est affirmé comme spécialiste international de la philosophie de la Renaissance. Il est professeur émérite de philosophie à l’Université de Sherbrooke. En 2006, le professeur Valcke a reçu le prix Monseigneur Marcel pour son ouvrage consacré à l’histoire de la philosophie de la Renaissance.
Dans cet ouvrage exceptionnellement bien fait, l’A. commence par situer le contexte historique et intellectuel dans lequel baigne Pic de la Mirandole. Il aborde les grands courants de pensée de l’époque, brosse l’arrière-plan philosophique qui inspirera ensuite toute l’oeuvre mirandolienne. L’A. démontre comment la Renaissance humaniste inspira une résurrection de la philosophie antique sous toutes ses formes. Les néoplatoniciens de l’Académie de Florence, sous l’égide de Marsile Ficin, tenteront d’unir les éléments valables de l’Antiquité païenne avec les aspects fondamentaux du christianisme. Le naturalisme aristotélicien leur déplaît d’une certaine façon. Sans l’opposer radicalement au platonisme, ils optent pour l’aspect religieux du néoplatonisme, sa philosophie de la beauté et l’attention mise sur l’harmonie dans le monde. Toutes les réalités divines sont comprises par l’intermédiaire des créatures. L’univers est beau, harmonieux, et il est composé de degrés d’être, qui s’étendent des choses corporelles jusqu’à Dieu, l’Unité ou l’Un. Le rôle de l’homme est d’établir le lien entre le spirituel et le matériel. La philosophie de l’Académie est profondément syncrétique.
L’A. situe tout au long des chapitres 3, 5 et 6 la biographie de Pic de la Mirandole. Ce survol biographique permet au lecteur de situer les principales oeuvres du jeune prodige de Florence. Autodidacte de génie, le jeune et beau comte de la Mirandole tente de maîtriser toutes les sciences « humaines et divines ». Après avoir connu des amours fort romanesques, il étudia les traditions intellectuelles les plus variées, tant chrétienne (en latin), que juive et cabalistique (en hébreu) ou païenne (orphisme, pythagorisme et platonisme en grec). Il connut la célébrité en proposant à Rome en 1486 le fameux débat portant sur ses 900 thèses philosophiques et théologiques. Il s’enfuit en France, après avoir été soupçonné d’hérésie, puis revint à Florence pour vivre sous la protection de Laurent le Magnifique. Il mourut à l’âge de 31 ans, sans avoir réussi son rêve d’unifier les écoles philosophiques de son temps.
Le grand dessein de Pic de la Mirandole était de concilier la pensée de Platon et celle d’Aristote. Initialement en accord avec le mouvement néoplatonicien qui prévalait à l’Académie, il trouvera en Platon la norme du vrai, vers laquelle il tentera de reconduire Aristote. Sa démarche le conduira exactement à l’inverse. L’évolution de sa pensée le conduira à rejeter la perspective néoplatonicienne dans laquelle il s’inscrivait depuis le tout début de sa recherche philosophique, pour en revenir à une rigueur toute péripatéticienne. Ce renversement de perspective est uniquement d’ordre philosophique, et découle d’une réflexion rigoureuse sur l’être et l’un comme principes métaphysiques fondamentaux.
Le lecteur trouvera ici un ouvrage génial, fort bien documenté, et qui mérite de s’ajouter aux oeuvres de qualité portant sur les débats philosophiques de la Renaissance. Pic de la Mirandole témoigne par sa vie d’une grande tolérance à l’égard de toutes les philosophies (il y a une part de vérité en toutes) et du désir de concilier l’aristotélisme padouan et le platonisme florentin. Son nom est demeuré le symbole de l’érudition la plus étendue. Un livre à lire et à relire.