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Mark Kingwell est professeur de philosophie à l’Université de Toronto et agrégé supérieur de recherches au Collège Massey. Il est spécialisé en théories des politiques et de la culture et est diplômé des Universités de Toronto, d’Édimbourg et de Yale.
Dans cet essai, à la fois original et audacieux, l’A. dévoile ses expériences personnelles et sa quête de bien-être. Les chemins qu’il explore ne s’écartent pas de ceux de ses contemporains. Chacun a son idée sur ce que constitue le bonheur et rares sont ceux qui arrivent à convaincre les autres de leur point de vue. Le monde moderne présente le bonheur sous la forme d’un objet matériel, d’un programme de thérapie, d’une réussite professionnelle, de séminaires de pensées positives, de cyber-divertissements. Non seulement le bonheur est matérialisé, mais on le veut tout de suite. L’A. ne craint pas de dire que, dans son expérience personnelle, il a cherché le bonheur dans ces tape-à-l’oeil, ces simulacres du bonheur humain.
Pourquoi le bonheur est-il si difficile à atteindre ? Parce que, selon l’A., nous regardons au mauvais endroit et, pis encore, nous ne recherchons pas ce qu’il faut. L’alcool, les narcotiques, la prise excessive de médicaments entrent dans la panoplie des quêtes du bonheur et laissent souvent de larges pans de déceptions, de vides, d’insatisfactions assurées. Alors que les gens heureux n’ont, semble-t-il, aucun besoin de ce genre de béquille constante.
Chacun doit donc travailler à fabriquer la réalisation de son bonheur. Pour cela, l’A. suggère le retour à une vie calme, l’élimination de l’agitation énervante et inutile. Le bonheur, c’est être là où l’on est, sans vouloir être nulle part ailleurs. Comme l’envie fait simplement partie de la nature humaine, pourquoi l’être humain se soumet-il souvent à toute cette imagerie et à toute cette stimulation qui n’ont d’autre but, inavoué mais évident, que de susciter dans l’esprit de faux bonheurs. Et de rendre l’homme malheureux.
Pour l’A., la route du bonheur passe par la consolation de la philosophie. Elle prend visage dans le Manuel d’Épictète. L’A. explique pourquoi l’enseignement de ce philosophe semble si utile et pertinent en ce début du xxie siècle. Le philosophe antique explique comment composer avec les aléas de la vie et rappelle l’importance de cultiver une sérénité durable afin d’accéder doucement à notre moi intérieur. La théorie stoïcienne du bonheur attire aussi le philosophe de Toronto parce qu’elle est ferme, résolue et solide. Le bonheur n’est donc pas affaire de théorie métaphysique et d’harmonie préétablie. Il faut renoncer à donner un sens à un monde absurde pour mener une vie simple de travail et de loisir.
La seule manière d’arracher la notion de bonheur aux engrenages de la manipulation et de l’obsession du confort, c’est, selon l’A., l’associer au fait de vivre une bonne vie. Bref, la vie heureuse est, dans une certaine mesure, la même chose qu’une bonne vie. La quête du bonheur n’est rien d’autre que l’épanouissement de la nature humaine : il s’agit de devenir ce que nous sommes.
L’argumentation développée par l’A., tout au long de cet essai, a porté, pour une part, sur les dangers de la pensée technologique, sur les pouvoirs des machines, au sens propre comme au sens figuré, et sur les façons dont elles ne cessent de déformer nos idées sur le bonheur. Bref, il semble qu’à la fin de ces longues pages sur le bonheur, l’A. se rallie à la thèse aristotélicienne que le bonheur humain, fondée sur l’action vertueuse et la contemplation rigoureuse, est possible sur cette terre enténébrée. Le bonheur consiste dans l’épanouissement de la nature humaine.