Abstracts
Résumé
Le rééquilibrage territorial en matière de logement social s’est imposé depuis les années 2000 comme un nouvel outil de l’action publique pour lutter contre la ségrégation urbaine. Dans les grandes métropoles soumises au renchérissement des prix immobiliers, des logements sociaux sont construits au coeur des quartiers bourgeois où leur part est historiquement faible. À partir de trois sources de données (fichiers administratifs de relogement, recensements à l’échelle infracommunale, monographies de familles relogées), cet article livre une analyse quantitative et qualitative des modalités et des conditions d’insertion des ménages relogés dans les quartiers bourgeois parisiens. Les populations relogées se distinguent non seulement des populations résidantes par des écarts de niveaux de vie et par des différences d’origine (phénomène déjà bien documenté), mais aussi du point de vue de leur structure familiale et des normes de genre. Nombreuses à être relogées dans ces quartiers, les femmes à la tête de familles monoparentales se trouvent confrontées au modèle de la famille nucléaire stable, prépondérante dans ces arrondissements, qui contrarie leurs chances et leurs expériences d’insertion locale.
Mots-clés :
- logement social,
- politique de logement,
- ségrégation urbaine,
- structure familiale,
- normes de genre
Abstract
Since the 2000s, the objective of territorial rebalancing in terms of social housing has become a new tool of public intervention to fight against urban segregation. In large metropolises subject to rising housing prices, social housing is being built in well-off neighborhoods where its share is historically low. Based on three sources of data (administrative re-housing files, censuses on an infra-municipal scale, monographs of re-housed families), this article provides a quantitative and qualitative analysis of the modalities and conditions of integration of re-housed households in Parisian well-off districts. The re-housed populations are distinguished not only from the resident populations by differences in standards of living and origin (a phenomenon already well documented), but also by differences in family structure and gender norms. Women at the head of single-parent families, many relocated in these neighborhoods, are in reality confronted on a daily basis with the norm of the stable nuclear family, which is prevalent in these districts, and which thwarts their chances and experiences of local integration.
Keywords:
- social housing,
- housing policies,
- poverty,
- segregation,
- family structure,
- gender
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