Abstracts
Résumé
Cette recherche a pour objet l’action publique en matière de migrations internationales du travail au Canada. Elle se focalise sur l’encadrement institutionnel des travailleurs migrants temporaires (TMT) réajusté en 2014, au niveau fédéral, par la Réforme globale du Programme de travailleurs étrangers temporaires (PTET) suivie, au niveau provincial, de la Loi nº 8 modifiant le Code du travail. Appuyée sur une enquête menée au Québec depuis 2016 dans l’agroalimentaire et l’hôtellerie-restauration, elle analyse les impacts de l’action publique sur : 1) les liens d’emploi et les relations du travail ; 2) les statuts sociojuridiques des TMT et les conditions d’accès à la syndicalisation (droits d’association et de négociation). Sa méthodologie combine une démarche qualitative et des conclusions de recherches réalisées dans d’autres provinces du Canada qui permettent de constater l’orientation économique croissante du modèle canadien en matière de politiques migratoires. Nos conclusions proposent un modèle théorique qui fait ressortir deux niveaux de conséquences de l’action publique : 1) d’abord, la segmentation de l’emploi, qui va de pair avec la désyndicalisation résultant de la suppression des rapports collectifs du travail dans ces secteurs ; 2) ensuite, l’accès juridiquement restreint à certains droits sociaux du travail, la précarisation institutionnelle des TMT générée par la multiplication de leurs statuts de séjour et par leur subordination nominative à un employeur unique. Cette action publique, conjuguant politiques migratoires et politiques de l’emploi, permet aux entreprises d’internaliser une main-d’oeuvre étrangère peu coûteuse et juridiquement vulnérabilisée ; elle régule des flux migratoires pouvant combler indéfiniment des emplois permanents par cette main-d’oeuvre sans avoir à assumer les coûts sociaux dont bénéficient les salariés locaux.
Mots-clés :
- travailleurs migrants temporaires,
- action publique,
- droits fondamentaux du travail
Abstract
This research focuses on public policy in Canada on international labor migration. It examines the impacts of the institutional framework of the temporary migrant workers (TMW), implemented at the federal level in 2014, with the global reform, “Overhauling the temporary foreign worker program”, followed by a provincial component, the Law 8 amending the Labor Code. This research, conducted in Quebec since 2016, in the agribusiness, services, hotels and restaurants, analyzes these impacts on: 1) the employment relations and the labour relations; 2) the socio-legal status of TMWs, their career curriculum and the access to unionization (association and negotiation rights). Its methodology combines a qualitative approach with research findings from other Canadian provinces. Noting the increasing economic orientation of the Canadian model of migration policy, our conclusions propose a theoretical model explaining two levels of consequences of public policies. Firstly, the process of employment segmentation resulting from the de-unionization and from the gradual elimination of collective labour relations in these sectors. Secondly, the differential of social labour rights resulting from a process of an institutional precariousness directly related to 1) the multiplication of the TMWs status and 2) their individual and nominative subordination to the employer. This public action, combining migration policies and employment policies, allows companies to internalize an inexpensive and legally vulnerable foreign labor force; it regulates migratory flows which can fill indefinitely permanent jobs by this workforce without having to assume their social costs.
Keywords:
- temporary migrant workers,
- public action,
- social rights of work