Abstracts
Résumé
La pandémie de Covid-19 a révélé au grand jour l’importance socioéconomique de la résilience organisationnelle. Or, malgré la popularité de ce concept, force est de constater la difficulté à proposer aux dirigeants un accompagnement opérationnel en ces périodes de crise. Dans ce contexte, cet article montrera tout d’abord les limites de l’approche substantialiste qui, concevant la résilience uniquement comme une capacité, ignore la manière avec laquelle celle-ci est mise en oeuvre. Par la suite, relevant le caractère émergent et essentiellement théorique de l’approche processuelle, cette étude cherchera à opérationnaliser celle-ci en répondant à la question : comment se caractérise le processus de résilience engagé par des dirigeants de PME confrontés à une situation de gestion inédite ? Pour cela, une étude qualitative a été réalisée grâce à un journal de bord en ligne tenu par une quarantaine de dirigeants de PME françaises tout au long du confinement du printemps 2020. Les résultats obtenus confirment la pertinence de l’approche processuelle et laissent entrevoir la possibilité d’élaborer un accompagnement spécifique aux trois phases identifiées dans ce processus d’enquête qu’est la résilience. En conclusion, les limites et les perspectives de cette étude seront présentées.
Mots-clés:
- Résilience,
- Confinement,
- Dirigeants de PME,
- Processus,
- Enquête
Abstract
The Covid-19 pandemic revealed the socio-economic importance of organizational resilience. However, despite the popularity of this concept, it is difficult to offer operational support to companies in times of crisis. In this context, this article will first show the limits of the substantialist approach which conceiving resilience only as a capacity ignores the way in which it is implemented. Subsequently, noting the emerging and essentially theoretical nature of the processual approach, this study will seek to complement it by answering the question : how SME managers are adapted to a new management situation? To this end, a qualitative study was conducted using an online diary kept by some forty French SME managers throughout the spring 2020 lockdown. The results obtained confirm the relevance of the processual approach and suggest the possibility of developing specific support for the three phases identified in the survey process that is resilience. In conclusion, the limitations and perspectives of this study will be outlined.
Keywords:
- Resilience,
- Lockdown,
- SMEs,
- Process,
- Inquiry
Resumen
La pandemia de Covid-19 ha puesto de manifiesto la importancia socioeconómica de la resiliencia organizativa. Sin embargo, a pesar de la popularidad de este concepto, es difícil ofrecer apoyo operativo a las empresas en tiempos de crisis. En este contexto, este artículo mostrará en primer lugar los límites del enfoque sustancialista que, al concebir la resiliencia sólo como una capacidad, ignora la forma en que se pone en práctica. Posteriormente, observando el carácter emergente y esencialmente teórico del enfoque procesual, este estudio tratará de operacionalizarlo respondiendo a la pregunta: ¿Cómo se caracteriza el proceso de resiliencia que llevan a cabo los directivos de las PyME que se enfrentan a una situación de gestión sin precedentes? Para ello, se ha llevado a cabo un estudio cualitativo a partir de un diario en línea llevado por unos cuarenta directivos de PyME francesas a lo largo del cierre de la primavera de 2020. Los resultados obtenidos confirman la pertinencia del enfoque procesual y sugieren la posibilidad de desarrollar apoyos específicos para las tres fases identificadas en el proceso de encuesta que es la resiliencia. Para concluir, se presentarán las limitaciones y perspectivas de este estudio.
Palabras clave:
- Resiliencia,
- Confinamiento,
- PyME,
- Proceso,
- Encuesta
Article body
Introduction
La pandémie de Covid-19 qui frappe le monde depuis le début de l’année 2020 a révélé au grand jour l’importance que revêt la résilience organisationnelle. Alors que certaines structures ont su repenser leur mode de fonctionnement et poursuivre leurs activités, d’autres étaient totalement à l’arrêt, entraînant en cascade de nombreuses perturbations. Le développement de la résilience organisationnelle, notamment des PME, apparaît ainsi comme un objectif sociétal et économique majeur de l’après-crise (Plan national de relance et de résilience, 2021[2]).
Mais, de quoi parle-t-on lorsque l’on évoque la résilience ? Issue des sciences naturelles, la résilience est généralement définie comme la capacité d’un objet à reprendre sa forme initiale à la suite d’un choc. Si elle est largement répandue, cette conception présente des limites lorsqu’elle est appliquée aux systèmes complexes que sont les organisations. Considérant la résilience comme une capacité dont disposeraient, plus ou moins, les individus, les groupes ou les organisations (Barreda et al., 2021), les recherches menées dans cette perspective ne permettent pas de comprendre comment les organisations s’adaptent effectivement à une situation de crise. Si des recherches concevant la résilience comme une dynamique ont bien été développées (Stainton et al., 2019), celles-ci sont encore émergentes et l’on ne sait encore que peu de choses sur la manière dont les entreprises en général, et les PME en particulier, mettent en oeuvre un processus de résilience (Verreynne, Ho et Linnenluecke, 2018 ; Conz et Magnani, 2020). C’est à cela que s’attache le présent article.
Afin d’approfondir les recherches existantes et d’envisager un accompagnement plus opérationnel du processus de résilience, cette étude vise à apporter une réponse à la question suivante : comment se caractérise le processus de résilience engagé par des dirigeants de PME confrontés à une situation de gestion inédite, en l’occurrence l’application d’un confinement généralisé en France au printemps 2020 ?
Dans une première partie, cet article reviendra sur l’origine du concept de résilience organisationnelle et proposera de distinguer conceptions substantialiste et processuelle. Complétant les travaux existants, la résilience sera définie comme un processus d’enquête permettant à un acteur de se doter d’un cadre satisfaisant de compréhension et d’action vis-à-vis d’une situation qui, sans cela, serait restée ambiguë ou dépourvue de sens.
Dans une deuxième partie, les choix méthodologiques et les principaux résultats de l’étude seront exposés. Afin de comprendre comment se caractérise le processus de résilience engagé par des dirigeants de PME, il a été demandé à une quarantaine d’entre eux de tenir un journal de bord en ligne tout au long du confinement généralisé décrété en France entre le 17 mars 2020 et le 11 mai 2020. Suivant la méthodologie proposée par Corley et Gioia (2004), l’analyse du discours des dirigeants sur la situation rencontrée, leurs priorités, leurs difficultés et les émotions ressenties permettra de confirmer la pertinence d’une approche processuelle de la résilience en PME et de la définition proposée de la résilience comme processus d’enquête. Trois étapes seront plus particulièrement distinguées. Face à cette situation critique, les dirigeants ont d’abord cherché (1) à apprivoiser la réalité, (2) puis à gérer le présent, (3) avant de se projeter vers l’avenir. Ainsi, il est possible de voir qu’au cours des premiers jours de confinement, ces derniers ont avant tout cherché à comprendre la situation et à protéger les personnes. Une fois de nouveaux repères développés, ils se sont attachés à gérer ce nouveau quotidien en agissant sur le fonctionnement de leur structure. Enfin, ce n’est que lorsque le déconfinement s’est profilé qu’une troisième phase a pu s’engager et que les dirigeants se sont tournés vers des actions à plus long terme. Au-delà du renforcement des capacités de résilience propre à l’approche substantialiste, l’interrogation de la résilience comme un processus d’enquête permet d’envisager des actions adaptées en fonction des spécificités des phases identifiées.
Enfin, les principaux résultats seront rapprochés des connaissances existantes. L’apport conceptuel de cette recherche, ses enseignements méthodologiques et les perspectives d’actions managériales qui se dessinent à la suite de celle-ci seront discutés. En conclusion, les limites de la présente étude et ses perspectives de prolongation seront dégagées.
1. La résilience : objet ou processus ?
Après un retour sur l’origine du concept, cette partie distinguera deux conceptions de la résilience : l’une substantialiste, l’autre processuelle. Constatant les limites de l’approche substantialiste, nous conclurons sur la nécessité de compléter au niveau conceptuel et opérationnel l’approche processuelle afin de proposer un véritable accompagnement aux dirigeants de PME confrontés à des situations de crise.
1.1. La résilience : origines et approches
Du latin resiliere, composé de « salire », « sauter » et du préfixe « re » indiquant un retour en arrière (Tisseron, 2009), le concept de résilience a été initialement développé par les sciences naturelles. En physique, par exemple, il s’agit d’interroger la capacité d’un système ou d’un matériau à reprendre son état ou sa configuration initiale après un choc ou une perturbation. En écologie, la résilience fait référence à l’interrogation du niveau de perturbation qu’un écosystème est en mesure de supporter (Manfield et Newey, 2018). Depuis de nombreuses années cependant, le concept de résilience a été adopté par les sciences humaines et sociales et plus particulièrement par la psychologie. Si les différentes approches développées ne peuvent pas être exposées dans le cadre du présent article[3], celles-ci interrogent de manière générique les capacités et les mécanismes permettant aux individus de se remettre de l’adversité et de poursuivre leur vie après des événements susceptibles d’être traumatisants (Stainton et al., 2019).
En sciences de gestion et du management, les recherches portant sur la résilience se développent de manière exponentielle depuis quelques années (Van der Vegt, Essens, Wahlström et George, 2015). Ce concept est ainsi mobilisé dans une variété de champs allant de l’entrepreneuriat à la stratégie, en passant par la logistique ou la gestion des ressources humaines (Linnenluecke, 2017). Ce véritable foisonnement (Verreynne, Ho et Linnenluecke, 2018) entraîne cependant une certaine confusion (Hillmann et Guenther, 2021). Afin de clarifier la réalité recouverte par ce concept, Korber et McNaughton (2018) proposent de différencier les recherches sur la résilience en fonction de la temporalité dans laquelle celles-ci s’inscrivent. Les recherches ex ante se donnent ainsi pour objectif d’identifier les déterminants permettant à un individu ou une organisation de s’adapter, le moment venu, à une perturbation (Schriber, Bauer et King, 2019), quand les recherches ex post cherchent à apprécier les conséquences de la résilience sur la performance des organisations (Ayala et Manzano, 2014). Partant de cette distinction temporelle, nous proposons de différencier deux conceptions fondamentales de la résilience (Tableau 1) : l’une substantialiste interrogeant la résilience comme un objet dont il serait possible de saisir la nature et les effets ; l’autre processuelle qui considère avant tout la résilience comme une dynamique adaptative.
Alors que le manque de repères conceptuels apparaît comme une des limites des recherches actuelles sur la résilience organisationnelle (Linnenluecke, 2017), il est essentiel de mettre à jour les présupposés associés à ces deux approches afin de permettre aux chercheurs et aux praticiens d’effectuer leurs choix de manière éclairée.
1.2. La résilience comme une substance
Transposition de la conception issue des sciences naturelles, l’approche substantialiste considère la résilience comme une « chose en soi » dont il est possible d’isoler par le seul exercice de la raison, la composition, les antécédents et les effets. S’inscrivant dans cette perspective, l’immense majorité des recherches menées en sciences de gestion et du management tentent d’identifier les éléments expliquant que certaines organisations sont plus résilientes que d’autres (Korber et McNaughton, 2018). La résilience s’exprime alors en termes de capacités : capacité à absorber les tensions et à préserver l’existant dans une situation de crise ; capacité à rétablir la situation et à rebondir ; capacité à tirer des enseignements (Barreda et al., 2021). Les sources de résilience sont alors recherchées dans les caractéristiques des individus telles que l’intelligence émotionnelle (Ngah et Salleh, 2015), la hardiesse, la capacité à trouver des ressources ou l’optimisme, par exemple (Ayala et Manzano, 2014). Cette conception de la résilience considère que celle-ci est une ressource rare et inimitable susceptible de favoriser la performance de l’organisation (Barney, 1991). Les pratiques managériales développées dans cette perspective vont alors chercher à mesurer les capacités de résilience des membres à recruter et à retenir les personnes les plus résilientes (Michaels, Handfield-Jones et Axelrod, 2001).
En proposant d’identifier les éléments permettant à une organisation d’augmenter sa capacité de résilience, l’approche substantialiste offre un schéma explicatif attrayant à partir duquel il est aisé d’élaborer un plan d’action. Cependant, cela ne va pas sans un certain nombre de limites. Focalisées sur l’étude de la variance, ces recherches reposent sur une conception acontextuelle et atemporelle de la réalité (Marchesnay, 2020). En effet, celles-ci impliquent de suspendre le cours du temps et de l’action afin d’interroger les liens statistiques entre des variables (Marchesnay, 2010). Par ailleurs, dans cette approche, les acteurs sont vus comme les réceptacles passifs de capacités et de caractéristiques plus ou moins développables. Cette perspective considère enfin que les acteurs disposent (ou non) d’une capacité de résilience constante, mobilisée de manière identique, quelle que soit la période de la vie ou la situation rencontrée. Cette conception réduit ainsi la compréhension d’un phénomène socio-organisationnel complexe à une somme de causalités linéaires (Southwick et al., 2016). En un mot, on peut s’interroger sur le fait que la résilience puisse se limiter à la coprésence d’un ensemble de ressources.
Cette conception de la résilience apparaît plus particulièrement problématique pour les entreprises de petite taille (Reboud et Séville, 2016) qui se laissent difficilement saisir par les approches réductionnistes (Paradas, 2009). Les chercheurs interrogeant le fonctionnement des PME relèvent la nécessité de développer un regard spécifique. Ceux-ci insistent notamment sur l’importance du dirigeant et de ses représentations dans la prise de décision (Plane, 1998), sur l’importance des relations entretenues entre les petites organisations et leur environnement ainsi que sur une modalité de gestion plus ancrée dans l’action que sur la planification stratégique des ressources (Marchesnay, 2003). L’ensemble de ces éléments plaide ainsi pour une approche de la résilience en PME qui ne soit pas la simple réplication d’une conception substantialiste développée à partir et pour une autre réalité.
1.3. La résilience comme un processus
Face aux limites des recherches substantialistes, certains auteurs (Stainton et al., 2019 ; Bernard et Barbosa, 2016) proposent de concevoir la résilience comme une dynamique. La résilience est alors vue comme une réalité évolutive, inscrite dans un contexte particulier (Pettigrew, 1997). Parmi les différentes approches théoriques permettant de comprendre le développement d’un processus tel que celui-ci (Van de Ven, 1992), la perspective dialectique apparaît comme la plus appropriée aux caractéristiques des petites et moyennes entreprises (Marchesnay, 2003). En effet, celle-ci considère les évolutions comme étant le fruit de l’interaction constante entre différentes forces, parfois opposées, relevant à la fois de l’acteur et de son cadre d’action. Se pose alors la question de savoir comment ce processus dialectique se développe concrètement au sein des organisations.
Parmi les travaux susceptibles d’éclairer cet aspect, ceux de Giddens (1987) sont particulièrement intéressants (Cordelier, Vásquez et Mahy, 2011). Pour cet auteur, les acteurs sont capables d’effectuer une analyse réflexive afin d’évaluer et de faire évoluer leurs acteurs au regard de leur pertinence vis-à-vis d’une situation donnée. Partageant cette vision, Goffman (1991) montre comment, confronté à « une rupture de cadre », entendue comme une situation qu’il ne peut ignorer et vis-à-vis de laquelle il ne sait pas comment agir, l’acteur va s’engager dans un véritable travail d’enquête, au sens de Dewey (2018), visant à transformer une situation au départ indéterminée en situation déterminée, c’est-à-dire problématisée.
Aux fondements rationalistes de l’approche substantialiste, pour qui la résilience peut être expliquée indépendamment de l’expérience, se substituerait alors une approche processuelle, plus proche de la philosophie pragmatiste (Tiercelin, 2013). Pour ce courant de pensée, le vrai ne s’apprécie pas au regard de sa conformité avec un absolu, mais par sa capacité à guider l’action. En introduction de l’ouvrage de William James, l’un des principaux penseurs du pragmatisme, Henri Bergson, indique ainsi : « Nous définissons le vrai d’ordinaire par sa conformité à ce qui existe déjà, James le définit par sa relation à ce qui n’existe pas encore. Le vrai, selon William James, ne copie pas quelque chose qui a été ou qui est : il annonce ce qui sera, ou plutôt il prépare notre action sur ce qui va être. » (2011, p. 5)
Critiquant le cartésianisme, le pragmatisme propose une théorie de l’action basée sur une conception évolutionniste, indéterminée et relativiste de la réalité (Lorino, 2020). Si l’on applique ces principes à la question de la résilience, en nous inspirant des travaux de Girin sur les situations de gestion (2016), il est alors ainsi possible de préciser la définition donnée par Stainton et al. (2019) en considérant la résilience comme un processus d’enquête permettant à un acteur de se doter d’un cadre satisfaisant de compréhension et d’action vis-à-vis d’une situation qui, sans cela, serait restée ambiguë ou dépourvue de sens. Favoriser la résilience au sein d’une organisation reviendrait alors moins à établir le portrait-robot de l’acteur résilient (dirigeant ou salarié) qu’à permettre à chacun de s’engager dans un exercice réflexif lui permettant de comprendre une situation problématique et d’adapter ses comportements.
Si cette perspective apparaît plus en phase avec la réalité des PME, peu d’études permettent de comprendre comment ce processus de résilience s’y développe (Conz et Magnani, 2020). Cela s’explique notamment par la difficulté à intégrer un phénomène imprévisible dans le cadre d’une stratégie prédéterminée de production de connaissances scientifiques. Interroger la résilience dans une perspective processuelle nécessite en effet de mettre en oeuvre une méthodologie à visée interprétative permettant de « saisir la réalité au vol », selon l’expression de Pettigrew (1997). C’est dans cet objectif qu’une étude a été menée dès les premiers jours du confinement généralisé décrété en France au printemps 2020.
2. Méthodologie de l’étude
Alors que la France traversait, selon le président de la République, « la plus grave crise sanitaire […] depuis un siècle[4] », le gouvernement a décrété, dans le cadre de l’État d’urgence sanitaire, un confinement généralisé au printemps 2020. Afin de comprendre comment les dirigeants de PME se sont adaptés à cette situation exceptionnelle, une étude qualitative, réalisée à l’aide d’un journal de bord en ligne, a été menée auprès d’une quarantaine d’entre eux[5] (Tableau 2).
S’inspirant des travaux de Corley et Gioia (2004), une étude exploratoire, inductive et interprétative a été mise en oeuvre dès les premiers jours du confinement. L’objectif était d’éclairer un phénomène social mal connu (Dumez, 2016). Pour constituer l’échantillon, il a été demandé à un dirigeant de PME interrogé dans le cadre d’une précédente enquête s’il connaissait d’autres dirigeants susceptibles d’être concernés par cette étude et ainsi de suite. Ce choix présente un certain nombre de limites liées notamment à l’existence de liens sociaux entre les répondants, ce qui est susceptible d’engendrer une surreprésentation de certains profils[6]. Cependant, la représentativité statistique n’étant pas visée dans le cadre de cette étude, il a été décidé de choisir ce mode d’échantillonnage dit « orienté » (Miles et Huberman, 2013). Celui-ci présentait l’avantage de toucher directement et rapidement un nombre relativement important de personnes concernées par le phénomène étudié.
Dès le 19 mars 2020, soit deux jours après l’application du confinement et jusqu’à la fin de celui-ci le 11 mai 2020, neuf collectes de données ont été réalisées (Figure 1). Chaque semaine, à heure et jour fixes, les dirigeants étaient invités par courriel à rédiger leur journal de bord en complétant des phrases qui leur étaient proposées sur un formulaire en ligne. La complétion de phrases a été choisie car il s’agit d’une technique projective éprouvée (Forer, 1950) qui permet d’éviter les biais du questionnement d’un phénomène relativement méconnu (trop grande directivité ou absence de guidance) (Lallemand et Gronier, 2015). Les répondants ont ainsi été invités à compléter les phrases suivantes :
ce que je retiens de la situation c’est…
ma priorité à l’heure actuelle est de…
cette semaine, le plus difficile pour moi a été de…
si je devais traduire mon émotion du jour je dirais que…
Les dirigeants étaient ainsi interrogés sur les éléments fondamentaux que constituent leur perception de la situation, leurs priorités, les difficultés rencontrées ainsi que les émotions ressenties.
De manière complémentaire, une veille a été réalisée tout au long de l’étude. Celle-ci a permis de rapprocher l’expression des dirigeants des principaux événements ayant marqué cette période (annonces gouvernementales, dispositifs de soutien, etc.) (Figure 1). Ces éléments ont permis de mieux comprendre la réaction des dirigeants au regard de l’évolution de la situation et d’identifier les différentes phases qui constituent le processus de résilience. Les réponses des dirigeants ont fait l’objet d’un codage thématique, puis d’un codage axial (Saldaña, 2016) pour chacune des quatre thématiques interrogées. Le codage a d’abord été réalisé par un chercheur, puis les choix effectués ont été exposés aux autres auteurs afin de contrôler la subjectivité de l’analyse. Par la suite, les résultats ont été présentés à un groupe d’une douzaine de dirigeants à l’occasion d’une réunion de restitution.
3. Présentation des résultats
L’analyse du discours des dirigeants et son évolution, tout au long de cette période exceptionnelle, permet de mieux comprendre comment ces derniers se sont adaptés à une réalité qui remettait en cause l’ensemble des modes d’organisation ordinairement en oeuvre. Au regard de la composition du discours, il est possible de distinguer trois étapes ou « moments génériques », au sens de Callon (1986), à travers lesquels les dirigeants se sont progressivement dégagés de l’immanence du présent pour se tourner peu à peu vers l’avenir. À l’instar des travaux de Corley et Gioia (2004), nous avons choisi de présenter ces résultats sous la forme de figures en y associant les principales composantes et verbatim propres à chacune des phases identifiées.
3.1. Étape 1 : apprivoiser la réalité
Quelques jours après l’annonce du confinement, le caractère inédit de la situation impose aux dirigeants d’apprivoiser la réalité. Confrontés à l’inconnu, ces derniers ont d’abord, comme l’indique l’un d’entre eux, « cherché des repères dans l’obscurité ». À ce moment, « la seule certitude, c’est l’incertitude ». Comme le montre la figure 2, la situation est vue comme révélatrice de dysfonctionnements sociétaux ignorés (volontairement ou non) jusque-là. Face à l’inconnu, la priorité des dirigeants est de protéger les personnes et l’entreprise. Ils cherchent pour cela avant tout à disposer d’informations pertinentes. Lorsqu’ils évoquent les difficultés rencontrées, ceux-ci soulignent les problèmes organisationnels, mais aussi des difficultés psychocognitives liées au fait de ne pas comprendre la situation qui se présente à eux. De ce fait, les émotions ressenties oscillent fortement entre optimisme et crainte, fatalisme et détermination. Comme l’évoque un dirigeant, ceux-ci sont confrontés à la gestion « d’émotions non linéaires ».
3.2. Étape 2 : gérer le présent
Près de dix jours après le début du confinement, les règles sont désormais connues et les mesures de soutien aux entreprises commencent à être mises en oeuvre. Comme le montre la figure 3, les dirigeants semblent à ce moment considérer que la situation se stabilise. Cette pause apparaît propice à une analyse réflexive permettant de tirer des enseignements au niveau sociétal, mais aussi au niveau organisationnel. La situation sanitaire, elle, est encore très incertaine. L’une des priorités évoquées par les dirigeants consiste ainsi à protéger les personnes, les salariés, les clients, mais aussi leur famille. Les dirigeants s’attachent à gérer ce nouveau quotidien en organisant l’activité, mais aussi en trouvant les moyens d’assurer la survie de l’entreprise à très court terme. C’est à cette période que ces derniers se tournent vers les services de l’État et les banques afin de mettre en oeuvre les dispositifs de sauvegarde (prêt garanti par l’État, chômage partiel). Dans ces conditions exceptionnelles, les dirigeants doivent apprendre à travailler différemment, avec moins de relations sociales. Les émotions exprimées font toujours référence à de la méfiance même si, comme l’indique un répondant, la situation semble « en cours d’apaisement ». Ainsi les émotions exprimées sont moins fortes et moins entremêlées que dans la première phase. Par ailleurs, une orientation sensible relative à un sentiment de combativité se dégage. L’annonce de la prolongation jusqu’au 11 mai 2020 du confinement, faite le 13 avril, a remis largement en cause cette perception de stabilité, mais une fois celle-ci intégrée par les dirigeants, une autre phase semble s’ouvrir.
3.3. Étape 3 : se tourner vers demain
L’annonce de la date de déconfinement apparaît comme un point de bascule dans le discours des dirigeants. Comme l’illustre la figure 4, ceux-ci se focalisent alors sur l’avenir. Cette projection est cependant accompagnée d’importantes incertitudes, notamment économiques. Le cadre d’action, s’il est amené à se normaliser dans les semaines à venir, impose à nouveau d’être confronté à l’inconnu de l’activité postconfinement. Si les difficultés émotionnelles sont toujours présentes, celles-ci portent désormais plus sur la lassitude d’une situation éprouvante vécue depuis plusieurs semaines, que sur les interrogations relatives aux conditions de reprise de l’activité. La priorité des dirigeants est alors toute entière dirigée vers l’après-confinement. La préparation pratique de la reprise, l’organisation de l’activité, ainsi que la gestion des hommes apparaissent à ce moment comme des points clés pour lesquels les dirigeants expliquent éprouver le plus de difficultés.
4. Discussion
Après avoir exposé les résultats, il convient de rapprocher ceux-ci des connaissances existantes afin d’en tirer des enseignements au niveau conceptuel, méthodologique et managérial.
Un premier élément qu’il est possible de souligner tient à la confirmation de la pertinence de l’approche processuelle de la résilience dans le cadre de l’étude de PME. Par ailleurs, cette étude permet de compléter les travaux de Stainton et al. (2019) et de Bernard et Barbosa (2016) en conférant à ceux-ci un caractère plus opérationnel. Elle confirme ainsi l’intérêt de notre proposition visant à concevoir la résilience comme un processus d’enquête permettant à un acteur de se doter d’un cadre satisfaisant de compréhension et d’action vis-à-vis d’une situation qui, sans cela, serait restée ambiguë ou dépourvue de sens. Cet apport peut apparaître modeste. Cependant, il ouvre la voie à une interrogation du processus de résilience à partir des principes et méthodes de la philosophie pragmatiste.
Les données collectées ont ainsi permis de confirmer, comme les travaux de Giddens (1987) nous le laissaient à penser, que contrairement aux présupposés de l’approche substantialiste, la réalité ne s’est pas offerte de manière totale, objective et immédiate aux dirigeants, mais s’est plutôt présentée à eux sous la forme d’un problème à l’énoncé inconnu et en perpétuelle évolution. Ainsi, les dirigeants ont dû concevoir, et reconcevoir en permanence, les modalités de l’action collective. Loin de la solution idéale, il est ainsi possible de constater que ces derniers ont développé une analyse réflexive, en étroite relation avec les autres (confrères, salariés, familles, etc.), afin de construire des réponses provisoires leur permettant d’agir de manière adéquate face à une réalité changeante.
Au-delà de cette caractérisation générale de la résilience comme un processus d’enquête, la présente étude a permis d’identifier trois grandes phases à partir de l’expression des dirigeants. Lors de la première phase, l’absence de repères apparaît prégnante. Les dirigeants ont avant tout cherché à comprendre la réalité. Face à l’incertitude, ils ont protégé les personnes et l’entreprise. La deuxième phase apparaît avec la stabilisation de la situation. Les dirigeants essaient alors de gérer ce nouveau quotidien en réorganisant l’activité et en mobilisant les dispositifs de soutien. Enfin, lorsque le déconfinement se profile, une troisième phase s’engage. Les dirigeants se tournent alors totalement vers la préparation de l’avenir.
Au niveau méthodologique, la réalisation de collectes régulières tout au long des huit semaines de confinement, a permis de révéler, in vivo, le processus d’adaptation suivi par les dirigeants. Concernant la modalité de collecte, si d’autres techniques que l’envoi d’un journal de bord en ligne peuvent être envisagées[7], les chercheurs souhaitant s’inspirer de cette étude pourraient, selon nous, retenir plusieurs éléments. Tout d’abord, la nécessaire réactivité et le fait de mettre en oeuvre une collecte dès les premiers jours de l’événement étudié. Ensuite, l’intérêt qu’ils ont d’utiliser une technique, en l’occurrence la complétion de phrases, favorisant l’expression de répondants plongés dans une situation complexe. Un autre élément qui mérite d’être souligné réside dans le choix de la temporalité d’interrogation. Après une période de calage lors des deux premières collectes, le choix a été fait d’envoyer le journal de bord de manière hebdomadaire, à jour et heure fixes, afin de ritualiser sa rédaction. Enfin, la réunion de présentation des résultats réalisée avec une douzaine de dirigeants a permis à la fois d’apporter une confirmation à l’analyse effectuée et de dégager des perspectives concrètes d’accompagnement.
Ainsi, au niveau managérial, à partir de la conception de la résilience comme un processus d’enquête et des différentes phases identifiées, il est possible de dégager plusieurs pistes d’action. De manière générale, plus que la définition d’un idéal de résilience, il conviendrait, au regard de cette étude, de partir des difficultés rencontrées par les dirigeants. Un accompagnement spécifique à chacune des phases pourrait alors être envisagé. Face à la rupture avec les modes de fonctionnement existants qui caractérise la première phase, il apparaît essentiel de favoriser les échanges afin que les dirigeants puissent, le plus rapidement possible, se doter de repères provisoires leur permettant de comprendre la réalité nouvelle qui se présente à eux. Dans cette perspective, les participants à la réunion de présentation des résultats ont plébiscité la création d’une communauté de dirigeants qui est actuellement en cours d’élaboration. C’est alors seulement qu’une deuxième série de dispositifs de soutien pourrait être envisagée. Il s’agit à ce moment de proposer des solutions pratiques permettant aux dirigeants de gérer le quotidien (soutien à la trésorerie, accompagnement dans la mise en place d’un nouveau mode d’organisation, etc.). Les dirigeants consultés ont alors émis le souhait de pouvoir bénéficier de formations courtes et très spécialisées pouvant prendre la forme de webinaires thématiques ou de « fiche action » décrivant de manière simple les différentes procédures à suivre afin de bénéficier des dispositifs de soutien. Ici, la réactivité et la capacité des intervenants (organismes consulaires, services de l’État, cabinet de conseil, etc.) à proposer une information adaptée aux besoins ressentis à un instant t apparaissent primordiales. Lors de la dernière phase, le temps de l’accompagnement semble s’allonger. Les dirigeants ont émis le souhait d’être suivis dans la durée afin de se préparer à l’avenir. Il s’agira alors de mettre en oeuvre notamment des ateliers rebond ou des diagnostics stratégiques par exemple. Cette étude nous amène ainsi à penser que non seulement le contenu des dispositifs de soutien devrait être adapté aux spécificités des différentes phases, mais que leurs modalités de mise en oeuvre, notamment temporelles, doivent-elles aussi évoluer en même temps que le processus de résilience.
En définitive, favoriser la résilience des PME nécessite, selon nous, d’accompagner le processus d’enquête dans lequel les dirigeants sont engagés. Sous certains aspects, nous pensons que la présente recherche, au-delà de la production de connaissances d’intention scientifique (Savall et Zardet, 2004), a pu jouer ce rôle auprès des participants. C’est en tout cas en ce sens qu’il est possible d’interpréter les propos d’une dirigeante pour qui le journal de bord « a permis de trouver des solutions en me [la] conduisant à s’interroger sur ma [sa] propre situation ».
Conclusion
Alors que la capacité d’adaptation des organisations apparaît comme un enjeu socioéconomique majeur, cette étude a tout d’abord souligné les limites de l’approche substantialiste de la résilience. Dominante en sciences de gestion et du management, celle-ci propose un cadre d’action immédiatement opérationnel à partir duquel les dirigeants sont incités à mesurer et à acquérir des ressources dans le but de renforcer la capacité de résilience de leur organisation. Cependant, cette approche ne permet pas de comprendre la manière avec laquelle la résilience est effectivement mise en oeuvre. Si des recherches considèrent bien la résilience comme une dynamique (Stainton et al., 2019 ; Bernard et Barbosa, 2016), celles-ci sont encore émergentes et la caractérisation de ce qu’est le processus de résilience demande à être complétée. C’est cette zone d’ombre que le présent article s’est proposé d’éclairer.
Pour cela, une étude a été réalisée auprès d’une quarantaine de dirigeants de PME par le biais d’un journal de bord en ligne, afin de comprendre comment ceux-ci se sont adaptés au confinement généralisé qu’a connu la France au printemps 2020. Les résultats obtenus, rapprochés avec la notion d’enquête (Dewey, 2018) et plus largement avec les principes de la philosophie pragmatiste dans lesquels celle-ci s’inscrit, nous amènent à considérer la résilience comme un processus à travers lequel les acteurs vont progressivement donner sens à la réalité. Cette proposition permet d’ouvrir un cadre de compréhension et d’action susceptible de rendre plus opérationnel l’accompagnement des dirigeants confrontés à une situation de crise. Cela passe notamment par le développement de dispositifs de soutien propres à chacune des trois phases identifiées. Compréhension de la réalité, gestion du présent, projection dans l’avenir, pour chacune d’elles, des pistes d’action ont été esquissées. Au niveau méthodologique, les chercheurs désireux d’interroger le processus de résilience pourront, nous l’espérons, tirer de cet article des éléments susceptibles d’inspirer de futures enquêtes.
La présente étude n’est cependant pas exempte de limites. Si l’orientation inductive et interprétative permet d’assurer une proximité forte avec la réalité vécue par les dirigeants, ce choix expose au risque de produire une connaissance valable uniquement pour une réalité et une population très particulière. Conscient de cela, nous avons considéré que les enseignements potentiels de cette étude dépassaient les limites inhérentes à la méthodologie utilisée. Afin d’assurer la validité de notre recherche, nous avons cependant veillé à expliciter les choix effectués et à présenter les résultats obtenus lors d’une réunion de restitution. Cependant, malgré toutes ces précautions, seule la mise à l’épreuve des faits de nos propositions permettra, in fine, d’en apprécier la portée. L’une des principales perspectives de cette recherche est donc de reproduire le dispositif méthodologique afin de voir si la conception de la résilience comme processus d’enquête est pertinente dans d’autres contextes et auprès d’un autre public. À ce stade, si cette étude ne prétend aucunement voir ses résultats généralisés, elle contribue, modestement, à outiller conceptuellement et opérationnellement une approche processuelle de la résilience, bien plus en phase avec la réalité vécue par les dirigeants de PME.
Appendices
Notes biographiques
Patrice Terramorsi est maître de conférences en sciences de gestion et du management au sein de l’UMR CNRS Université de Corse 6240 LISA. Il est également chercheur associé au Labex Entreprendre, Université de Montpellier. Ses recherches portent sur l’étude du comportement organisationnel au sein des petites entreprises. Il interroge plus particulièrement les processus de conciliation entre les individus et les collectifs. Depuis 2019, il codirige le projet de recherche « RéSO TPE-PME » dont l’objectif est de comprendre et d’accompagner le développement de relations interorganisationnelles entre TPE-PME. Depuis 2020, il assure la direction scientifique d’un axe de l’UMR CNRS Université de Corse 6240 LISA, questionnant l’ancrage territorial des petites organisations.
Thierry Fabiani est maître de conférences en sciences de gestion et du management au sein de l’UMR CNRS Université de Corse 6240 LISA. Ses travaux portent sur le marketing et l’action commerciale en PME et TPE. Depuis 2019, il participe au projet de recherche « RéSO TPE-PME » dont l’objectif est de comprendre et d’accompagner le développement de relations interorganisationnelles entre TPE-PME. Thierry Fabiani est responsable pédagogique du master marketing de l’IAE de Corse.
Nicolas Terrazzoni est maître de conférences associé en sciences de gestion et du management au sein de l’UMR CNRS Université de Corse 6240 LISA. Depuis 2019, il participe au projet de recherche « RéSO TPE-PME » dont l’objectif est de comprendre et d’accompagner le développement de relations interorganisationnelles entre TPE-PME. Ses recherches portent principalement sur la transformation digitale des PME. Nicolas Terrazzoni est enseignant au sein de l’institut d’administration des entreprises de Corse.
Notes
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[1]
Les auteurs remercient M. Roy Thurik et Mme Josée St-Pierre pour les riches échanges qui ont largement contribué à enrichir leur réflexion. Ils remercient également Mme Andréa Mattei, ingénieure d’études au sein de l’UMR CNRS Université de Corse 6240 LISA, pour sa précieuse contribution.
- [2]
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[3]
Le lecteur intéressé pourra notamment se référer aux travaux de Bernard et Barbosa (2016) ou de Manfield et Newey (2018).
- [4]
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[5]
Le nombre de répondants a varié de 40 lors de la première collecte à 31 lors de la dernière.
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[6]
Il est ainsi possible de constater qu’une part importante des répondants est issue de la région Corse et qu’ils développent pour beaucoup des activités dans le secteur du commerce.
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[7]
La technique du mur d’images en ligne apparaît particulièrement intéressante à explorer dans cette perspective (Ganassali, 2016).
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