Abstracts
Résumé
Cette étude sur les réseaux structurés de business angels porte sur l’évolution des critères de sélection des projets entrepreneuriaux en vue d’un financement, entre deux stades successifs du processus, à partir de données réelles et d’évaluations à chaud. Au niveau de la présélection, les instructeurs chargés d’étudier les projets exigent de tout projet d’être porté par des entrepreneurs qui présentent des compétences managériales fortes tout en proposant simultanément un plan d’affaires qui paraît crédible. Au stade de la plénière en revanche, les business angels se soucient particulièrement de l’avantage concurrentiel des projets. Les entrepreneurs doivent inspirer confiance aux business angels tout au long du processus de sélection alors que leur capital social ne semble pas pris en compte par ceux-ci.
Mots-clés:
- Entrepreneur,
- Start-up,
- Business angels,
- Critères d’investissement,
- Sélection de projets,
- Investissement
Abstract
This study on structured business angels’ groups focuses on the evolution of the criteria for the selection of entrepreneurial projects candidates for financing, between two successive stages of the process, based on actual data and real-time evaluations. At the pre-screening stage, the coordinators responsible for studying the proposals require any project to be carried by entrepreneurs who have strong managerial skills while simultaneously proposing a business plan that seems credible. At the oral pitch presentation stage on the other hand, business angels are particularly concerned about the competitive advantage of projects. Entrepreneurs must be trusted by business angels throughout the screening process while their social capital does not seem to be considered by business angels.
Keywords:
- Entrepreneur,
- Startup,
- Business angels,
- Investment criteria,
- Screening of projects,
- Investment
Resumen
Este estudio sobre las redes estructuradas de Business Angels se enfoca en la evolución de los criterios para la selección de proyectos emprendedores de financiación, entre dos etapas sucesivas del proceso, basadas en datos reales y evaluación en tiempo real. En el nivel de pre-selección, los instructores encargados de estudiar los proyectos requieren que todos los proyectos sean propuestos por empresarios que tengan sólidas habilidades gerenciales y simultáneamente propongan un plan de negocios que parezca creíble. En la etapa de sesión plenaria, los Business Angels están particularmente preocupados por la ventaja competitiva de los proyectos. Los empresarios deben inspirar confianza a los Business Angels a lo largo del proceso de selección, mientras que su capital social no parece ser tomado en cuenta por los Business Angels.
Palabras clave:
- Contratista,
- Inicio,
- Business Angels,
- Criterios de inversión,
- Selección de proyectos,
- Inversión
Article body
Introduction
Nous nous intéressons au financement de l’entrepreneuriat au stade d’amorçage (après la phase de levée de fonds auprès des familles et des amis des créateurs), lorsque des porteurs de projet sollicitent des investisseurs privés, appelés business angels (BA), pour qu’ils investissent dans leur start-up. Tout d’abord, un BA est une personne physique d’un niveau de revenu assez élevé qui agit seul ou dans un réseau formel ou informel de BA, investissant une partie de sa richesse dans le capital d’une start-up avec laquelle il/elle n’a aucun lien familial et qui, après avoir investi, est impliqué(e) activement dans l’entreprise en apportant à cette dernière des conseils ou même en siégeant au sein de son conseil d’administration (Mason et Harrison, 1999), entraînant généralement une formalisation de la structure de gouvernance des start-up (Tarillon, Grazzini et Boissin, 2015, p. 92). Les BA peuvent également aider les entrepreneurs en mettant à leur disposition leur réseau professionnel. La plupart des BA sont affiliés à un réseau pour des raisons de taille critique d’investissement. Les organisations de BA se sont développées à partir de 2001 (premier réseau créé en 1998) en France, bien plus tard que dans le monde anglo-saxon (1958), à la faveur de mesures fiscales incitatives et restent beaucoup moins nombreuses qu’aux États-Unis ou en Grande-Bretagne. Les avantages fiscaux diffèrent selon le cadre d’investissement, soit une défiscalisation « à l’entrée » au moment de l’investissement, soit une défiscalisation « à la sortie », notamment sur les plus-values. Différentes formes de structures coexistent en France : l’association de personnes physiques (avec des montants individuels relativement modestes), la société d’investissement de capital-risque (pour des montants plus élevés) et la structure mixte mêlant les deux précédentes. Nous nous intéressons dans ce travail au processus d’investissement des réseaux associatifs de personnes physiques.
En pratique, les BA n’investissent pas dans tous les projets candidats à un financement, car il s’agit d’un investissement très risqué. La littérature portant sur le processus de sélection des projets fait ressortir que, pour s’engager dans un investissement, les BA accordent une importance particulière à la capacité de management des porteurs de projet, se fient à leur intuition reposant sur leur expertise ou cherchent à identifier les défauts provenant de l’équipe d’entrepreneurs ou des caractéristiques du projet (Clark, 2008 ; Mason et Harrison, 2003 ; Mitteness, Baucus et Sudek, 2012 ; Carpentier et Suret, 2015 ; Huang et Pearce, 2015 ; Maxwell, Jeffrey et Lévesque, 2011). « Les business angels ont des objectifs clairs : à la recherche d’investissements extraordinaires en termes de profitabilité, ils misent de faibles montants par projet et sont tout à fait conscients qu’ils peuvent perdre l’intégralité de leur investissement dans la plupart des cas. » (Huang et Pearce, 2015, p. 634) Afin de réduire le risque de leurs investissements, les réseaux de BA mettent en place un processus de sélection des projets très rigoureux comprenant plusieurs étapes successives : la soumission du dossier de candidature à un financement par les entrepreneurs, une courte présentation orale des entrepreneurs (cinq minutes) devant un nombre restreint de BA (bref plaidoyer ou elevator pitch), le passage en plénière (présentation d’une durée de trente minutes) et enfin, à l’issue de la période de due diligence, la rédaction des pactes d’actionnaires. À chaque étape du processus, de nombreux projets sont éliminés. Ce type de processus est mis en place dans les réseaux recevant de nombreuses propositions et comprenant suffisamment de BA pour devoir organiser un certain nombre d’étapes (nous les appellerons « réseaux structurés »). Dans les réseaux plus petits à la structuration moins formelle, le bref plaidoyer est souvent supprimé et le projet est instruit après la plénière si le projet dégage un consensus minimum auprès des investisseurs présents.
Le bref plaidoyer est considéré comme une étape très importante pour la poursuite de l’opportunité par le réseau de BA, car c’est la première rencontre entre les entrepreneurs et quelques membres du groupe d’investisseurs. Au sein des réseaux de BA structurés, après le bref plaidoyer, si le projet n’est pas immédiatement rejeté, un BA est désigné comme instructeur afin d’analyser dans le détail l’opportunité d’investissement (réunion avec les entrepreneurs, tests du prototype, consultation des experts dans le domaine en question, etc.). Ces instructeurs se portent volontaires en fonction de leur disponibilité, de leur expérience dans le secteur d’activité du projet en question et surtout en fonction de l’intérêt qu’ils portent personnellement à l’opportunité ; ils peuvent être deux voire trois par projet instruit. À la fin de l’instruction du dossier (qui peut durer d’un à trois mois selon le projet), l’instructeur rend sa conclusion dans laquelle il (ou elle) recommande la présentation du projet en plénière par les entrepreneurs ou propose son rejet. Un projet est accepté pour présentation en plénière si au moins un instructeur est prêt à investir son argent dans le projet et la conclusion complète rédigée par l’instructeur est consultable par tous les BA membres du réseau dans une salle des données virtuelle. Dans la pratique, les réseaux structurés de BA rejettent toujours une opportunité si l’instructeur recommande de le faire. L’avis de l’instructeur est un élément important dans la décision de financement des investisseurs au stade de présélection des projets (Harrison, Dibben et Mason, 1997). Cependant, la littérature existante n’apporte pas d’éclairage sur les facteurs qui sont pris en compte par l’instructeur pour formuler un jugement sur une opportunité d’investissement avant le stade de la plénière. Il existe ainsi un manque dans la littérature que notre étude propose de combler. La littérature sur le processus d’investissement des BA a montré que ceux-ci se fondent sur des caractéristiques « objectives » des projets qui leur sont soumis telles que la crédibilité des plans d’affaires, mais également sur d’autres facteurs plus « subjectifs » tels que la confiance en l’équipe d’entrepreneurs, pour prendre leur décision d’investissement. Ainsi, le premier objectif visé par notre étude est d’analyser les critères de sélection pour présentation en plénière de certains projets conformément à la recommandation des instructeurs de chaque projet dans le cadre d’un réseau structuré de BA. Étudier les facteurs qui pourraient expliquer la décision de rejet des projets par les réseaux de BA avant le stade de la plénière pourrait avoir des implications pratiques pour des entrepreneurs qui souhaitent lever des fonds auprès des réseaux de BA. En d’autres termes, les résultats de notre étude pourraient aider les entrepreneurs à évaluer s’ils sont « prêts » ou non à soumettre leur dossier de candidature pour un financement à un réseau de BA.
À un stade plus avancé du processus de sélection, les études ayant porté sur les décisions finales d’investissement des BA ont fait ressortir des résultats contrastés quant aux critères de sélection des projets par les investisseurs. Alors que certaines études ont souligné le fait que les BA accordent plus d’importance à l’équipe d’entrepreneurs dit Jockey (Mason et Harrison, 2002 ; Haines, Madill et Riding, 2003), d’autres chercheurs sont arrivés à la conclusion selon laquelle les BA placent un poids plus important sur les forces de l’opportunité d’affaire dit Horse plutôt que sur l’équipe d’entrepreneurs (Fiet, 1995 ; Kaplan, Sensoy et Strömberg, 2009). Ces résultats contrastés pourraient être expliqués par des différences de critères à chaque stade du processus de sélection des projets par les BA ainsi que par des différences de caractéristiques des BA qui évaluent les projets (Mitteness, Baucus et Sudek, 2012). En effet, un état des lieux des études portant sur le processus d’investissement des BA dites de « troisième génération » considère que des facteurs différents contribuent au rejet d’une opportunité à chaque stade du processus de sélection des projets (Maxwell, 2016, p. 119). Les BA expérimentés cherchent les raisons de rejeter des opportunités en utilisant un processus séquentiel d’élimination qui minimise l’effort global requis pour la prise de décision (Jeffrey, Levesque et Maxwell, 2016). Nous suggérons également une explication qui pourrait être d’ordre méthodologique, car la plupart des travaux ayant porté sur les critères d’investissement des BA ont utilisé des questionnaires rétrospectifs, après la phase de financement. Or, les questionnaires basés sur des données rétrospectives sont susceptibles de produire des résultats biaisés (Shepherd et Zacharakis, 1999). Aussi, le deuxième objectif visé par notre étude est d’identifier les raisons qui pourraient expliquer la décision des réseaux de BA de financer certains projets après le passage en plénière à partir de données issues des réactions à chaud des BA aux présentations des entrepreneurs.
Notre travail sur les réseaux structurés de BA est innovant à deux titres, d’une part, nous analysons les facteurs qui pourraient expliquer les décisions des instructeurs au stade de présélection des projets et, d’autre part, nous considérons l’évolution des critères d’investissement des BA à deux stades successifs du processus de sélection avec des données réelles issues des évaluations à chaud des BA.
Dans cette étude, nous présenterons d’abord les concepts de la confiance, du capital social et du capital humain des entrepreneurs ainsi que la littérature mettant en avant l’intérêt pour les entrepreneurs candidats à un financement de rédiger un plan d’affaires (business plan) de qualité. Puis nous analyserons la façon dont l’instructeur intègre ces différents éléments dans sa prise de décision de recommander la présentation du projet en plénière ou son rejet. Afin d’étudier l’évolution des critères d’investissement des BA, nous étudierons par la suite, lors des présentations des entrepreneurs, les facteurs qui expliqueraient les décisions à chaud des BA de financer ou non les start-up. Les parties subséquentes de cet article concerneront la présentation des données de l’étude, la définition des variables ainsi que la méthodologie. Enfin, la dernière partie de l’article portera sur la présentation ainsi que la discussion des résultats empiriques de l’étude.
1. Revue de la littérature et formulation des hypothèses
1.1. Importance de la confiance dans la relation entrepreneurs/instructeurs
La complexité de la notion de confiance, qui est en première approche la disposition à compter sur un partenaire d’échange en qui l’on peut se fier (Moorman, Zaltman et Deshpande, 1992), a donné lieu à de nombreux travaux et a généré diverses approches donnant des points de vue souvent complémentaires. La confiance est définie classiquement comme « la volonté d’une partie de se rendre vulnérable aux actions de l’autre partie, basée sur l’attente que l’autre partie effectuera des actions qui sont importantes pour soi, sans qu’aucune forme de contrôle ou de surveillance ne soit nécessaire » (Mayer, Davis et Schoorman, 1995, p. 712). La notion de fiabilité est centrale dans toute relation de confiance et, à ce titre, les études ayant porté sur ce sujet ont mis en avant plusieurs caractéristiques qui font d’une partie impliquée dans une relation d’être considérée comme fiable. « Même si un certain nombre de facteurs ont été proposés, trois caractéristiques de la partie à qui l’on fait confiance apparaissent souvent dans la littérature, à savoir l’aptitude, la bienveillance et l’intégrité. En tant qu’ensemble, ces trois éléments semblent expliquer une grande partie de la fiabilité. » (Mayer, Davis et Schoorman, 1995, p. 717) La relation entre l’intégrité et la confiance implique que l’on perçoit que l’autre partie adhère à un ensemble de principes que l’on juge acceptables (Mayer, Davis et Schoorman, 1995, p. 719). D’un point de vue conceptuel, les études ayant porté sur la confiance sont organisées en approche comportementale ou en approche psychologique (Lewicki, Tomlinson et Gillespie, 2006, p. 992). La tradition comportementale considère la confiance comme une résultante de choix rationnels tels que les choix coopératifs dans les jeux expérimentaux (Hardin, 1993 ; Williamson, 1981). La tradition psychologique de la confiance quant à elle tente de comprendre les états intrapersonnels complexes associés à la confiance, incluant les attentes, les émotions, les intentions ainsi que les dispositions (Lewicki et Bunker, 1995, 1996 ; Mayer, Davis et Schoorman, 1995). Certains chercheurs qui adhèrent à cette tradition psychologique soutiennent que la confiance commence à un niveau bas, voire nul, et peut changer au fil du temps. Elle est qualifiée d’approche transformationnelle de la confiance. Lewicki et Bunker (1995, 1996) ont développé un modèle transformationnel dans lequel la confiance passe par trois étapes qui sont respectivement la confiance fondée sur le calcul, la confiance basée sur la connaissance et enfin la confiance fondée sur l’identification. Toutes ces études permettent de contextualiser l’évolution de la relation de confiance BA/entrepreneurs au cours du processus de sélection des projets.
Dans le cadre spécifique des investissements des BA, des chercheurs ont montré que l’idée de confiance entre les entrepreneurs et les BA est importante pour qu’un projet soit financé (Harrison, Dibben et Mason, 1997 ; Scarbrough, Swan, Amaeshi et Briggs, 2013). Le fait de rassembler les informations pour construire successivement plusieurs formes de confiance aide les investisseurs à mieux contextualiser et exploiter les informations disponibles dans différentes phases du processus d’investissement (Scarbrough et al., 2013). Selon Scarbrough et al. (2013), s’agissant du cas spécifique des start-up technologiques, au démarrage de la relation investisseurs/entrepreneurs, la première forme de confiance est construite sur la base de signaux d’ordre institutionnel (telle l’idée que la technologie provient d’une institution à forte réputation comme une université) tandis que la seconde forme de confiance construite au cours du processus est fondée sur la base de l’échange d’informations au fur et à mesure que cette relation investisseurs/entrepreneurs se poursuit dans le temps. Cependant, tout au long d’une relation, il y a des situations où la confiance se rompt et, dans le cas spécifique du lien BA/entrepreneur, ce type de circonstance, apparaissant en période de post- investissement, a été vérifié empiriquement (Berggren et Fili, 2008). Un courant de pensée s’est développé sur la réparation de la confiance rompue (Kramer et Lewicki, 2010 ; Tomlinson, Dineen et Lewicki, 2004 ; Dirks, Lewicki et Zaheer, 2009 ; Kim, Dirks et Cooper, 2009), mais n’est pas applicable dans la relation de préinvestissement impliquant les BA et les entrepreneurs. À ce stade, étant donné que les délais sont très courts, toute rupture de confiance entraîne le rejet du projet par le réseau de BA.
Au moment des premières interactions entre les entrepreneurs et les BA, Maxwell et Lévesque (2014) ont empiriquement montré qu’en comparaison des entrepreneurs qui n’ont pas reçu d’offre de la part des BA, ceux qui ont reçu des financements présentent un plus grand nombre de comportements aidant à construire la confiance (comme avoir un comportement confirmant les promesses antérieures, être préoccupé du bien-être des autres, être ouvert aux idées nouvelles ou à d’autres façons de faire les choses), un plus faible nombre de comportements non intentionnels détériorant la confiance (comme montrer des incohérences entre les paroles et les actions, ne pas écouter ou réfuter les remarques des BA) et enfin un faible nombre de comportements délibérés violant la confiance (comme stopper ou saper de nouvelles idées, rejeter les demandes d’explications, réfuter les commentaires ou blâmer les autres).
Étant donné qu’au stade de présélection des projets, les BA et les entrepreneurs ont disposé de peu de temps de travail ensemble, nous allons utiliser dans cette étude le concept de confiance émergente (swift trust) comme point de départ de la confiance entre les instructeurs et les entrepreneurs. Le concept de swift trust a été développé pour expliquer l’émergence de relations de confiance dans des situations où les individus ont un historique de travail commun limité (Meyerson, Weick et Kramer, 1996). Dans ces circonstances, les chercheurs ont avancé que les individus concernés importent des formes de confiance d’autres contextes (Meyerson, Weick et Kramer, 1996 ; Xu, Feng, Wu et Zhao, 2007). Dans le processus de sélection des projets, la confiance apparaît dans deux relations. Le premier cas concerne la confiance que font les instructeurs aux entrepreneurs à deux stades différents du processus de sélection. En effet, au début du processus, si le BA instructeur qui fait partie de l’équipe des investisseurs et qui a reçu les entrepreneurs pour une courte présentation orale de cinq minutes (bref plaidoyer) fait confiance à l’équipe d’entrepreneurs, alors le projet est accepté pour instruction pendant une période pouvant aller jusqu’à trois mois. Cette confiance de départ entre les instructeurs et les entrepreneurs à l’issue d’un bref plaidoyer prend la forme de confiance émergente (Meyerson, Weick et Kramer, 1996), les instructeurs et les entrepreneurs n’ayant aucun historique de travail ensemble. Le bref plaidoyer est le premier contact entre le réseau de BA et les entrepreneurs. Pendant la période d’instruction du projet, l’instructeur rencontre les entrepreneurs dans le cadre de réunions de travail, apprend à mieux les connaître et approfondit l’étude d’opportunité d’investissement. Ainsi, à la fin de l’instruction correspondant au moment où l’instructeur recommande le passage du projet en plénière ou propose au réseau de BA son rejet, l’instructeur aura accumulé beaucoup d’informations lui permettant d’avoir une meilleure connaissance de l’équipe d’entrepreneurs et de l’opportunité d’investissement. À ce stade, la confiance initiale qu’il (elle) avait en l’équipe des entrepreneurs (swift trust) aura pu évoluer vers une forme de confiance qui tend vers la confiance basée sur la connaissance (Lewicki et Bunker, 1995, 1996).
Le deuxième cas concerne la confiance qu’ont les BA dans l’instructeur. Harrison, Dibben et Mason (1997) ont largement montré que dans les réseaux de BA les investisseurs se fient de façon considérable au travail des instructeurs qui leur fournissent des informations leur permettant de se forger leur propre confiance et d’identifier des seuils de coopération. En résumé, les entrepreneurs ont plus de chance de présenter leur projet en plénière lorsque la confiance qu’a l’instructeur en eux est élevée au moment de sa prise de décision à la fin de l’instruction du projet. Ces différents arguments nous conduisent à l’hypothèse suivante :
H1 : à l’issue de la période d’instruction du projet, plus importante est la confiance basée sur la connaissance qu’a l’instructeur en l’équipe d’entrepreneurs au moment de sa prise de décision, plus grande sera la chance des entrepreneurs de présenter leur projet en plénière.
1.2. Lien capital social, succès de l’entrepreneur et décision de l’instructeur
Le concept de capital social est défini comme « l’agrégation de ressources actuelles ou potentielles liées à la possession d’un réseau durable de relations plus ou moins institutionnalisées des connaissances ou considérations mutuelles » (Bourdieu, 1980, p. 2). La littérature en entrepreneuriat a souligné le lien positif entre le capital social de l’entrepreneur et la performance de l’entreprise (Bosma, van Praag, Thurik et de Wit, 2004 ; Schutjens et Völker, 2010). Les start-up qui ont les fondateurs les mieux « connectés » sont celles qui ont le plus de chance de réussir parce que les réseaux professionnels et sociaux des créateurs fournissent les moyens requis (informations, ressources, bénéfices liés au statut) de développement du modèle d’affaires au stade d’amorçage (Spiegel et al., 2016). Dans la période post-investissement, le réseau des entrepreneurs s’avère avoir un impact positif sur le succès ou sur la performance de la start-up mesurée par le profit réalisé ou par le nombre d’emplois créés (Davidsson et Honig, 2003 ; Baron et Markman, 2000 ; Bosma et al., 2004). L’interaction entre le capital humain de l’entrepreneur et son capital social aide la start-up à progresser et à réaliser une performance mesurée par le résultat opérationnel (Semrau et Hopp, 2016 ; Santarelli et Tran, 2013). Au sein des réseaux structurés de BA, l’instructeur est en général un investisseur avec une expérience d’investissement de plusieurs années et dans certains cas avec également une expérience entrepreneuriale. Ainsi, selon sa propre expérience, l’instructeur est conscient de l’importance du réseau social sur le succès de l’entrepreneur. Au même titre que n’importe quel autre investisseur, l’instructeur est à la recherche d’investissements avec la plus grande chance de succès. Ainsi, l’on peut s’attendre à ce que l’instructeur soit plus enclin à recommander la présentation en plénière des projets portés par des entrepreneurs qui ont un meilleur capital social, toutes choses restant égales par ailleurs. Ces arguments nous permettent d’ériger l’hypothèse suivante :
H2 : plus grande est la perception par l’instructeur de la qualité du réseau social des entrepreneurs, plus grande sera la disposition de cet instructeur à recommander la présentation du projet par les entrepreneurs en plénière, toutes choses étant égales par ailleurs.
1.3. Lien crédibilité du plan d’affaires (Horse), capital humain de l’entrepreneur (Jockey) et décision de l’instructeur
Les BA sont conscients du risque de leur activité, ils enregistrent des pertes sur une grande majorité de leurs investissements et réalisent des rentabilités extraordinaires occasionnelles (DeGennaro et Dwyer, 2014 ; Huang et Pearce, 2015). Certaines études ont prouvé l’importance de la qualité ainsi que de la crédibilité du plan d’affaires dans le processus de décision des BA (Clark, 2008 ; Mason et Stark, 2004 ; Mason et Harrison, 2002). Dans une recherche menée par Mason et Harrison (2002), 81 % des investisseurs qui ont répondu à l’enquête ont indiqué que leur capacité à investir est limitée par la qualité des opportunités d’investissement qui se présentent à eux. « Selon les business angels eux-mêmes, les déficiences majeures qu’ils remarquent au niveau des opportunités concernent les plans d’affaires qui contiennent des hypothèses irréalistes ou des informations qui ne sont pas crédibles. » (Mason et Harrison, 2002, p. 281) La prise de décision est guidée par la rentabilité espérée et non par la rentabilité réalisée (DeGennaro et Dwyer, 2014, p. 740). Ainsi, la perception de la crédibilité du plan d’affaires par les BA est susceptible d’être corrélée à la rentabilité espérée par ces investisseurs et par conséquent corrélée à la prise de décision des BA. En résumé, le plan d’affaires (Horse), qui peut être considéré comme un élément objectif de l’opportunité d’investissement, apparaît peser dans la prise de décision des BA. Qu’en est-il des aspects humains, c’est-à-dire ceux liés à l’entrepreneur dans la prise de décision des BA ?
Il a largement été prouvé que le capital humain avait un effet positif sur la valeur de la société de l’entrepreneur. L’investissement d’une entreprise dans un capital humain spécifique se traduit par l’accroissement de la valeur de cette dernière (Becker, 1964). Le capital humain est défini par l’OCDE (2007) comme étant la connaissance, les compétences et les attributs incarnés dans des individus qui facilitent la création d’un bien-être personnel, social ou économique. L’importance du capital humain pour une entreprise a fait émerger la notion de « risque du capital humain clé » défini comme étant le risque lié à la concentration du capital humain au sein d’un nombre limité d’employés irremplaçables. Les résultats de l’étude menée par Israelsen et Yonker (2017) font ressortir qu’à la suite de l’annonce du départ d’employés clés, les entreprises les plus exposées au risque de capital humain clé perdent 8 % de leur valeur. La littérature en entrepreneuriat a bien souligné l’importance du capital humain (ainsi que celle du capital social) dans le succès des entrepreneurs. Le concept de capital humain se réduit souvent aux compétences managériales, notamment quand il s’agit de jeunes entrepreneurs qui sont à leur première création d’entreprise. Levie et Gimmon (2008) ont mené une étude qualitative dans laquelle ils ont demandé aux investisseurs leurs critères d’investissement dans des start-up technologiques pour lesquelles les entrepreneurs sont primocréateurs. D’après les résultats de cette étude, les investisseurs se focalisent sur les aptitudes managériales des créateurs et non sur les compétences technologiques des entrepreneurs.
Au sein des réseaux structurés de BA, les instructeurs sont également des investisseurs à la recherche de bonnes opportunités d’investissement. Étant donné que toute défaillance majeure potentielle liée au projet (Horse) ou liée à l’équipe d’entrepreneurs (Jockey) est un motif de rejet du projet par le réseau de BA (Maxwell, Jeffrey et Lévesque, 2011), nous suggérons qu’un capital humain de qualité des entrepreneurs couplé à un plan d’affaires crédible du projet seront simultanément exigés par les instructeurs afin que ces derniers donnent un avis positif quant au passage du projet au stade de la plénière. Ceci conduit à l’hypothèse suivante :
H3 : plus grande est la perception simultanée par l’instructeur de la qualité du capital humain (compétence managériale) des entrepreneurs ainsi que de la crédibilité du plan d’affaires du projet, plus grande sera la chance des entrepreneurs de présenter leur projet en plénière.
1.4. Évaluation à chaud par les BA des pitchs des entrepreneurs et décision d’investissement
La présentation des projets par les entrepreneurs en plénière est l’une des étapes importantes dans le processus d’investissement des BA. Certaines études, qui ont porté sur la réaction des BA à la suite des pitchs des entrepreneurs, ont fait ressortir que les BA accordent de l’importance à la clarté ainsi qu’à la structure de la présentation (Mason et Harrison, 2003 ; Clark, 2008). Les BA sont très attentifs à la capacité des entrepreneurs à démontrer leurs compétences managériales (Feeney, Haines et Riding, 1999 ; Paul, Whittam et Johnston, 2003 ; Clark, 2008 ; Mason et Harrison, 2003). Dans une étude menée par Mason et Harrison (2002), certains BA qui ont répondu à l’enquête ont notifié qu’ils étaient prêts à faire des concessions quant à leurs critères d’investissement, notamment dans le cas où les entrepreneurs paraissent qualifiés, car ils ont su montrer leurs capacités managériales. Sur la base de données canadiennes, au stade des pitchs des entrepreneurs, les raisons des rejets des projets par les réseaux de BA sont principalement liées au produit ainsi qu’à la stratégie de marché telle que l’existence et/ou la visibilité du marché ou encore un marché très limité ou de niche (Carpentier et Suret, 2015). Lorsqu’une faiblesse « fatale » est identifiée au niveau d’une opportunité, cette dernière est rejetée par le réseau de BA dès le stade de présélection des projets (Maxwell, Jeffrey et Lévesque, 2011) et la confiance qu’ont les BA dans les entrepreneurs est rompue. Au sein des réseaux structurés de BA les instructeurs jouent un rôle particulièrement important, car ils sélectionnent les projets qui vont être présentés en plénière. Aussi, nous suggérons que les projets qui accèdent au stade de la plénière sont ceux pour lesquels l’instructeur n’a pas décelé de faiblesse notable aussi bien au niveau de l’équipe des entrepreneurs ou Jockey (compétences managériales) qu’au niveau de l’opportunité ou Horse (crédibilité du plan d’affaires du projet). Ainsi, nous suggérons que les BA qui assistent à la plénière vont s’intéresser aux projets qu’ils estiment « sortir du lot », notamment à cause de la qualité de la stratégie de marché de ces projets qui les laissent espérer un retour sur investissement conséquent. Ces arguments conduisent aux hypothèses suivantes :
H4a : au stade de la plénière, dans leur prise de décision d’investissement, les BA se focaliseront sur des aspects de stratégie de marché du projet liée à l’identification d’une opportunité.
H4b : au stade de la plénière, dans leur prise de décision d’investissement, les BA se focaliseront sur des aspects du projet en lien avec la capacité de la start-up à mettre en oeuvre la stratégie de marché appropriée.
La figure 1 présente le design de l’étude.
2. Données de l’étude, définition des variables et méthodologie
2.1. Présentation des données
Depuis 2001, on compte environ 12 000 BA personnes physiques dans les réseaux associatifs français ayant financé et accompagné 3 900 entreprises dans 455 opérations de financement ; 600 millions d’euros ont été investis au total, toutes organisations confondues depuis cette date. La fédération France Angels (Fédération nationale des BA) annonce 37,3 millions d’euros investis (dont 38 % en refinancement) en France par les BA en 2018, dont 42 % dans le digital, 22 % dans la santé et la biotech et 10 % dans les biens et services industriels. On remarque que France Angels investit dans 10 % de start-up dirigées par des femmes entrepreneures alors que le réseau féminin Femmes Business Angels investit dans 33 % d’entreprises féminines (Amatucci, 2016, p. 101).
Les projets et leurs caractéristiques détaillées ne sont pas accessibles au public. Nous avons passé un accord pour utiliser des données collectées dans un important consortium de BA à Paris constitué de plusieurs réseaux de BA, dont le plus important est Paris Business Angels (PBA), association structurée la plus grosse en France. Les données sont issues de deux questionnaires et du système d’information local fournissant les caractéristiques des BA et des projets proposés. Ce regroupement compte 419 membres, dont 150 considérés comme actifs. Le premier questionnaire (Annexe 1) que nous avons mis en place au niveau de l’instruction sur une période de trois ans (2014-2016) a fourni un premier jeu de données constituant l’échantillon 1. Un second questionnaire (Annexe 2) déjà existant dans le consortium a permis d’exploiter des données récoltées plus tardivement dans le processus de sélection des projets, au moment de la plénière, sur une période de sept ans (2011-2017), constituant l’échantillon 2. Pour le premier objectif visé par cette étude, nous avons utilisé l’échantillon 1 et pour le second objectif l’échantillon 2. Dans ce dernier cas, nous ne gardons que les observations liées aux BA personnes physiques et pour des projets hors refinancement. On note qu’il existe dans ce réseau une société d’investissement en capital-risque qui regroupe 50 BA membres très actifs et dispose d’une capacité d’investissement en fonds propres de 3 millions d’euros, ce qui augmente la capacité d’investissement du réseau en allant ponctuellement sur des levées de fonds de 500 000 € à plus de 1 million d’euros.
Dans le premier questionnaire, nous avons demandé aux BA chargés de l’instruction des projets d’évaluer quatre critères via des échelles de Likert à cinq niveaux, en complément de leur rapport habituel d’instruction dans lequel ils préconisent de rejeter le projet ou de l’accepter pour une présentation en plénière. Dans le premier critère, les instructeurs ont évalué la crédibilité du plan d’affaires du projet (Horse) conformément à la littérature sur le sujet qui a souligné l’importance pour les entrepreneurs de présenter un plan d’affaires crédible aux investisseurs potentiels (Clark, 2008 ; Mason et Stark, 2004 ; Mason et Harrison, 2002 ; DeGennaro et Dwyer, 2014). Dans le deuxième critère lié à la capacité de l’équipe d’entrepreneurs de mener à bien le projet, les instructeurs ont évalué le capital humain des entrepreneurs (leurs compétences managériales). La littérature en entrepreneuriat a également souligné l’importance du réseau social pour le succès de l’entrepreneur ainsi que sur la performance de la start-up (Davidsson et Honig, 2003 ; Bosma et al., 2004 ; Schutjens et Völker, 2010). Dans le troisième critère, les instructeurs ont évalué le réseau social des entrepreneurs. Dans le quatrième critère, nous avons demandé aux instructeurs d’évaluer la confiance qu’ils ont en l’équipe d’entrepreneurs, conformément à la littérature qui souligne l’importance pour les entrepreneurs d’avoir une relation de confiance avec les investisseurs (Harrison, Dibben et Mason, 1997 ; Scarbrough et al., 2013). Enfin, dans le questionnaire, l’instructeur a également indiqué s’il trouve le projet particulièrement innovant ou non. Le nombre total de projets pour lesquels nous avons obtenu la conclusion complète de l’instructeur est de 123 parmi lesquels seulement 13 projets (10,57 %) étaient autorisés à être présentés en plénière, les autres projets ayant été rejetés par le réseau des BA sur recommandation de l’instructeur. Nous obtenons ainsi 123 questionnaires remplis, au moins partiellement ou observations (= projet), pour les projets instruits.
Le second questionnaire est remis à chaque BA présent en plénière ; celui-ci le complète juste à l’issue des pitchs des entrepreneurs ; il permet d’obtenir ainsi les évaluations à chaud des BA en séance plénière. Ce questionnaire contient cinq critères mesurés par une échelle de Likert à cinq niveaux : la qualité et la clarté de la présentation, la confiance en l’équipe des entrepreneurs, l’avantage concurrentiel, l’attrait de l’opportunité et enfin la crédibilité du plan d’affaires. Nous obtenons ainsi 1 570 questionnaires remplis, au moins partiellement ou observations (= projet × BA), pour les projets présentés en plénière.
Les échelles de Likert complétées par les instructeurs (Échantillon 1) ainsi que celles complétées par les BA à la fin des pitchs des entrepreneurs (Échantillon 2) sont transformées en nombres comme suit : tout à fait d’accord (+2), d’accord (+1), neutre (0), pas d’accord (-1), pas du tout d’accord (-2).
2.2. Définition des variables
2.2.1. Les variables à expliquer
Évaluation des projets par l’instructeur
DécisionInstructeur est une variable muette égale à 1 si l’instructeur a recommandé le passage du projet en plénière et 0 sinon.
Évaluation des projets par les BA à l’issue de la plénière
ProjetFinancé est une variable muette égale à 1 si le projet a reçu un accord de financement de la part du BA après son passage en plénière et 0 sinon.
2.2.2. Les variables explicatives
Évaluation des projets par l’instructeur
CrédibilitéBP est l’évaluation de la crédibilité du plan d’affaires du projet par l’instructeur sur la base d’une échelle de Likert.
CapSocialEntrep est l’évaluation de la qualité perçue du réseau social des entrepreneurs par l’instructeur sur la base d’une échelle de Likert.
CapHumainEntrep est l’évaluation des compétences managériales des entrepreneurs par l’instructeur sur la base d’une échelle de Likert.
MoyCapHumainCrédibilitéBP est la moyenne de l’évaluation des compétences managériales des entrepreneurs ainsi que de la crédibilité du plan d’affaires du projet. Cette variable qui est construite à des fins économétriques est l’évaluation « objective » d’une certaine pertinence technique et financière des entrepreneurs ainsi que de leur projet. Ainsi, un niveau élevé de cette variable signifie que l’instructeur exige simultanément que le projet soit porté par des entrepreneurs compétents tout en ayant un plan d’affaires crédible. L’intérêt d’une telle variable est qu’elle capte simultanément la perception par l’instructeur de la compétence managériale des entrepreneurs ainsi que la crédibilité du plan d’affaires du projet. Conformément à la littérature sur la « faiblesse fatale » (Maxwell, Jeffrey et Lévesque, 2011), la perception par l’instructeur de toute défaillance au niveau du capital humain des entrepreneurs ne peut pas être compensée par la crédibilité du plan d’affaires du projet et vice versa.
ConfianceInstructeur est l’évaluation sur la base d’une échelle de Likert par l’instructeur de la confiance qu’il a en l’équipe des entrepreneurs au moment de sa prise de décision à la fin de la période d’instruction du projet quant à son passage en plénière ou son rejet. Il s’agit de la forme de confiance basée sur la connaissance (Lewicki et Bunker, 1995, 1996).
Évaluation des pitchs des entrepreneurs par les BA à chaud à la fin des plénières
ClartéPrésentation est l’évaluation à chaud de la clarté de la présentation des entrepreneurs par chaque BA à la fin du pitch, sur la base d’une échelle de Likert.
ConfianceEntrep est l’évaluation à chaud de la confiance aux entrepreneurs par chaque BA à la fin du pitch, sur la base d’une échelle de Likert. Cette confiance des BA dans les entrepreneurs qui font leur pitch est étroitement liée à la confiance que l’instructeur a en l’équipe des entrepreneurs, car les BA font confiance à l’instructeur en toute circonstance, le réseau de BA suivant toujours les recommandations des instructeurs. De plus, les BA ont accès aux conclusions des instructeurs concernant chaque projet qui passe en plénière. Aussi, à ce stade du processus de sélection des projets, les BA se fient largement au travail de ces instructeurs leur fournissant des informations qui leur permettent de se forger leur propre confiance dans les entrepreneurs (Harrison, Dibben et Mason, 1997).
AttraitOpportunité est l’évaluation à chaud de l’attractivité de l’opportunité par chaque BA à la fin du pitch, sur la base d’une échelle de Likert.
AvantagesConcurrentiels est l’évaluation à chaud des avantages concurrentiels de la start-up par chaque BA à la fin du pitch, sur la base d’une échelle de Likert.
CrédibilitéBP est l’évaluation à chaud de la crédibilité du plan d’affaires du projet par chaque BA à la fin du pitch, sur la base d’une échelle de Likert.
MoyConfianceCrédibilitéBP est la moyenne de l’évaluation de la confiance aux entrepreneurs ainsi que de la crédibilité du plan d’affaires. Cette variable est construite pour des fins économétriques afin de vérifier si les BA exigent simultanément des projets présentés, d’être portés par des entrepreneurs qui leur inspirent confiance au moment des pitchs, tout en ayant en même temps un plan d’affaires crédible.
2.2.3. Les variables de contrôle
Nous avons introduit différentes variables reconnues par la littérature comme pouvant influencer les prises de décision. Certaines sont liées au projet comme le rapport entre le capital recherché par les entrepreneurs et la valorisation préinvestissement de la société, d’autres sont attachées au profil des BA. Parmi les variables, nous avons introduit la notion de genre, car la littérature a montré une différence notable entre les hommes et les femmes en matière d’investissement. En effet, la question de genre dans les décisions d’investissement des BA a fait l’objet de plusieurs travaux. Amatucci (2016) a synthétisé les avancées des études sur les femmes BA et souligne la persistance du plafond de verre en ce qui concerne la participation des femmes en tant qu’investisseurs, ainsi que l’existence d’une forme d’homophilie dans les décisions d’investissement des femmes BA. Étant donné que le consortium étudié est essentiellement composé d’hommes (91 %), il est intéressant de considérer cet angle. Le but de notre étude n’est pas d’expliquer le comportement des femmes au regard des théories évoquées par la littérature (comme les stéréotypes), mais simplement de contrôler ces aspects.
CapitalRecherché/Pré-money est un ratio qui traduit le risque pris par les BA défini comme étant le poids relatif du capital recherché par les entrepreneurs, comparé à la valorisation pré-money de la start-up (valorisation avant l’opération de financement par les BA).
ÉducationBA est une variable muette qui prend la valeur de 1 si le BA est diplômé d’une université scientifique ou d’une école d’ingénieur et 0 sinon.
Start-upExpBA est une variable muette égale à 1 si le BA a une expérience entrepreneuriale et 0 sinon.
ÂgeBA est l’âge du BA en années.
ProjetInnovant est une variable muette égale à 1 si l’instructeur trouve le projet particulièrement innovant et 0 sinon (Échantillon 1).
GenreBA est une variable muette égale à 1 si le BA est une femme et 0 sinon.
PresenceFemmeInstructeur est une variable muette égale à 1 si une femme BA fait partie de l’équipe d’instructeurs et 0 sinon (Échantillon 1).
GenreEntrep est une variable muette égale à 1 si une femme est à la tête de l’équipe d’entrepreneurs et 0 sinon.
SecteurStéréotypé est une variable muette qui est égale à 1 si le secteur d’activité de la start-up est stéréotypé masculin (industrie, électronique, logiciel, télécommunication et écosolution) et 0 sinon. Les domaines de l’ingénierie, de la chirurgie, de la direction générale, de la magistrature et du barreau sont considérés comme plutôt stéréotypés masculin tandis que les secteurs des soins infirmiers, des métiers du secrétariat ou des services sont généralement stéréotypés féminin (Heilman, 1983, 2001).
2.3. Méthodologie
Afin de tester H1, H2 et H3, nous allons expliquer la variable dépendante dichotomique DécisionInstructeur qui prend la valeur de 0 pour les projets rejetés par l’instructeur et 1 pour les projets acceptés par celui-ci. Pour cela, nous avons mis en oeuvre des régressions logistiques réalisées sur la base du modèle Probit. Si on recourt plutôt à un modèle Logit, généralement plus simple d’utilisation et moins contraignant du point de vue des hypothèses que le Probit, on obtient des résultats équivalents. Ici, le modèle Probit donne un pseudo R² légèrement meilleur que le Logit, d’où notre choix. Nous nous sommes assurés de la normalité des résidus par des tests de Shapiro-Wilk et de la non-multicolinéarité des variables en calculant les VIF (variance inflation factor).
De la même manière, pour tester H4a et H4b, nous allons expliquer la variable dépendante dichotomique ProjetFinancé qui prend la valeur de 0 pour les projets rejetés en séance plénière et 1 pour les projets acceptés pour un financement, et ce, pour chaque BA. Un modèle Probit est également utilisé avec les mêmes remarques que précédemment.
3. Résultats empiriques
3.1. Statistiques descriptives
Le tableau 1 présente les statistiques descriptives concernant les projets soumis à l’instruction ainsi que les entrepreneurs correspondants. Seuls 11,38 % des projets sont dirigés par des femmes, ce qui confirme le constat général que les femmes proposent beaucoup moins de créations d’entreprise.
Le tableau 2 fournit les statistiques descriptives concernant les instructeurs (Échantillon 1) et les BA au niveau de la plénière (Échantillon 2).
Les femmes BA ne représentent que 9 % de la totalité des membres du consortium, ce qui est conforme aux caractéristiques de réseaux de BA traditionnels qui sont majoritairement masculins. On constate une différence de profil entre les hommes et les femmes BA de ce consortium : les hommes plutôt avec un profil de retraité (41 %) ou cadre supérieur/consultant (43,6 %), de formation scientifique et les femmes plutôt avec un profil d’entrepreneure, diplômée d’école de commerce (68 %).
Le tableau 3 donne les statistiques descriptives concernant les évaluations des projets par les instructeurs à la fin de la période d’instruction du dossier.
Le tableau 4 présente les résultats des tests de différence de moyenne des évaluations à chaud des pitchs concernant les projets financés et ceux rejetés (Échantillon 2). Les secteurs d’activité des projets présentés en plénière se situent principalement à 31 % dans les services, 20 % dans les logiciels, 16 % dans le commerce électronique et 12 % dans la distribution.
Les résultats des tests de différence de moyenne du tableau 4 montrent que par rapport aux entrepreneurs qui n’ont pas reçu de financement, les projets financés sont ceux pour lesquels les entrepreneurs ont obtenu les meilleures notations à chaque critère mesuré par une échelle de Likert (différence de moyenne positive et significative).
Le tableau 5 donne les corrélations entre les variables de l’échantillon 1 et le tableau 6 celles de l’échantillon 2.
3.2. Facteurs pouvant expliquer la décision de l’instructeur (passage du projet en plénière ou non)
Les résultats de la première spécification du modèle Probit sur la décision de l’instructeur (Tableau 7, 1re spécification) montrent que les coefficients estimés des variables CrédibilitéBP et CapHumainEntrep sont positifs, mais statistiquement non significatifs. Ces résultats suggèrent qu’aucune des deux variables, toute seule, ne peut expliquer la décision de l’instructeur. En revanche, le coefficient de la variable ConfianceInstructeur est positif et significatif au seuil de 10 %, signifiant qu’au moment où l’instructeur prend sa décision (à la fin de la période d’instruction) de recommander le passage du projet en plénière ou son rejet, le fait que la confiance qu’il (elle) a en l’équipe d’entrepreneurs soit grande, accroît les chances que les entrepreneurs présentent leur projet en plénière (pitch de 30 minutes). Cependant, les résultats montrent que la qualité du capital social des entrepreneurs n’a aucun impact sur la décision de l’instructeur. L’hypothèse 1 est ainsi validée et l’hypothèse 2 est rejetée.
Afin d’analyser le rôle des caractéristiques « objectives » des opportunités d’investissement sur le jugement de l’instructeur, nous avons estimé le modèle Probit en mettant comme variable explicative MoyCapHumainCéedibilitéBP. Les résultats de la deuxième spécification du modèle Probit sur la décision de l’instructeur (Tableau 7, 2e spécification) montrent que le coefficient de cette variable MoyCapHumainCrédibilitéBP est positif et significatif au seuil de 5 %. Ceci veut dire que lorsqu’un projet est porté par des entrepreneurs perçus comme compétents tout en ayant en même temps un plan d’affaires crédible, il a de grandes chances d’être accepté par l’instructeur pour présentation en plénière. De ce fait, toute faiblesse liée à l’un des deux aspects (compétences managériales des entrepreneurs ou crédibilité du plan d’affaires) ne peut pas être compensée par la qualité de l’autre aux yeux de l’instructeur.
Le test de Shapiro-Wilk donne des coefficients de W = 0,884 dans la première spécification et W = 0,883 dans la deuxième, ce qui confirme l’absence de problème de normalité des résidus. Par ailleurs, on peut écarter les problèmes de multicolinéarité entre les variables explicatives avec une moyenne VIF (variance inflation factor) de 1,416 pour la 1re spécification et de 1,294 pour la 2e spécification.
Ainsi, l’hypothèse 3 est validée.
3.3. Facteurs pouvant expliquer la décision des BA à l’issue de la plénière (financer les projets ou non)
Les résultats de la première spécification du modèle Probit sur les projets financés (Tableau 8) montrent que seuls les projets pour lesquels les entrepreneurs inspirent confiance aux BA et qui, en même temps, présentent un avantage concurrentiel notable, sont susceptibles de recevoir un accord de financement des BA à la suite des pitchs des entrepreneurs.
Les résultats de la deuxième spécification du modèle Probit sur les projets financés (Tableau 8) montrent une fois encore que les projets qui présentent un avantage concurrentiel important sont ceux qui sont susceptibles de recevoir un accord de financement par les BA à la suite des pitchs des entrepreneurs. Ces résultats montrent qu’au stade de la plénière, les BA accordent une importance particulière à la stratégie de marché des start-up candidates à un financement. On note que conformément aux résultats traditionnels, les femmes BA investissent moins que leurs homologues masculins.
Le test de Shapiro-Wilk donne des coefficients de W = 0,932 dans la première spécification et W = 0,930 dans la deuxième, ce qui confirme l’absence de problème de normalité des résidus. Par ailleurs, on peut écarter les problèmes de multicolinéarité entre les variables explicatives avec une moyenne VIF (variance inflation factor) de 1,35 pour la première spécification et de 1,34 pour la deuxième spécification.
Ainsi, l’hypothèse 4 est validée.
Conclusion, discussions et perspectives de recherche
Les résultats de notre étude sur l’évolution des critères de sélection de projets entrepreneuriaux par des business angels (BA) dans un réseau structuré qui est sollicité pour des financements montrent d’abord que les chances pour un projet d’être présélectionné (pour une présentation en séance plénière) augmentent lorsque l’instructeur du dossier a pu construire une confiance en l’équipe d’entrepreneurs à travers leurs différents échanges et qu’il évalue, simultanément, de façon très positive, la crédibilité du plan d’affaires de ce projet et le capital humain (les compétences managériales) des entrepreneurs. Nous constatons également que la perception par l’instructeur de la qualité du réseau social des entrepreneurs n’a aucun impact sur sa recommandation. À l’étape suivante du processus, à l’issue des présentations en séance plénière évaluées à chaud par tous les BA présents, les résultats obtenus font ressortir que les projets validés pour un financement sont ceux pour lesquels les BA ont fait une évaluation très positive de l’avantage concurrentiel des projets ainsi que de la confiance que leur inspirent les entrepreneurs. Quand on analyse les résultats obtenus aux deux étapes de l’étude, on se rend compte que la confiance portée aux entrepreneurs est importante pour les BA tout au long du processus de sélection des projets et donc peut être considérée comme un critère « stable » ou « incontournable ». Ainsi, dès que la confiance entre les BA et les entrepreneurs se rompt, le réseau de BA élimine systématiquement le projet. Alors qu’au stade de présélection les instructeurs exigent de tout projet d’être porté par des entrepreneurs qui ont des compétences managériales (un bon Jockey), tout en ayant simultanément un plan d’affaires qui paraît crédible (un bon Horse), à l’issue des pitchs, les BA accordent plutôt une importance capitale à l’avantage concurrentiel des projets et donc à la stratégie de marché de la start-up. Ceci pourrait signifier que les BA font confiance au travail réalisé par les instructeurs qui ont bien évalué en amont les compétences managériales des entrepreneurs ainsi que le plan d’affaires des projets, les instructeurs ayant généralement beaucoup d’expérience en matière d’investissement et connaissant bien les secteurs d’activité des projets. Comme les instructeurs ont réalisé ce premier filtre à la présélection, au moment des présentations en plénière les BA sont à la recherche de projets qui ont un fort avantage concurrentiel. À ce stade, les BA espèrent dénicher des projets qui présentent une singularité déterminante, dans l’espoir d’investir dans une start-up qui deviendra un jour un exemple de réussite.
Notre travail sur les réseaux structurés de BA est innovant à deux titres, d’une part, nous analysons les facteurs qui pourraient expliquer les décisions des instructeurs, les BA chargés d’étudier les start-up, au stade de présélection des projets et, d’autre part, nous considérons l’évolution des critères d’investissement des BA à deux stades successifs du processus de sélection avec des données réelles issues des évaluations à chaud des BA. Il est intéressant d’analyser les facteurs qui expliquent la décision des instructeurs de recommander le passage en plénière des projets étudiés ou leur rejet immédiat par les réseaux de BA, dans la mesure où les entrepreneurs qui n’ont pas l’opportunité de faire leur pitch devant tous les BA en séance plénière n’ont aucune chance d’obtenir un financement par le réseau de BA. Dans la littérature existante, il a été prouvé que l’avis de l’instructeur au stade de présélection des projets est un élément important dans la décision de financement des investisseurs (Harrison, Dibben et Mason, 1997). Cependant, les facteurs qui expliquent la décision de l’instructeur n’ont pas été étudiés dans la littérature et notre étude apporte une contribution significative dans ce sens. Par ailleurs, le fait d’utiliser les évaluations réelles à chaud des BA aux pitchs des entrepreneurs dans le but d’expliquer leur décision d’investissement finale nous a permis de pallier les limites des études antérieures qui ont utilisé des questionnaires rétrospectifs remplis après le financement (Shepherd et Zacharakis, 1999). Sur cet aspect, la contribution de notre étude est d’ordre méthodologique.
Les résultats de notre étude montrent qu’au stade de la présélection, les instructeurs exigent de tout projet d’être porté par des entrepreneurs qui disposent de compétences managériales tout en présentant simultanément un plan d’affaires qui paraît crédible alors qu’à l’issue des pitchs, les BA portent plus particulièrement leur attention sur l’avantage concurrentiel des projets. Par ailleurs, nos résultats font ressortir que dans leur prise de décision, la confiance qu’inspirent les entrepreneurs est importante aussi bien pour les instructeurs des projets au stade de présélection que pour les BA en séance plénière, mesurée par leurs évaluations à chaud des pitchs des entrepreneurs. Ainsi, d’un point de vue pratique, les résultats de notre étude peuvent aider les entrepreneurs à savoir s’ils sont prêts ou non à contacter un réseau structuré de BA pour demander un financement. En d’autres termes, à la lumière des résultats de notre étude, avant leur premier contact avec le réseau de BA, c’est-à-dire avant le stade de présélection, les entrepreneurs doivent s’interroger sur la crédibilité du plan d’affaires de leur projet, sur la confiance qu’ils sont susceptibles d’inspirer tout en paraissant disposer des compétences managériales requises par les investisseurs potentiels. S’ils passent avec succès la barrière de la présélection, à l’étape du pitch en séance plénière, les entrepreneurs doivent mettre en avant la singularité de leur projet. En résumé, les résultats de notre étude suggèrent que les entrepreneurs, notamment ceux qui sont jeunes ou inexpérimentés, ont intérêt à se faire aider voire accompagner (par des organismes privés ou au sein des incubateurs) à chaque étape de la sélection des projets par les BA afin d’inspirer confiance aux BA tout au long du processus de sélection et d’adapter leur discours à chaque stade pour éviter l’élimination. Enfin, il n’est pas utile pour les entrepreneurs de s’appesantir sur leur capital social, car la décision des BA ne semble pas dépendre de ce critère.
Dans cette étude, nous utilisons des données issues d’un consortium de réseaux structurés et généralistes de BA majoritairement masculins dans lesquels les femmes BA ne représentent que 9 % des membres. On constate que les réseaux de BA thématiques (biotechnologies, musique, etc.) ou principalement féminins se développent de plus en plus. Cela peut entraîner une limite de notre étude dans la mesure où la généralisation de nos résultats dans ces contextes particuliers doit être confirmée. Des études complémentaires pourraient être menées pour généraliser nos résultats à d’autres réseaux structurés ou dans des réseaux de BA féminins, thématiques ou organisés en sociétés d’investissement pour y examiner le processus et les critères de sélection.
Appendices
Annexe
Annexe 1. Questionnaire proposé aux BA instructeurs lors de la phase d’instruction dite « fiche projet instruit »
Annexe 2. Questionnaire proposé aux BA lors de la séance plénière
Notes biographiques
Annie Bellier est maître de conférences, habilitée à diriger des recherches, ingénieure, responsable de la chaire gestion des risques et financement des PME. Elle s’intéresse au rationnement de crédit des PME, aux indicateurs de détection précoce de la défaillance des PME.
Abdoulkarim Idi Cheffou est docteur ès sciences de gestion de l’Université Paris Dauphine. Il s’intéresse à la finance entrepreneuriale, aux marchés financiers ; a publié des articles dans Journal of Financial Markets, Revue management & avenir, Applied Economics, Bankers, Markets & Investors.
Note
-
[1]
Cette recherche a été conduite dans le cadre du projet LabEx MME-DII (ANR11-LBX-0023-01).
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