Depuis le pic de faillites qui a frappé l’ensemble des pays de l’OCDE en 2009, le nombre d’entreprises qui disparaissent annuellement reste à un niveau élevé. Tous les secteurs et toutes les tailles d’entreprise sont concernés par ce risque de disparition accru. Les disparitions de groupes industriels qui ont défrayé les chroniques constituent la partie la plus visible de ce phénomène, mais, derrière ces affaires retentissantes, ce sont tous les ans plusieurs milliers de PME et, avec elles, des dizaines de milliers d’emplois qui disparaissent. S’il est difficile d’estimer précisément le nombre d’emplois détruits par les liquidations judiciaires et les cessions d’éléments d’actif, les analystes s’accordent à considérer que le coût économique, social et personnel de la fermeture d’entreprises est exceptionnellement élevé et mérite d’être pris en considération pour mieux être traité. Cette préoccupation n’est pas nouvelle. La défaillance d’entreprise suscite en effet l’intérêt de praticiens et de chercheurs aux profils et domaines de recherche variés dès le début du xixe siècle (Hautcoeur et Levratto, 2010, 2018). Encouragés principalement par l’accélération du phénomène qui a suivi la crise des années trente, ils font de l’échec de l’entreprise un champ d’investigation à part entière (Guilhot, 2000). Riche de plusieurs centaines de contributions qui continuent d’être publiées annuellement, la défaillance demeure un champ de recherche fertile, d’autant plus que le nombre de disparitions d’entreprises connaît une augmentation remarquable au cours de la dernière décennie. Ses liens étroits avec la création d’entreprises et l’entrepreneuriat sont également l’objet d’une attention particulière (Eklund, Levratto et Ramello, 2018) dans la mesure où les possibilités de survie et les modalités de clôture d’une activité peuvent influencer d’une part les décisions d’entrepreneurs potentiels et de l’autre les choix de financement d’éventuels apporteurs de ressources financières. Située à la frontière entre la finance d’entreprise, la statistique, la gestion et le droit, la défaillance d’entreprise est un objet d’analyse pluridisciplinaire. Elle admet par conséquent plusieurs acceptions difficilement compatibles avec une caractérisation partagée par tous (Levratto, 2012). D’un point de vue juridique, la défaillance est définie sur la base de sa conformité, à un moment donné, avec les critères légaux retenus par les différents législateurs pour déterminer ou non une situation de faillite légale de l’entreprise. Si cette acception répond aux objectifs des juges, son utilisation d’un point de vue entrepreneurial a fait l’objet de critiques, car jugée trop restrictive. Balcaen et Ooghe (2006) déplorent surtout le caractère arbitraire d’une définition purement juridique qui ne permet d’aboutir, selon eux, qu’à une classification artificielle des entreprises en deux catégories. D’une part, parce qu’il existerait des cas où l’entreprise peut se retrouver en procédure collective sans pour autant présenter les symptômes d’une véritable défaillance et, d’autre part, parce que la classification dichotomique des entreprises ignore le fait que la faillite ne représente que l’aboutissement d’un processus plus ou moins long de défaillance. D’autres formes plus générales d’échec ont alors été évoquées. Des modèles ont été élaborés afin de modéliser des situations comme le défaut de paiement, la détresse financière, le non-versement de dividendes. Progressivement, économistes et gestionnaires ont assimilé la défaillance à un processus progressif de dégradation des performances et des capacités, pouvant ou non, entraîner l’entreprise à faire l’objet d’un traitement judiciaire (Charreaux, 1996). La cessation d’une entreprise est alors considérée comme le résultat d’un processus progressif. Il est caractérisé par le fait que, durant tout son déroulement, l’entreprise se trouve dans l’incapacité de répondre de manière régulière aux exigences formulées à son endroit par ses divers partenaires. En effet, les problèmes que peut rencontrer une entreprise doivent s’analyser en continu (Levratto, 2011) ; l’échec commence par de petites difficultés qui …
Appendices
Références
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