Chronique sur le métier de chercheur

Comment préparer un bon rapport d’évaluation : quelques trucs du métier…[Record]

  • Denis A. Grégoire

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  • Denis A. Grégoire
    HEC Montréal

L’évaluation de manuscrits pour des revues savantes est une tâche ingrate, ardue, nécessairement anonyme, largement solitaire, le plus souvent gratuite et pas du tout reconnue. Ça prend un temps fou. On ne sait pas toujours par où commencer ni où arrêter (ou comment). Surtout, on se demande parfois si ce ne serait pas un peu prétentieux de dire à nos collègues que ce qu’ils/elles font n’est pas nécessairement bon ou intéressant, en quoi et pourquoi. Pire encore, on a souvent mieux à faire pour l’avancement de nos propres projets que de passer du temps à suggérer à d’autres comment ils pourraient faire mieux. Et, fréquemment, on sait très bien que ce qu’on suggère de faire exigera beaucoup de temps et d’efforts… Bon an mal an, je fais plus d’une quarantaine d’évaluations de manuscrits pour différentes revues savantes. J’en fais aussi quelques-unes à titre amical pour des collègues, sans compter l’évaluation de demandes de bourse et de travaux de doctorants ou la critique de mes propres écrits, seul ou avec des collègues. Plus souvent qu’autrement, je dois passer une partie de mes fins de semaine sur ce genre de rapports – souvent tôt le matin, avant que les enfants soient levés… Une explication psychosociale pourrait être que je suis un type A à tendances sadomasochistes, une sorte de teigneux qui veut ventiler ses frustrations sur d’autres ou que, comme pourraient le dire mes proches, j’aime tellement chialer que l’évaluation de manuscrits constitue une tâche toute désignée pour un type comme moi… (rires). Pourtant, de mon point de vue, les raisons sont beaucoup plus simples et naturelles : je le fais parce que c’est mon travail, j’y trouve mon compte et oui, j’aime ça ! D’une part, je considère sincèrement qu’évaluer des manuscrits fait partie de mon métier de chercheur. Chaque fois que je soumets un article à une revue savante, je reçois les commentaires de deux, trois, parfois quatre autres chercheurs ou rédacteurs en chef. À de très rares exceptions près, les commentaires reçus sont exhaustifs, détaillés, éclairants, précis et immensément utiles pour la suite. Dans la mesure où je veux publier dans ces revues, j’estime donc qu’il est de mon devoir de mettre mon épaule à la roue du système d’évaluation par les pairs. C’est une simple question de réciprocité. D’autre part, l’évaluation de manuscrits m’offre un véhicule privilégié pour suivre les plus récents développements dans mes champs d’intérêt et, surtout, pour continuer mes apprentissages et mon développement professionnel. Par exemple, c’est souvent à travers l’évaluation de manuscrits que j’ai pu découvrir que tel ou tel texte pourrait avoir d’importantes implications pour mes propres travaux. Plus encore, l’évaluation de manuscrits m’a beaucoup appris sur l’artisanat de l’écriture. Ma collègue Melissa Cardon (Pace University) a d’ailleurs une très belle façon d’évoquer cet apprentissage quand elle discute de ces questions auprès d’étudiants de doctorat et qu’elle dit : « L’évaluation de manuscrits m’a enseigné ce qui fonctionne dans ce que les autres font – et ce qui ne fonctionne pas ! » Alors que la seule lecture des revues savantes ne permet de voir que les produits finis, l’évaluation de manuscrits offre une vitrine unique pour comparer des travaux présentant différents degrés d’aboutissement. Même que, d’une manière un peu paradoxale, l’évaluation de différents travaux peut permettre de gagner en confiance dans ses propres habiletés à écrire. Après tout, les textes envoyés pour évaluation ne sont généralement pas parfaits du premier jet ! Dans les meilleurs cas, l’évaluation de différentes versions d’un même projet permettra d’apprécier les efforts nécessaires pour transformer un manuscrit prometteur en article publié de haut calibre. Et dans les …

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