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La passion, c’est ce qui anime ce collectif québécois. Passion, pour leur discipline, l’entrepreneuriat, passion pour leur action d’entrepreneurs, et passion de transmettre leur flamme au plus grand nombre grâce à ce livre.
Cet ouvrage collectif, édité sous la direction de Cynthia A. Sheehan, Entrepreneure et Chargée d’enseignement à la FSA de Laval, réunit autour de 13 chapitres, des enseignants et des chercheurs en entrepreneuriat, de l’Université Laval, de l’Université du Québec à Trois-Rivières et de la TELUQ. La passion étant un bon prérequis de la pédagogie, l’ouvrage est naturellement destiné à un public étudiant en attente de sensibilisation et d’initiation à l’entrepreneuriat, de connaissances élémentaires pour pouvoir penser un projet. Ainsi, chacun des chapitres aborde de manière simple un thème clé de la démarche entrepreneuriale. Les auteurs présentent les explications de base permettant à un néophyte de comprendre la notion développée. Celle-ci est systématiquement illustrée d’un témoignage court, illustratif et accrocheur. En outre, en fin de chaque chapitre, des questions de révisions et des exercices sont proposés au lecteur. Certains chapitres (pas tous et on peut le regretter) proposent un compagnon web où le lecteur pourra retrouver quelques exercices et les liens hypertextes proposés dans l’ouvrage.
L’ouvrage est organisé autour de quatre sections. La première présente l’entrepreneur, son projet et son environnement. La deuxième section traite du passage de l’idée au projet. La troisième section expose les étapes permettant d’inscrire un projet dans la réalité. Enfin, la quatrième section aborde la question des réseaux d’accompagnement.
Yvon Gasse présente la figure complexe de l’entrepreneur dans le chapitre d’ouverture. Tout d’abord l’entrepreneur apparait comme un composant, central, du processus d’entreprendre au même titre que les idées, les savoir-faire, les plans et ressources. Ensuite, l’auteur centre son propos sur l’individu entrepreneur. Le chapitre définit, en termes simples, quelques notions clés et détaille les caractéristiques (motivations, aptitudes, attitudes) attendues de l’entrepreneur. L’auteur interroge le lecteur ou le pousse à s’interroger sur sa volonté et ses capacités : possédez-vous les capacités requises ? Pourrais-je devenir un bon patron ? La (longue) liste des caractéristiques à avoir, la volonté de mettre le curseur sur les exigences et les difficultés de l’action entrepreneuriale visent à donner un aperçu réaliste de la tâche, mais risquent de faire de l’entrepreneur une sorte de héros inaccessible pour l’étudiant néophyte.
Dans le chapitre suivant, M. Tremblay et Y. Gasse replacent l’entrepreneur au coeur de son environnement, terreau nourricier nécessaire à l’acte d’entreprendre. L’environnement va rendre le projet désirable (rôles des modèles et de la culture) et faisable (rôles des ressources accessibles, du capital social et intellectuel, des externalités positives). Les auteurs rappellent que l’acte d’entreprendre, à l’instar d’une réaction chimique, va dépendre des conditions de l’expérience et donc de la présence d’un catalyseur (déclencheur, facilitateur du processus) ou d’inhibiteurs. Si les auteurs montrent que l’entrepreneur est le fruit de son environnement, ils concluent leur chapitre en rappelant que l’environnement peut lui-même être façonné pour être rendu propice à la démarche entrepreneuriale, montrant ainsi en filigrane que l’environnement est à la fois déterminant dans la démarche entrepreneuriale, mais est aussi le résultat d’une démarche entrepreneuriale, à un autre niveau qu’on qualifiera de politique.
La section suivante nous invite à passer de l’idée au projet en trois points. D’abord, C. Carrier, M. Tremblay et C. Contreras nous proposent d’explorer les modalités de la créativité, susceptibles de produire une bonne idée. S. Laferté et D. Robichaud complètent ensuite le propos et introduisent la notion d’occasion d’affaires faisant ainsi le lien avec la section précédente (l’idée, l’entrepreneur et l’environnement marché). Dans le troisième chapitre de la section, ils exposent les étapes de la transformation de l’idée en occasion d’affaires.
Cette section permet au novice de découvrir les techniques de créativité individuelles et collectives, offrant ainsi au lecteur à la fois les connaissances élémentaires relatives à la notion de créativité, mais aussi des éléments de techniques (questions à se poser, attitudes à avoir) pour stimuler sa capacité à développer des idées nouvelles. Le chapitre 3 dédramatise le processus créatif en insistant, à juste titre, sur le fait que tout un chacun peut être créatif et avoir des idées. Les chapitres 4 et 5 relient les notions d’idée, d’entrepreneur et de marché. Car là réside une de missions clé de l’entrepreneur : vérifier qu’il existe un marché où son idée sera susceptible d’exister et, ainsi, muter en occasion d’affaires. Les notions de plaisir et de motivation de l’entrepreneur d’une part et, de besoins du marché, d’autre part, sont mises en exergue. On pourra peut-être regretter que la pyramide de Maslow dont la dimension scientifique reste discutable soit aussi largement mobilisée. Le chapitre 5 propose de manière très simplifiée (dans le meilleur sens du terme) une démarche d’analyse du marché potentiel en quatre points :
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exprimer sa vision du projet, c’est-à-dire proposer la représentation de son idée au coeur du marché visé ;
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analyser l’environnement (les auteurs introduisent les cinq forces de Porter ou l’analyse PESTEL) ;
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évaluer le niveau de demande et donc le volume et la valeur potentiels du marché,
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et enfin, s’interroger sur sa capacité à proposer une offre cohérente (faisabilité technique de l’offre et besoin de financement).
À l’issue de cette section, le lecteur sera rassuré sur sa capacité à avoir une idée et sensibilisé au chemin qu’il reste à parcourir avant d’en faire une occasion d’affaires.
Une fois l’idée trouvée et façonnée en occasion d’affaires, le projet devient plausible. Reste à l’insérer dans le réel. C’est là toute l’ambition de la troisième section de l’ouvrage. Celle-ci s’ouvre sur les « avenues entrepreneuriales », c’est-à-dire sur les différents modes d’accès qui s’offrent au candidat entrepreneur, leurs contraintes, leurs avantages, les prérequis qu’ils supposent, les enjeux qu’ils font peser sur l’entrepreneur. C.A. Sheehan, S. Laferté et D. Robichaud exposent ainsi la création ex nihilo, la relève, la franchise et diverses formes juridiques que peut choisir un entrepreneur. Les notions de contrôle, de risque et de partage des bénéfices sont notamment discutées.
Dans le chapitre 7, S. Veilleux, traite de manière spécifique du marketing entrepreneurial et en ce sens, vient compléter le chapitre 5, au risque parfois de le recouper (PESTEL, l’analyse sectorielle de Porter). L’auteure montre ainsi le caractère fortement informel de la démarche, mais néanmoins méthodique et valorisable. L’intérêt du chapitre est d’insister sur la nécessité, pour un entrepreneur, de bien délimiter le marché, d’identifier ses caractéristiques afin de le segmenter, pour pouvoir ensuite viser une cible et se positionner à partir d’un marketing mix cohérent. Le chapitre 8, proposé par Y. Groleau aborde un autre point clé, et souvent épineux pour le non-initié : le volet financier du projet. La lecture du chapitre permet de découvrir en ouverture, en termes très accessibles, les notions d’utilité, de risque, de rendement et leur lien. Si le chapitre aborde des notions dont l’intérêt est indéniable dans l’absolu, elles risquent peut-être de paraitre éloignées des préoccupations plus opérationnelles de l’entrepreneur en devenir. Par la suite, toutefois, l’auteur explique comment évaluer son patrimoine et sa capacité d’endettement et décortique les modalités de calcul d’un résultat net. Il propose à cette fin des outils simples d’utilisation. L’auteur termine sur la distinction entre liquidités et rentabilité, distinction qui aurait peut-être mérité d’être opérationnalisée et approfondie. Le chapitre 9, rédigé par la directrice de l’ouvrage, C. A. Sheehan, présente « le moment de vérité » que constitue la présentation écrite et/ou orale de son projet aux parties prenantes potentielles (banquiers, investisseurs, etc.). Délibérément tourné vers l’opérationnel, le chapitre s’applique la devise que doit suivre un entrepreneur pour communiquer : « être clair, concis et convaincant ». Il expose les questions à se poser pour être perçu favorablement par son auditoire, les modalités pratiques à suivre pour communiquer selon le public concerné et le format des présentations. Le dernier chapitre de cette section est consacré au plan d’affaires. S. Chartier en présente les tenants et les aboutissants. Il insiste sur la fonction du plan et sur les rubriques qui doivent le composer, sans rentrer dans le détail technique des contenus, mais offrant ainsi un lien avec différents chapitres de l’ouvrage (l’environnement, le marché, le financement).
La dernière section invite le lecteur à prendre connaissance d’une ressource essentielle lors d’une démarche entrepreneuriale : la ressource réseau. M.-J. Drapeau expose les différents réseaux à disposition d’un entrepreneur (réseaux personnels, d’affaires, sociaux ou stratégiques) ainsi que la dynamique de leur utilisation. L’auteur utilise une formule particulièrement à propos pour tirer pleinement avantage d’un réseau : « ce qui compte (…) ce n’est plus qui vous connaissez, mais plutôt qui vous connait ». Le réseau est un lieu d’échange où on donne avant de recevoir comme le rappellent les 10 commandements du réseautage fournis en fin de chapitre. S. Chartier, après un aperçu rapide des diverses formes de soutien à l’entrepreneur, présente plus en profondeur, le rôle en matière d’accompagnement du conseiller en création d’entreprises (à ne pas confondre avec le consultant). Le lecteur trouvera en fin de chapitre les liens lui permettant de contacter les différentes institutions conseillères qui s’offrent à lui et découvrir leurs spécificités. La section se termine sur les écrits d’E. St-Jean et la présentation de la forme particulière et efficace d’accompagnement qu’est le mentorat. L’auteur montre qu’au-delà des avantages opérationnels du mentorat (coût, flexibilité, simplicité, formalisme limité), celui-ci revêt un caractère réellement stratégique pour le néo-entrepreneur : pour son entreprise (améliorer la vision, aider à la reconnaissance d’occasion d’affaires) comme pour lui-même (renforcer la motivation, assurer un soutien). L’auteur conclut sur les conditions de succès de la relation de couple mentor/mentoré et met en exergue, au-delà des savoir-faire techniques, l’importance de la dimension humaine.
En suivant le processus naturel du cheminement de l’entrepreneur : de l’individu à l’idée, de l’idée au projet, du projet à sa réalisation, l’ouvrage offre un fil conducteur facile à suivre. L’ouvrage évite les écueils d’une érudition excessive au profit d’un discours simple et clair. Il assure ainsi une lecture accessible, d’initiation, relative aux exigences de la démarche entrepreneuriale. Largement illustré d’anecdotes (plus que de cas à proprement parler) en fin de chaque chapitre, il permet au lecteur de se projeter. Au-delà de cette volonté bien légitime de séduire le lecteur, les exemples surlignent à propos et de manière attractive les éléments développés dans la partie concernée.
Entreprendre. La passion de créer et d’agir ne se présente pas comme un ouvrage technique ou théorique, mais bien initiatique. Il vise à sensibiliser et convaincre que le projet d’entreprendre est possible, si le désir et la capacité à mobiliser les moyens adéquats sont présents. Si l’ouvrage n’apporte pas toutes les réponses au défi d’entreprendre, il a le mérite de poser les bonnes questions au candidat entrepreneur et d’apporter un premier éclairage à celui ou celle qui s’envisagerait d’entreprendre.