Depuis un certain temps, les références à la PME se multiplient sur la place publique et les élus y voient de plus en plus une panacée aux problèmes d’emploi, de développement régional et d’ajustement. Quel changement de perspective, pour peu que l’on remonte dans le temps ! Dans la transition d’un mode de vie rurale à un monde urbain et industrialisé, les petites unités de production, agricoles ou autres, étaient généralement présentées comme une cause des problèmes d’ajustement et maintenant, elles seraient un remède. Une telle comparaison demande des nuances et le texte de Nadine Levratto en fait plusieurs ; par exemple, l’objectif premier des aides et avantages accordés aux PME est « une finalité d’intérêt général dont l’entreprise n’est qu’un vecteur ». Et, à moins de supposer que toute entreprise peut ou a besoin de profiter de ressources publiques, « la question du découpage de ce gigantesque ensemble que constituent les PME doit de nouveau être posée », il faut ramener le débat « au sujet de la définition de la PME ». La première partie expose différentes approches pour définir la PME. L’auteur en utilise quatre : taille et indépendance du capital, nombre de salariés, spécificités organisationnelles et perspective historique ; la deuxième approche est sous-jacente à la première et se distingue par l’accent qu’elle met sur l’emploi. La multitude d’approches a certains avantages en termes d’adaptabilité du cadre d’analyse à la question de recherche. Mais cela devient un désavantage quand des critères objectifs et opérationnels deviennent nécessaires pour orienter l’allocation des aides de l’État. L’approche des spécificités organisationnelles explore les circonstances pouvant entourer et différencier l’activité des PME : l’appartenance à un groupe ou un réseau, le lien avec le dirigeant, la nature du projet de création de valeur, la nature du couple produit-marché et les relations interfirmes. Il s’en suit une représentation des univers possibles de la PME à partir des axes « produit standardisé – produit spécialisé » et « produit générique – produit dédié » ; cette construction distingue l’univers de la commande, de l’univers de l’adaptation, de l’univers de la grande série et de l’univers de la création. La discussion des spécificités organisationnelles se termine avec des considérations opposant la maximisation des profits et dividendes au processus de survie et de croissance qui caractériserait mieux la PME. Les chapitres 2 et 3 de la première partie présentent des statistiques sur l’effectif de PME en nombres absolus et relatifs et discutent le choix de mesure, l’établissement versus l’entreprise. Une attention spéciale est accordée aux catégories juridiques d’entreprises et à leurs attributs ; outre les regroupements sectoriels, l’effectif des PME est distribué selon le degré d’autonomie. Cela est suivi de considérations dynamiques sur les créations et les cessions d’entreprises, d’observations sur la stabilité du parc d’entreprises et de comparaisons internationales. La deuxième partie traite successivement de l’emploi associé aux PME, de leur financement et de leur contribution à la richesse des nations. Le chapitre sur l’emploi présente un tour d’horizon assez complet des thèmes attendus : caractéristiques des emplois créés dans les PME dont une productivité plus faible et un taux de roulement plus élevé, avec en toile de fond le soutien public à la création d’entreprises et le « toilettage du droit du travail » comme moyen de lutter contre le chômage. La question à savoir si les PME ont suffisamment accès à l’épargne pour réaliser leur potentiel de croissance a fait l’objet d’écrits depuis près d’un demi-siècle ; le chapitre sur le financement retrace le fil conducteur de ces écrits : la perspective macroéconomique des débuts avec Ed Kane, Malkiel et la politique …
Nadine Levratto, Les PME. Définition, rôle économique et politiques publiques, Bruxelles, De Boeck Université, 2009, 191 p.[Record]
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Benoît-Mario Papillon
Professeur, Université du Québec à Trois-Rivières