Abstracts
Résumé
Au tournant du siècle, Montréal est traversée, comme la plupart des grandes villes nord-américaines, par un mouvement réformiste dirigé par la bourgeoisie, dont l'un des principaux objectifs est d'introduire dans l'administration municipale un mode de gestion de type bureaucratique, tel qu'appliqué dans les grandes entreprises. ¡l s'agit, essentiellement, de soumettre le gouvernement municipal aux règles de l'économie, de l'efficacité et de la rationalité grâce à la centralisation des pouvoirs administratifs au sein d'un "bureau de contrôle", organisme non-partisan fonctionnant indépendam- ment du Conseil de Ville qui abrite la "machine politique" génératrice de corruption.
Or les réformistes désirent aussi introduire ce mode de gestion dans le système éducatif. À Montréal, les promoteurs de la centralisation scolaire se confondent ainsi, dans une large mesure, avec les partisans de la réforme municipale, regroupés au sein du Comité des citoyens. En 1909, devant la Commission royale d'enquête sur les écoles catholiques de Montréal, ils revendiqueront la fusion de toutes les commissions sco- laires catholiques de la métropole, faisant valoir les nombreux avantages de cette réforme: uniformisation de la taxe scolaire, administration plus efficace et moins coûteuse, meilleure classification des écoles, établissement d'écoles supérieures accueillant les élèves ayant complété le cours primaire actuel. Les porte-parole du mouvement ouvrier réclament aussi la centralisation, mesure qui permettra, selon eux, d'établir l'uniformité des livres sur l'ensemble du territoire montréalais et de réduire, par le fait même, le coût des manuels scolaires. Les partisans de la centrali- sation se heurtent toutefois à Vopposition de l'ensemble du clergé, qui tient à conserver le cadre paroissial de la commission scolaire, au sein duquel il exerce une influence considérable.
En 1916, le gouvernement libéral de Lomer Gouin vient trancher le débat en adoptant une loi qui donne largement satisfaction aux promoteurs de la centralisation tout en offrant des garanties au clergé montréalais. Celle-ci fusionne la Commission des Écoles catholiques de Montréal avec vingt-trois municipalités scolaires indépen- dantes. Elle confie Vadministration financière de la nouvelle commission scolaire à un bureau central de sept membres, alors que quatre commissions de district adminis- treront les écoles au point de vue pédagogique. Cette réforme aboutit à un nouveau partage des pouvoirs entre clercs et laïcs. La présidence des commissions de district est confiée aux premiers, tandis que les seconds se retrouvent majoritaires au bureau central. De plus, la présidence de la CECM reviendra, en 1919, à un partisan de la centralisation, le juge Eugène Lafontaine, ce qui témoigne de la montée du pouvoir laïc au sein du système scolaire public montréalais au début du XXe siècle.
Abstract
During the early years of the twentieth century, Montreal - like many cities all over North America - was seized by a reform movement directed by an activist middle-class group, one of whose objectives was to introduce business methods, such as those developed in the great businesses of the period, to the management of municipalities. Henceforth, municipalities were to be governed according to the principles of econo- my, efficiency and rationality. This entailed the setting up of boards of control, nonpartisan bodies operating independently from the city council which was thought to foster machine politics and corruption.
Reformers also sought to introduce this style of management to educational admin- istration. In Montreal, the advocates of educational centralization allied themselves with supporters of municipal reform through the Citizens' Committee. In 1909, before the Royal Commission on the Catholic Schools of Montreal, they advocated the uni- fication of all the Catholic school boards in the city, citing the following advantages: uniformity in the tax rate, cheaper and more efficient administration of the educational system, better assessment of individual schools, and the encouragement of higher-level institutions for those students who had successfully completed the primary curriculum. Centralization also entailed a uniform course of study throughout the city, something which would lower textbook costs. The reformers faced intense opposition from the clergy, who sought to preserve local control of school boards, thereby protecting their considerable influence in school matters.
In 1916 the Liberal government of Lomer Gouin settled this dispute by passing a law conceding centralization to the reformers while offering protective guarantees to the clergy. Twenty-three independent school boards were united into a single Catholic School Commission of Montreal. Financial administration was placed in the hands of a seven-member central office, while pedagogical matters were supervised by four district committees. This entailed a redistribution of powers between the clergy and the laity. Control of the district committees rested largely with the former, while financial administration was now largely in lay hands. Furthermore, the chairmanship of the centralized board was given in 1919 to a supporter of unification, Judge Eugène Lafontaine, an act which assured the dominance of lay over clerical control of the public school system in Montreal in the years after the First World War.