Abstracts
Résumés
L'étude des croyances et attitudes religieuses des ruraux français du début de l'époque moderne n'est pas qu'utile aux chercheurs intéressés à la religion populaire; elle l'est aussi à ceux qui se préoccupent de retracer l'implantation et l'application des réformes tridentines. Certaines perceptions sont ici implicites. Ainsi, selon certains, la majorité des Français pré-tridentins auraient été à peine christianisés, leur foi ou croyance ayant été un curieux mélange de traditions médiévales et de superstitions païennes. Ils s'appuient pour ce dire sur les témoignages des prêtres tridentins qui, l'auteur nous le rappelle, avaient fréquenté les séminaires et étaient majoritairement des urbains. D'autres ont plutôt perçu la vie religieuse dans les campagnes françaises comme ayant été traditionnelle et étant restée inchangée jusqu'à l'imposition des nonnes tridentines par ce nouveau clergé issu de la réforme.
Les circonstances ayant été telles, il est évident que le clergé et le peuple de l'époque aient été fort divisés. Cependant, cette division ne fut peut-être pas tant le résultat de l'insuffisance de la christianisation du peuple que celui de la nouvelle orientation théologique d'un clergé paroissial mieux formé qu'avant et qui perçut l'état de la christianisation comme étant insuffisant. C'est là la théorie que l'auteur veut vérifier à travers l'étude de 539 testaments provenant des Archives départementales de l'Aube et s'échelonnant des années 1500 à 1650.
Après avoir décrit le corpus des testaments et souligné les problèmes inhérents à la source, l'auteur en analyse le contenu en faisant ressortir ce qui a trait à la pratique et à la croyance religieuse: dévotions, appartenance aux confréries, attachement aux chapelles de procession, dons à l'Eglise, à la paroisse et aux pauvres, demandes de prières et de messes, coutume de la "trentaine" et de "l'année", désir d'être enterré sous l'église et préoccupation du salut. Toutes ces manifestations varient évidemment dans l'espace et le temps mais elles n'en témoignent pas moins de croyances religieuses véritables et de pratiques qui étaient tout à fait orthodoxes à l'époque. Le clergé tridentin l'eût-il compris ainsi qu'il n'aurait pas mis fin à des traditions séculaires et amené la religion à être perçue comme étant imposée d'en haut plutôt qu'émanant d'une culture profondément ressentie. Voire, précise l'auteur, la foi qui a inspiré les testaments de 1500 à 1650 eût-elle survécue que la déchristianisation qui survint plus tard n'aurait été ni aussi facile ni aussi répandue.
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