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Cet ouvrage de Rune Frederiksen (directeur de l’Institut Danois à Athènes) est le produit de sa dissertation de doctorat de 2004, abordant les fortifications des cités archaïques grecques. Ce livre rassemble les preuves de vestiges défensifs provenant de sources autant philologiques qu’archéologiques d’établissements et de cités datant de 900 à 480 av. J.-C. À l’aide de son catalogue fort de 132 sites, Frederiksen essaie de prouver que les cités étaient majoritairement fortifiées dès l’époque archaïque. L’autre objectif majeur est de tenter de comprendre quel était le rôle des murs défensifs dans le développement des premières poleis grecques.
Le chapitre 1 est composé d’une courte introduction au volume regroupant les objectifs de cette étude, l’histoire des recherches, les sources abordées (vestiges) et l’organisation du livre. Dans le chapitre 2, « Types of fortifications », Frederiksen décrit l’étendue des types de fortification en commençant par celles se référant aux poleis et établissements, soit les murailles des centres urbains, des ports, des établissements secondaires et des fermes privées. Il enchaîne avec les défenses territoriales et panhelléniques (forteresses, tours et défenses régionales) et conclut le chapitre avec une discussion sur la différence entre un groupe d’habitats (Nucleated settlements) et un centre urbain. Dans son chapitre 3, l’auteur met en contexte le terme grec « Teichos » (mur) qui peut avoir différentes significations, mais dans le cadre de cette étude, ce mot est principalement utilisé pour désigner une muraille de cité, un fort ou toutes fortifications entourant un établissement. Il termine ce chapitre en parcourant les différentes attestations de fortifications dans les sources anciennes, qu’elles soient directes ou indirectes, et il aborde les représentations de fortification dans l’art visuel, principalement la poterie. Le chapitre 4 est consacré à la préservation des fortifications urbaines. Frederiksen expose une panoplie d’évènements ayant pu altérer les enceintes, tels que : la destruction à différentes époques, la destruction causée par la guerre, par l’expansion ou la reconstruction et la destruction naturelle. Dans les chapitres 5 et 6, l’auteur sollicite une approche plus technique, contextuelle et stylistique des fortifications archaïques. Frederiksen revient sur les différents types de fortification urbaine et sur les éléments qui les composent, comme les tours, les portes, les murs et les bastions. La partie sur la datation est séparée en trois volets, soit un sur la datation grâce à l’archéologie, le deuxième consistant en une datation par les styles de maçonnerie (particulièrement le style lesbien), et finalement, la datation par les sources anciennes. Les deux derniers chapitres de l’ouvrage de Frederiksen consistent en un commentaire sur les analyses et les conclusions qu’il tire de son catalogue. De plus, il tente de répondre aux nombreuses questions qui se rattachent aux fortifications préclassiques. Dans le chapitre 7, la période à l’étude est séparée en sous-périodes permettant ainsi de constater l’évolution des fortifications du début de l’âge du fer jusqu’à la fin de l’époque archaïque [1]. La topographie des sites et les éléments architecturaux des enceintes sont les principaux éléments analysés. Le chapitre 8 aborde le sujet de la fréquence des sites fortifiés entre 900 et 480 av. J.-C., mais aussi la distribution de ces derniers sur le territoire grec. Finalement, le dernier volet de cet ouvrage est consacré au catalogue. Les sites y sont présentés en ordre alphabétique et, selon l’état de leurs vestiges, les thèmes suivants sont abordés : location, statut, construction, éléments des murs, datation, sources et bibliographie. De plus, chaque site est précédé d’une lettre qui indique la nature des preuves reliées aux vestiges (A. archéologiques, B. stylistique, C. sources anciennes).
Le livre de Frederiksen est un manuel qui rejoint principalement les spécialistes de l’architecture, les archéologues et les étudiants gradués s’intéressant aux fortifications. Cet ouvrage bien construit convient à ce public assez académique, et son catalogue est assurément un ajout très important pour l’étude des fortifications grecques. Les cartes, les tableaux, les images et les dessins sont à jour et accroissent grandement la compréhension des différents sites. Nous pouvons cependant nous questionner à savoir si ce catalogue est bel et bien complet. Les sites de Pergamos [2] et Argilos [3] par exemple, tous deux dans le nord de la Grèce, ont été datés de la fin de l’époque archaïque, mais ils ne figurent pas dans l’ouvrage de Frederiksen. La principale critique pouvant être faite est que Frederiksen respecte très peu le cadre temporel de son titre. Trop souvent, l’auteur sort de la période archaïque pour nous donner des exemples de l’époque classique ou hellénistique, périodes déjà bien connues des spécialistes des fortifications. Bien que ce livre soit une addition nécessaire à l’étude des fortifications, surtout grâce au catalogue, nous ne pouvons pas dire qu’il est concluant. Certes, il est un bon point de départ pour de nouvelles recherches, mais l’ouvrage de Frederiksen est surement prématuré vu notre manque actuel de vestiges et de connaissances sur les fortifications archaïques.
Appendices
Notes
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[1]
Ces sous-périodes sont les suivantes : les fortifications de début de l’Âge du Fer, les murailles du 7e siècle, les murailles du milieu de la période archaïque et celles de la fin de l’époque archaïque.
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[2]
Selon Hérodote (Hdt. VII. 112), Xerxès et son armée auraient croisé deux forteresses au sud du mont Pangée, et Pergamos aurait été l’une d’entre elles. Donc aux alentours de 480 av. J.-C., Pergamos était une place fortifiée.
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[3]
La fortification d’Argilos a été datée à l’aide d’évidences archéologiques. Voir Liampi, K. Argilos. A historical and numismatic study, Athens, Society for the Study of Numismatics and Economic History, 2005, p. 68, (Coll. « KERMA 1 ») ; Ouellet, K. « La fortification d’Argilos », dans Meditations on the diversity of the built environment in the Aegean basin: A colloquium in memory of Frederick E Winter (Athènes, juin 2012), Athens, Monographs of the Canadian Institute in Greece, p. 213-30.