Table ronde sur une parution récenteL’école historique de Québec. Une histoire intellectuelle, de François-Olivier Dorais (2022)[Record]

  • Éric Bédard,
  • Patrice Groulx,
  • Louise Bienvenue,
  • Jean Lamarre and
  • François-Olivier Dorais

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  • Éric Bédard
    Université TÉLUQ

  • Patrice Groulx
    Historien indépendant

  • Louise Bienvenue
    Université de Sherbooke

  • Jean Lamarre
    Fondation Maurice-Séguin

  • François-Olivier Dorais
    Université du Québec à Chicoutimi

Longtemps, l’historiographie a été un parent pauvre de notre discipline. L’article synthèse de Julien Goyette, Louise Bienvenue et Nicolas Devaux consacré à l’évolution de la Revue d’histoire de l’Amérique française depuis 1982 montrait récemment que l’historiographie n’avait pas beaucoup intéressé les historiens et historiennes de la génération issue du baby-boom. En annexe de leur article, un tableau dresse la liste des champs d’intérêt les plus populaires : l’historiographie, comme sous-champ autonome, n’y figure pas. Serge Gagnon, seul véritable historiographe de sa génération, peut-être parce qu’il ne trouvait pas, au sein de la discipline, un nombre suffisant d’interlocuteurs, a très tôt dans sa carrière négocié un virage vers l’histoire sociale et culturelle de l’Église et du clergé catholiques. Quant à Making History in Twentieth-Century Quebec, l’ouvrage de Ronald Rudin paru en 1997, il a davantage provoqué une querelle d’école que favorisé le développement de nouvelles recherches. C’est donc dans les marges que l’historiographie a continué d’intéresser chercheurs et chercheuses, parce qu’il fallait bien parfois proposer des bilans, justifier l’existence d’approches nouvelles ou discuter d’enjeux théoriques. En sociologie, Fernand Dumont a commis quelques travaux d’historiographie, lesquels montraient l’évolution de notre rapport au passé. Il n’est pas surprenant que ce soit lui qui ait dirigé la thèse de Jean Lamarre sur l’École de Montréal qui a donné lieu à la publication d’un livre ambitieux et important, certainement l’un des classiques en historiographie québécoise, avec les livres pionniers de Serge Gagnon. Depuis quelques années, l’historiographie est sortie des marges. Les thèses, articles et ouvrages sont si nombreux et si stimulants que François-Olivier Dorais et Daniel Poitras croient que nous serions en train de vivre un « moment historiographique ». Historiographe et théoricien de l’histoire, Patrick Noël plaide en faveur d’une autonomisation de cette sous-discipline, trop longtemps conscrite par des querelles d’école. Ayant codirigé, avec Julien Goyette, une première anthologie des réflexions sur l’histoire au Québec, je ne peux que me réjouir d’un tel développement car l’historiographie a beaucoup à dire sur les préoccupations du présent. Cela dit, cet intérêt marqué pour l’historiographie témoignerait-il d’un « contexte d’incertitude épistémique » ? Faudrait-il y voir le « symptôme d’une histoire de plus en plus coupée de la mémoire collective », voire un « repli sur le “passé intérieur” de la discipline, faute de visions assurées du devenir commun » ? Difficile de trancher car il faudra un certain temps avant de comprendre les ferments qui travaillent la conscience historienne de notre époque. Pour l’heure, ne boudons pas notre plaisir et voyons-y un sain désir de réflexivité au sein d’une pratique qui se fonde avant tout sur un travail empirique et patient dans les sources du passé. Dans ce grand chantier historiographique, nul doute que l’ouvrage important de François-Olivier Dorais sur l’école historique de Québec deviendra une référence incontournable. Avec les outils de l’histoire intellectuelle et les apports d’une sociologie de la connaissance qui a donné de très beaux fruits, Dorais se penche sur les trois figures marquantes de cette école, soit Marcel Trudel, Fernand Ouellet et Jean Hamelin. Comme ce travail ne peut qu’intéresser les praticiens de la discipline, j’ai proposé à trois chercheurs reconnus de discuter l’approche, les thèses et la démonstration proposées par Dorais. Je remercie les organisateurs du 75e Congrès de l’Institut d’histoire de l’Amérique française, tenu au Collège militaire royal de Saint-Jean, d’avoir permis à Patrice Groulx, Louise Bienvenue et Jean Lamarre de livrer leurs réflexions sur l’ouvrage à l’occasion d’une séance spéciale de ce congrès le 21 octobre 2023, et François-Olivier Dorais d’avoir accepté de réagir à leurs commentaires critiques, un exercice qui demande une certaine dose d’humilité. Mes remerciements …

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