Abstracts
Résumé
L’histoire ferroviaire du Québec demeure mal connue. Destinés au grand public quand ils n’émanent pas de la recherche anglophone, dominés d’ailleurs par l’histoire économique et politique, la plupart des travaux sur les chemins de fer québécois (et canadiens) disent très peu de choses de la vie ferroviaire complexe du 19e siècle. En adoptant les perspectives d’une histoire sociale et culturelle, cet article reconstitue l’univers physique, social et sensoriel des gares et des wagons de l’époque « primitive » du chemin de fer québécois, le deuxième tiers du 19e siècle étant marqué par son apparition, son implantation et ses premières appropriations par les populations locales.
Abstract
Much remains to be learned about the railway history of Quebec. Often dominated by material history and intended for the general public, when it doesn’t emanate from the English-language scholarship, most of the research says almost nothing about the complex railway life of the 19th century. Adopting the perspectives of social and cultural history, this article reconstructs the physical, social and sensory landscape of the primitive railway stations and trains of Lower Canada between 1836 and 1867. The second third of the 19th century witnesses the emergence of railroads as well as their first appropriation by the local populations.
Article body
On connaît mal l’histoire ferroviaire du Québec[1]. L’abandon de la vapeur au profit de forces de traction plus efficaces, le remplacement progressif du rail, au cours du 20e siècle, par des moyens de locomotion plus rapides et porteurs de rêves nouveaux, bref l’irrémédiable déclin du chemin de fer dans le paysage des pratiques collectives — et dans le paysage physique lui-même — ont entraîné la disparition d’un univers social et sensoriel jadis vivant et dynamique, aujourd’hui tombé dans l’oubli. Au Québec comme ailleurs, le chemin de fer a durablement transformé les collectivités qui l’ont vu naître et croître. Et pourtant, ici plus qu’ailleurs, l’étendue des connaissances reste pauvre et partielle.
Les études sur l’histoire ferroviaire québécoise, d’abord, sont rares. La liste se rétrécit encore davantage si l’on ne retient que les travaux relevant de l’historiographie savante, les ouvrages destinés au grand public[2] ou issus de la recherche amateur[3] n’offrant qu’un survol fragmentaire dont la crédibilité est souvent affaiblie par l’effacement des sources. L’absence presque totale des objets ferroviaires dans la Revue d’histoire de l’Amérique française[4] indique la place restreinte qu’ils occupent dans l’historiographie francophone. Cette étonnante désaffection est peut-être un effet de l’histoire ferroviaire elle-même : principalement rattaché au monde anglophone, l’univers ferroviaire est non seulement dominé par la langue anglaise, mais aussi intimement associé, sur le plan politique, à l’histoire canadienne — c’est-à-dire fédérale —, comme le révèle notamment l’historiographie souvent triomphaliste du Canadien Pacifique[5]. Les travaux sur l’histoire du rail québécois émanent ainsi majoritairement du milieu anglophone.
Or, plusieurs facteurs en limitent l’étendue et l’intérêt. De façon générale, leur rareté est aggravée par leur ancienneté : les seuls ouvrages sérieux sur le Grand Tronc, par exemple, datent de 1957 et de 1960[6]. Les connaissances souffrent d’ailleurs du caractère souvent monographique des études existantes, qui portent principalement sur les plus grandes compagnies et sur l’époque tardive des réseaux transcontinentaux[7], laissant dans l’ombre l’ère primitive du rail québécois et l’essentiel de la vaste nébuleuse ferroviaire du 19e siècle, dont la complexité et les nombreuses ramifications ont jusqu’ici échappé à l’attention des historiens. Les travaux qui ont abordé la naissance et l’implantation du chemin de fer québécois au milieu du 19e siècle donnent du phénomène un portrait utile, mais partiel et parcellaire. En effet, l’historiographie ferroviaire du Québec est marquée par une lacune fondamentale : la vie ferroviaire elle-même y brille par son absence. On fait l’histoire administrative, économique ou politique de quelques compagnies[8], on retrace les stratégies commerciales, l’évolution du réseau et le thème ferroviaire dans les débats politiques[9], on s’intéresse au travail des cheminots et aux aspects techniques du monde ferroviaire[10], mais on ne sait encore presque rien du paysage social et physique des gares, des trains et des wagons, des représentations collectives du chemin de fer, des usages, des pratiques et de l’expérience sensorielle des voyageurs. Comme l’a constaté un géographe en 2014, l’histoire du chemin de fer au Québec « reste encore à faire[11] ».
C’est, dans ses grandes lignes, cet univers social et sensoriel oublié que souhaite restituer le présent article, première et modeste contribution à une histoire culturelle en cours de réalisation. La période retenue correspond à l’ère « primitive » du chemin de fer au Québec (au Bas-Canada, puis au Canada-Est), celle de son apparition, de son implantation et de ses premières appropriations par les populations du 19e siècle, qui précède l’époque de concrétisation des entreprises intercoloniale et transcontinentale du Canada confédéré. Quelle expérience les premières générations confrontées au chemin de fer font-elles du voyage ferroviaire ? Quels sont les usages du train, les manières d’habiter le wagon, les sociabilités ferroviaires ? Quelles perceptions, quelles valeurs, quels sens le déplacement en train engage-t-il ou sollicite-t-il ? Comment les voyageurs du milieu du 19e siècle vivent-ils ce qui apparaît rétrospectivement comme une technologie fondatrice de la « modernité » ?
Si le cadre restreint d’un article ne permet évidemment pas de résoudre ces ambitieuses questions, il permet à tout le moins de les poser fermement en les étayant par une esquisse historique, une reconstitution de l’univers des « chars » (comme le disent les contemporains) et du paysage à la fois physique, social et sensoriel qu’il crée. La perspective adoptée est délibérément panoramique et descriptive : il s’agit de recomposer un tableau, et non d’explorer systématiquement chacun des éléments qui le composent ; il s’agit de faire émerger un questionnaire cohérent (et programmatique) en déclinant les multiples facettes de l’expérience que font du train les populations québécoises entre 1836 et 1867. Comme l’a suggéré Nicolas Kenny, l’histoire des sensibilités invite à définir l’« expérience » comme un phénomène complexe dans lequel le sensible se mêle inextricablement au langage : s’il faut chercher, d’une part, à retracer le senti et le vécu corporel des acteurs sociaux, il faut également concevoir comme une dimension inhérente à cette expérience, d’autre part, les discours à travers lesquels elle s’énonce ou se communique — et qui peuvent aussi l’accentuer, la taire ou la moduler. En effet, « c’est uniquement lorsqu’elles sont verbalisées, mises en discours ou partagées publiquement que les expériences ..., que ce qui est individuellement éprouvé devient un phénomène social, assimilable par les autres membres d’une collectivité[12] ».
On connaît les défis de ce type d’enquête historique, dans lequel, comme l’a souligné Pascal Ory, « aucune source ne peut être exclue a priori » : l’histoire culturelle repose sur la « transformation en objet » de tout ce qui peut devenir le signe, la trace d’une expérience, d’une pratique, d’une sensibilité, d’une perception ou d’une représentation. Par conséquent, on ne peut rien ignorer, et il faut chercher dans la « totalité des sources documentaires possibles[13] » les moyens de reconstituer un univers social et sensible.
Cette étude s’appuie sur l’exploration systématique des sources générées, entre 1836 et 1867, par quatre grands ensembles de producteurs impliqués dans la vie ferroviaire : les instances politiques et parlementaires, les compagnies ferroviaires, la presse périodique et les observateurs de tout acabit (voyageurs, témoins, auteurs, ingénieurs, commerçants, etc.) qui ont laissé un témoignage et des écrits variés[14]. En décryptant ce vaste ensemble pluriel — les documents officiels y côtoient l’écrit personnel et la correspondance privée, les sources imprimées y cohabitent avec les archives et l’iconographie —, il faut non seulement accorder une égale attention aux « témoignages involontaires » et aux « témoignages volontaires[15] », mais aussi savoir lire ce que ces derniers révèlent involontairement.
Prendre les « chars » : voyageurs et usages sociaux du train
Le deuxième tiers du 19e siècle voit l’émergence et la constitution progressive d’un réseau ferroviaire soutenu et aidé par la Province du Canada. Incorporée le 25 février 1832, la Company of Proprietors of the Champlain and Saint Lawrence Rail-road[16] célèbre le 21 juillet 1836 l’ouverture de sa ligne entre Saint-Jean et La Prairie, premier chemin de fer de l’histoire canadienne. Cette courte voie ferrée demeure sans égale pendant une décennie, mais la fin des années 1840 et les années 1850 connaissent un « boom[17] » ferroviaire sans précédent : 27 des 43 chartes ferroviaires octroyées sur le territoire bas-canadien entre 1832 et 1866 inclusivement le sont entre 1845 et 1855[18]. Les chemins de fer, du reste, se multiplient. Le 19 novembre 1847, on inaugure une ligne reliant Lachine à Montréal[19] et, à partir du 27 décembre 1848, les voyageurs peuvent se déplacer en train entre Longueuil et Saint-Hyacinthe sur le premier tronçon du chemin de fer du Saint-Laurent et de l’Atlantique[20], inauguré officiellement le 10 février suivant. En mai 1850, une voie ferrée entre Industrie — aujourd’hui Joliette — et Lanoraie, construite par le seigneur Barthélemy Joliette, s’ouvre à la circulation[21].
L’expansion de ce réseau naissant s’accélère au début des années 1850. Le Champlain & St. Lawrence s’étend, vers le sud comme vers le nord, jusqu’à Rouses Point (août 1851) et Saint-Lambert (hiver 1852). De son côté, le St. Lawrence & Atlantic s’étire vers l’est, par extensions successives, jusqu’à Richmond (octobre 1851), Sherbrooke (septembre 1852) et la frontière des États-Unis (juillet 1853), où il rejoint une voie ferrée menant jusqu’à Portland (Maine). Le Montreal & Lachine, devenu en 1852 le Montreal & New York après sa fusion avec la Compagnie du chemin de fer du lac Saint-Louis et de la ligne provinciale, inaugure au mois de septembre de la même année, en partenariat avec une compagnie américaine, un tronçon reliant Caughnawaga (aujourd'hui Kahnawake) et Plattsburgh, tandis qu’à Industrie une compagnie née en 1850 construit une voie ferrée — inaugurée en décembre 1852, elle est abandonnée dans les années suivantes et au moins partiellement démantelée à partir de l’été 1860 — jusque dans les environs de Rawdon. D’autres chemins de fer voient le jour en 1854 : en novembre, la région de Québec entre dans l’ère ferroviaire alors que se déploie, sous la bannière du Grand Tronc (une compagnie incorporée le 10 novembre 1852 et qui absorbe en 1853 plusieurs compagnies existantes, dont le St. Lawrence & Atlantic), une ligne entre Lévis et Richmond ; une voie ferrée reliant Carillon et Grenville commence au même moment ses opérations (interrompues provisoirement en 1855 et 1856).
On assiste dans les années suivantes à l’établissement d’un chemin de fer dans les Cantons-de-l’Est, qui relie Saint-Jean à West Farnham (janvier 1859), à Granby (janvier 1860), puis à Waterloo (septembre 1861)[22], ligne à laquelle s’annexe à l’automne 1864 une voie ferrée courant d’Iberville à Saint Albans (Vermont) ouverte à la circulation régulière en janvier 1865. Mais ces années sont surtout marquées par la construction du Grand Tronc. Conçu en 1851 comme un « ouvrage provincial[23] », puis cédé à une compagnie privée en 1852 (mais soutenu néanmoins par des fonds publics), le Grand Tronc étire vers l’est comme vers l’ouest sa ligne initiale reliant Longueuil, Richmond, Lévis et Portland : sur le front oriental, les trajets offerts aux voyageurs atteignent successivement Saint-Thomas (décembre 1855), Saint-Pascal (décembre 1859) et Rivière-du-Loup (juillet 1860), tandis que du côté occidental, la voie ferrée qu’il construit mène ses passagers montréalais jusqu’à Brockville (novembre 1855), Toronto (octobre 1856) et Sarnia (automne 1859), l’ouverture du pont Victoria, en décembre 1859, raccordant les deux parties de son réseau. En janvier 1864, le Grand Tronc absorbe le Montreal & Champlain (né de la fusion, en 1857, du Montreal & New York et du Champlain & St. Lawrence) et inaugure, en décembre, une branche liant sa gare d’Arthabaska à « Doucet Landing » (situé sur la rive sud du fleuve devant Trois-Rivières), achevant ainsi la construction des lignes que prévoyaient les actes fondateurs de la compagnie, sanctionnés dans les années 1850.
Le nombre total de voyageurs empruntant ce réseau demeure inconnu, mais une compilation des rapports annuels des compagnies, des documents déposés devant l’Assemblée législative[24] et des rapports rédigés, entre 1858 et 1860, par l’inspecteur des chemins de fer Samuel Keefer[25] fournit un portrait révélateur. Certaines compagnies offrent des séries statistiques complètes. Entre 1836 et 1856 inclusivement, environ 940 000 passagers voyagent dans les wagons du Champlain & St. Lawrence. Ceux de son successeur, le Montreal & Champlain, en transportent un peu plus de un million entre 1857 et 1863, tandis que sur la ligne entre Montréal et Lachine, 446 000 voyageurs environ prennent le train entre 1847 et 1851. Les statistiques de fréquentation des autres compagnies restent fragmentaires, mais livrent néanmoins un ordre de grandeur appréciable. En 1852, 53 625 voyageurs montent à bord du St. Lawrence & Atlantic. Les lignes secondaires ou régionales, qui desservent des populations et des secteurs éloignés des centres d’affaires, enregistrent une moins forte fréquentation : 2 428 passagers, par exemple, voyagent sur le chemin de fer de Rawdon en 1853, alors que la voie ferrée reliant Industrie et Lanoraie en véhicule entre 4 000 et 6 000 annuellement au cours des années 1850 et 1860. De son côté, le Stanstead, Shefford & Chambly déclare 27 883 passagers entre 1860 et 1861[26] et 21 000 en 1865, au moment où les wagons du Carillon & Grenville en voiturent également plusieurs dizaines de milliers (souvent plus de 20 000 annuellement dans les années 1860). L’étendue incomparable et le tracé du Grand Tronc en font évidemment la ligne la plus achalandée. Entre 1857 et 1867 inclusivement, 10 859 034 voyageurs sont montés dans ses chars[27].
De manière générale, les chiffres indiquent une croissance de la fréquentation au cours de la période. Si l’augmentation du nombre de passagers résulte largement de la densification du réseau, c’est-à-dire d’une multiplication des lignes, qui accroît l’accessibilité physique du chemin de fer pour des populations de plus en plus nombreuses, elle traduit aussi une popularisation grandissante du voyage ferroviaire. Le Champlain & St. Lawrence, par exemple, transporte 18 899 passagers en 1838 ; ce nombre bondit, en moyenne, à 27 426 passagers annuels entre 1839 et 1842, puis à 53 232 entre 1845 et 1848, alors que sa ligne entre Saint-Jean et La Prairie demeure inchangée. Des gens qui ne prenaient pas (ou peu) les « chars » se mettent à les utiliser ou à le faire peut-être plus fréquemment.
Les horaires que cette compagnie fait paraître dans la presse montréalaise signalent, dès le début de sa deuxième saison en mai 1837, une division des trains en deux « classes[28] » distinctes ; jusqu’à son absorption en 1864 au sein du Grand Tronc, ses convois sépareront les voyageurs de première et de seconde classes. Les autres compagnies suivent essentiellement le même modèle tout en le faisant parfois varier légèrement. Inauguré en 1847, le Montreal & Lachine offre initialement trois classes à sa clientèle, mais les guides et annuaires de 1852, par exemple, en mentionnent tantôt deux, tantôt trois[29]. Les devis du Grand Tronc indiquent qu’il prévoyait à l’origine diviser en trois classes ses trains entre Montréal et Toronto[30], mais ceux-ci n’en compteront que deux, même si certaines tables de prix publiées par la compagnie évoquent l’existence de trois classes[31].
En 1851, on trouve dans la flotte du St. Lawrence & Atlantic un wagon mixte « de première et seconde classe[32] », mais c’est l’une des exceptions qui confirment la règle : sur les chemins de fer bas-canadiens du milieu du 19e siècle, la frontière qui sépare les « classes » ne passe pas à l’intérieur des chars eux-mêmes, qui restent pour ainsi dire socialement homogènes, mais entre deux catégories de wagons distinctes, auxquelles se rattachent des degrés de confort et des tarifs différents.
Les données qui permettraient de déterminer le poids relatif de chaque « classe » dans le volume total de passagers sont généralement manquantes, mais cette distribution, dont les fluctuations sont multifactorielles, varie probablement d’une compagnie à une autre et selon de nombreux paramètres (localisation de la ligne, état de la flotte, prix des billets, temps de l’année, évolution des salaires, etc.). Les livres de comptes du Champlain & St. Lawrence et du Montreal & Lachine autorisent toutefois quelques estimations relativement précises. De fait, en connaissant le nombre annuel de voyageurs, le prix des billets et le revenu annuel total engendré par leur vente, on peut déduire mathématiquement des pourcentages qui s’approchent sans doute de la réalité : de 1847 à 1850, sur la ligne entre Saint-Jean et La Prairie, la première classe regroupe entre 27 et 36 pour cent du contingent des voyageurs et la seconde, entre 64 et 73 pour cent[33] ; entre Montréal et Lachine, en 1848, les passagers de troisième classe forment entre 54 et 78 pour cent du total, ceux de deuxième moins de 45 pour cent et ceux de première, moins de 22 pour cent[34]. En 1853, le rapport annuel du St. Lawrence & Atlantic tend à corroborer ces proportions : 35 pour cent de ses passagers en 1852 y ont voyagé en première classe, la seconde ayant accueilli la portion restante (65 %)[35]. Certaines déclarations statistiques du Grand Tronc offrent toutefois un portrait radicalement opposé : en 1854, environ 83 pour cent de ses 278 465 passagers circulent en première classe[36].
Si les voyageurs se recrutent sans doute, pour l’essentiel, au sein de l’élite, les « chars » ne sont pas exclusivement réservés aux classes dominantes. Généralement moins onéreux que la diligence, le train est parfois offert à des prix modiques, comme l’indiquent les publicités publiées dans la presse. Entre 1849 et 1854, par exemple, un aller simple en deuxième classe entre Lachine et Montréal coûte 1 shilling et 3 pences (0,25 $), alors que les journaliers les moins rémunérés des chantiers ferroviaires en activité gagnent entre 0,60 et 1 dollar par jour[37]. Sur le Grand Tronc, les prix sont variables, souvent élevés pendant l’hiver, mais chutant pour la saison estivale. En mai 1863, par exemple, les voyageurs peuvent, pour 1 dollar, se déplacer en seconde classe de Québec à Montréal, alors que, à titre indicatif et comme le révèle l’échelle salariale de la compagnie, la majorité de ses « agents de station » touchent à l’époque plus de 26 dollars par mois, ses ouvriers « réparateurs de chars » 1,35 dollar par jour, et ses journaliers entre 0,70 et 1 dollar — le salaire annuel de Walter Shanly, directeur général du trafic, s’élève quant à lui à 7 300 dollars[38]. Prendre les « chars » peut s’avérer coûteux, mais on peut penser que, dans certaines circonstances, l’achat d’un billet de train ne représente pas nécessairement une dépense insurmontable.
On ne s’étonnera pas, dès lors, que la composition socioculturelle du public voyageur soit (au moins en partie) hétérogène. Les citadins prennent davantage le train que les populations rurales, et les anglophones sans doute plus que les francophones. C’est ce qu’indique l’achalandage différencié des gares du Grand Tronc : dans le premier semestre de 1860, les seules stations qui se démarquent nettement du lot en voyant passer plus de 10 000 voyageurs (entrants ou sortants) se situent en zone urbaine (Montréal et Lévis) ou dans les centres régionaux (Saint-Hyacinthe, Sherbrooke, Richmond, Saint-Hilaire et Acton)[39]. La disparité entre les lieux de concentration francophone et les secteurs où sont regroupés les anglophones est parfois frappante. À l’automne 1855, les lignes reliant Montréal à Brockville et Lévis à Montmagny sont inaugurées presque au même moment : à la clôture de l’année, le 31 décembre, les recettes totales générées par la première sont 26 fois plus élevées (8 089 £ en 37 jours d’opération) que celles produites par la seconde (211 £ en 25 jours d’activité), et 10 fois plus importantes au cours de l’année suivante[40]. Ces grandes tendances n’effacent toutefois pas la diversité relative de la population ferroviaire. En 1861, le témoignage d’un gestionnaire du tronçon de Rivière-du-Loup, interrogé dans le cadre d’une commission d’enquête, signale la présence des cultivateurs francophones dans les wagons : « les passagers de deuxième classe sont d’ordinaire des agriculteurs qui vont porter du produit à Québec et s’en retournent simples passagers seulement[41] ».
Il reste que l’accès au train n’est pas universel, et qu’au sein même des groupes « ferroviarisés », l’accès au confort et à la vitesse est marqué par des inégalités sociales. Comme le précisent à partir des années 1850 les règlements généraux du Grand Tronc, les trains de passagers ont toujours préséance sur les trains de marchandises, tandis que parmi les premiers, les « express » priment les « trains de la malle », qui priment eux-mêmes les « trains mêlés[42] » (composés de wagons de fret et de wagons de passagers). Cette hiérarchie des convois désavantage certaines localités rurales dont les gares sont peu ou mal desservies par les « express », qui ignorent sur leur passage bien des stations secondaires et qui privilégient, par conséquent, les citadins. Exaspéré par le retard indécent d’un train et par le manque de ponctualité du Grand Tronc, un voyageur s’emporte en 1866 dans Le Courrier du Canada : il en a contre les « express », ces trains de « citadins » qui charrient « MM. de la race supérieure » et qui dédaignent dans leur élan les « habitants » et « une population toute canadienne-française », condamnés à prendre « les trains des boeufs et des marchandises[43] ».
La couverture journalistique des incidents ferroviaires renseigne fréquemment sur l’identité des passagers. Trois exemples suffiront : une femme autochtone voyageant dans un « char de seconde classe » perd un pied en 1854 et une autre accouche dans le Grand Tronc en 1867 ; son « Excellence le Gouverneur Général » est retardé en 1860 par une collision survenue entre Montréal et Québec ; et une bagarre éclate, en 1862, dans un wagon de seconde classe entre des « draveurs » (« raftsmen[44] »). Une constellation d’indices permet d’étoffer le tableau de cette faune ambulante : les compagnies consentent des prix spéciaux aux enfants — parfois aux étudiants — et les directeurs du Montreal & Champlain accordent, à la fin des années 1850, des tarifs préférentiels aux membres du clergé[45]. Des trains du Grand Tronc assurent le transport des immigrants européens qui débarquent à Québec. La compagnie aménage ses horaires pour satisfaire les gens d’affaires désireux de quitter la ville du samedi soir au lundi matin. Elle offre aussi des trains spéciaux entre Québec et Sarnia « pour l’accommodement des membres de la législature[46] ». Les journalistes, que les compagnies perçoivent comme des instruments publicitaires, sont constamment conviés aux excursions spéciales et activités d’inauguration. En 1856, le rédacteur du Montreal Herald reçoit des invitations pour deux promenades ferroviaires ayant lieu le même jour. Déchiré, il ne sait pas laquelle choisir et versifie son indécision : « Combien serais-je heureux avec l’un ou l’autre / Si l’un des deux charmeurs se tenait loin[47]. »
Les touristes américains qui affluent pendant l’été grossissent considérablement ce contingent de voyageurs locaux. En 1845, selon la correspondance du secrétaire du Champlain & St. Lawrence, environ 35 000 passagers étrangers empruntent sa voie ferrée[48]. Profitant, pour 12,75 dollars, de l’un des nombreux voyages collectifs organisés à l’époque par les compagnies, le philosophe américain Henry David Thoreau arrive au Bas-Canada, en septembre 1850, par le Champlain & St. Lawrence. Lors du voyage de retour, l’ambiance est festive parmi les Bostonnais regroupés dans les wagons : « Dans les trains de La Prairie, dit-il, les Yankees se firent gais, imitant les cris des conducteurs de charrettes à la perfection, au grand amusement de quelques voyageurs canadiens-français[49]. »
La diversité de la clientèle ferroviaire implique une diversité des usages sociaux du train. Aux usages marchands (celui des cultivateurs et des commerçants) et professionnels (celui des députés qui doivent se déplacer pour les sessions parlementaires) s’ajoute évidemment toute la gamme des usages pratiques fondés sur les besoins de déplacement courants (comme le transport du courrier[50] et le mouvement des forces de l’ordre, etc.), voire quotidiens : dès la fin des années 1840, le Montreal & Lachine vend des laissez-passer mensuels, des billets saisonniers et des « paquets[51] » de billets, adressés peut-être, comme le suppose l’ingénieur Thomas Keefer, aux gens d’affaires qui ont « leurs demeures à dix ou vingt milles de la ville[52] ». Mais les usages du train débordent largement son utilité pratique. Deux usages en particulier, qui s’imposent très tôt, frappent par leur importance et leur généralisation au cours de la période : les usages ludiques et touristiques.
La presse fournit à ce chapitre une inépuisable source d’informations. En août 1836 déjà, un mois après l’ouverture du Champlain & St. Lawrence, « des partis de plaisir », écrit Le Canadien, « laissent Montréal chaque jour pour St.-Jean, où l’on peut rester quelques heures et revenir dans la même après-midi[53] ». Cette pratique sociale survivra durablement à l’attrait de la nouveauté. Alors qu’émerge et se diffuse, à partir de 1849 et 1850, la publicité ferroviaire dans les journaux (tant anglophones que francophones), la mode des « excursions » et des « voyages de plaisir » — comme on dit à l’époque — se répand au sein des publics bas-canadiens. Prendre les « chars » est un plaisir en soi, mais les wagons servent aussi (les jours de fête, pendant l’été, notamment le dimanche, mais pas uniquement) à mener les passagers aux lieux récréatifs et touristiques. Certes, le chemin de fer québécois du milieu du 19e siècle modifie peu la carte des itinéraires touristiques, mais il renforce nettement la popularité de sites déjà établis[54]. Les Montagnes blanches du New Hampshire, les « places d’eaux » (Portland, Kamouraska, Rivière-du-Loup), les sites naturels (comme les chutes de la Chaudière ou le lac Memphrémagog) et les grands espaces champêtres comme le mont Saint-Hilaire : on ne compte plus les publicités ferroviaires qui vantent le charme de ces destinations et qui proposent des billets pour s’y rendre. La tenue d’événements culturels ou sportifs est aussi l’occasion de rabais. À partir du début des années 1850, le St. Lawrence & Atlantic et le Grand Tronc offrent chaque année des tarifs spéciaux pour les courses de chevaux de Saint-Hyacinthe. Mais on prend aussi le train pour assister aux expositions agricoles ou à l’occasion d’événements ponctuels, comme le « bazar » de Waterloo en 1864, la visite du célèbre Great Eastern (amarré dans la rade de Québec à l’été 1861) ou encore la consécration de Mgr Laflèche à Trois-Rivières, en février 1867.
La fureur de l’« excursion » ferroviaire s’empare massivement, au cours des années 1850, des corporations et des associations, alors que les compagnies, ainsi que le révèle une annonce du Grand Tronc, font des offres avantageuses aux « groupes désireux d’organiser des excursions de plaisir ou des pique-niques[55] ». Tous les groupes désirent se prévaloir de forfaits semblables. Une énumération partielle des communautés ou des cohortes qui s’offrent de courts voyages en train suffit à montrer l’ampleur de ce mouvement dont les journaux portent la trace : les pompiers de Montréal (entre 1851 et 1855), des organisations militant pour la tempérance (1853 et 1854), les membres du Mechanics’ Institute (1856), une compagnie d’artillerie (1858), les ouvriers du pont Victoria (1859), une loge maçonnique (1860), le Séminaire de Québec (1860), les cheminots du Grand Tronc, une institution wesleyenne (méthodiste), des cadets, les enfants de choeur d’une église montréalaise (1865). Dès son apparition et son implantation dans la vie des populations canadiennes, le chemin de fer accompagne et renforce une quête sociale de plaisirs et de délassement.
Habiter l’espace ferroviaire : de la gare au wagon
Les premières gares installées au Bas-Canada n’ont rien des édifices imposants que certaines d’entre elles deviendront à la fin du 19e siècle[56], ni des chefs-d’oeuvre architecturaux dont se dote, dès 1852 avec la prestigieuse gare de l’Est, le Paris du Second Empire[57]. Avant les années 1880, les gares québécoises sont des édifices modestes et souvent purement fonctionnels, comme le sont aussi avant les années 1870 leurs vis-à-vis américaines[58]. Les rares témoignages que l’on peut repérer, épars, dans les archives et les journaux permettent d’en reconstituer partiellement le paysage.
L’une des premières choses qui frappent le regard de Thoreau, quand il arrive en 1850 sur le territoire bas-canadien, c’est le caractère chétif et rustre de la « gare » du Champlain & St. Lawrence, à Saint-Jean : « L’édifice ressemblait à une grange, avait l’air d’être le produit de la collaboration de tous les villageois, tout comme une maison en bois rond dans un endroit de colonisation. » Il s’étonne de n’y apercevoir « aucun chef de train élégant[59] ». Les regards canadiens paraissent moins exigeants, mais plusieurs passagers énoncent publiquement leur insatisfaction. En 1848, un voyageur montréalais déplore dans les pages du Herald l’indifférence de la compagnie « pour le confort des passagers » et la médiocrité de ses « installations à La Prairie et Saint-Jean[60] ». Les gares des têtes de lignes établies à partir de la fin des années 1840 semblent moins rudimentaires. À l’automne 1847, la première gare Bonaventure, du Montreal & Lachine, est un spacieux édifice ouvert en briques, que la compagnie enrichit, l’année suivante, d’une cloche, d’une cheminée et de l’éclairage au gaz, comme le précise son registre de dépenses[61]. En janvier 1849, les journalistes qui participent aux premiers voyages du St. Lawrence & Atlantic décrivent le terminus de Longueuil comme une « grande et belle structure », mesurant plus de 200 pieds et munie de « bureaux et de salles d’attente confortablement aménagées[62] ». Une estampe anonyme datée de 1855 représente l’édifice : percé d’une grande ouverture latérale, il permet aux trains de s’introduire dans son enceinte, où les passagers peuvent attendre à l’abri des intempéries[63]. Moins vaste, la gare de Saint-Hyacinthe est aussi conçue selon ce modèle[64].
La rareté, dans les discours de l’époque, des descriptions de gares — alors que certains ponts, par exemple, suscitent des exposés passionnés ou deviennent, comme le pont Victoria, des objets de représentations artistiques — révèle en elle-même l’absence d’excitation. Les gares savent en somme se faire oublier, comme le rappellent en creux quelques inhabituels enthousiasmes : bâtie en briques, la station de Sherbrooke, digne d’un « chemin provincial » comme le Grand Tronc, a « bien meilleure apparence[65] » que la plupart des gares, note en 1853 un inspecteur ; en 1854, celle de Lévis arrache à un journaliste du Quebec Mercury une brève émotion, en exhibant devant son regard surpris ses quais couverts et surtout sa toiture, « une immense arche d’une conception inédite[66] ». La gare rurale, plus modeste, est généralement une maison abritant l’agent de station et sa famille. Mais il est parfois impossible aux trains d’entrer en gare, car certaines stations sont (au moins temporairement) dépourvues d’édifice. Un voyageur de la Côte-du-Sud s’en plaint en 1863, exaspéré par les retards sur le Grand Tronc près de Rivière-du-Loup : « il nous faut attendre, dit-il, des trois à quatre heures dans des dépôts, où il y en a, ou le long du chemin où il n’y en a pas[67] ». Les gares, renchérissent en 1866 d’autres usagers furieux, ne sont parfois qu’une « mauvaise cabane » abusivement « appelée station[68] », et dans certaines localités on doit subir les retards « sur les trottoirs à se lamenter, ou à périr de froid, ou même à la pluie[69] ». Plusieurs stations sont en effet des « stations à pavillon » (flag stations), simples points d’arrêt facultatifs où les trains n’interrompent leur course que si des voyageurs signalent leur volonté d’y monter.
En fait, les expériences, nécessairement multiples, varient fortement en fonction du lieu. Les gares principales, situées aux têtes de lignes et dans les zones plus urbanisées, se distinguent des gares intermédiaires, modestes et le plus souvent construites en bois[70]. En 1855, sur le tronçon reliant Lévis et Montmagny, seuls les édifices des deux extrémités de la ligne sont construits en briques ou en pierres[71]. Nettement majoritaires, les stations intermédiaires — chaque ligne possède les siennes — sont parfois nombreuses : entre les gares de Lévis et de Richmond, par exemple, on en trouve 10 en 1854, 11 en 1856 et 12 en 1865[72]. S’il reste difficile d’évaluer avec exactitude le nombre total de stations — il évolue au fil des années et les dénombrements, variables, ne sont pas toujours systématiques —, les rapports officiels et les indicateurs ferroviaires permettent d’en mesurer l’évolution. En 1836, le territoire bas-canadien ne possède que deux stations[73] ; vingt ans plus tard, on en compte environ 65, nombre qui s’élève à 109 en 1866. La majorité de celles-ci relèvent du Grand Tronc, qui en exploite environ 89 au Québec à la veille de la Confédération.
Nombre de ces stations ne disposent que d’un équipement minimal : selon les devis généraux du Grand Tronc, la majorité des stations intermédiaires entre Lévis et Richmond, par exemple, n’ont pas de « lieux d’aisance » et contiennent uniquement un espace destiné aux bagages, un bureau et une petite « halle à marchandises et passagers ». Les « maisons » entre Montréal et Toronto semblent mieux pourvues en appareils sanitaires, mais partout les gares secondaires sont privées du superflu[74]. Dans la mesure où le contenu des toilettes que renferment les wagons du Grand Tronc, dans les années 1860, semble se déverser sous les chars[75], on comprend qu’un Mémoire sur le choléra ait pu déplorer en 1866 « l’état horrible habituel des lieux d’aisance de chacune des stations de nos voies ferrées » et dénoncer « l’abominable coutume contractée de souiller les approches des embarcadères et débarcadères[76] ».
L’expérience des voyageurs diffère sensiblement dans les gares principales. Comme dans les petites stations, les usagers du train peuvent y consulter les horaires, y acheter leur billet et y attendre les chars. Mais ils peuvent également profiter de « salles de rafraîchissements » (comme à Richmond et Lévis) et les « dames » y bénéficient à l’occasion d’un « salon » réservé, séparé de la « chambre » des hommes ou de la « halle » d’attente (comme à Longueuil ou Saint-Lambert, par exemple)[77]. Près de ces stations sont généralement implantés des établissements hôteliers (mais on en trouve aussi ailleurs, comme à Caughnawaga, Compton, Waterloo ou Rivière-du-Loup). Les plus grandes gares offrent aussi, dès les années 1850, une gamme de services un peu plus étendue. Le Journal de Québec évoque en 1865 « la vente des journaux aux stations de chemins de fer[78] », alors que le Grand Tronc loue à des particuliers le privilège de distribuer des imprimés dans ses stations et ses wagons. En 1852, il prévoit doter sa gare de Pointe-Saint-Charles de « salles d’attente », de « salons de rafraîchissements » et d’une cantine (« cambuses[79] »). Puritain, The Montreal Witness voit d’un mauvais oeil en 1860 la présence d’une taverne au débarcadère de Saint-Lambert, où les passagers du Montreal & Champlain prennent le traversier[80]. En 1857, les voyageurs du Grand Tronc croisent une « buvette » à la gare de Cornwall et un restaurant tenu par un Français à celle de Kingston. Dans les années 1860, ils peuvent bouquiner au kiosque de livres de la gare Bonaventure — le Grand Tronc y centralise ses activités entre 1861 et 1864, au détriment de Pointe-Saint-Charles, incommode pour le public — ou s’y attabler à un débit de boisson en attendant leur train[81]. Lieux d’affichage (des règlements et des horaires, par exemple), les gares et les chars du Grand Tronc deviennent à partir de 1862 des espaces publicitaires : par l’entremise de la Canada Railway Advertising Company, sorte d’agence publicitaire, les commerçants peuvent dorénavant payer pour faire dans les trains la promotion de leurs produits[82].
Le voyageur qui monte dans le wagon entre dans un autre espace, marqué par ses découpages spécifiques. Fabriqués à Troy (New York), les premiers wagons du Champlain & St. Lawrence, en 1836, peuvent contenir de 16 à 24 passagers[83], mais les chars deviennent plus spacieux dans les décennies subséquentes : les wagons du Grand Tronc (ceux de première comme de seconde classe) accueillent entre 50 et 60 voyageurs. Ceux du Montreal & Lachine, vers 1850, obéissent à la compartimentation des wagons européens de première classe[84] (The Quebec Mercury déplore que le passager y soit enfermé comme du bétail[85]), mais c’est l’architecture américaine qui l’emporte : comme le souligne, en 1851, un fabricant de chars d’Albany interrogé par les promoteurs du Grand Tronc, les wagons en exploitation, d’une largeur intérieure d’environ huit pieds, contiennent deux séries de banquettes (chacune peut accueillir deux passagers) séparées par une allée centrale d’une vingtaine de pouces[86], qui permet aux employés et voyageurs de circuler d’un wagon à un autre pendant le voyage. Les chars de première classe présentent une configuration plus complexe. La division entre les sexes, inscrite dans l’aménagement des gares, tend à se reproduire à bord du train : en 1851, par exemple, la voyageuse trouve dans les wagons de première classe du St. Lawrence & Atlantic un salon cloisonné et réservé aux femmes, dans lequel elle peut se mettre à l’abri des fumeurs[87], qui ont parfois aussi leur propre pièce ou leur wagon-fumoir. Dans les années 1850 et 1860, des réservoirs d’eau potable sont disponibles dans les chars, équipés par ailleurs de lampes à huile, qui assurent un éclairage minimal tout en générant des risques d’incendie. Si le fini intérieur des wagons est toujours en bois, ceux de première classe offrent un espace où la distinction sociale se manifeste dans l’aménagement décoratif et dans un confort accru : avec le luxe de leurs tentures en satin, de leurs sièges moelleux et de leurs stores en soie, les meilleurs chars du Montreal & Lachine se distinguent nettement, en 1847, des wagons de deuxième (les bancs y sont en cuir et les fenêtres, sans rideaux) et de troisième classe (dépourvus de vitres et ouverts à tous les vents[88]). Jusqu’à la toute fin des années 1840, les chemins de fer bas-canadiens interrompent leurs activités pendant l’hiver. Le St. Lawrence & Atlantic lance les voyages hivernaux dès son ouverture en décembre 1848, suivi bientôt par le Champlain & St. Lawrence (1851) et par le Montreal & New York (1852). Les wagons, dès lors, seront équipés de poêles destinés à protéger les passagers du froid.
Les premiers voyages ferroviaires qui s’étendent sur deux jours (entre Longueuil et Portland, à partir de 1853) sont interrompus par l’arrêt nocturne du train, qui fait dormir ses passagers à l’hôtel, comme la diligence long-courrier reliant Québec à Montréal à partir des années 1810[89]. Les premiers trains de nuit apparaissent en 1854 sur la ligne du Grand Tronc, entre Lévis et Longueuil, mais il faut attendre quelques années avant de voir arriver dans le paysage ferroviaire local les « chars de nuit[90] » (munis de lits), introduits dès juin 1858 entre Montréal et Toronto, et régulièrement annoncés à partir de décembre 1859. La Minerve salue ce « nouveau confort » et décrit un wagon « divisé en huit chambres », dont chaque compartiment contient « une espèce de sofa pour la commodité des passagers[91] ». Une maquette photographiée en 1867 par William Notman montre un wagon-dortoir similaire : une série de lits fixés au mur et séparés par de minces cloisons y est coupée du couloir par des rideaux[92].
Que fait-on pour tuer le temps dans un train, au milieu du 19e siècle ? Le récit de voyage que livre, en 1855, le chroniqueur du Pays invité à l’inauguration de la ligne entre Montréal et Brockville fournit de précieux renseignements, même si l’événement est plus festif que les voyages ferroviaires ordinaires : après avoir décrit la « magnifique peluche rouge » des sièges et le fini intérieur des wagons, il se tourne vers l’atmosphère qui règne dans le train au cours de l’excursion, étouffé par la fumée des fumeurs qui le prend « à la gorge comme un gendarme ». Réfugiées « dans le dernier char » à l’abri des cigares, les dames voyagent entre elles ; chez les hommes, des groupes chantent et d’autres « discutent politique », tandis que des passagers dorment et ronflent ; le journaliste finit lui-même par s’endormir, le train devenant à la nuit tombée « tout à fait noir[93] ». Car l’on dort en train bien avant la venue des « chars de nuit ». Dans la relative promiscuité du wagon, ce relâchement de l’autocontrôle peut susciter quelques malaises. En 1853, un poète met en vers, dans un journal de Québec, les aléas du sommeil ferroviaire dans le silence d’un wagon « rempli de passagers » (« full of passengers ») : un voyageur s’y réveille de sa sieste tout dépenaillé (cravate à l’envers, chapeau en bataille) et suscite le rire moqueur d’une voyageuse cachée derrière un livre[94]. Le poème le dit : ceux et celles qui ne dorment pas peuvent lire. Dans les journaux bas-canadiens, les allusions à la lecture ferroviaire existent assez tôt, mais les signes de cette pratique ne se multiplient qu’à partir des années 1850, alors que se fixent les usages sociaux du train, de mieux en mieux implanté dans les habitudes. Des libraires annoncent dans la presse leur « Bibliothèque des chemins de fer[95] » (vraisemblablement importée de la France), tandis que des auteurs suggèrent à leurs lecteurs d’emporter leur livre « pour le lire sur un bateau à vapeur, dans un char de chemin de fer[96] ». Comme le disent les nombreux récits d’excursion ferroviaire publiés dans les journaux, l’observation du paysage traversé demeure l’une des principales activités du voyageur. Plusieurs sont disposés, dès qu’ils montent dans un train, à chercher par la fenêtre du wagon une image qui « émeut l’âme » et « charme l’oeil[97] », comme l’écrit un touriste dans L’Ordre, en 1864.
Splendeurs et misères du chemin de fer
Peut-on restituer, pour finir, l’expérience et le paysage sensoriel qui s’offrent au voyageur bas-canadien entre 1836 et 1867 ? Pour Alain Corbin, l’historien des sensibilités s’apparente au « chasseur » qui « scrute la trace du gibier invisible ». Il doit « déduire le comportement de l’autre d’infimes et subtils indices », mais l’absence d’« aucune véritable procédure de vérification » peut le conduire à confondre les sensibilités réelles et les manières de dire, le sensible et le rhétorique, le vécu et le discours social. L’histoire des systèmes sensoriels et des sensibilités est en ce sens un « savoir conjectural[98] ». Ce qu’elle reconstruit est moins une expérience réelle, vécue uniformément par les acteurs, qu’une expérience possible, inscrite en puissance dans les matérialités et les pratiques sociales d’une époque.
S’il faut garder à l’esprit cette nécessaire distinction entre le sensible et le rhétorique, et rester attentif aux décalages éventuels entre ces deux plans, les sources écrites demeurent pourtant, comme l’a souligné Mark Smith, la meilleure voie d’accès à la vie sensorielle du passé : « Grâce à un examen attentif des sources imprimées, nous pouvons parvenir à comprendre ce que certains événements ou stimuli sensoriels ont pu signifier pour des individus et des groupes sociaux particuliers dans divers contextes historiques[99]. » L’histoire sensorielle telle qu’il la conçoit dans le sillage de Corbin vise moins à rendre l’exactitude du senti que les significations qu’il peut avoir, et qui forment l’essentiel de l’expérience des acteurs. L’histoire des sens est aussi une histoire du sens. Sur cette voie, le caractère encore embryonnaire de ma recherche n’autorise pour le moment que des indications sommaires.
Plusieurs voyageurs de l’époque affirment « jouir de la locomotion » sur rails : le « cahottement » y est presque « imperceptible[100] » et sa douceur s’oppose aux rudesses douloureuses de la diligence, bien connues des voyageurs de l’époque. L’usure des rails compromet parfois cet agrément, mais le train est supérieur à la voiture. « Je suis fatiguée : le chemin de fer est assez inégal pour nous donner le mal de tête. Jugez si le stage m’aurait fatiguée[101] ! », écrit par exemple Julie Bruneau dans une lettre à sa belle-fille en 1860. Le confort des chars de première classe (ils sont offerts aux journalistes lors des excursions) fait l’objet d’appréciations enthousiastes, mais les voyageurs moins nantis vivent parfois une autre expérience. En 1866, un lecteur de Kamouraska décrie l’« odeur de fumier » (« et quelques fois même plus que cela ») qui l’accompagne dans les trains du Grand Tronc : « c’est vraiment dégoûtant de voir l’extrême malpropreté qui règne dans les chars de seconde classe[102] ». L’été, la poussière soulevée par les locomotives, qui pénètre dans des wagons trop peu étanches, est l’une des « principales nuisances dans les voyages en train[103] ». La suffocation, la sensation d’étouffement dans des chars mal ventilés est une autre expérience commune à laquelle on tente de remédier vers la fin des années 1850[104]. L’hiver, alors que certains rôtissent près des poêles, c’est le froid, surtout, qu’il faut affronter dans le train. Les marchands le comprennent bien, puisqu’ils misent sur ces désagréments ferroviaires pour publiciser manteaux et couvertures, indispensables « pour les Voyages par Chemins de Fer[105] ».
Épargnée à tous ceux qui parcourent de courtes distances, la fatigue est une autre ennemie courante du voyageur : même sur les « sièges moelleux » de la première classe, il n’est pas rare de parvenir à destination « fatigué de notre haletante course à la vapeur[106] », même si des colporteurs distrayant les voyageurs montent parfois à bord (comme ce jeune vendeur d’oranges qu’un chroniqueur du Journal de Québec, en 1857, est heureux de voir arriver dans le train[107]). Certes, les trains prennent des pauses rapides aux stations principales pour permettre aux voyageurs de se restaurer, mais certains d’entre eux goûtent assez peu les « biscuits rassis » (stale biscuits), la « bière dégoûtante » (disgusting beer) et le « mauvais thé » (bad tea) qu’on leur sert, apparemment réputés pour leur « caractère infâme » (infamous nature[108]). Les nuits peuvent être mauvaises dans les wagons-lits des années 1860 : à l’hiver 1861, par exemple, leurs occupants dorment mal et se plaignent de l’ouverture des portes aux gares intermédiaires[109]. Aux odeurs, aux inconforts et déplaisirs du corps s’ajoutent les bruits de la machine roulante, que plusieurs décrivent comme assourdissants. En 1851, un correspondant qui n’a pas aimé son « voyage de plaisir » de Québec à Troy s’étonne que l’on puisse apprécier les « chars » quand on est importuné tant « par le fracas des locomotives » que « par le nuage de poussière qui blanchit les habits et prend à la gorge[110] ». Les francophones vivent parfois d’autres frustrations. Prendre les chars, pour les ruraux, c’est souvent entrer dans un univers socioculturel étranger, qui leur rappelle constamment qu’ils ne comprennent pas l’anglais, unique langue (ou presque) du Grand Tronc. Le Courrier de Saint-Hyacinthe, qui défend les intérêts de son auditoire local, dénonce assidûment, parfois avec fureur, le mépris affiché par la compagnie, qui « devrait comprendre et parler les deux langues de la province[111] ».
Mais c’est aux immigrants européens qui débarquent à Québec que sont peut-être réservées les plus désagréables expériences ferroviaires. À l’été 1864, les procédures judiciaires déclenchées par l’une des pires catastrophes ferroviaires de l’histoire canadienne (une centaine de noyés) dévoilent les conditions matérielles qui règnent dans certains trains d’immigrants du Grand Tronc. Avant de s’engouffrer dans la rivière Richelieu à Beloeil, le convoi nocturne parti de Lévis le 28 juin en soirée entasse dans six wagons de marchandises dotés de bancs amovibles, « sans distinction d’âge ni de sexe », 360 de ses 467 passagers arrivant de Hambourg. La nuit dans ces espaces « fermés » se déroule sans « lumière ni air » frais. L’eau potable vient parfois à manquer et les voyageurs n’ont pas toujours « la permission de laisser les chars pour répondre aux besoins de la nature », ce qui les force, accusent les grands jurés, à se soulager « au mépris de la décence commune et au dégoût d’eux-mêmes et de leurs compagnons[112] ». Mais il faut se garder de généraliser cette catastrophe : la compagnie possède également à la même époque des wagons pour immigrants (mesurant 50 pieds) équipés de ventilateurs et de toilettes[113].
Multiples et contrastées, les expériences du chemin de fer sont socialement, contextuellement et géographiquement variables. Dans les chars se croisent les progrès du confort et les désagréments ; le déplaisir des sens et le plaisir des touristes emportés par des « excursions » vers le délassement des campagnes ou des bords de mer ; le sentiment du prodige technologique et la peur de l’accident, qui s’exprime avec une force nouvelle à partir des années 1850, alors que progresse la conviction que « les accidents et les retards se [disputent] la palme pendant tout l’hiver[114] ». Ces expériences sensorielles, les plaisantes comme les affligeantes, que bien des voyageurs relatent dans l’espace public, ont sans doute joué un rôle parfois déterminant — autant que certaines idéologies — dans les adhésions et dans les résistances collectives aux compagnies ferroviaires. Mais, au-delà de ces disparités, l’avènement du train engendre des formes d’expérience auxquelles l’ensemble des usagers, voire des contemporains, sont à peu près uniformément confrontés. Plusieurs éléments frappent, sur ce plan, le chercheur qui parcourt le discours bas-canadien sur le chemin de fer au milieu du 19e siècle.
Le premier est la place importante qu’en vient à occuper, dans le paysage sonore de l’époque, le sifflet des locomotives, dont la fonction pratique — une loi de 1851 force les engins à s’annoncer au moyen d’un « sifflet à vapeur » ou d’une « cloche[115] » — se double sans cesse d’une valeur symbolique. « Le sifflet de la locomotive se fit entendre à la gare voisine[116] » : c’est ce signe sonore, qui emplit l’air et découpe le temps, qui rappelle au narrateur du roman Jean Rivard, économiste (1864) qu’il doit quitter Rivardville et prendre son train. Repère temporel, mais aussi annonce du danger potentiel, le « sifflet des chars qui vient à toute heure du jour et de la nuit[117] » ressurgit aussi constamment dans les récits d’excursion que publient les journalistes, où il devient un symbole, une métonymie du chemin de fer et parfois du progrès, voire de la modernité dans son ensemble. Pour célébrer l’essor croissant de l’industrie chez les Canadiens français, The Morning Chronicle, par exemple, mobilise en 1861 une image révélatrice : « le sifflet à vapeur fait désormais entendre son cri aux oreilles canadiennes-françaises[118] ». Comme l’a montré Corbin dans ses travaux sur la culture campanaire, les cloches villageoises sont, dans l’univers rural du 19e siècle, une source de fierté communautaire et un symbole de prestige, qui se mesure par la force, le nombre, la qualité des sonneries[119]. Le sifflet de la locomotive impose un tout autre paysage sonore, mais à l’instar de la cloche, il devient l’incarnation sensorielle d’un ensemble de valeurs : le progrès technique, l’éclat imaginé d’un avenir radieux, que le chemin de fer représente aux yeux de ses premiers promoteurs, se trouvent physiquement ressentis dans le cri triomphal du sifflet, qui suscite chez de nombreux commentateurs un plaisir auditif manifeste.
Ce qui frappe, ce sont aussi la vigueur et la diffusion rapide, dans les discours bas-canadiens, des grands topoï qui marquent, au même moment en Europe, la mise en discours des expériences spatiotemporelles que provoque le chemin de fer. D’innombrables exemples pourraient appuyer les thèses développées par quelques chercheurs européens : au Québec comme ailleurs, le train, qui tend à instaurer une « scansion nouvelle du rythme de déplacement et de vie[120] », qui impose l’heure comme unité de mesure fondamentale, frustre aussi plusieurs passagers en détruisant « la relation profonde entre le voyageur et l’espace du voyage », détrôné par la destination et l’« espace géographique[121] » dans lequel on se sent avancer comme sur une carte. Alors que les convois « express » des lignes bas- canadiennes atteignent vers 1860 des vitesses moyennes allant de 29 à 36 milles par heure (46 à 58 km/h)[122], le train est en outre couramment décrit comme un projectile, le voyage comme un « vol », et la mobilité ferroviaire comme une magique abolition de la distance[123].
Mais ce qui frappe également, c’est la récurrence — plus souterraine, mais tout aussi vive — des frustrations et des déceptions que fait naître l’incapacité du chemin de fer à honorer les promesses que les lieux communs les plus enthousiastes ne cessent à cette époque d’associer à son invention. Relativement rares avant 1850, les plaintes prolifèrent au cours des années suivantes. On ne compte plus les voyageurs qui prennent la plume pour dénoncer dans la presse la fréquence des retards, des interruptions de service ou des déraillements sur le Grand Tronc, particulièrement vulnérable aux rigueurs de l’hiver. Le phénomène est parfois chiffré avec précision : entre le 1er janvier et le 4 avril 1861, par exemple, 19 déraillements ou accidents mineurs interrompent la marche régulière des trains entre Montréal et Toronto[124]. Des voyageurs outrés racontent leur histoire d’horreur. Abolition des distances, prodiges de la vitesse, ponctualité exemplaire ? On sait ce qu’en pensent ces passagers du Grand Tronc qui, aux prises avec le froid, l’inconfort et la privation, ont mis quarante-huit heures à faire le trajet de Montréal à Saint-Hyacinthe (1862), trente-cinq heures pour celui de Montréal à Saint-Jean (1865), cinquante-quatre heures et seize heures — pour ne nommer que ces exemples — pour ceux entre Montréal et Toronto (1861) et entre Lévis et Rivière-du-Loup (1865), enfermés dans des trains paralysés par la neige et indignes de cet « âge de la vapeur » (age of steam[125]) auquel plusieurs ne croient manifestement plus. L’efficacité théorique de la vapeur fait pâle figure devant ces faits, alors que l’hiver, constatent les nostalgiques, la rend parfois inférieure à la diligence ; ceux pour qui « la mesure est pleine » disent qu’il faudrait « faire transporter les malles en voiture quand les chars ne peuvent le faire[126] ».
Ces plaintes récurrentes signalent un ensemble de perceptions et d’expériences collectives qui invitent les historiens à la prudence. Elles relativisent en effet les idées de « révolution » et de « rupture » qui dominent communément l’historiographie du chemin de fer. « Il serait difficile de surestimer la nature de la révolution des transports opérée par les chemins de fer », écrit Derek Booth. « Pratiquement du jour au lendemain, ils ont rendu possible une série d’activités économiques et sociales qui demeuraient impensables avant leur apparition[127]. » Valable sans doute à l’échelle macrohistorique, cette représentation l’est beaucoup moins à l’échelle microhistorique, où elle apparaît comme une conclusion hâtive dont l’histoire sociale et culturelle ne peut pas se contenter. Elle néglige de fait la réalité des expériences ferroviaires, toujours largement plus complexe que ce qu’en disent les rhétoriques optimistes et bruyantes produites par le 19e siècle lui-même. Ne pas « confondre le non-dit et le non-éprouvé », c’est aussi éviter de réduire la complexité de l’expérience aux « formes rhétoriques[128] » qui sont rétrospectivement les plus visibles. Si l’implantation du chemin de fer au Québec constitue bien une « révolution », celle-ci n’est pas toujours vécue comme telle par les contemporains. C’est une révolution lente, « tranquille », si l’on veut, qui a ses intermittences et ses régressions, qui suscite des nouveautés et des plaisirs, mais aussi quelques amères déceptions.
Appendices
Note biographique
Docteur en littérature de l’Université de Montréal, Alex Gagnon a effectué trois stages postdoctoraux (UQAM, McGill, U. Laval), dont l’un avec une bourse Banting, et fait présentement un deuxième doctorat en histoire à l’UQTR. Il a remporté de nombreux prix pour ses ouvrages parus aux Presses de l’Université de Montréal (La communauté du dehors. Imaginaire social et crimes célèbres au Québec, XIXe-XXe siècle, 2016 ; Les métamorphoses de la grandeur. Imaginaire social et célébrité au Québec, de Louis Cyr à Dédé Fortin, 2020). Ses travaux portent principalement sur l’histoire des imaginaires, des sensibilités et des systèmes symboliques. Alex Gagnon a aussi fait paraître, chez Del Busso éditeur, deux recueils d’essais sur le Québec actuel (Nouvelles obscurités, 2017; Les déchirures, 2023).
Notes
-
[1]
Amorcée à l’Université Laval grâce à une bourse postdoctorale Banting en études littéraires, la recherche dont cet article est issu s’inscrit présentement dans le cadre d’une thèse de doctorat en histoire.
-
[2]
Alexander Reford, Au rythme du train (1859-1970) (Québec, Publications du Québec, 2002) ; Michel-Louis Pelletier, Histoire des chemins de fer du Québec (Québec, GID, 2014) ; Pierre Landry (dir.), Histoires de train. Rivière-du-Loup, carrefour ferroviaire de l’est du pays (Trois-Pistoles QC, Éditions Trois-Pistoles et Mus’Art, 2016). On peut ajouter des ouvrages plus généraux qui offrent un regard panoramique sur l’histoire du rail au Canada : R.A.J. Phillips, Canada’s Railways (Toronto, McGraw-Hill, 1968) ; Robert Ferguson Legget, Railroads of Canada (New York, Drake Publishers, 1973).
-
[3]
On peut citer plusieurs ouvrages autoédités : Marc Carette, L’épopée du Quebec Central (Sainte-Foy QC, 1985) ; J.-F.-Adrien Levasseur, Le chemin de fer Témiscouata (Longueuil QC, 1994) ; Philippe Fournier, Saint-Armand, d’hier à aujourd’hui. Histoire du Central Vermont (Bedford QC, 2016).
-
[4]
On note une exception récente : Dany Fougères, « Le pont Royal-Albert (1875-1876) : histoire d’une bérézina sur fond de rivalités ferroviaires », Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 75, no 3 (2022), p. 3-34.
-
[5]
Voir à ce sujet Andy Albert den Otter, The Philosophy of Railways. The Transcontinental Railway Idea in British North America (Toronto, University of Toronto Press, 1997), p. 5-9.
-
[6]
A.W. Currie, The Grand Trunk Railway of Canada (Toronto, University of Toronto Press, 1957) ; George Roy Stevens, Canadian National Railways, tome 1, Sixty Years of Trial and Error (1836-1896) (Toronto, Clarke, Irwin & Company, 1960).
-
[7]
On pense à Harold Innis, A History of the Canadian Pacific Railway (Londres et Toronto, P.S. King and Son et McClelland and Stewart, 1923) ; John Lorne McDougall, Canadian Pacific. A Brief History (Montréal, McGill University Press, 1968) ; William Kaye Lamb, History of the Canadian Pacific Railway (New York, Macmillan, 1977) ; Pierre Berton [1974], Le grand défi. Le chemin de fer canadien, traduction de Pierre Bourgault, 2 tomes (Montréal, Éditions du Jour, 1975) ; Omer Lavallée [1974], Van Horne’s Road. The Building of the Canadian Pacific Railway, nouvelle édition (Toronto, Fifth House, 2007) ; Donald MacKay, L’histoire du CN, traduction de Claude Fafard et Normand Paiement (Montréal, Éditions de l’Homme, 1992).
-
[8]
Derek Booth, Railways of Southern Quebec, tomes 1 et 2 (Toronto, Railfare Enterprises, 1982 et 1985) ; François Cinq-Mars, L’avènement du premier chemin de fer au Canada. Saint-Jean — La Prairie (1836) (Saint-Jean-sur-Richelieu QC, Mille Roches, 1986).
-
[9]
G.P. de T. Glazebrook [1938], A History of Transportation in Canada, tome 1, Continental Strategy to 1867 (Toronto, McClelland and Stewart, 1964) ; Jean Hamelin et Yves Roby, Histoire économique du Québec (1851-1896) (Montréal, Fides, 1971), p. 119-138 ; Gerald Tulchinsky, The River Barons. Montreal Businessmen and the Growth of Industry and Transportation (1837-53) (Toronto, University of Toronto Press, 1977) ; Brian Young, Promoters and Politicians. The North Shore Railways in the History of Quebec (1854-1885) (Toronto, University of Toronto Press, 1978) ; David B. Hanna, « Stratégies ferroviaires : emprises et terminus de Montréal », dans Montréal portuaire et ferroviaire (Actes du 5e Congrès de l’Association québécoise pour le patrimoine industriel, 1993), p. 34-60.
-
[10]
Jean-Pierre Kesteman, « Les travailleurs à la construction du chemin de fer dans la région de Sherbrooke (1851-1853) », Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 31, no 4 (1978), p. 525-545 ; Christopher Andreae, Lines of Country. An Atlas of Railway and Waterway History in Canada (Erin ON, Boston Mills Press, 1997) ; Marc Lemaire, « Le développement du réseau pionnier des chemins de fer au Canada : isolement et intégration (1836-1883) », mémoire de maîtrise (histoire), Université de Montréal, 1997 ; Paul Craven et Tom Traves, « Dimensions of Paternalism : Discipline and Culture in Canadian Railway Operations in the 1850’s », dans Craig Heron et Robert Storey (dir.), On the Job. Confronting the Labour Process in Canada (Montréal et Kingston, McGill-Queen’s University Press, 1986), p. 47-74 ; Stanley Triggs et al., Le pont Victoria. Un lien vital (Montréal, Musée McCord, 1992) ; Rémi Guertin, L’implantation des premiers chemins de fer du Bas-Canada (Québec, GID, 2014).
-
[11]
Guertin, L’implantation des premiers chemins de fer du Bas-Canada, p. 17.
-
[12]
Nicolas Kenny, The Feel of the City. Experiences of Urban Transformation (Toronto, University of Toronto Press, 2014), p. 19, traduction libre. «… it is only when they are spoken, written, or otherwise shared with others that experiences …, that what is felt individually becomes a social phenomenon, decipherable to many on the basis of common encounters. »
-
[13]
Pascal Ory [2004], L’histoire culturelle, 5e édition corrigée (Paris, Presses universitaires de France, 2019), p. 43-44.
-
[14]
Ces fouilles ont été grandement facilitées par les vastes collections et outils numériques de Canadiana et de BAnQ, qui non seulement rassemblent de grands corpus documentaires, mais permettent aussi de les interroger efficacement.
-
[15]
Antoine Prost [1996], Douze leçons sur l’histoire, édition augmentée (Paris, Points, 2014), p. 62.
-
[16]
Les statuts provinciaux du Bas-Canada, 2 Guillaume 4, 1832, chapitre 58, p. 642. Dorénavant : Champlain & St. Lawrence.
-
[17]
Currie, The Grand Trunk Railway of Canada, p. 36.
-
[18]
J’entends par « charte ferroviaire » une charte conférant à une compagnie le triple pouvoir de construire un chemin de fer, d’exploiter ce chemin de fer en l’offrant à l’usage du public et de l’exploiter, enfin, en recourant à des locomotives à vapeur. Le nombre (43) inclut deux compagnies minières (les compagnies des ardoisières de Kingsey et de Shipton) qui sont exceptionnellement investies de ce triple pouvoir en 1854.
-
[19]
Dorénavant : Montreal & Lachine.
-
[20]
Dorénavant : St. Lawrence & Atlantic.
-
[21]
Ce bref historique repose sur le croisement des documents parlementaires, des archives ferroviaires et de la presse des années 1840, 1850 et 1860, le recoupement de sources variées permettant une validation rigoureuse des informations.
-
[22]
Dorénavant : Stanstead, Shefford & Chambly.
-
[23]
Les statuts provinciaux du Canada, 14 et 15 Victoria, 1851, chapitre 73, article IV. Apparue nommément, dans l’espace public, en 1851 (l’idée existe cependant avant la lettre dans les années 1840), l’expression « grand tronc » désigne d’abord un projet et non une compagnie : il s’agit de relier les deux extrémités de la Province du Canada par un lien ferroviaire appelé à devenir un jour le maillon central d’une voie ferrée plus étendue qui relierait Halifax aux contrées de l’Ouest. Ce n’est qu’à partir de l’automne 1852 que l’expression s’applique à une compagnie particulière, chargée de réaliser ce projet transcanadien.
-
[24]
Appendice des Journaux de l’Assemblée législative de la Province du Canada, 1841-1859 (dorénavant : Appendice) ; Documents de la session, 1860-1866.
-
[25]
Report of Samuel Keefer, Esq., Inspector of Railways, for the Year 1858 (Hamilton, Gillespy & Robertson, 1859) ; Report of Samuel Keefer, Esq., Inspector of Railways, for the Years 1859 and 1860 (Toronto, Leader and Patriot Establishment, 1861).
-
[26]
Les données du Stanstead, Shefford & Chambly proviennent en partie des archives. Stanstead, Shefford and Chambly Railroad Company, Meeting Papers (vol. 1385), 1859-1861, Bibliothèque et Archives Canada (ci-après BAC), Ottawa, fonds de la Compagnie des chemins de fer nationaux, RG30.
-
[27]
Des sources différentes donnent parfois des chiffres légèrement contradictoires. La source la plus fiable a toujours été privilégiée, mais il faut évidemment considérer ces statistiques comme approximatives.
-
[28]
« Chemin à lisse du Lac Champlain au St. Laurent », L’Ami du peuple, de l’ordre et des lois, 3 mai 1837, p. 3.
-
[29]
Voir, par exemple, « Classified Business Directory », The Montreal Directory (Montréal, John Lovell, 1852), p. 327.
-
[30]
« Comptes et états des affaires de la compagnie du Grand Tronc… », Appendice, 1856, annexe 13.
-
[31]
Tariff of Passenger Rates via the Grand Trunk Railway of Canada (Buffalo NY, Clapp, Matthews & Co.’s Steam Printing House, 1857). La « troisième classe » renvoie vraisemblablement aux immigrants arrivant de l’Europe.
-
[32]
« Rapport de l’Hon. H.H. Killaly, ingénieur civil… », Appendice, 1851, annexe UU.
-
[33]
Company of Proprietors of the Champlain and Saint Lawrence Railroad, Journal B (vol. 134), 1846-1851, BAC, RG30.
-
[34]
Montreal and Lachine Railroad Company, Journal A (vol. 276), 1847-1851, BAC, RG30.
-
[35]
Proceedings of the Eighth General Meeting of … the St. Lawrence & Atlantic Rail-Road (Montréal, James Potts, 1853), p. 8.
-
[36]
« Comptes et états de la compagnie du Grand Tronc… », Appendice, 1855, annexe FF ; « Compagnie du grand tronc de chemin de fer du Canada », La Minerve, 12 mai 1855, p. 2. La comptabilisation des passagers américains voyageant entre Portland et Island Pond explique peut-être cette apparente « disproportion ». En 1859, la compagnie ne semble exploiter que des wagons de première classe sur sa division de Portland (Report of Mr. Thomas E. Blackwell … of the Grand Trunk Railway Company of Canada for the Year 1859 [Londres, Waterlow & Sons, 1860], annexe F).
-
[37]
Kesteman, « Les travailleurs à la construction du chemin de fer dans la région de Sherbrooke », p. 541.
-
[38]
Rapport de la commission nommée pour s’enquérir des affaires du chemin de fer du Grand tronc (Québec, Derbishire et Desbarats, 1861), appendice XXII.
-
[39]
Ibid., appendice XXVI.
-
[40]
États, rapports et comptes de la compagnie du Grand Tronc de chemin de fer du Canada (Toronto, John Lovell, 1857), p. 30.
-
[41]
Rapport de la commission nommée pour s’enquérir des affaires du chemin de fer du Grand tronc, p. 150-151.
-
[42]
Grand Trunk Railway Company of Canada, Minute Book No. 2 (vol. 1001), règlements du 31 mai 1861, BAC, RG30.
-
[43]
« Correspondance », Le Courrier du Canada, 5 septembre 1866, p. 2.
-
[44]
[Sans titre], Le Journal de Québec, 23 mai 1854, p. 2 ; « Birth in the Cars », The Morning Chronicle, 7 mars 1867, p. 2 ; « Collision sur la ligne du Grand tronc », Le Courrier du Canada, 24 septembre 1860, p. 2 ; « Riot in the Railway Cars between Montreal and Quebec », The Montreal Herald, 17 juin 1862, p. 2.
-
[45]
Montreal and Champlain Railroad Company, Minute Book No. 1 (vol. 282), 29 décembre 1858, BAC, RG30.
-
[46]
« Compagnies des chemins de fer du Great Western et du Grand Tronc », La Minerve, 11 mars 1862.
-
[47]
« Pleasure trip », The Montreal Herald, 3 juillet 1856, p. 2. « How happy could I be with either / Were the other dear charmer away. »
-
[48]
Company of Proprietors of the Champlain and Saint Lawrence Railroad, Currency Issues, Letterbook (vol. 3007), Lettre du secrétaire Lindsay à une compagnie vermontoise (6 mars 1846), BAC, RG30.
-
[49]
Henry David Thoreau [1866], Un Yankee au Québec, traduction d'Adrien Thério (Montréal, Stanké, 1996), p. 114.
-
[50]
À partir des années 1850, les trains sont équipés de « bureaux de poste ambulants », que les contemporains appellent des « chars-poste » (« Rapport du Maître-général des Postes… », Documents de la session, 1865, annexe 3).
-
[51]
Montreal and Lachine Railroad Company, Journal A (vol. 276), 1847-1851, BAC, RG30.
-
[52]
Thomas Coltrin Keefer, Philosophie des chemins de fer, 4e édition (Montréal, John Lovell, 1853), p. 29.
-
[53]
[Sans titre], Le Canadien, 19 août 1836, p. 2.
-
[54]
Voir France Gagnon, « Du cheval au rail : l’évolution des circuits touristiques québécois au XIXe siècle », dans Serge Courville, Jean-Claude Robert et Normand Séguin (dir.), Le pays laurentien au XIXe siècle (Québec, Montréal et Trois-Rivières, Université Laval, Université du Québec à Montréal et Université du Québec à Trois-Rivières, 1992), p. 124.
-
[55]
« Grand Trunk Railway », The Montreal Herald, 26 juin 1856, p. 3. « parties forming PLEASURE EXCURSIONS, or PIC-NICS » (en petites capitales dans l’original).
-
[56]
Voir notamment Vittoria Delli-Colli, « Les grandes gares ferroviaires du Québec (1888-1945) », mémoire de maîtrise (histoire), Université Laval, 2009.
-
[57]
Voir Stéphanie Sauget, À la recherche des pas perdus. Une histoire des gares parisiennes (Paris, Tallandier, 2009), p. 28-34.
-
[58]
Voir à ce sujet Jeffrey Richards et John Mackenzie, The Railway Station. A Social History (Oxford et New York, Oxford University Press, 1986), p. 38-58.
-
[59]
Thoreau, Un Yankee au Québec, p. 15.
-
[60]
« Correspondence », The Montreal Herald, 30 mars 1848, p. 2. « for the convenience and comfort of travellers » ; « accommodations at Laprairie and St. Johns ».
-
[61]
Montreal and Lachine Railroad Company, Account Book (vol. 281), 1846-1851, BAC, RG30.
-
[62]
« Opening of the St. Lawrence and Atlantic Railroad to St. Hyacinthe », The Quebec Mercury, 2 janvier 1849, p. 2. « large and handsome structure » ; « offices and waiting rooms fitted up on a scale of great convenience ».
-
[63]
« St. Lawrence & Atlantic R.R. Longueuil Station — 1855 », encre sur papier, 1855, Musée McCord, M982.530.129. Ce dessin doit cependant être considéré prudemment. Selon Omer Lavallée, il pourrait dater en fait des années 1880 (Omer Lavallée, « Dundee-Built Locomotives on Canada’s First Railways », Railroad History, no 149 (1983), p. 37-38).
-
[64]
« Nouvelles et faits divers », Le Courrier de Saint-Hyacinthe, 10 mars 1863, p. 3.
-
[65]
Rapport de Samuel Keefer daté du 18 décembre 1852, Appendice, 1853, annexe VVV.
-
[66]
« Grand Trunk Railroad », The Quebec Mercury, 21 novembre 1854, p. 2. « an immense arch of novel construction to our eyes ».
-
[67]
« Correspondance », Le Courrier du Canada, 17 avril 1863, p. 3.
-
[68]
« Correspondance », Le Courrier du Canada, 5 septembre 1866, p. 2.
-
[69]
« Le Grand-Tronc paralysé ! », Le Journal de Québec, 15 novembre 1866, p. 3.
-
[70]
Rapport du comité spécial nommé pour s’enquérir et faire rapport sur l’état … du chemin de fer Grand Tronc (Toronto, John Lovell, 1857), p. 70-71.
-
[71]
« Opening of the Grand Trunk Railway to St. Thomas », Morning Chronicle, 3 décembre 1855, p. 2.
-
[72]
The Canada (Monthly) General Railway and Steam Navigation Guide (Toronto, MacLear & Co., no 2, juillet 1856) ; Grand Trunk Railway Time-Tables and International Railway Guide (Montréal, Longmoore & Co., no 11, septembre 1865).
-
[73]
Rapport de l’ingénieur en chef William R. Casey (décembre 1835), reproduit dans Robert Brown, « The Champlain and St. Lawrence Railroad », The Railway and Locomotive Historical Society Bulletin, no 39 (1936), p. 18-20.
-
[74]
« Comptes et états des affaires de la compagnie du Grand Tronc… », Appendice, 1856, annexe 13.
-
[75]
« Birth on the Cars », The Montreal Herald, 14 septembre 1861, p. 2.
-
[76]
Commission de Santé, Mémoire sur le choléra (Bureau d’agriculture et des statistiques, 1866), p. 37.
-
[77]
« Chemin de Fer du Grand Tronc », Le Canadien, 11 décembre 1854, p. 3 ; « Longueuil », Le Pays, 14 septembre 1853, p. 3.
-
[78]
[Sans titre], Le Journal de Québec, 8 février 1865, p. 2.
-
[79]
« Comptes et états des affaires de la compagnie du Grand Tronc… », Appendice, 1856, annexe 13.
-
[80]
[Sans titre], The Montreal Witness, 8 septembre 1860, p. 5.
-
[81]
« Notes à la vapeur », Le Journal de Québec, 27 juin 1857, p. 1 ; « Correspondence », The Montreal Herald, 5 août 1865, p. 2 ; « Correspondence », The Montreal Witness, 14 septembre 1867, p. 1.
-
[82]
[Sans titre], The Montreal Herald, 29 novembre 1862, p. 2.
-
[83]
« Chemin de fer », L’Ami du peuple, de l’ordre et des lois, 14 mai 1836, p. 2.
-
[84]
Voir Wolfgang Schivelbusch [1977], Histoire des voyages en train, traduction de Jean-François Boutout (Paris, Le Promeneur, 1990), p. 77 et suivantes.
-
[85]
« Grand Trunk Railroad », The Quebec Mercury, 21 novembre 1854, p. 2.
-
[86]
« Minutes des témoignages », Appendice, 1851, annexe UU.
-
[87]
« Opening of the St. Lawrence and Atlantic Railroad to Richmond », The Montreal Herald, 16 octobre 1851, p. 2.
-
[88]
« Opening of the Lachine Railway », The Montreal Witness, 22 novembre 1847, p. 4.
-
[89]
Pierre Lambert, Les anciennes diligences du Québec. Le transport en voiture publique au XIXe siècle (Québec, Septentrion, 1998), p. 60-67. Les voyages de nuit existent cependant sur certaines lignes de diligence ou de malle-poste (p. 102-104).
-
[90]
« Chemin de fer du Grand tronc », La Minerve, 15 décembre 1859, p. 3.
-
[91]
« Nouveau confort pour les Voyageurs de Montréal à Toronto », La Minerve, 23 juin 1858, p. 2.
-
[92]
William Notman, « Maquette d’une voiture-lits du chemin de fer du Grand tronc », photographie, 1867, Musée McCord, I-24933.1.
-
[93]
« Inauguration du chemin de fer de Montréal à Brockville », Le Pays, 21 novembre 1855, p. 2-3.
-
[94]
« Napping in the Cars », The Quebec Mercury, 20 septembre 1853, p. 1.
-
[95]
« Bibliothèque des Chemins de Fer », Le Journal de Québec, 20 juillet 1854, p. 2. En France, la librairie Hachette implante précisément en 1854 sa Bibliothèque des chemins de fer et ses kiosques de livres dans les gares, suivant une pratique née en Angleterre dans les années 1840 (voir Sauget, À la recherche des pas perdus, p. 191-193).
-
[96]
Joseph-Charles Taché, Esquisse sur le Canada (Paris, Hector Bossange et fils, 1855), p. 11.
-
[97]
« Souvenir d’un Touriste », L’Ordre, Union catholique, 16 novembre 1864, p. 2.
-
[98]
Alain Corbin, « Histoire et anthropologie sensorielle », dans Le temps, le désir et l’horreur. Essais sur le XIXe siècle (Paris, Flammarion, 2014 [1991]), p. 238.
-
[99]
Mark M. Smith, « Producing Sense, Consuming Sense, Making Sense : Perils and Prospects for Sensory History », Journal of Social History, vol. 40, no 4 (2007), p. 849. « Through careful and considered engagement with printed evidence, we can readily grasp what particular sensory events or stimuli meant to particular individuals and groups in particular contexts. » Voir aussi à ce sujet Mark M. Smith, Sensing the Past. Seeing, Hearing, Smelling, Tasting and Touching in History (Berkeley et Los Angeles, University of California Press, 2007), p. 118-119.
-
[100]
« Inauguration du chemin de fer de Montréal à Brockville », Le Pays, 21 novembre 1855, p. 2-3.
-
[101]
Julie Bruneau Papineau, Une femme patriote. Correspondance (1823-1862), édition de Renée Blanchet (Québec, Septentrion, 1997), p. 480.
-
[102]
[Sans titre], Le Canadien, 5 novembre 1866, p. 2.
-
[103]
« Speed on the Hudson River Railroad », The Montreal Herald, 21 juin 1853, p. 2. « great nuisances in railroad travelling ».
-
[104]
« Ruttan’s Car Ventilation », The Montreal Witness, 13 juin 1857, p. 1.
-
[105]
« Pour les temps froids », L’Ordre, Union catholique, 12 novembre 1862, p. 3.
-
[106]
« Excursion à Portland », Le Pays, 7 septembre 1853, p. 3.
-
[107]
« Notes à la vapeur », Le Journal de Québec, 27 juin 1857, p. 1.
-
[108]
Francis Duncan, Our Garrisons in the West, or Sketches in British North America (Londres, Chapman and Hall, 1864), p. 164.
-
[109]
« Grand Trunk Railway », The Morning Chronicle, 23 avril 1861, p. 2.
-
[110]
« Excursions canadiennes », Le Journal de Québec, 19 juillet 1851, p. 2.
-
[111]
[Sans titre], Le Courrier de Saint-Hyacinthe, 20 avril 1855, p. 3.
-
[112]
« L’accident de Beloeil », Le Canadien, 10 octobre 1864, p. 1.
-
[113]
Canada Railway Advertising Company, Montreal Business Sketches (Montréal, Longmoore, 1864), p. 215.
-
[114]
« Aux voyageurs », L’Ordre, Union catholique, 2 mai 1866, p. 1.
-
[115]
Les statuts provinciaux du Canada, 14 et 15 Victoria, 1851, chapitre 51, article XXI, section 5.
-
[116]
Antoine Gérin-Lajoie [1864], Jean Rivard, le défricheur suivi de Jean Rivard, économiste (Montréal, Bibliothèque québécoise, 1993), p. 455.
-
[117]
« Promenade autour de Montréal », Le Pays, 10 août 1853, p. 3.
-
[118]
« The Agricultural Show of the County of Quebec », The Morning Chronicle, 16 octobre 1861, p. 2. « the steam-whistle has screamed into the ears especially of French Canadians ».
-
[119]
Alain Corbin [1994], Les cloches de la terre. Paysage sonore et culture sensible dans les campagnes au XIXe siècle (Paris, Flammarion, 2013), p. 127 et suivantes.
-
[120]
Christophe Studeny, L’invention de la vitesse (France, XVIIIe-XXe siècle) (Paris, Gallimard, 1995), p. 216-217.
-
[121]
Schivelbusch, Histoire des voyages en train, p. 58.
-
[122]
Report of Samuel Keefer, Esq., Inspector of Railways, for the Year 1858, p. 44.
-
[123]
Sur ces topoï discursifs, voir Schivelbusch, Histoire des voyages en train, p. 59, 40 et 43-44.
-
[124]
Rapport de la commission nommée pour s’enquérir des affaires du chemin de fer du Grand tronc, p. 135.
-
[125]
« Adventures in the Wilds of Canada — Grand Trunk Management », The Montreal Herald, 21 février 1865, p. 2.
-
[126]
« Correspondance », Le Courrier du Canada, 17 avril 1863, p. 3.
-
[127]
Je souligne. « It is difficult to overstate the nature of the transport revolution that railways represented. Virtually overnight, they made possible a range of economic and social activities that had been unthinkable before their arrival. » Derek Booth, « The Impacts of Railways on Stanstead : 1850 to 1950 », Histoire Québec, vol. 14, no 3 (2009), p. 14-15.
-
[128]
Corbin, « Histoire et anthropologie sensorielle », p. 238.